Chinamerica

Credit crunch: La Chine coupe le robinet du cash à ses banques

Credit crunch: La Chine coupe le robinet du cash à ses banques 

EN LIEN: http://leblogalupus.com/2013/05/11/la-bulle-chinoise-semble-etre-prete-a-eclater/

Le chiffre peut sembler technique mais il n’en est pas moins symptomatique de la complexité de la situation financière de la Chine. Les taux auxquels se financent les banques chinoises sur le marché interbancaire atteignent actuellement un niveau sans précédent depuis 2006, date à laquelle Pékin a commencé à en tenir la comptabilité. Vendredi dernier, ce taux à sept jours atteignait 6,9%. Lundi, il refluait très légèrement, à 6,85%, mais continuait de traduire une situation de très nette raréfaction des liquidités sur le marché interbancaire. Jeudi matin, c’est l’explosion le taux interbancaire à sept jours se situait ainsi à 12,06%. Une situation qui exerce une pression extrêmement forte sur les banques locales, qui ont eu massivement recours à un endettement de court terme. Mais ces dernières ont beau demander à la Banque centrale un geste pour soulager le marché, la People’s Bank of China n’a pas l’air décidée à les entendre.

China: Shibor 21st June 2013

  • China’s 1-day Repo Rate Climbs to Highest Since at Least 2006
  • MNI – CHINA OVERNIGHT REPO FIXING AT RECORD HIGH

China’s bond market is also collapsing:

Yield on 3.1% govt bonds due January 2016 jumps 39 bps to 3.749%, biggest rise since notes were issued in January

China this week…

Cette situation a des conséquences directes sur les émissions obligataires. Fait rarissime, l’Etat chinois n’est pas parvenu, vendredi dernier, à placer l’intégralité de la dette qu’il espérait vendre sur le marché. Lundi, c’est Agricultural Bank of China, géant bancaire chinois, qui a, de son côté, réduit d’un tiers son émission obligataire, qui devait originellement permettre de lever 26 milliards de yuans. 

Pour certains analystes, cet assèchement du marché interbancaire devrait pousser la banque centrale à prendre des mesures très rapidement, et à réinjecter des liquidités dans le système, par exemple en relâchant le taux de réserves obligatoires que doivent lui confier les banques commerciales. C’est en tout cas le souhait formulé par les banques chinoises. Mais la lecture d’un journal, Le Financial News, contrôlé par cette banque centrale rend ce scénario peu probable: certaines banques y sont accusées d’avoir recours à des financements à trop court terme sur le marché interbancaire, voire d’avoir prêté de façon excessive. Jeudi, c’est le Conseil d’Etat, l’équivalent local du gouvernement, qui a appuyé cette posture de façon plus claire encore. Dans un communiqué publié à la suite d’une réunion présidée par le premier ministre Li Keqiang, le Conseil d’Etat juge que le système financier doit «aider à la transformation économique et à la montée en gamme d’une façon plus claire, servir le développement économique réel plus efficacement, promouvoir la demande intérieure de façon plus ciblée et empêcher les risques financiers de façon plus concrète».

Cette fermeté de la banque centrale apparaît donc révélatrice de la volonté nouvelle des autorités d’empêcher à tout prix un nouvel emballement du crédit, fût-ce au prix d’une croissance économique plus modeste, et de difficultés de financement à très court terme. Mardi, on a appris par exemple que les prix de l’immobilier s’étaient à nouveau fortement appréciés en mai dans le pays, prouvant que malgré la multiplication des mesures de lutte contre la spéculation, le marché fait encore le pari de la hausse.

70-city average primary housing price growth MoM and volume growth YoY

70-city average home price growth YoY

PLUS DE CHINA BUBBLE:

« Le système bancaire occulte chinois a échappé à tout contrôle et il est soumis à une pression croissante des investisseurs qui ont de plus en plus de mal à refinancer leurs dettes de court terme », a avertit quant à elle l’agence de notation Fitch, dont les conclusions ont été rapportées par Ambrose Evans-Pritchard du Daily Telegraph. Selon l’agence, L’ampleur des prêts consentis en Chine est si extrême que le pays ne réussira plus à se sortir de ses excès comme il l’avait fait par le passé. 

« Le modèle de croissance basé sur le crédit est clairement en train de voler en éclats. Cela pourrait alimenter une crise massive de sur-capacités, et potentiellement à une déflation de style japonais », a indiqué Charlene Chu de Fitch. Elle précise que le système bancaire souterrain chinois n’offre aucune transparence. « Nous ne savons pas qui emprunte l’argent, qui sont les prêteurs, et quelle est la qualité des actifs, et cela sape la crédibilité des signaux », a-t-elle dit au Daily Telegraph.

En Avril, Fitch a déjà décidé pour la première fois en 14 ans de dégrader la note de long terme de la devise chinoise de A+ à AA-. Toutefois, elle considère toujours que le gouvernement chinois aurait les moyens de faire face à une crise financière, quelle que soit son ampleurCelui-ci a mis fin à ses incitations dans le domaine du crédit immobilier, en restreignant l’offre de crédit, et en obligeant les banques à respecter des ratios de détention de réserves plus importants pour stopper la spéculation immobilière. Mais le système bancaire souterrain a pris le relai. 

