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La dégradation de la qualité de crédit des souverains européens passe un nouveau cap

 L’indice des CDS d’émetteurs souverains d’Europe continentale, publié par Markit, est passé au-dessus de celui des CDS de sociétés notées « investissement » 

 

 

 

   

La perception de la qualité de crédit des émetteurs souverains, telle qu’interprétée par les indices de dérivés de crédit, s’est dégradée. A un tel point que la dette émise par les gouvernements est désormais jugée davantage exposée au risque de défaut que les entreprises. De fait, l’indice Markit iTraxx SovX Western Europe, qui suit les contrats de protection contre le risque de défaut (CDS) de 15 économies d’Europe continentale, s’est établi mardi à 70 pb, contre 67 pb pour l’iTraxx Main Europe, qui couvre les CDS de 125 émetteurs corporate européens notés «investissement». En octobre 2009, ils évoluaient, dans l’ordre, autour des 45 et 98 pb. 

En début de semaine, et selon les indices Markit, les investisseurs devaient payer 63.000 dollars pour assurer l’achat de 10 millions de dollars de titres de dette d’une entreprise avec une échéance 5 ans. A comparer avec les 71,500 dollars à débourser pour un investissement de même somme en obligations d’Etat, rapporte le Financial Times.(cliquez sur le lien) Normalement, l’inverse prévaut. La crise a tout changé 

Ce renversement a été nourri par le retour du phénomène de différentiation des spreads des pays par rapport aux Bunds et le rally du crédit corporate. L’indice Markit iTraxx SovX, construit de manière équipondérée, a subi l’évolution défavorable des CDS des pays actuellement les plus sous pression sur leur déficit, leur dette et leur économie, comme la Grèce, l’Irlande et l’Espagne. Selon CMA DataVision, les spreads des CDS des trois pays se traitaient hier respectivement à 278, 146 et 115 pb

Cette dynamique – à relativiser car les CDS souverains sont moins liquides que le cash et les émissions se placent – devrait persister. Dans un rapport hier, Moody’s a estimé que l’année 2010 promet d’être difficile pour les émetteurs souverains. Et selon l’agence, les notations des gouvernements n’ayant pas été capables de restaurer leur santé économique et budgétaire, tout particulièrement ceux des catégories «Aa-A», seront testées. La Grèce, l’Irlande et l’Espagne sont donc prévenues 

source agefi janv10 

EN COMPLEMENTS INDISPENSABLES : L’indice iTraxx SovX Western Europe : un bon indicateur du Risque systèmique souverain (cliquez sur le lien) 

Trappes à Dettes /obligataire européen : L’écart grandit entre le Bund et les taux grecs (cliquez sur le lien) 

RAPPEL : Depuis fin 2008, les Etats se sont endettés jusqu’au cou afin de financer les plans de sauvetages à destination de pans entiers de l’économie. Dans le même temps, les entreprises, elles, sont progressivement revenues sur le marché du crédit. En bien meilleure forme qu’auparavant. Elles ont assaini leur bilan à coup de restructurations, ont maîtrisé leurs coûts. Résultat, le risque attaché à leurs obligations a commencé à baisser, jusqu’à passer en dessous de celui lié aux titres de dettes d’Etat. 

Faillite impossible 

La situation présente est paradoxale. Un Etat ne peut théoriquement pas faire faillite, contrairement à une entreprise. Pour un investisseur, il représente le risque zéro. Mais les niveaux de dette publique record ont changé la donne. «Le risque attaché aux obligations d’Etat ne reflète pas la probabilité de non remboursement mais la capacité de l’Etat à réduire sa dette à l’avenir», explique Jérôme Broustra, responsable adjoint de la gestion obligataire euro chez Axa IM. 

Plus les Etats émettent de dette, plus les taux d’intérêt ont tendance à augmenter. Du coup, les obligations déjà sur le marché, rétribuées à un taux inférieur, perdent de la valeur. C’est bien ce risque qui augmente, selon les investisseurs. 

