Douce France

France : Les principales piques du rapport de la Cour des Comptes

Le rapport de la Cour des Comptes révèle de nombreuses irrégularités dans le fonctionnement des services publics.  

PLUS D IRREGULARITES EN SUIVANT :

15 % des contraventions routières annulées à Paris

Contrôlé pour la première fois par la Cour, le système des amendes routières de police (1,46 milliard d’euros en 2008) est jugé opaque. L’Etat est incapable de dire combien d’amendes sont infligées chaque année aux automobilistes, ni leur montant ou leur nature. Gérées par différents services (ministère de l’Intérieur, services des radars, polices municipales, etc.), elles sont recensées par des logiciels qui ne communiquent pas entre eux. Cette situation crée une grande opacité et alimente  » bien des suspicions « , commente la Cour, qui en veut pour preuve la fréquence des sanctions annulées par la préfecture de Paris : plus de 15 % des amendes y ont été annulées en 2007, dont plus de 525.000 l’ont été directement par les services de la préfecture, en dehors de tout cadre légal. Pour y remédier, la Cour demande l’application de la circulaire de 2002, imposant que le pouvoir de classer sans suite soit du ressort exclusif du ministère de l’Intérieur.

Contrôleurs aériens : toujours plus d’avantages

Pour la troisième fois en huit ans, la Cour s’en prend au fonctionnement  » opaque  » de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC), accusée de favoriser l’absentéisme des contrôleurs aériens, au détriment de la productivité et de la sécurité. Au centre de ses critiques : l’organisation du temps de travail dans les centres de contrôle, autogérés par les aiguilleurs du ciel. Si les contrôleurs aériens français font de plus longues journées que leurs collègues européens – jusqu’à 8 h 15 min par vacation, contre 5 h 30 min pour leurs collègues d’Eurocontrol -, ils travailleraient en moyenne moins de cent jours par an. Et ce, grâce à des pratiques déjà condamnées dans les précédents rapports de 2002 et 2006, et jamais éliminées, du fait de l’incapacité de la DGAC à contrôler le temps de présence effectif de ses agents. La Cour dénonce aussi les protocoles d’accord triennaux censés prévenir les grèves, qui ont permis aux syndicats de contrôleurs d’obtenir une revalorisation constante de leur indice statutaire, en passe de rejoindre celui des polytechniciens (alors qu’ils n’ont pas le titre d’ingénieurs), assortie d’une inflation des primes. Et ce en échange de gains de productivité peu ou pas réalisés et alors que la DGAC enchaîne les déficits.

L’usage surprenant de certaines voitures de police

Le parc automobile des services centraux de la police nationale (1.469 véhicules) fait l’objet d’un usage parfois injustifié, et souvent dangereux. Injustifié, parce que les agents l’utilisent à des fins personnelles  » sans autorisation formalisée ni assurance complémentaire « . Une trentaine de véhicules sont aussi mis à la disposition permanente de personnes n’exerçant aucune fonction au ministère de l’Intérieur (ancien président de la République, anciens Premiers ministres, hauts responsables administratifs, etc.). La Cour n’a pourtant  » eu connaissance d’aucun texte régissant ces mises à disposition demandées oralement par le cabinet du ministre « . Le nombre élevé d’accidents révèle, en outre, une  » conduite peu respectueuse des règles de sécurité « . En 2007, près de 80 % des véhicules des services centraux (79 %) ont été accidentés ! Les voitures mises à la disposition des cabinets font l’objet d’un accident tous les six mois et demi, en moyenne.

Les retraites coûteuses du Cese

La caisse de retraite des anciens membres du Conseil économique, social et environnemental est particulièrement déséquilibrée. Malgré une subvention de l’Etat qui représente près du quart de ses ressources et le recours massif à un fonds de réserve, elle affiche un déficit de plus de 4 millions d’euros. Et les ressources du fonds de réserve s’épuisent rapidement : il pourrait même  » disparaître à l’horizon 2013  » si aucune mesure n’est prise. La Cour pointe  » un risque budgétaire certain  » : le total des engagements hors bilan de l’Etat pour les droits acquis par 1.086 anciens membres est évalué à 218 millions d’euros. Pour éviter une  » fuite en avant dont l’Etat supportera seul les conséquences « , le rapport recommande de jouer sur l’âge de départ et/ou le montant des cotisations ou bien de faire évoluer le dispositif  » vers un régime complémentaire en capitalisation à cotisations définies « .

