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L’Afrique dans le sillage des BRIC

Les risques n’excédent pas ceux des marchés émergents alors que la valorisation des actions et leur croissance sont jugées attrayantes par DWS. 

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C’est en regard des autres marchés émergents que les atouts de l’Afrique apparaissent les plus prometteurs aux yeux de Jens Schleuniger, gérant du fonds en actions DWS Invest Africa. Depuis le début de l’année,ce fonds a d’ailleurs réalisé une performance de près de 70%, donc supérieure à celle de son indice de référence S&P Africa 40. Ce qui le place même en tête de sa catégorie, devant Robeco Afrika Fonds et JP Morgan Africa Equity. 

 Avec pourtant un quart du portefeuille (26,6%) dédié à des valeurs financières. Alors que plusieurs banques nigérianes ont perdu leur licences dernièrement.«Mais DWS n’était investi dans aucune d’entre elles « précise le gérant. Ce que ce dernier explique par sa bonne implantation dans le tissu local. C’est que la maîtrise du pôle financier est un bon indicateur de la gestion des risques. Le fonds a d’ailleurs investi les liquidités récemment recueillies – portant sa fortune à 49,5 millions d’euros à la mi-novembre – dans des banques nigérianes et des valeurs de la construction sud-africaines. Au-delà des perspectives d’investissement qu’offre le continent sur le plan opérationnel, bien loin de se limiter aux matières premières. 

Le gérant de DWS, l’entité fonds de placement de Deutsche Bank – résume même les vecteurs de croissance clé de ce marché par quatre vocables en «C « (en anglais),soit Consommation, Construction/ infrastructure, Commodities (matières premières) et la Chine, pour son rôle moteur dans les économies africaines. 

Investir dans les actions africaines n’est certes pas dénué de risques. 

«Mais ceux-ci ne sont pas plus prononcés que dans d’autres marchés émergents» assure Jens Schleuniger. 

Ainsi le risque d’expropriation – évoqué par un investisseur lors de la présentation tenue à Zurich – est il jugé bien plus élevé dans certains pays d’Amérique latine ou en Russie

Côté corruption, il souligne que le Botswana est mieux classé que l’Italie. Et de souligner l’amélioration de la stabilité politique de la plupart des pays, «même s’il y aura toujours deux ou trois pays instables politiquement». La plupart des pays de la contrée souffrent en revanche encore d’un manque de transparence et d’une gouvernance qui laisse à désirer. Démentant les craintes, le continent africain en général a du reste été bien moins affecté par les turbulences financières mondiales, même si certains marchés sont confrontés à des difficultés locales. 

Dans un contexte qui fait des marchés émergents une classe d’actifs en forte croissance, supérieure à celle des pays développés depuis 2001, l’Afrique est ainsi jugée bien positionnée avec, par exemple le dynamisme le plus marqué, après celui de l’Inde, en termes de nouveaux abonnements à la téléphonie mobile. 

D’autant qu’avec un quart de la population mondiale et un bon tiers de ses terres, le continent ne représente que 8% de la richesse créée dans le monde (PIB) et 5% de la capitalisation boursière. Cette dernière – qui ne représente pourtant qu’un peu plus de la moitié de la capitalisation de l’indice suisse SMI – est de surcroit dominée par ses quatre grands marchés: l’Afrique du Sud (six dixièmes), suivie par l’Egypte, le Maroc et le Nigéria. 

En Afrique du Sud, ce dynamisme devrait être stimulé par la Coupe du Monde de football (World Cup) qui doit s’y tenir l’an prochain. Avec à la clé la création de 400’000 emplois liés aux investissements prévus à hauteur de 5 milliards de dollars dans les infrastructures. Sans oublier les dépenses des 500’000 visiteurs attendus. Avec un effet positif escompté plutôt l’année suivante sur la Bourse du pays, si l’on se fie aux quatre précédentes coupes du monde. 

Un dynamisme porté aussi par les besoins croissants de la Chine. Dont la plus grande acquisition internationale a précisément été menée en août dernier par le groupe Sinopec sur des actifs pétroliers africains de la société Addax Petroleum, basée à Genève. Les sociétés occidentales de leur côté manifestent elles aussi un intérêt grandissant pour des sociétés africaines, notamment dans le secteur brassicole et les télécoms. 

Tout comme les grands groupe d’autres pays émergents comme l’opérateur indien Bharti Airtel, ou le producteur d’acier brut du Kazakhstan ENRC qui a accepté en octobre d’acheter, pour près d’un milliard de dollars, le groupe CAMEC et ses actifs africains. Un regain d’activités de nature à soutenir l’intérêt pour les actions et les Bourses africaines. 