LES RAISONS DU SUCCES

Les liquidités abondantes facilitent le placement des dettes souveraines européennes  

Quatre Etats ont émis hier 21 milliards d’euros de titres en concédant une légère prime par rapport au marché secondaire  

Malgré l’embouteillage d’émissions sur le marché de la dette, les nouvelles obligations souveraines de la zone euro se sont plutôt bien placées hier. Les investisseurs ont acheté plus de 21 milliards d’euros de titres d’Etat émis par l’Allemagne, l’Italie, le Portugal, et l’Espagne qui a procédé à une syndication.  

«Les Trésors n’ont eu qu’à offrir une légère prime par rapport au marché secondaire qui a suffi à faire venir les investisseurs», explique Thierry Million, directeur de la gestion obligataire de Allianz Global Investors France. Pour son nouveau benchmark à cinq ans, l’Allemagne a par exemple offert un rendement de 2,45% contre 2,41% et 2,35% pour les deux précédentes émissions d’octobre et novembre dernier. Mardi, la Belgique et l’Autriche, par syndication, et les Pays-Bas, avaient eux aussi vendus de la dette.  

Le bon déroulement des opérations tient notamment à l’abondance de liquidités sur le marché. Depuis plusieurs mois, les politiques très accommodantes des banques centrales permettent aux investisseurs de disposer de fonds à un faible coût. Par ailleurs, cette semaine, le marché de la dette souveraine bénéficie des remboursements et des paiements de coupons aux investisseurs qui disposent ainsi de liquidités à réinvestir. Au total, 55,6 milliards d’euros leur sont retournés d’après Barclays Capital. Un montant bien supérieur aux 32 milliards d’euros d’émissions attendues sur la semaine. 

 En janvier, 96 milliards d’euros d’obligations souveraines pourraient être émis dans la zone euro, ce qui en ferait le mois le plus actif depuis juin dernier. Mais les Etats ne pourront plus compter dans la deuxième quinzaine sur l’afflux de liquidités liés à des remboursements de titres, ces derniers devant ralentir nettement.  

Malgré cela, «le marché ne devrait pas avoir de problème à absorber les émissions souveraines dans les mois à venir, estime Thierry Million. Les placements pourraient ensuite devenir plus difficiles lorsque les banques centrales commenceront à retirer les liquidités du marché». Les émetteurs, dont les programmes sont en légère hausse par rapport à 2009 compte tenu de l’augmentation des dépenses publiques pour faire face à la crise, pourraient alors concéder des rendements plus importants pour attirer les investisseurs 

source agefi janv10

DERNIERE MINUTE :

Les obligations grecques encore chahutées

Les obligations d’Etat grecques ont à nouveau été chahutées jeudi, avec un rendement supérieur à 6%, à la veille de la présentation par la Grèce de son programme de stabilité et de croissance devant la Commission européenne et après des déclarations sévères de Jean-Claude Trichet, président de la BCE.

Le rendement de l’obligation grecque à 10 ans a grimpé au-dessus des 6%, pour la première fois depuis mars 2009. Hier soir, il valait 6,032%, contre 5,868% la veille à la même heure.

Le rendement du Bund allemand à 10 ans se détendait de son côté à 3,296% contre 3,301% mercredi soir tandis que l’OAT française augmentait à 3,536% contre 3,521% la veille.

Le différentiel entre l’obligation d’Etat allemande (le Bund 10 ans), qui sert de référence sur le marché obligataire européen, et l’emprunt d’Etat grec s’est encore accru jeudi (à 273 points de base) et se rapproche de son plus haut niveau depuis le début de la crise grecque (280 points de base), atteint le 21 décembre.

Le Gilt britannique à 10 ans se tendait à 3,978% contre 3,949% mercredi.

Aux Etats-Unis, le rendement du bon du Trésor américain à 10 ans se repliait à 3,758% contre 3,783% mercredi soir, et celui du bon à 30 ans à 4,675% contre 4,707% . Les taux à échéances courtes ont légèrement augmenté à 0,05% contre 0,04%. Sur le marché interbancaire, l’Euribor a reculé à 0,682% contre 0,684% mercredi et le Libor est resté stable à 0,251%

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