Art de la guerre monétaire et économique

Bienvenue dans la troisième guerre mondiale(James Howard Kunstler)/ Interventionnisme assassin: Ukraine, un an plus tard(Ron Paul)/ Les intérêts de l’Iran et des USA s’entrecroisent en « Syrak »/ Le monde anglo-saxon en guerre contre l’Europe ? (Alexandre Latsa)

Bienvenue dans la troisième guerre mondiale Par James Howard Kunstler

Kunstler.com/24hgold Publié le 19 février 2015

Au cas où vous n’auriez pas saisi le message à retenir de la récente vidéo de l’EIIL qui montre l’exécution sommaire de vingt-et-un Egyptiens coptes chrétiens, le voici : « Nous sommes des bourreaux, pas des guerriers ». Le sang déversé sur la plage libyenne marque le tapis rouge de bienvenue à l’exécution de masse de l’Occident euro-américain. La dignité de funérailles n’est même pas au programme.

Ce que nous avons aujourd’hui est un djihad apocalyptique qui se propage dans toute la région, depuis la Palestine jusqu’au Maroc, et une Europe qui se contente d’ignorer que ce qui se passe de l’autre côté de la Méditerranée est un face à face historique qui transformera le monde. Il apparaît au moment le plus opportun, alors qu’entrent en déclin la richesse pétrolière du Proche-Orient et de l’Afrique du Nord. C’est cette richesse pétrolière qui a généré une forte croissance démographique dans une région désolée de la planète au cours du siècle dernier. Aujourd’hui, nous avons là-bas une sur-disponibilité d’hommes qui n’ont rien d’autre à faire que de vivre le psychodrame exaspéré qu’est l’absence de futur. Et lorsque les perspectives d’un avenir décent disparaissent complètement, est-il étonnant que certains puissent se préoccuper l’esprit de visions de festins et de vierges les attendant dans l’au-delà ?

Ce à quoi nous assistons est, en partie, une bataille interne pour le contrôle de ce qu’il reste du trésor. Cette bataille a déjà eu l’étrange conséquence de la paralysie de la capacité de production pétrolière de l’Irak et de la Libye, qui possèdent encore d’importants gisements de pétrole, mais n’ont plus la stabilité politique nécessaire à l’organisation de programmes d’exploitation et de transport. Mieux encore, les infrastructures de ces pays ont été grandement endommagées, en raison principalement de sabotages délibérés, mais aussi de bombardements, de négligence et d’ajournement d’opérations de maintenance. Les raffineries du pétrole et terminaux de transports sont des machines délicates qui requièrent des soins constants.

Il est évident aujourd’hui que l’EIIL cherche à contrôler autant de richesse pétrolière que possible – bien que je doute que le groupe dispose des compétences nécessaires à son exploitation, même s’il semble contrôler le terrain. L’Occident euro-américain peut encore décider d’ajouter à la destruction à l’aide de bombes et de missiles, mais il détruirait également ses réserves futures de pétrole, et donc ses propres économies industrielles modernes.

Le gros lot est bien entendu la forteresse d’Arabie saoudite. Le royaume est encerclé de maniaques islamistes, le Yémen au sud, l’Iran chiite de l’autre côté du Golfe persique, l’Irak et la Syrie au nord, et les compostes humains que sont l’Egypte et la Libye de l’autre côté de la Mer Rouge. Et n’oublions pas Israël, avec tous ses ennemis et tous ses problèmes. L’Arabie a un nouveau roi, âgé de 79 ans, et supposé souffrir de retard mental. Les revenus pétroliers du pays sont à la baisse, et sa population continue de gonfler. Trop de jeunes hommes n’ont rien de mieux à faire que mariner dans les fantaisies wahhabites. Si l’Arabie Saoudite se désintégrait, la partie serait terminée pour la vie moderne que connaît l’Occident (et une grande partie de l’Asie).

Entretemps, les Etats-Unis sont parvenus à s’embarquer dans un conflit imbécile et complètement inutile en Ukraine, un pays qui pour les Etats-Unis n’a aucune importance stratégique. C’est en agissant ainsi qu’ils sont parvenus à aliéner la seule nation qui aurait pu avoir la volonté de s’opposer au djihad, la Russie, dont la frontière sud la sépare de l’immensité islamique d’Asie centrale.

