Europe

Immobilier : L’étonnante résistance du marché européen du logement

La réactivité des banques centrales et les amortisseurs sociaux ont amorti le choc en Europe

La crise des marchés résidentiels, en Europe, sera finalement de courte durée, si l’on en croit les experts réunis par la Royal Institution of Chartered Surveyors, et leur étude publiée le 2 mars. Les auteurs perçoivent déjà des signes de rétablissement du marché, tant dans le nombre croissant des ventes que dans la remontée des prix. «La reprise amorcée est quand même fragile et menacée par le chômage», tempère Jean-Michel Six, chef économiste chez Standard and Poor’s.

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 Le cas le plus spectaculaire s’observe au Royaume-Uni. La baisse des prix, commencée au printemps 2008, n’y aura duré que dix-huit petits mois, atteignant 20%, selon l’indice Halifax des prix des logements anglais, avant de regagner 1,1% sur l’ensemble de l’année 2009.

De bonnes affaires à Londres

La reprise est plus marquée à Londres, où les acquéreurs, attirés par les décotes, se sont pressés pour acheter les biens de qualité. Le nombre de transactions conclues a augmenté de 10%, entre octobre 2008 et octobre 2009, et celui des crédits hypothécaires accordés, de 80%. Les saisies ont été bien moins nombreuses que prévu par le Conseil des prêteurs hypothécaires, qui s’attendait à 75 000 dossiers. Finalement, il n’en a compté «que» 48 000.

Autre redressement spectaculaire, celui du marché néerlandais alors que le système bancaire des Pays-Bas était ébranlé. Le nombre de transactions s’est bien effondré de plus de 30%, en 2008, mais la chute des prix s’est finalement limitée à 5,5%, pour se stabiliser dès l’automne 2009.

Le rebond des prix est impressionnant dans certains pays du nord de l’Europe, comme en Norvège (+11,6%) ou encore en Finlande (+7,9%) après des chutes respectives de 7% et de 6,1% en 2008.

En France, la baisse a plafonné à -3,1%, en 2008, et -4,9%, en 2009. En Italie, 2008 était restée positive et la décrue n’a pas dépassé 4% en 2009, 3,3% en Allemagne et 1,6%, en Belgique. Quant à certains pays, ils ne sont pas passés dans le rouge. C’est le cas du Portugal (+0,3%, en 2009), de la Suisse (+0,4%) ou de l’Autriche (+2,9%).

Pour les auteurs du rapport, l’Europe a mieux encaissé cette crise financière que celle des années 1990 et en a, surtout, moins souffert que les Etats-Unis. Grâce à la réaction des banques centrales qui a conduit à une rapide et forte réduction des taux d’intérêt des crédits, donnant un coup de fouet au marché européen du logement.

L’allégement de la charge financière a profité aux acquéreurs et soulagé les emprunteurs à taux variable, nombreux en Espagne, en Irlande ou au Royaume-Uni.

Les amortisseurs sociaux de l’Europe ont aussi fonctionné, avec un chômage généralement mieux indemnisé, donc peu de faillites, de saisies et de ventes forcées qui sont, en elles-mêmes, des accélérateurs de la baisse. Cela contraste avec le marché américain, où plus de 8% d’emprunteurs connaissent ces difficultés.

Le facteur démographique

Pour Jean-Michel Six, «il ne faut pas négliger le facteur démographique et la relative pénurie d’offres de logements qui expliquent aussi ce rebond. D’autant qu’il y a toujours une forte demande pour être propriétaire afin d’être à l’abri lors de la retraite.» Cette pénurie n’est pas générale en Europe. Certains pays ont une surproduction et le marasme y perdure.

En Irlande, 300 000 logements restent invendus et les prix ont perdu 9%, en 2008, et 18,5%, en 2009. En Espagne, plus d’un million de logements n’ont pas trouvé preneur et les prix ont ­reculé de 10%, en 2009, après 11% en 2008.

Difficultés en Europe de l’Est

A l’est, la situation n’est guère plus favorable. En Hongrie, les accédants à la propriété ont emprunté en devises étrangères et subissent de plein fouet la baisse du forint. La Pologne, épargnée par la récession, ne l’est pas par la surproduction de logements, et cumule un stock considérable d’invendus, une baisse du nombre de transactions de 40%, en 2009, et des prix en berne de 10%, alors qu’ils avaient doublé entre 2005 et 2007. La stabilisation est cependant espérée pour 2011. Quant aux Etats baltes, les chutes des prix y sont vertigineuses, jusqu’à -53% en Lettonie.

L’Allemagne, enfin, se distingue par un faible taux de propriétaires, qui a même baissé, passant de 43% à 42%, entre 2002 et 2006, par l’abondance des logements disponibles, l’absence d’inflation, voire la lente érosion des prix, régulière depuis vingt ans, et un crédit jamais facile.

Par Isabelle Rey-Lefebvre, Le Monde mars10

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