Another BRIC in the Wall

Another Bric in the Wall: Le Brésil réduit à des politiques économiques jugées erratiques

Another Bric in the Wall: Le Brésil réduit à des politiques économiques jugées erratiques

EN LIEN: Another brick in the Wall: Cascade de signaux négatifs au Brésil- retour vers le passé!

La révolte historique dans le pays découlerait de la fable du miracle économique. Rentière par la terre et par les banques, la nation continent vit un déclassement de sa main-d’œuvre

Le Brésil montrerait-il son vrai visage? Celui de la panne après le miracle économique. «On ne peut pas parler d’échec, vu qu’il n’y a pas eu de prodige», nuance Pierre Salama, professeur émérite au Centre d’économie de Paris-Nord. Les manifestations débutées timidement il y a trois semaines ont culminé le 20 juin avec plus d’un million de personnes dans les rues. Il y a quelques jours, les camionneurs ont bloqué les routes dans tout le pays et les médecins ont fait grève. On attend fin juillet, à l’occasion des Journées mondiales de la jeunesse, 2 millions de manifestants. Les revendications des protestataires: en finir avec la corruption et les investissements lacunaires dans les transports, la santé et l’éducation face à ceux consentis pour les compétitions sportives mondiales de 2014 et de 2016.

Brazil industrial production and GDP growth

Comment en est-on arrivé là? Depuis un peu plus d’un an, les indicateurs de la 7e économie mondiale s’affolent. A commencer par l’effondrement de la croissance du pays (0,9% en 2012, soit plus de huit fois inférieure aux 7,5% en 2010), en raison de l’inflation passée à 6,45% sur un an, soit en dehors des marges de tolérance fixées par le gouvernement. «Sur ces dix dernières années, l’évolution du PIB n’a été en moyenne que de +3,5%. Ce qui est faible compte tenu de la poussée démographique du pays», signale Pierre Salama, également chercheur au CNRS et auteur de plusieurs ouvrages consacrés aux puissances émergentes, dont les économies latino-américaines.

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Résultat: les prix des produits alimentaires ont explosé (96% pour les tomates, 70% pour les oignons, plus de 20% pour le riz, soit plus de 13% en moyenne sur toutes les denrées entre 2011 et 2012). Phénomène auquel s’ajoute la chute du solde commercial (2,4% du PIB en 2012 et 5,3 milliards de dollars de déficit cumulé de janvier à mai 2013).

«La flambée des prix des matières premières a permis à ce géant de l’exportation des produits miniers et agricoles [ndlr: +8,6% entre 2007 et 2012] de dissimuler – temporairement – la perte de compétitivité de son industrie», poursuit Pierre Salama. Depuis cinq ans, le Brésil enregistre une forte augmentation de son déficit commercial dans le secteur manufacturier (+16,2% par an, soit 73,1% de ses importations totales en 2012). «Le Brésil souffre de deux maux principaux: sa spécialisation dans des produits de rente comme les matières premières et la financiarisation de son économie, explique-t-il. Le pays est ainsi doublement rentier, par sa terre et par ses banques.» Résultat: une surenchère dans la politique de taux d’intérêt [ndlr: actuellement à 8%] pour attirer des capitaux et freiner l’empiétement chinois sur son secteur manufacturier.

BRIC interest rates - India China Russia Brazil

Les entrées massives de capitaux étrangers ont largement compensé le découvert commercial. «Les réserves ont augmenté et la monnaie s’est appréciée, explique Pierre Salama. Ce qui a renchéri les exportations et mené à une désindustrialisation précoce – avant que le revenu moyen ne soit suffisamment élevé –, en faveur de l’Asie.» Cela étant, les politiques de redistribution depuis la présidence Lula (2003-2010) ont permis à près de 40 millions de personnes de rejoindre la classe moyenne. «Lula, puis Dilma Rousseff ont sans conteste réussi à augmenter les salaires de 4% depuis 2009», reconnaît Pierre Salama.

La productivité du travail, elle, n’a pas suivi. Le Brésil investit 1% de son PIB dans la recherche, contre 3,5% en Corée du Sud ou 2,4% en France. Et injecte 18% de ce même montant dans son industrie, soit trois fois moins que la Chine. «Il faudrait investir au minimum 25% du PIB pour espérer une croissance régulière de 5%», estime Pierre Salama. Seul hic: le gouvernement a divisé par deux ses dépenses en 2012. «Les revenus ont augmenté, pas la qualité des services publics. Et avec le ralentissement de la croissance, la main-d’œuvre brésilienne a commencé à souffrir de ce que l’on appelle le déclassement, l’industrie étant incapable de fournir suffisamment d’emplois qualifiés», continue-t-il.

Toujours selon lui, le gouvernement, piégé par la conjoncture, en est réduit à manœuvrer de manière erratique. «C’est la politique du «stop-and-go» des années 1970, alternant phases de relance et politique de rigueur pour contenir l’inflation.» Trop longtemps, le gouvernement n’a rien fait contre la force du real. «Mais il a mangé son pain blanc», remarque Pierre Salama. Le Brésil a fini par dévaluer sa devise [ndlr: dépréciation de 24% par rapport au dollar depuis un an]. Verdict de l’OMC qui, en juin, procédait à la révision quadriennale des politiques commerciales de Brasilia: infrastructures inadaptées, accès insuffisant au crédit, impôts trop élevés, rigidités du marché du travail et mesures protectionnistes n’ayant pas su compenser la perte de compétitivité de son industrie.

Par Dejan Nikolic/ Le Temps 5/7/13

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/5690bd40-e4de-11e2-bdf9-c9c6ed16cd06/Le_Br�sil_r�duit_�_des_politiques_�conomiques_jug�es_erratiques

1 réponse »

  1. Tiens, ça me rappelle cet « envoi » du Général de Gaulle alors Président de la République,
    parlant du Brésil il avait dit :

    Le Brésil ? le pays d’avenir d’hier, d’aujourd’hui et de demain …..
    ce qui résumait bien la situation et l’article de ce jour me semble t-il ?

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