L’Europe se préoccupe quant à elle de questions monétaires. La Grèce est en crise. La fameuse Troika – BCE, bureaucrates de l’Union européenne et FMI – demande à la Grèce de continuer de prétendre rembourser sa dette. C’est jusqu’à présent ce qu’on a voulu dire par « austérité ». Mais l’Europe est un champ de mines de la dette au travers duquel il ne fait pas bon s’aventurer. D’autres pays d’Europe n’attendent plus que d’exploser, il n’est pas certain que l’Europe se soit même intéressée au tapis rouge de sang déroulé en Libye le weekend dernier. La vraie signification d’austérité deviendra claire une fois que l’Europe se retrouvera forcée de faire face à une troisième guerre mondiale juste au moment où son système bancaire implosera.

http://www.24hgold.com/francais/actualite-or-argent-bienvenue-dans-la-troisieme-guerre-mondiale.aspx?contributor=James+Howard+Kunstler.&article=6409980122H11690&redirect=False

Complètement rincés Par James Howard Kunstler

Kunstler.com/ 24hgold Publié le 25 février 2015

Les Romains, dans leur voyage vers la décadence, manquaient du voltage et du câblage nécessaires à l’amplification de l’anomie qui les accablait. Nous baignons dans des images qui nous rappellent à quel point nous sommes répugnants. Consommateurs, brisez les chaines de l’endettement. Imaginez gouverner une telle société. Mais sachez que personne n’essaie vraiment – bien qu’il soit difficile de dire si c’est par manque de conviction, de courage ou d’intelligence, ou par simple mépris.

Je trouve réconfortant de voir l’Europe tenter de s’extirper des intrigues de notre Konfédération Klownesque, du moins pour ce qui concerne l’Ukraine, ce territoire de mangeurs de patates éternellement piétiné, ruiné aujourd’hui par le désir imbécile des Etats-Unis de l’écarter de la sphère d’influence millénaire de la Russie. Merkel et Hollande se sont entretenus avec Poutine la semaine dernière à Moscou. Ils ont bien évidemment omis d’en informer notre chère coupe de cheveux à la recherche d’une cervelle, le Secrétaire d’Etat John Kerry. Qui aurait voulu de cette mule autour de la table des négociations ? Les Européens commencent à dire des choses sensées, comme « la Russie et l’Europe appartiennent à la même civilisation » – notez le sous-entendu : les Etats-Unis ne font après tout peut-être pas partie du club. Peut-être faut-il les laisser s’adonner à une séance de twerk endiablée sur une de leurs autoroutes perdues jusqu’à ce qu’ils soient complètement rincés.

L’Europe, bien évidemment, a ses propres problèmes, qui sont difficiles à comprendre, puisqu’ils sont dérivés d’un système financier devenu si abscons et impénétrable que l’art de la magie noire ressemble en comparaison à un jeu de Pêche. A ce stade, elle ne peut plus que prétendre comprendre où la mèneront toutes ces obligations entremêlées, et ce qui se passerait si quelqu’un décidait de tirer sur une ficelle. La question est donc pour le moment de savoir si elle pourra continuer de prétendre. Le sentiment étourdissant d’avoir à regarder ce qui nous attend en bas se disperse parmi les êtres les plus sensibles.

Une chose est claire : l’Europe n’a ni l’envie ni le besoin de se retrouver projetée dans une guerre contre la Russie sur l’insistance des Etats-Unis. Ce dont l’Amérique a besoin est d’une guerre contre elle-même, une guerre contre le narcissisme fainéant qui l’a rendue susceptible aux armées de racketteurs et d’escrocs, parce que les gens ordinaires étaient trop occupés à pratiquer le twerk pour prêter attention au démembrement de leur culture. Ne serait-il pas choquant de commencer à percevoir des actes de fortitude et de valeur parmi nos rangs ?

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Interventionnisme assassin: Ukraine, un an plus tard Par Ron Paul

Daily Paul/24hgold Publié le 26 février 2015

BAN THE NEOCONInfographic: Most Americans Support Sending Ground Troops To Fight ISIS | Statista

Le weekend dernier marquait le premier anniversaire du violent coup qui a renversé le gouvernement élu ukrainien. Ce coup a non seulement reçu le soutien des gouvernements des Etats-Unis et de l’Union européenne, il a aussi été en grande partie organisé par ces derniers. En observant aujourd’hui les évènements qui ont précédé ce renversement, il devient évident que sans intervention étrangère, l’Ukraine ne serait pas dans une situation si désespérée.

