Inflation, inflation importée, monétarisation de la dette

Une forte inflation s’incruste pour 15 ans dans les mémoires

Tandis que le risque d’inflation est évoqué par maints économistes, la BCE analyse l’impact des expériences d’inflation sur les mémoires et en tire des enseignements de politique économique.

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 L’inflation semblait avoir disparu des pays industrialisés. Mais les politiques monétaires accommodantes employées pour contrer les effets de la crise conduisent maints économistes à anticiper son retour en 2011. Or l’inflation reflète partiellement les préférences et valeurs d’une société, selon une étude  (cliquez sur le lien)de la Banque centrale européenne (1). Celles-ci diffèrent considérablement selon les expériences des différents pays. L’hyperinflation de 1923 en Allemagne continue par exemple à hanter les esprits outre-Rhin.

C’est elle qui explique que la Bundesbank soit restée la première à combattre toute velléité de hausse des prix. Dans un ouvrage admirable (2), Paul Cantor analyse l’hyperinflation allemande en littérature, et notamment un écrit de Thomas Mann sur cette période (Unordnung und frühes Leid). Ce dernier a dépeint les effets de l’inflation sur les moeurs germaniques, brisant les hiérarchies établies au sein des familles par exemple, et créant finalement un terreau fertile au national-socialisme. Non seulement la littérature, mais l’art n’y a pas été insensible à cette période.

Dans leur étude, les économistes de la BCE utilisent le World Values Survey auprès de 52’000 personnes, conduit en quatre vagues, de 1981 à 2000, dans 23 pays industrialisés. Il en ressort que les individus qui ont connu l’hyperinflation en restent profondément marqués durant toute leur vie. Ils sont 770 à faire partie de ce sondage (1,5% du total). Ce sont aujourd’hui les plus ardents défenseurs de la lutte contre l’inflation. Car l’hyperinflation a frappé d’autres pays que l’Allemagne. L’Autriche, la Grèce, l’Italie et le Japon ont subi ce traumatisme après la Deuxième Guerre. La BCE définit l’hyperinflation comme une hausse des prix supérieure à 200% par an.

Par contre, une vague de haute inflation marque moins longtemps les mémoires que l’hyperinflation. Elle reste ancrée dans les esprits de 10 à 15 ans, selon les deux économistes. Comme les dernières vagues de forte inflation datent des années 1970, la volonté de lutter contre le risque de hausse des prix est en baisse. Or il est beaucoup plus difficile pour une banque centrale de réduire l’inflation quand elle est haute que de prévenir une forte inflation.

En 2007, Blanchflower a montré qu’une expérience de haute inflation diminuait le sentiment de bien-être. La même année, Malmendier et Nagel ont expliqué que l’inflation conduisait les ménages à réduire leurs placements en obligations. En 2009, Tabellini a pour sa part démontré le lien causal entre culture et développement économique. La quête d’une culture de stabilité n’est donc pas qu’un débat pour experts financiers. Les auteurs regrettent clairement que la lutte contre l’inflation ne soit plus aujourd’hui la priorité des personnes interrogées. C’est la priorité de 15% des gens, contre 50% dans les années 1980.

Ces observations sont importantes pour les banques centrales. Le soutien à leur mandat de lutte contre l’inflation tend à s’éroder, d’ailleurs en réponse à leur propre succès des dernières années. C’est pourquoi elles sont invitées à préparer très tôt une campagne de communication, spécialement auprès des jeunes générations, afin de leur vanter les mérites de la stabilité des prix.

(1) Memories of high inflation, Michael Ehrmann and Panagiota Tzamourani, Working Paper 1095, 2009

(2) Literature and the Economics of Liberty, spontaneous order in culture, Paul Cantor, Ed. Ludwig von Mises, 528 pages

Par Emmanuel Garessus  le temps janv10

EN COMPLEMENT INDISPENSABLE : Bruno Bertez :Haussier sur tout. Mais en nominal/Pourquoi la croissance sera forte et inflationniste !!!! (cliquez sur le lien)

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