Anciens combattants des colonies : injustice persistante

La Cour dénonce  » des problèmes persistants en matière d’égalité de traitement  » pour les anciens combattants des ex-colonies françaises, une injustice évoquée en 2006 par le film  » Indigènes « , de Rachid Bouchareb. Malgré les mesures prises en 2002 et 2007, le montant des pensions militaires de retraite versées à près de 50.000 Africains, Maghrébins ou Asiatiques reste en  » décalage très important  » avec celles qui sont attribuées aux personnes de nationalité française : 19.971 euros par an en moyenne pour les Français, 1.276 euros pour les autres. Des différences  » de l’ordre de 1 à 10  » sont constatées même à grade équivalent : 646 euros pour un sergent marocain, 7.512 euros pour un sergent français. C’est dû notamment au fait que la valeur des points, l’indice et les règles juridiques permettant de calculer le montant des pensions ont été figés ( » cristallisés « ) lors de l’indépendance de ces pays.

L’Etat ne prévient pas le surendettement

En cause : l’absence de politique de prévention et de pilotage stratégique de l’Etat, qui s’est contenté de déléguer le secrétariat des commissions à la Banque de France (commissions constituées selon des choix individuels, critères de recevabilité mouvants, responsabilité hypertrophiée des agents de la Banque de France, etc.). Par ailleurs, les coûts supportés par la Banque de France sont élevés et non maîtrisés.

Les banques doivent participer aux coûts de fonctionnement des commissions. En matière de prévention, la Cour est favorable au durcissement des mesures comprises dans la réforme du crédit à la consommation. Un fichier positif  » pourrait éclairer la prise de risques des banques « , indique-t-elle. Si le Parlement crée une commission d’étude, celle-ci devra statuer dans  » les plus brefs délais « . Si le nouvel encadrement des cartes de fidélité et de crédit est inefficace, il faudra  » étudier la possibilité de les interdire à terme « .

Les dérives systématiques des programmes d’armement

Sous-estimation systématique des budgets, jusqu’au-boutisme technologique, contrats mal négociés : la Cour n’est pas tendre sur la conduite des grands programmes d’armement, même si, note-t-elle, les réformes engagées vont dans le bon sens. Premier investisseur de l’Etat, le ministère de la Défense consacre en moyenne une dizaine de milliards d’euros par an à ses équipements. Après avoir épluché depuis 2005 la totalité des programmes de plus de 5 milliards d’euros (à l’exception des frégates FREMM) et pointé l’exécution des lois de programmation 1997-2002 et 2003-2008, la Cour en a conclu que tous ces programmes ont coûté plus cher et duré plus longtemps que prévu.

Education : l’anomalie des inspecteurs de Paris

La semonce ne concerne que 22 personnes, mais elle est explosive. Les inspecteurs de l’académie de Paris ont vu au fil du temps leur gestion évoluer vers des conditions de nomination et d’emploi déconnectées de toute fonction d’inspection. Depuis une dizaine d’années, les effectifs ont triplé et ces nominations ont servi à placer des collaborateurs d’autorités politiques. Plusieurs d’entre eux ont été rémunérés – 4.500 euros net par mois -alors même qu’ils n’exerçaient aucune fonction, ce qui, note le rapport  » ne peut qu’appeler les plus vives critiques, sans préjudice des suites juridictionnelles qui pourraient être données « . Le ministère de l’Education nationale a engagé depuis leur suppression.

Les Echos fev2010

EN COMPLEMENT : La Cour , ses contes, ses légendes et ses courtisans : En France Le nombre de fonctionnaires a augmenté de 36% depuis 1980 (Cour des Comptes) (cliquez sur le lien)

1 réponse »

Laisser un commentaire