Au coeur de la création de richesse : l'Entreprise

Charles Gave : l’extraordinaire rentabilité des Entreprises américaines (LA SUITE)

C’était sous forme de point d’interrogation qu’hier Charles Gave  posait la question des conséquences de l’extraordinaire santé des Entreprises et des conséquences induites sur les marchés financiers,  sa réponse attendue au travers du JDF d’aujourd’hui 

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Un phénomène tout à fait extraordinaire.

PAR CHARLES GAVE | JDF HEBDO | 07.11.2009

Il y a déjà quelque temps déjà que j’essaie d’attirer l’attention des lecteurs du JDF sur l’extraordinaire rentabilité des sociétés américaines. Je voudrais y revenir aujourd’hui.

La comptabilité nationale américaine publie chaque trimestre des statistiques très intéressantes sur les profits et, surtout, sur le cash-flow des sociétés. Ces statistiques, qui commencent en 1948, ont ceci d’intéressant qu’elles se concentrent sur l’argent que les entreprises génèrent dans leurs activités de tous les jours. Il s’agit donc de la meilleure analyse que nous ayons sur le cash généré par ces sociétés dans leurs activités récurrentes. Et quelque chose de très étonnant (et qui pourtant ne retient l’attention de personne) est en train de se produire. Historiquement, le ratio entre le cash-flow généré par les sociétés américaines et le PNB était à peu près constant, autour d’une tendance horizontale se situant à environ 9 %. Les bonnes années, on était à 10 %, les mauvaises à 8 %. Les variations cycliques de 10 à 8 % trouvaient en général leur explication dans une récession. Quand les affaires allaient mal, les sociétés encaissaient le coup et leur cash-flow baissait, et inversement quand les affaires allaient bien.

Rien de tel ne s’est produit lors de la dernière récession, pourtant l’une des plus sévères jamais enregistrées. Dans cette récession, non seulement notre ratio cash-flow sur PNB a grimpé de 9,5 % à 11 %, mais le chiffre absolu dudit cash-flow est monté pendant toute la période, ce qui ne s’était jamais vu. Pendant une récession, le cash-flow des sociétés est censé baisser, et non pas monter. Or, il est monté…

Comment expliquer ce phénomène étrange ? Sans doute par un fait, et un seul : l’information parfaite et en temps réel dont les dirigeants de société disposent aujourd’hui a fait que les temps de réaction à une détérioration de l’activité sont beaucoup plus courts. Les programmes d’investissements ont été annulés instantanément, les stocks coupés sauvagement, ainsi que l’emploi. De ce fait, la variable d’ajustement à un ralentissement économique n’est plus le profit (cash-flow) mais les dépenses d’investissement, l’emploi ou les stocks ou, plus probablement, les trois à la fois. Le résultat final est impressionnant : jamais les sociétés américaines n’ont eu une telle trésorerie. Les dépôts en cash se monteraient aujourd’hui à plus de 1.000 milliards de dollars et sont en forte hausse, ce qui est invraisemblable dans une récession.

Bref, les sociétés américaines sont aujourd’hui gérées pour maximiser la création de cash à travers le cycle. La question suivante est, bien entendu : comment cela a-t-il été interprété par les marchés financiers ?

Fort logiquement, les obligations des sociétés (corporate) ont connu depuis le mois de mars la plus forte hausse de leur histoire, ce qui est bien normal. La Bourse de New York, en revanche, a fortement baissé avant mars, comme elle le fait toujours avant les récessions, anticipant la baisse des cash-flows… laquelle n’a pas eu lieu. Elle est revenue, depuis, à un niveau où elle a effacé environ la moitié de la baisse, ce qui me paraît insuffisant. En effet, la conjonction de la baisse de la Bourse et de la hausse du cash-flow fait que nous nous retrouvons sur des niveaux de valorisation aussi bas que ceux que nous avions au début des années 80 quand les taux sur les obligations d’Etat étaient à deux chiffres.

En termes clairs : rarement la Bourse de New York a été aussi bon marché… A cela, sans doute, une explication politique. L’administration Obama semble avoir comme seul but de démontrer que Milton Friedman et Ronald Reagan avaient tort et que, eux, ils sauront mieux faire, et, du coup, nous avons droit à une orgie d’interventions étatiques quelque peu inquiétantes, qui explique en grande partie la hausse de l’or ou la baisse du dollar, mais aussi les faibles valorisations. Le paradoxe est donc que jamais les sociétés n’ont été aussi bien gérées, tandis que le gouvernement, lui, n’a jamais été aussi mal géré… Le principal frein à une revalorisation du marché des actions et du marché des changes aux USA est donc de nature politique, et là, honnêtement, je n’ai rien à dire, si ce n’est peut-être qu’aux USA les mauvais gouvernements peuvent s’amender. Faute de quoi ils sont renvoyés à leurs chères études par les électeurs. Si cela venait à se produire, la hausse aux USA pourrait être explosive…

*charlesgave@gmail.com

EN COMPLEMENT INDISPENSABLE : Un livre, une histoire , un évènement : Charles Gave : libéral mais non coupable…. (cliquez sur le lien)

EN TV LE 9 OCTOBRE 2009  : http://www.reichmantv.com/page1.html  (cliquez sur le lien)

EN VIDEO A L’ASSEMBLEE NATIONALE : http://blog.turgot.org/index.php?post/Gave-test3 (cliquez sur le lien)

EN ENTRETIEN ECRIT : Actualités Charles Gave : Transcription écrite de l’entretien BFM du 9 octobre (cliquez sur le lien)

BILLET PRECEDENT :  (Charles Gave : Malaise (cliquez sur le lien)

Charles Gave – né en 1941, il est économiste spécialiste des marchés financiers. Il a reçu un PhD en économie de l’Université de Chicago où il fut l’élève de Milton Friedman. Après avoir commencé sa carrière comme analyste financier dans une banque d’affaires française, il crée en 1974 une entreprise de recherche économique indépendante, Cecogest. En 1986, il diversifie son activité vers la gestion de portefeuille et devient le cofondateur de Cursitor-Eaton Asset Management, qui est ensuite vendu en 1995 à Alliance Capital. C’est en 1995 que Charles Gave crée Gavekal Research, Gavekal Capital et Gavekal Securities, trois entreprises dont le siège est aujourd’hui à Hong Kong.

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5 réponses »

  1. yep c’est la premiere recession avec ERP/SAP dans toutes les grosse boites.

    pourtant les boites europeenne n’ont pas dégraissée autant que les ricaines et le cac a bien rebondit.

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