A la fin de l’année 2013, l’Ukraine était sans le sou. Le gouvernement cherchait désespérément à obtenir un plan de sauvetage économique, et le président Ianoukovytch s’est d’abord tourné vers les Etats-Unis et l’Union européenne avant d’accepter l’aide de la Russie. Les résidents du sud et de l’est du pays, qui parlent en grande majorité le Russe et commercent exclusivement avec la Russie, ont été satisfaits de cette décision. Les Ukrainiens de l’ouest, qui s’identifient plus avec la Pologne et l’Europe, ont commencé à protester. L’Ukraine a toujours souffert de profondes divisions, et son président élu était originaire de l’est du pays.

Ce conflit n’était alors qu’un autre chapitre de la difficile histoire post-soviétique du pays. La décision ne pouvait que générer des mécontentements, mais sans aucune intervention étrangère pour soutenir les mouvements de protestations, vous ne seriez certainement pas aujourd’hui en train de lire cet article. Le problème aurait pu se résoudre de lui-même plutôt que de se transformer en guerre civile. Mais les interventionnistes américains et européens sont entrés en jeu, et leur interventionnisme s’est trouvé être un désastre.

Les manifestations de la fin 2013 ont redoublé de violence après que les politiciens américains et européens ont ouvertement participé, et que les protestataires ont commencé à demander le renversement du gouvernement ukrainien. Le sénateur John McCain s’est rendu à plusieurs reprises à Kiev et s’est adressé à la foule pour l’encourager.

Imaginez qu’un élu étranger comme Poutine ou Assad se rende à Washington pour encourager les protestataires à renverser l’administration Obama !

Comme nous avons pu l’apprendre de la fuite d’un appel téléphonique, l’ambassadeur des Etats-Unis à Kiev et la sous-secrétaire d’Etat, Victoria Nuland, ont établi des plans détaillés pour l’établissement d’un nouveau gouvernement à Kiev après le reversement, grâce à leur assistance, du gouvernement élu.

Les manifestations se sont intensifiées jusqu’au 20 février de l’an dernier, date à laquelle une délégation européenne a établi un compromis qui demandait des élections anticipées et d’autres concessions de la part de Ianoukovytch. Le pire aurait pu être évité, mais la nuit même, de violents groupes proches des Etats-Unis ont procédé à un coup d’Etat, et le président élu a fui le pays.

Quand l’est du pays a refusé de reconnaître le nouveau gouvernement comme légitime et organisé un référendum pour faire sécession avec le reste du pays, Kiev a envoyé ses chars pour le forcer à se soumettre. Plutôt que d’accepter la volonté de ceux qui cherchaient à devenir indépendants face à ce qu’ils percevaient comme un gouvernement élu par des étrangers, l’administration Obama a décidé de blâmer les Russes et commencé à imposer des sanctions à leur pays. 

La guerre lancée par Kiev dure toujours, mais le cessez-le-feu déclaré ce mois-ci par les Allemands et les Français offre un espoir de voir le conflit enfin terminé. Plus de 5.000 personnes ont trouvé la mort, dont de nombreux civils tués dans leur propre ville par Kiev.

Que se serait-il passé si John McCain était resté chez lui et s’était inquiété de ses constituants d’Arizona plutôt que des gens vivant à 10.000 kilomètres de chez lui ? Et si les politiciens américains et européens en avaient fait de même ? Et si Victoria Nuland et l’ambassadeur américain en Ukraine, Geoffrey Pyatt, s’étaient concentrés sur la diplomatie plutôt que sur un changement de régime ?

Un grand nombre des personnes tuées depuis le début du conflit seraient encore en vie aujourd’hui. Interventionnisme assassin.

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Les intérêts de l’Iran et des USA s’entrecroisent en « Syrak »

Pepe Escobar
Pepe Escobar

Par Pepe Escobar – Le 11 mars 2015 –Russia Today

Un débat qui ne manquera pas de suspense nous attend ce mercredi (11 mars) devant le Comité des affaires étrangères du Sénat des États-Unis, quand témoigneront dans la même pièce le secrétaire d’État, John Kerry, le nouveau chef du Pentagone, Ashton Carter, et le chef d’État-Major des armées des Etats-Unis, Martin Dempsey.