Au point d’assister à la montée en puissance d’un nouveau pôle de marchés émergents désignés non plus seulement BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine) mais BARIC selon Jens Schleuniger. D’autant que le PIB du continent noir équivaut à ceux du Brésil ou de la Russie.

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Leçons de la géo-économie chinoise en Afrique

Par Marc Laperrouza nov09

Pékin a profité du 4e sommet Chine-Afrique pour effacer l’idée que la présence de la Chine en Afrique relève d’une simple «diplomatie du pétrole»

Dix milliards de dollars pour l’Afrique sur 3 ans. Décidément, c’est le monde à l’envers! Après avoir été durant des années le premier bénéficiaire de l’aide de la Banque mondiale, voilà que la Chine commence à jouer les bons samaritains dans des pays en voie de développement. 

En 2006, la Chine avait déjà promis de doubler son aide à l’Afrique jusqu’en 2009. Ce n’est donc pas à proprement parler une surprise. Dix milliards, c’est toutefois 10 fois plus que l’aide distribuée annuellement par la Chine à l’Afrique entre 1980 et 2005, une aide qui n’incluait pas il est vrai les prêts bonifiés. La Chine apporte de l’aide sous 3 formes: des subventions, des prêts sans intérêt (dont 90% sont annulés…) et des prêts concessionnels octroyés par la Banque Exim, l’organe de prêt du gouvernement chinois, ces derniers étant subventionnés par le Ministère du commerce. 

Les montants restent cependant modestes en comparaison avec ceux déboursés par les pays de l’OCDE. Avec ces 10 milliards sur 3 ans, la Chine demeure encore en deçà des Etats-Unis (9 milliards pour 2010) et de l’Union européenne (plus de 20 milliards). 

Qu’est-ce qui explique cette générosité? A en croire le premier ministre Wen Jiabao, ce serait l’amitié entre les peuples. L’appel chinois aux frères musulmans africains n’est pas passé inaperçu à Charm el-Cheikh. Après les violents heurts entre les populations chinoises et ouïgours au Xinjiang, le gouvernement chinois en a profité pour réaffirmer son attachement à la défense des minorités. En somme, un discours identique à celui que professait le Grand Timonier au plus fort de la période communiste.

 L’un des facteurs qui entrent en ligne de compte est bien sûr l’impératif d’assurer la sécurité énergétique. Au vu du rythme actuel de croissance, la Chine a un besoin pressant de diversifier ses sources d’approvisionnement. Ce n’est donc sans doute pas un hasard si deux tiers de l’aide vont à des programmes d’aide aux régions subsahariennes, où se trouvent justement un grand nombre de ressources pétrolières et minières. Toutefois, l’investissement direct chinois ne se concentre pas uniquement dans les pays riches en ressources minérales. En Afrique de l’Est, la Chine a participé au financement et à la construction de ministères et de stades de football. Elle contribue également à améliorer l’exploitation des terres agricoles, puisqu’elle s’est engagée à renforcer la coopération en formant des experts agricoles africains. 

Enfin, sujet dont on a moins entendu parler au sommet de Sharm-El-Sheik, les investissements directs chinois en Afrique ont été multipliés par 20 en 5 ans, à 8 milliards de dollars. Et les échanges commerciaux ont été multipliés par 10 en dix ans. La Chine aligne stratégiquement l’octroi de son aide sur sa politique d’expansion commerciale en Afrique. L’aide officielle soutient en effet indirectement, voire parfois directement, les entreprises chinoises en Afrique. Par exemple, la plupart des projets d’infrastructures «offerts» sous l’égide de l’aide au développement requièrent que l’entrepreneur ou l’équipementier soit chinois. Le modèle chinois a ceci de particulier que les entreprises privées travaillent main dans la main avec les organismes gouvernementaux en charge de l’aide au développement. 

Les montages financiers abondent, à l’image de celui qui a été utilisé originellement en Angola: les fonds ne sont pas prêtés directement au pays. Le gouvernement chinois mandate une entreprise de construction chinoise pour la réalisation d’un projet d’infrastructure. En contrepartie, une tierce entreprise chinoise se verra délivrer un droit de forage pétrolier ou une concession minière. Dans ce cadre, l’aide chinoise est administrée par la Banque Exim qui exige qu’au moins la moitié des fonds soit versée à des entreprises chinoises. De façon générale, les grands projets d’infrastructures font souvent partie de contrats globaux qui prévoient l’acquisition de ressources naturelles par des firmes chinoises. 

