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Marché : Risque de correction sur les actions par Serge Laedermann

Marché : Risque de correction sur les actions par Serge Laedermann

L’environnement technique, politique et économique n’est pas favorable à une poursuite de la hausse. Il est temps de réduire l’exposition.

Le blues de printemps a commencé. Ce phénomène, observable quasiment chaque année, se caractérise au mieux par une consolidation du fameux rallye de Noël, au pire par une correction qui peut s’avérer assez saignante. Les principaux indices boursiers ont repris plus de 20% depuis le 24 novembre, et les fossoyeurs qui voyaient dans leur urine la fin de l’euro et un marché dépressif à souhait élaborent des trésors d’ingéniosité pour tourner leur veste, sans que cela ne se remarque trop. Classique. Alors que tout ce petit monde de spécialistes prononce un discours désormais nettement plus doucereux, l’envie de siffler la fin de la récréation commence à se faire jour.

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Cette «correction» est attendue et ne constituera pas une surprise. Le marché a besoin de souffler et l’environnement géo-économico-politique n’est pas bon. Rassurez-vous, boursicoteurs invétérés,  le pronostic d’un très bon millésime boursier est intact, mais tout ça ne se fera simplement pas en ligne droite.

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Tout d’abord le climat européen se détériore et la France en est le principal responsable. Malheureusement, les décisions majeures au niveau européen ne seront votées qu’après la mise en place du nouveau gouvernement, et surtout de la nouvelle assemblée. Cela induit un risque majeur. Selon longues oreilles (mon bookmaker préféré), le Sieur Hollande a 70% de chances d’être élu, Sarkozy 25%. A moins de deux mois des élections, cette cote indique que la messe est dite. Dans les faits et selon ma formule magique (qui s’est avérée juste ces 100 dernières années), cela implique un 54%-46% dans les urnes.

Le candidat socialiste est fort capable, à lui tout seul, de fragiliser l’édifice qui a eu tant de mal à se consolider ces derniers mois. Sans un axe franco-allemand dur et indéfectible, tout va être remis en question et donc sur le tapis. La dette va donc redevenir un thème central pour les marchés. L’émergence du communiste Mélenchon n’arrangera rien à l’affaire. A moins d’une surprise, c’est une gauche préhistorique qui va gérer ce pays et cela ne peut que précipiter ce pays dans l’abîme vers lequel il s’approche depuis deux décennies en termes de compétitivité. Il faudra attendre l’été pour que le nouveau locataire de l’Elysée soit mis au pas par l’Allemagne et surtout par la Banque centrale européenne.

Chez l’Oncle Sam, on arrive à la même cote en faveur d’Obama face au mormon, les autres faisant de la figuration. La bonne nouvelle pour nous est que la Réserve fédérale est en général très discrète et plutôt accommodante en année électorale. Ceci devrait être notre moteur du second semestre, une dynamique propre à tirer avec elle les marchés mondiaux.

Je ne peux pas évoquer ce qui nous attend sans aborder le problème pétrole. Avec un Brent à 125 dollars, les économies ne vont que peu souffrir et ce prix est déjà inclus dans tous les budgets. Par contre à 150 dollars, ce n’est plus la même histoire. Ainsi d’une croissance légèrement positive dès le troisième trimestre, l’Europe pourrait se retrouver en récession sur l’année. Ce scénario a peu de chances de se réaliser, mais le paramètre or noir est redevenu incontournable. Ce qui nous amène aux deux premiers trimestres de cette année, qui seront négatifs sur le Vieux Continent (comme expliqué ici en janvier), ce qui fera naturellement mauvaise effet et accentuera le blues du moment. 

Du côté des sociétés, il faut avouer que les résultats sont plutôt encourageants. Beaucoup d’entre elles annoncent des chiffres d’affaires en baisse, mais des bénéfices en hausse, ou stables. Ce sont les premières à s’adapter à la situation et naturellement c’est aux Etats-Unis qu’elles sont les plus réactives. Les acquis sociaux européens sont devenus lourds à porter pour ces entreprises qui doivent rechercher la compétitivité en délocalisant sous peine de fermer boutique. Histoire connue.

D’un point de vue technique, à l’aide de graphiques donc, le DJ Europe 600 bute depuis quelques temps sur le plafond situé entre 261 et 275 points. Pour les amateurs de rugby dont je fais partie, c’est un peu comme un pick & go où vous ne progressez pas après plusieurs temps de jeu. Pour ceux qui ne connaissent pas, j’en suis désolé, mais documentez-vous au lieu de regarder ces matchs de foot à la noix.

Résultat des courses, on va perdre le ballon et perdre 30 mètres. Le marché est en train de s’user à vouloir franchir cette barrière et le risque d’une reculade est naturellement venu.

