Art de la guerre monétaire et économique

Gestion d’actifs: Les hedge funds servent-ils encore à quelque chose? Par Laurent Chevallier

Gestion d’actifs: Les hedge funds servent-ils encore à quelque chose? Par Laurent Chevallier

Les hedge funds servent-ils encore à quelque chose? Alors que la gestion alternative est à la traîne des marchés actions cette année, les investisseurs se détournent. C’est pourtant cette méthode de gestion qui sera capable de retomber sur ses pattes grâce à sa capacité de protéger les capitaux si la volatilité reste élevée

Avec les interventions continues des banquiers centraux dans les marchés financiers, l’afflux de liquidité tous azimuts aura permis d’éviter (ou de repousser?) une dépression, mais a aussi créé un vacuum qui a aspiré toutes les valeurs mobilières (actions, obligations, crédits) et immobilières à la hausse.

Dans ce contexte de gestion qu’on peut qualifier de quasi étatique des marchés, la différentiation entre les bons investissements et les mauvais ne se fait plus. De même, l’allocation aux actifs n’est plus efficiente, les rendements (yields) sont écrasés et on observe une course au portage (carry) pour trouver
du rendement qui fait voler par la fenêtre toute analyse fondamentale.

Dans ce contexte de marchés quasi anesthésié au risque (la volatilité du S&P 500 est de 12% sur les 250 derniers jours, elle est tombée à moins de 4% cet été, par rapport à un historique de 20% au cours des dix dernières années), les hedge funds ont énormément de difficulté à surperformer les indices traditionnels. Comparé à une hausse de 15% depuis le début de l’année pour l’indice des actions MSCI World, les hedge funds sont en moyenne en progression de 5% (indices HFR global) et les fonds à biais action sont en hausse seulement de 7%. En plus de cette sous-performance chronique, on entend la litanie des critiques habituelles: manque de transparence, liquidité et commissions de gestion trop élevées. Les investisseurs se détournent.

D’où la question: le hedge fund sert-il encore à quelque chose?

La réponse dépend d’abord de l’appétit au risque de l’investisseur. Si celui-ci peut se permettre de longues périodes de sous-performances dans les marchés traditionnels (1929-1941, la plus longue, 2007-2013, la plus récente), il pourrait théoriquement se passer d’investir dans les hedge funds.

En réalité, c’est plus difficile. Si l’on se réfère au mois de juin de cette année, lorsque la Réserve fédérale américaine (Fed) a laissé entendre qu’elle pourrait stopper ses injections massives, tous les marchés ont plongé: actions, obligations, haut rendement, marchés émergents. Aucun endroit pour se cacher. Imaginons que, suite au changement de cap de la Fed qui mettra fin aux politiques d’assouplissement quantitatif (quantitative easing), la volatilité du mois de juin devienne prépondérante… A part le cash, seuls les hedge funds, après une rapide adaptation, seront capables de retomber sur leurs pattes grâce à leur capacité à profiter de la baisse des marchés et ainsi protéger les capitaux.

Finalement, la réponse dépend aussi de la vision du monde de l’investisseur. Les investisseurs, dont un certain nombre s’émerveillent (encore) de la gestion planifiée de l’économie chinoise par des oligarques communistes, peuvent vouloir continuer vivre dans le confort de la Matrice et «prendre la pilule bleue» 1. Le tout en espérant que les banquiers centraux vont toujours réussir à maintenir leur contrôle quasi stalinien sur les marchés financiers car ils peuvent «imprimer» des billets de banque au mépris des conséquences futures (notamment socio-économiques avec une hyperinflation ou une hyperdéflation). Ou les investisseurs peuvent «prendre la pilule rouge» et acheter des hedge funds car un jour la cocotte-minute explosera.

Source Eurofin Capital/ Le Temps 23/9/2013

1. Référence au film.

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/e168b4b6-23a6-11e3-8a42-a4515a9d0c4c%7C1

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