Alep, Syrie (Reuters / Jalal Al-Mamo)

Le vif du sujet: le Château de cartes, pardon, le Congrès des USA, qui rumine son doute à propos des véritables enjeux derrière la proposition de l’administration Obama de recourir à la force armée en Syrie, tout en se demandant s’il faut ou non imposer une zone d’exclusion aérienne pour protéger les rebelles syriens.

Obama dispose déjà d’un émissaire spécial du président au sein de l’orwellienne coalition globale contre l’État islamique, en la personne de John Allen, général du corps des Marines à la retraite. Ce dernier promet que les USA vont protéger les rebelles formés et armés par Washington, en plus d’appuyer sans réserve l’imposition d’une zone d’exclusion aérienne au‑dessus du nord de la Syrie.

L’émissaire ne fait que répéter comme un perroquet la voix de son maître, soit l’administration à la stratégie autoproclamée d’éviter les conneries, qui est convaincue que sa demande d’autorisation du recours à la force armée en Syrie résistera à l’examen du Château de cartes, pardon, du Congrès des USA.

La zone d’exclusion aérienne, c’est précisément ce que défend depuis toujours le gouvernement du sultan de Constantinople, pardon, du président de la Turquie Tayyip Erdogan. Le plan directeur du sultanErdogan consiste à solidifier une base à partir de laquelle l’opposition syrienne armée pourra combattre non seulement l’EIIS/EIIL/Da’ech, mais aussi les forces armées syriennes de Bachar al-Assad.

Le ministre des Affaires étrangères turc Mevlut Cavusoglu a publiquement insisté sur le fait que c’est exactement ce à quoi l’on s’attend des rebellessyriens. Ankara, il semble que nous avons un problème !

Car voyez-vous, le Pentagone affirme maintenant, par l’entremise de son porte-parole, le contre-amiral John Kirby, que la composante syrienne de cette campagne vise l’État islamique. C’est ça l’objectif principal, pas le régime d’Assad. Rien n’a changé à propos de la politique écartant toute solution militaire contre Assad par les USA.

De deux choses l’une: ou bien on a affaire à une mascarade de désinformation, ou bien Erdogan vit au royaume des Bisounours. En fait, il pourrait s’agir d’une autre illustration de la tactique du bon et du méchant.

Parlant de méchants, nos salopards des monarchies du golfe Persique sont vraiment imbattables.

Les agents secrets du Qatar ont rencontré nul autre que le chef du front al-Nosra en Syrie, Abou Mohammed al-Joulani, en lui proposant l’offre proverbiale qu’il ne pouvait refuser: si vous coupez votre cordon ombilical avec Al-Qaïda, nous vous ferons pleuvoir des liasses d’argent liquide.

Le fait que le front al-Nosra soit considéré comme une organisation terroriste diabolique par le département d’État des USA n’a pas d’importance. Après tout, le Qatar n’a jamais vacillé dans son obsession de voir partir Assad, contrairement à l’administration Obama. La fin justifie les moyens une fois de plus.

Au même moment, l’Empire du Chaos garde vivante la fiction ambivalente d’une coalition globale combattant l’EIIS/EIIL/Da’ech, en mettant en veilleuse son intention cachée d’affaiblir Assad.

En Syrie, ce sont des conseillers militaires iraniens qui coordonnent l’armée arabe syrienne, avec l’aide de combattants du Hezbollah expérimentés et de miliciens chiites d’Irak.

Militants de l’Etat Islamique en Syrie (Reuters/Stringer)

Comme il n’y a plus d’opposition syrienne modérée (tous ont rejoint le faux califat), l’intention à peine cachée de l’Empire du Chaosderrière cette autorisation de recourir à la force armée serait de maintenir en place un groupe derebelles armés sélectionnés par la CIA, juste pour maintenir la pression sur Damas. Il apparaît maintenant évident que ce n’est pas l’Empire du Chaos qui l’emportera sur le faux califat, mais bien l’alliance formée par l’armée arabe syrienne, les combattants du Hezbollah et les milices chiites supervisées par l’Iran.

