Agences de Notation

Douce France : Radioscopie du mal français

Radioscopie du mal français

Les solutions existent. Il suffit que l’Etat regarde la réalité en face .

François de Closets, qui a consacré une vingtaine d’essais – des best-sellers pour la plupart – à la société française, vient de publier L’échéance chez Fayard, avec la collaboration d’Irène Inchauspé. Livre «né de l’urgence», précise l’auteur, qui est un constat implacable de la situation économique française «en cette veille d’année électorale». Constat fondé sur des faits, rien que des faits. Dépourvu donc de tout a priori idéologique. Et agrémenté de nombreuses formules percutantes. Quelques exemples éloquents.

La France doit impérativement trouver 70 milliards d’euros pour ne pas connaître le sort de ses voisins surendettés. C’est dire l’importance de son propre endettement. Cet argent ne lui sera pas donné par la croissance, il ne peut venir que d’économies. Au cours des trente dernières années, la France a toujours emprunté et jamais remboursé. Elle a «transformé l’emprunt en une source budgétaire ordinaire». Elle a purement et simplement perdu la capacité de gérer les finances du pays. «Le déficit est devenu une maladie chronique». Il fait corps avec le mode de gouvernement du pays. Explication: le Français est une curieuse chimère, mi-cigale, mi-fourmi. «Cigale, il dévore l’argent public; fourmi, il épargne son propre argent. Et, pour protéger ses économies, il les prête à l’Etat. Les bons du Trésor étaient la cassette des pères de famille précautionneux».

La France souffre d’abus de providence. Son système social est le plus cher du monde. Le nombre de ses fonctionnaires augmente deux fois plus vite que celui de ses ressortissants (30% contre 18%). Aujourd’hui, la fonction publique (5,2 millions d’agents) est trop nombreuse pour la simple raison que les fonctionnaires ne sont payés que neuf mois par an. Le dernier trimestre passe en déficit. Malheureusement, pour certains secteurs vitaux (la santé, l’éducation ou la justice), un Etat ne peut calibrer la fonction publique ni sur les besoins, ni sur la demande, mais seulement sur les moyens de financement. Avec l’Etat providence, «le droit de» est devenu «le droit à». C’est la prestation elle-même qui devient un dû. Le citoyen attend un emploi, un logement, un revenu, des soins, une éducation, etc. «Les Français s’entretiennent dans l’illusion d’une créance sans fin sur l’Etat.» Ils aiment trop leur Etat providence et pas assez leur système économique.

L’impôt sur le revenu est le parent pauvre du système fiscal français. Il ne rapporte que 52 milliards d’euros, contre 224 pour la TVA. C’est donc le consommateur plus que le contribuable qui assure le financement de l’Etat. La France a aussi inventé l’impôt dégressif sur les plus hauts revenus. Qu’il s’agisse des particuliers ou des entreprises, les moyens paient pour les gros.

La France est en passe de devenir une «société désindustrielle». Cette désaffection frappe autant les services que l’industrie. Le capitalisme financier a pris le pas sur le capitalisme entrepreneurial. Or, pour la finance, l’entreprise n’est plus qu’une source de profits. L’investisseur, spéculateur et non pas industriel, ne connaît qu’un seul critère: le cours de Bourse.

Depuis 2004, l’économie française a perdu un tiers de ses parts de marché dans le commerce international et la glissade s’est accentuée depuis la crise. La France coule à la fois face à ses partenaires européens et mondiaux. Ses échanges avec l’Union européenne (deux tiers de son commerce total) lui coûtent chaque année 28 milliards de dollars. Dans son commerce avec la Chine, elle perd bon an mal an quelque 20 milliards d’euros. Le gouvernement français a-t-il oublié qu’il faut absolument vendre autant qu’on achète lorsque le commerce international représente le quart du PIB?

Des solutions à ces problèmes existent. Les auteurs ne les définissent pas en détail. Mais ils précisent qu’elles ne pourront être mises en œuvre que si la France est capable de regarder la réalité en face. La confiance, condition sine qua non du redressement, ne peut plus naître que de la vérité. Les gouvernants de demain auront-ils le courage de la dire à leurs administrés? L’échéance, en tout cas, se rapproche. Et le risque est grand que les marchés financiers en soient les arbitres et décident du sort de la société française.

Henri SCHWAMM Université de Genève oct11

EN LIEN : Moody’s va étudier une éventuelle revue à la baisse de la perspective de la note de la France

http://labforecast.blogspot.com/2011/10/moodys-va-etudier-une-eventuelle-revue.html

1 réponse »

  1. A vrai dire, ce n’est plus un « risque »! Ce sont les prêteurs qui vont décider de l’avenir de la France, cela ne fait plus aucun doute… avec toutes les conséquences sociales et politiques que l’on peut imaginer!

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