Fondamentalement, beaucoup d’actions ne sont pas chères, loin de là. Notre salut viendra plus que jamais de la situation économique outre-Atlantique. Celle-ci va être à nouveau stimulée et en année électorale les déconvenues sont assez rares.

Un dernier mot sur notre franc suisse et le niveau plancher artificiel décidé sans s’attaquer vraiment aux racines du problème. La parité dollar/euro étant «imbougeable» pour la BNS, le risque futur vient clairement du billet vert. Avec l’explosion de la dette US, acheter 1 franc suisse avec 1,10 dollar, c’est presque un cadeau…

Serge Laedermann  Associé, GFA Geneva Financial Adviser mars2012

EN COMPLEMENT : Enquête Merrill Lynch mars12

Le fort regain d’optimisme des gérants/L’appétit pour le risque est en hausse.

Les gestionnaires de portefeuilles sont de plus en plus optimistes quant aux perspectives de croissance mondiale et un nombre décroissant s’attend à de nouvelles mesures d’assouplissements quantitatifs de la part des banques centrales, selon l’enquête de BofA Merrill Lynch du mois de mars.

Sur l’ensemble des personnes sondées, 28% s’attendent à un renforcement de l’économie mondiale dans les douze prochains mois. Comme en janvier, la majorité entrevoit un affaiblissement de l’économie.

La confiance dans l’eurozone a augmenté jusqu’à atteindre une répartition égale entre ceux qui s’attendent à une économie plus forte ou plus faible en zone euro.

Les investisseurs sont également plus optimistes concernant les bénéfices des sociétés. Ils sont 6% à s’attendre à une augmentation du revenu des sociétés. Il y a un mois, 11% d’entre eux prévoyaient une baisse des profits.

Près de la moitié du panel (47%) n’attend pas de la Fed qu’elle s’engage davantage dans le QE, contre 36% en février. Ils sont 39% à penser la même chose concernant la Banque centrale européenne (BCE), en hausse de 23% par rapport au mois précédent. Toutefois, les investisseurs interrogés prévoient une inflation plus élevée, 13% d’entre eux s’attendant à le voir augmenter cette année. Le mois dernier, ils étaient 16% à prévoir une baisse de l’inflation. «La perspective d’une inflation plus élevée reflète une victoire des banques centrales dans la guerre contre la déflation», commente Michael Hartnett, stratège en chef global equity pour Merrill Lynch. «L’appétit pour le risque est en hausse avec des hedge fund plus actifs, mais les liquidités sont encore trop en marges pour se mettre à travailler.»

Gary Baker, responsable de la stratégie action européenne de Merrill Lynch, estime quant à lui que «nous assistons à une remise en état des perspectives de croissance européenne, stimulées par une forte baisse des préoccupations souveraines en Europe».

Les perspectives de croissance en Europe, aux Etats-Unis et au Japon ont éclipsé les marchés émergents.

29% des investisseurs américains répondent que l’économie américaine va se renforcer durant cette année. Ils étaient 15% à le penser en février. Les gestionnaires de fonds japonais sont les plus optimistes: 91% estiment que l’économie du Japon va se renforcer, alors qu’ils n’étaient que 47% il y a deux mois. Alors que les marchés émergents restent globalement les régions les plus prisées, les perspectives de croissance concernant la Chine ont augmenté. Mais 9% des répondants estiment que l’économie chinoise va s’affaiblir durant la prochaine année. L’attrait pour la région Asie Pacifique s’est ralentit. Pour 41% des sondés, l’économie de la région devrait s’affaiblir, alors qu’ils étaient 35% à le penser le mois dernier.

En outre, les craintes d’inflation ont augmenté de manière significative parmi les gérants de fonds d’Asie-Pacifique: ils sont maintenant 41% à s’attendre à des hausses de prix durant l’année.

Les banques et les sociétés de services financiers ont connu un deuxième mois de popularité parmi les investisseurs, sous forme d’allocations d’actions qui ont augmenté.

Le secteur de la technologie reste dans le haut de l’échelle mondiale, en bénéficiant notamment d’un regain d’intérêt de la part des Européens. Ce secteur a d’ailleurs dépassé celui de l’automobile, appelé à devenir le plus demandés dans la région.

source Agefi mars 2012

1 réponse »

  1. Ce qui peut aller dans votre sens c’est qu’on assiste à un gros découplage cette semaine. Au moment ou j’écris le cac perd 90 points sur la semaine alors que le SP est flat. Quand l’europe part devant c’est jamais bon signe. 1) les initiés US vendent 2) ils vendent leur marché et les gogos vendent chez nous ce qui leur permet de racheter. Ce précepte simple fontionne à tout les coups ( et en sens inverse biensur) et me permet de vivre de la bourse depuis une petite quinzaine d’année…

    Réponse en fin de semaine : soit le cac rattrappe à la hausse soit c’est effectivement parti. je me méfie néanmoins car le trimestre semble favorable à des habillages de bilan de type nord.

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