Rock Star iranienne

Il se passe quelque chose de semblable sur le front irakien, que le ministre de la Défense de l’Irak, Khaled al-Obeidi, résume bien en disant que Bagdad se sent à l’aise avec l’aide qu’elle reçoit de Téhéran pour combattre sérieusement l’EIIS/EIIL/Da’ech sur le terrain.

Ce qui nous amène au véritable vif du sujet: le ballet croisé complexe auquel se livrent Washington et Téhéran en Syrak. Car ce n’est pas l’hyperpuissance qui est en train de repousser et de soumettre le faux califat sur le terrain en Irak, mais bien l’Iran, qui apporte son soutien tactique, stratégique et aérien à Bagdad.

Comme l’armée irakienne formée par les USA est une pagaille complète, ce sont les milices qui font le gros du travail. Les milices irakiennes comptent dans leurs rangs au moins 100 000 combattants pleinement mobilisés par de puissants dignitaires religieux chiites dans leur contre-djihad les opposant au faux califat, qui dépeint les chiites comme des apostats dont la seule destinée convenable repose six pieds sous terre.

Leur haut commandant est nul autre que le général Qasem Soleimani, le chef de la Force (d’élite) Al-Qods, qui jouit d’une renommée digne des rock stars en Iran. Soleimani est présent sur tous les écrans de télé iraniens et irakiens. Sa dernière apparition, au grand plaisir des photographes, c’était à Samara, où on l’a vu encourager les milices et les soldats irakiens à lutter contre les brutes du calife.

Derrière Soleimani, on retrouve deux personnalités incontournables: Hadi al Ameri et Abou Mahdi Mohandes.

Ameri a été ministre des Transports sous l’ancien premier ministre Nouri al-Maliki. Il est devenu depuis le chef de la milice numéro un en Irak, les brigades Badr.

Mohandes, un ex-membre de l’opposition à Saddam Hussein exilé en Iran, a été député au parlement lui aussi. Il est en quelque sorte l’homme de main de Soleimani, en plus d’être chargé de superviser le retour des sunnites dans les villes irakiennes reprises à l’EIIS/EIIL/Da’ech.

Ce sont donc ces hommes et ces forces qui sont sur le point de prendre Tikrit, l’ancien fief du clan de Saddam Hussein, à seulement 130 km au nord de Bagdad. Une fois Tikrit prise, il n’y a qu’un pas à franchir pour arriver à Mossoul, une ville comptant 1,5 million d’habitants, qui pourrait être libérée à la fin du printemps.

Alep, Syrie (Reuters/Stringer)

La considération déterminante, c’est que l’Empire du Chaos ne fait absolument rien pour débarrasser l’Irak de l’EIIS/EIIL/Da’ech, à part demander au gouvernement à Bagdad, par l’entremise du général Martin Dempsey, de se réconcilier avec les sunnites etd’expliquer ses relations avec Téhéran.

Voici une explication plausible: pendant que vous poursuivez vos inepties, ils nous aident à enrayer un cancer que vous avez permis de s’étendre.

Pagaille tous azimuts

L’administration Obama, avec sa politique étrangère décousue fondée sur sa stratégie autoproclamée d’éviter les conneries, rend complètement dingues les véritables Maîtres de l’Univers, ceux qui contrôlent le système mondial en place.

Ce qui n’est pas étonnant, car ils n’ont pas la moindre idée de ce qu’ils veulent vraiment accomplir en Syrak.

La RAND Corporation (groupe de réflexion des USA – NdT) a tenté de rendre les objectifs parfaitement clairs.

Puis le Council on Foreign Relations (autre groupe de réflexion des USA – NdT)a perdu les pédales, en affirmant que la seule manière de s’en sortir, consistait à remettre le palais impérial à l’ordre en le confiant à un groupe de sages formé d’Henry Kissinger, de Brent Scowcroft, de Zbigniew Brzezinski et de James Baker.

La proposition a été toutefois été discréditée en long et en large par Andrew Bacevich.

Que ce passe-t-il vraiment alors? La nouvelle Stratégie de sécurité nationalede l’administration Obama est volontairement vague. Elle vante en quelque sorte les vertus de la coalition globale, qui est en fait une alliance entrel’Empire du Chaos et nos salopards des pays du golfe Persique dans la lutte contre l’EIIS/EIIL/Da’ech, dont l’objectif n’est pas de le détruire pour de bon, mais de le laisser couver pour affaiblir Damas perpétuellement.