Des entreprises comme China Complete Plant Import and Export Corporation (COMPLANT) ont été mises en place pour organiser et gérer tous les projets d’aide du gouvernement et, en parallèle, faire office d’entreprise générale. Ces entreprises tombent du reste sous la supervision de l’agence en charge de la supervision des biens étatiques. 

Les pays africains semblent apprécier tout particulièrement le modèle d’aide chinois. En effet, Pékin prône une politique de non-ingérence dans les affaires intérieures, ce qui lui vaut régulièrement les foudres des autres pays donateurs qui tentent, au travers de leurs projets d’aide, d’éliminer la corruption, de promouvoir la démocratie ou encore de maintenir le niveau d’endettement des pays africains à des niveaux raisonnables. 

Au-delà des sommes engagées, la différence la plus notable entre l’aide chinoise et celle des autres pays de l’OCDE réside dans le fait que Pékin ne lie pas son aide à des valeurs occidentales ou à des modèles de développement pour les pays africains. Au consensus de Washington, la Chine a substitué le consensus de Pékin: une aide inconditionnelle. Deux modèles d’aide se retrouvent ainsi en concurrence, ce qui fait le jeu de certains pays africains. 

Si l’aide chinoise a pu être utilisée comme un instrument pour atteindre des objectifs politiques, stratégiques et économiques, jusqu’à récemment, elle visait principalement à gagner l’appui de la communauté internationale. Il semblerait qu’aujourd’hui cette aide soit de plus en plus guidée par des considérations économiques et commerciales, voire environnementales. Le nouveau paquet d’aide comporte en effet un partenariat sur le changement climatique: Pékin s’engage à construire 100 projets d’énergie propre (solaire, biogaz et mini-hydraulique). Pékin a profité de ce 4e sommet Chine-Afrique pour effacer l’idée que la présence de la Chine en Afrique relève d’une simple «diplomatie du pétrole». Les promesses faites à Charm el-Cheikh démontrent que la Chine n’a rien perdu de son habileté diplomatique.

1.000 milliards de dollars investis sur les marchés africains

Joël Antoine | JDF HEBDO | 05.12.2009

Les investisseurs ont le choix entre sept fonds et trackers exposés aux marchés africains. Le nombre de produits dépasse la vingtaine si l’on y ajoute ceux présents également au Moyen-Orient.

Cette offre est récente, la plupart des produits ayant moins de deux ans d’existence. En outre, elle est prioritairement destinée aux institutionnels qui souhaitent affiner leur allocation d’actifs. D’autant que la plupart des gérants de fonds émergents qui n’ont pas de limitation d’investissement à un pays ou à une région font l’impasse sur les Bourses africaines.

Pour Mark Mobius, directeur de la gestion pays émergents chez Franklin Templeton, il convient de ne pas négliger totalement les marchés qui se trouvent encore en situation de préémergence, tel le Nigeria : « Dans ces Bourses, on trouve généralement des entreprises orientées vers l’économie locale, ce qui réduit leur corrélation à la classe d’actifs marchés émergents prise dans son ensemble. La plupart des investisseurs misent peu sur ces Bourses préémergentes, qu’ils jugent risquées. Cependant, je ne crois pas que le niveau de risque soit bien supérieur aux autres marchés émergents car les investisseurs y sont confrontés à des risques politiques et économiques comparables, tandis que leur valorisation est bien plus attrayante. Au final, le principal consiste à sélectionner la bonne entreprise ou la bonne action. »

Les fonds Afrique obtiennent cette année, au 1er décembre, des performances qui s’étagent de 18,58 % pour le Nordea 1 African Equity BP à 69,44 % pour le DWS Invest Africa LC. L’allocation d’actifs explique en grande partie les écarts. Le JPMorgan Africa Equity Fund avance de 51,95 % en sous-pondérant fortement l’Afrique du Sud (à 26,4 % au 31 octobre, contre 83,7 % pour l’indice MSCI Emerging and Frontier Markets Africa). En revanche, son gérant privilégie le Niger à hauteur de 22,6 %, l’Egypte pour 10,8 % et le Kenya pour 5,7 %.

Le tracker Lyxor ETF Pan Africa réalise également une belle performance cette année en progressant de 49,32 %. Il réplique l’indice SGI Pan Africa, qui ne compte que 30 valeurs. Il a pour particularité de limiter à 10 % l’importance de chaque valeur dans l’indice, ce qui revient à prendre une part des bénéfices sur celles qui dépassent durablement cette limite au profit de celles qui sont en retard.

Catégories :Chinamerica, Pays Emergents

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