Depuis l’effondrement de la banque Lehman Brothers, le crédit est passé de 9000 à 23.000 milliards de dollars. « Le pays a dupliqué la totalité du système bancaire commercial américain en cinq ans», commente Chu. En 2009, la Chine a décidé d’injecter l’équivalent de 12% du PIB pour tenter de tenir la crise mondiale à distance. Cela a alimenté une bulle spéculative immobilière assortie d’une énorme dette envers les autorités locales. Le ratio du crédit par rapport au PIB est passé de 75% à 200% au cours des cinq dernières années. Par comparaison, ce ratio n’avait progressé que de 40% au cours des cinq années qui avaient précédé la crise des subprimes aux États-Unis. «C’est bien pire que tout ce que nous avons pu connaitre auparavant dans une économie majeure. Nous ne savons pas ce qui va se passer. Les six prochains mois seront cruciaux », estime Chu.

Les défaillances de prêts du pays ne représentent guère qu’un pourcent mais cela n’est pas significatif, dans la mesure où ce ne sont pas les banques, mais de nombreux autres types d’organismes financiers tels que des fonds de placement, des trusts, et des établissements financiers opaques qui ont accordé plus de la moitié des prêts récents. « Une grande partie de l’exposition des banques à l’immobilier n’est pas enregistrée comme de l’immobilier », explique Chu. 

En effet depuis plusieurs mois, l’autre menace pesant  sur la Chine c’est les «trust loans», des sortes de fonds d’investissement à haut rendement, assurant des gains de 6 à 9% par an, quand le citoyen lambda n’obtiendra pas plus de 3% de son compte épargne. Le truc? L’argent confié est prêté – au taux fort – à une myriade d’entreprises ou de promoteurs ayant vu les portes de leur banque se refermer depuis que Pékin a frappé du poing. Le rôle de ces usuriers a pris des proportions telles qu’ils sont qualifiés de «banques souterraines».

Les inquiétudes montent depuis que l’on a commencé à enregistrer quelques incidents de paiements liés à des trusts. La banque Everbright a fait défaut il y a une dizaine de jours sur un prêt interbancaire dans un contexte de forte hausse du taux d’intérêt Shibor, indiquant que les liquidités commencent à se tarir.

En octobre, la faillite d’un de ces «trust loans», dans la ville de Wenzhou, avait déjà  fait craindre une réplique des excès ayant conduit les Etats-Unis au bord du gouffre en 2008: «l’empaquetage» de centaines de milliers de prêts immobiliers irrécouvrables dans des produits de placement auxquels personne ne comprenait rien. La plus grande partie de ces produits est structurée à la demande des banques, par 67 sociétés ayant pignon sur rue», explique Fabrice Jacob, directeur général de la maison JK Capital Management à Hongkong, affiliée à la française A.M. L’équipe de cette dernière estime que, sur les 10 000 milliards de renminbis (1500 milliards de francs) de produits de gestion de fortune diffusés en République populaire – l’équivalent d’une année de PIB –, la moitié sont de tels «trust funds»; en «grande partie diffusés par les banques, qui en sont donc responsables». Selon le financier,déjà un cinquième de ces produits de banque privée – 300 milliards de francs suisses – présente un risque potentiel! Maigre consolation ces sociétés se comportent comme des prêteurs sur gages, et demandent souvent des garanties en collatéral atteignant trois fois le montant du crédit accordé.

Cet engouement pour les produits d’épargne miracle a pourtant des conséquences étonnantes, perceptibles dans les indicateurs économiques. Ainsi des variations surprises des exportations du pays, selon les statistiques officielles: alors qu’en avril, celles-ci étaient supérieures de 15% à celles affichées un an plus tôt, leur croissance était quasi-nulle en mai. Une secousse que n’a pas reflété le trafic des containers qui, lui, ne ment pas, note Fabrice Jacob, le patron de la firme hongkongaise. Et ce dernier d’esquisser une piste. «Nombre d’industriels du sud de la province de Canton se sont mis à stocker les marchandises en partance dans des entrepôts sous douane, afin de pouvoir emprunter dans l’ex-colonie en gageant ces produits», explique Fabrice Jacob. Les dollars de Hongkong ainsi reçus avaient surtout un but: pouvoir jouer au grand casino des «trust loans».

En Avril, Fitch a déjà décidé pour la première fois en 14 ans de dégrader la note de long terme de la devise chinoise de A+ à AA-. Toutefois, elle considère toujours que le gouvernement chinois aurait les moyens de faire face à une crise financière, quelle que soit son ampleur.

Celui-ci a mis fin à ses incitations dans le domaine du crédit immobilier, en restreignant l’offre de crédit, et en obligeant les banques à respecter des ratios de détention de réserves plus importants pour stopper la spéculation immobilière. Mais le système bancaire souterrain a pris le relai. 

Un autre problème provient de la baisse de l’efficacité de ces prêts pour générer de la croissance supplémentaire pour la Chine. En 4 ans, le PIB supplémentaire généré par chaque yuan de prêt supplémentaire est passé de 0,85% à 0,15%, signalant l’épuisement du système.

Selon Wei Yao de la Société Générale, le ratio d’endettement des entreprises chinoises a atteint le seuil critique de 30% du PIB, qui correspond au seuil typique des crises financières. De nombreuses entreprises ne parviendront pas à rembourser le principal, ni à servir les intérêts de ces prêts. Selon elle, le pays se raproche d’un « Minsky Moment », c’est-à-dire du moment où la pyramide de la dette s’effondre sous son propre poids. « La boule de neige de la dette devient de plus en plus grosse, sans contribuer à l’activité économique réelle », avertit-elle.

 Source: Les Echos, le Temps+Divers Juin13

1 réponse »

Laisser un commentaire