D’autres factions à Washington préféreraient contenir et détruire le faux califat, d’abord en Irak, puis en Syrie, ce qui implique un appui tacite de Washington aux efforts de l’Iran.

Le chef du Pentagone, Ashton Carter, pourrait bien avoir concocté son propre scénario. Il a réuni des experts de Washington et des intervenants au Moyen-Orient comme Robert Ford, ancien ambassadeur des USA en Syrie et fomenteur notoire de la campagne Assad dégage, qui travaille maintenant pour l’AIPAC (eh oui !). Il est important de se rappeler que l’AIPAC[équivalent du CRIF aux USA – NdT] craint davantage l’Iran, la Syrie sous Assad et le Hezbollah que la peste noire, mais ne considère toutefois pas l’EIIS/EIIL/Da’ech comme une menace pour Israël.

En attendant, la coalition globale entretient la fiction qu’elle bombardera le faux califat jusqu’à sa destruction complète. Dans la réalité, ce sont les forces coordonnées par l’Iran qui sont en train de gagner la bataille sur le terrain en Syrak.

Il serait naïf de croire qu’en poursuivant sur cette voie, l’Empire du Chaos va nécessairement jeter du lest dans sa diabolisation croisée de la Syrie, de l’Iran et de la Russie.

La campagne Assad dégage ne disparaîtra jamais complètement de la feuille de route. Une véritable détente avec l’Iran va dépendre de la conclusion ou non d’un accord sur le nucléaire cet été. Sur ce point, Obama augmente la pression en multipliant les demandes. Quant à la diabolisation de la Russie, elle sera encore plus véhémente.

Ce qui est assez intrigant, c’est que même des généraux étoilés du Pentagone laissent tomber les raisonnements non sequitur [illogique, NdT] à la Rumsfeld, comme la Révolution dans les affaires militaires, selon laquelle un Pentagone technologiquement capable vaincrait facilement tous les ennemis.

En fait, ladite révolution a foiré sur le sol afghan et irakien. Elle ne peut rien non plus contre les forces irrégulières de l’EIIS/EIIL/Da’ech. La seule chose que la domination tous azimuts a réussi à accomplir, c’est la destruction de la Libye à l’aide des bombes de l’Otan et d’une bande de djihadistes déments.

Pepe Escobar est l’auteur de Globalistan: How the Globalized World is Dissolving into Liquid War (Nimble Books, 2007), Red Zone Blues: a snapshot of Baghdad during the surge (Nimble Books, 2007), Obama does Globalistan (Nimble Books, 2009) et le petit dernier, Empire of Chaos (Nimble Books).

Traduit par Daniel, relu par jj  pour Le Saker francophone

 http://lesakerfrancophone.net/les-interets-de-liran-et-des-usa-sentrecroisent-en-syrak/

Le monde anglo-saxon en guerre contre l’Europe ?  Par Alexandre Latsa

9/3/2015

FABLES AGREED UPON

Les accords de Minsk ont fait ressurgir une vérité oubliée un peu trop vite : les États européens ont un rôle fondamental et incontournable quand il faut gérer une crise sur ce continent.

Paris et Berlin se sont en effet bien gardés d’inviter Washington et Bruxelles, c’est-à-dire l’Otan et l’UE, à ces négociations de Minsk, destinées à avancer vers un accord de paix, dans cette guerre civile qui se déroule en Ukraine.

Ironie de l’histoire : la Biélorussie, régulièrement taxée de « dernière dictature d’Europe », a accueilli une rencontre ayant permis aux puissances continentales de bloquer les velléités guerrières anglo-saxonnes.

Prises entre l’enclume des faucons ukrainiens et le marteau de leurs sponsors américains, les élites ukrainiennes, qui auraient naïvement cru à la fable de leur intégration fraternelle au sein de la communauté euro-atlantique, doivent désormais déchanter.

Les rêves d’adhésion immédiate à l’Union Européenne et à l’OTAN sont partis en fumée, et le pays est maintenant très proche de la faillite. Le divorce avec la Russie sur le modèle géorgien se fait au prix d’une guerre contre le monde russe et donc quasi-directement contre la Russie. Dans le même temps, les oligarques qui ont pris le pouvoir en Ukraine après les événements de la place Maïdan ont mis les nations européennes face à une situation très complexe.

Du côté de l’Europe de l’ouest, on essaie de croire à la paix en Ukraine et de rester optimistes, mais une scission apparaît de plus en plus nettement. D’une part, se profile un axe qui recherche la paix et d’autre part un groupe qui souhaite un affrontement plus direct avec Moscou.

L’axe anglo-saxon, fauteur de guerre ?

Dans ce groupe, quatre acteurs principaux.

Il y a d’abord l’Angleterre, dont le ministre de la Défense Michael Fallon affirme que Moscou fait planer un « véritable danger » sur les pays baltes. Quant à l’ex-ministre britannique de la Défense Liam Fox, il martèle que les forces de l’OTAN doivent « offrir aux Ukrainiens les capacités nécessaires pour se défendre » et notamment des « armes antichars sophistiquées » car la Russie menacerait de dominer l’Europe. Même son de cloche pour l’ancien responsable des services secrets russes qui affirme que la Russie représente une « menace en tant qu’État » pour l’Angleterre.

Il y a le Canada, l’un des acteurs étrangers les plus actifs durant le Maïdan, fait rarement mis en lumière par les médias français, qui vient d’être clairement appelé à l’aide par les autorités ukrainiennes qui affirment se préparer à une « guerre d’envergure » contre la Russie. Et au passage, sans aucun doute, à balayer d’un revers de main les accords de Minsk.

Washington menace de son côté la Russie de sanctions d‘une extrême gravité en l’accusant de faire entrer des chars en Ukraine, ce que pourtant François Hollande lui même dément. Fort de ce mythe médiatique, Washington étudie même la possibilité de livrer des armes à l’Ukraine afin de torpiller la fragile tentative de « quintuple entente continentale » arrachée à Minsk pendant la nuit du 11 au 12 février.

Enfin il y a l’OTAN, dont le commandant adjoint de l’Alliance atlantique en Europe, le général Adrian Bradshaw, vient d’affirmer, tout comme l’ex-secrétaire général de l’Otan Anders Fogh Rasmussen, que la Russie pourrait être tentée d’envahir des pays membres du bloc. Grace à la crise ukrainienne, l’Alliance se redonne une raison d’exister et peut utiliser ses satellites en Europe (Pologne, États baltes…) pour constituer un cordon « Otanien » entre Paris, Berlin et Moscou. La crise en Ukraine a donc permis en quelque sorte l’apparition d’un projet de mur américain, qui remplacerait le mur de Berlin.

L’Europe face à ses contradictions historiques et systémiques

Un commentateur objectif et raisonnable pourrait se demander ce qu’un axe non-européen et maritime « Otan-Washington-Londres-Ottawa » peut apporter à une crise ne concernant que des puissances continentales européennes ou péri-européennes. Il pourrait avec étonnement constater que cet « axe du bien » a été exclu des négociations vers la paix mises en place par l’axe « Paris-Berlin-Moscou ». Il y a pourtant des explications à cela.

À la fin du second conflit mondial, l’Europe a confié sa défense aux États-Unis pour se protéger du péril soviétique. Lors de la disparition de ce danger, les Européens n’ont pas fait l’effort de créer un système de défense indépendant. L’OTAN a poursuivi son expansion vers l’est du continent, pays par pays. Dans cette organisation, la suprématie américaine coule de source.

La jurisprudence De Gaulle n’a pas fait tache d’huile, tandis que Berlin s’est montré incapable de s’affirmer en leader de la puissance militaire européenne. L’Allemagne se contentait de prendre le leadership économique d’une construction européenne ayant transformé les pays de l’union en sujets de ce nouveau Reich puissant économiquement, mais sans défense autonome.

Une Allemagne désormais prise en tenaille entre sa tendance naturelle à l’expansion vers l’Est (militaire en 1940, économique en 2000) et le risque d’une guerre ouverte dans laquelle elle serait la grande perdante, à cause de sa position économique dominante. Enfin, et peut être surtout, l’UE n’a toujours pas clairement défini ses frontières, ses limites civilisationnelles et par conséquent la limite territoriale et géographique de son expansion.

La Russie et les frontières du monde russe

L’Europe se retrouve face à une Russie en pleine mutation. Parallèlement au redressement économique spectaculaire qu’il a connu, le pays vit une mutation qui est de nature géopolitique. On l’imaginait devenir une puissance européenne ou quasi-européenne au début des années 2000 ; depuis quelques années, on constate au sein des élites russes une tendance géopolitique « eurasiatique » qui s’est beaucoup affirmée et qui tend à devenir dominante.

Ce changement de cap a logiquement entraîné une reconfiguration systémique et permanente tant de la politique étrangère russe, que de la gestion de ses marches (son étranger proche) et de la relation avec sa zone d’influence propre : le fameux « monde russe » que l’on peut qualifier « d’étranger intérieur », une notion difficile à comprendre pour les occidentaux.

Avec moins de 9 habitants au kilomètre carré, la Russie n’est pas un État nation européen comme les autres. Certaines frontières sont très éloignées du centre politique, et d’autres n’ont pas, en Russie, une signification identitaire aussi forte qu’en Europe occidentale. Cette réalité explique l’obsession russe d’avoir marches stables. L’existence de populations situées « hors » des frontières administratives de l’Etat russe actuel, mais se considérant comme appartenant au monde russe, complique encore les choses, que l’on pense par exemple aux Ossètes, aux populations russophones du Donbass ou à une partie de la population de la Moldavie.

Quel avenir pour l’Ukraine entre Washington, Moscou et l’Europe ?

Le retour de la Russie en tant qu’acteur géopolitique indépendant et autonome, ayant ses propres intérêts et les moyens de les défendre, est un élément clairement déstabilisant pour l’agenda américain en Eurasie et en Europe. Mais cette nouvelle donne place également l’Europe face à des choix stratégiques. L’affaire ukrainienne le démontre, en contraignant l’Europe à naviguer entre l’unilatéralisme de Washington et ses intérêts propres. Ces derniers n’allant pas du tout dans le sens d’une guerre sur le continent et contre la Russie, avec laquelle l’interaction commerciale, politique et économique est croissante depuis une quinzaine d’années.

Les Américains et les Européens ont globalement deux visions et des intérêts diamétralement opposés quant à l’avenir de leur relation avec l’Ukraine.

Pour Washington, l’Ukraine est un pion stratégique fondamental du fait de sa position géographique. Une fois l’Ukraine affranchie de l’influence de Moscou, elle pourrait se transformer en satellite docile, à l’extrémité est du continent, pour introduire l’OTAN en Eurasie, en commençant par la mer noire, et ainsi refouler la Russie vers l’Est. Le plus loin possible du « mur de Washington ».

L’Ukraine ne revêt en revanche aucun intérêt stratégique fondamental pour Paris ou Berlin, ni sur le plan militaire, ni sur le plan sécuritaire. Sur le plan économique, le pays peut représenter un marché potentiel pour certains produits européens, et pourrait devenir une source importante de main d’œuvre bon marché pour l’Allemagne. Sous cet angle, du reste, l’opération ukrainienne permet aux Etats-Unis de donner des gages économiques à leur allié allemand en Europe ; du moins tant que Berlin ne se permet pas de s’octroyer une quelconque liberté sur le plan militaire ou sécuritaire. Ceci explique en partie l’effroi qui a saisi Washington, Berlin et la soi-disant « nouvelle Europe » sous tutelle militaire américaine et sous domination économique allemande lorsque les Français ont esquissé la vente de navires Mistral, alors que dans le même temps l’Allemagne procède elle à des entraînements militaires avec des reproductions des mitrailleuses en bois en raison de la faiblesse de son budget militaire.

Si la paix revient en Ukraine, ce qui semble improbable, il faudra rebâtir, avec tous ces intérêts divergents, un système viable de relations Europe-Ukraine-Russie.

On imagine mal comment il pourrait pacifiquement s’esquisser sans que l’Ukraine ne redevienne ce que sa géographie et son histoire lui imposent d’être : un pont naturel entre la Russie d’un côté, et l’Europe centrale et occidentale de l’autre et surtout un tampon suffisamment étendu pour éviter au monde euro-occidental et au monde eurasien bien des heurts, et bien des affrontements.

Je dis improbable que la paix ne revienne car une question bien plus inquiétante se profile à l’horizon, question que les dirigeants occidentaux semblent ne pas vouloir se poser : l’Ukraine en tant qu’État existe-t-elle encore ?

http://fr.sputniknews.com/points_de_vue/20150309/1015050021.html

EN BANDE SON: 

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