La politique de réduction des dépenses du gouvernement canadien en 1993 doit inspirer les états européens aujourd’hui. La Grèce au premier chef.
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Les grèves en Grèce contre le plan d’austérité du gouvernement doivent inquiéter les dirigeants de tous les pays ayant un gros déficit budgétaire – la plupart, en fait.
Pourtant, le plan n’était pas particulièrement austère: dégraissage mineur du secteur public pléthorique et notoirement corrompu, petit recul de l’âge de la retraite à 67 ans. Mais pas suffisant pour que la Grèce se rachète dans un avenir proche.
La bonne nouvelle est que les gouvernements peuvent, cependant, couper dans les budgets sans troubles sociaux et sans perdre de ce que les électeurs valorisent réellement.
Mais, comme le Canada l’a démontré, cela ne peut se faire que par une stratégie de réforme et non par une stratégie de coupures.
Les hausses vertigineuses des impôts aux Etats-Unis et en Europe durant la dernière décennie ont financé nombre de nouvelles administrations envahissantes, des médecins et des enseignants plus coûteux, et des paies et des retraites mirobolantes pour un nombre croissant de bureaucrates. Mais les contribuables ne croient pas qu’on leur a vendu là des services de meilleure qualité. Et les entrepreneurs se plaignent que l’augmentation de la réglementation et de la bureaucratie les empêche de générer la croissance économique nécessaire pour sauver les économies vacillantes.
Pourtant, parler de coupes dans les dépenses alarme toujours les électeurs. Même en Grande-Bretagne, avec un des pires problèmes d’endettement au monde et un déficit de presque 15%, ni le gouvernement travailliste de Gordon Brown ni l’opposition conservatrice de David Cameron sont disposés à parler de coupes budgétaires à l’approche de l’élection du mois de mai. Après dix ans de folles dépenses publiques, la dette de la Grande-Bretagne était «shocking» avant même la crise financière. En effet, une extrême prodigalité de la part de la Grande-Bretagne et les États- Unis a entraîné l’expansion qui a inévitablement conduit à la désastreuse récession. La dernière fois que la Grande-Bretagne a été si loin dans le rouge, elle se battait contre Napoléon et Hitler.
Les gouvernements qui ont des problèmes de la dette pourrait gagner un peu de temps à travers le gel de l’ensemble du budget et des salaires, mais ce n’est pas une solution à long terme: il génère juste du ressentiment parmi les travailleurs du secteur public – dont bon nombre sont faiblement rémunérés et seraient touchés de manière disproportionnée – tandis que les ministres se chamaillent au sujet de leur part d’un gâteau qui rétrécit.
Le Canada a vécu cela lors de sa tentative de réduire son déficit à la fin des années 1980: grèves et moral en berne. Des services importants ont été supprimés à côté de services marginaux. La stratégie d’efficacité a eu peu d’impact.
Le nouveau gouvernement libéral en 1993 a fait face à un problème budgétaire énorme mais a réussi à réduire le déficit de 9,1% du PIB à zéro en cinq ans seulement, en travaillant sur comment gérer l’État pour beaucoup moins cher – et sans augmentations d’impôts.
Le premier geste des Canadiens a été de nommer un ministre de réforme du service public – une seule personnalité avec l’autorité pour conduire le changement et s’assurer que tous les ministres assumaient leur part. Ils n’ont rien exclu de la réforme, même pas la santé. Il n’y avait pas d’objectifs de dépenses, car ils savaient que les ministères dépensent simplement jusqu’à ce qu’ils atteignent ces limites. Mais il y avait un examen complet de toutes les activités du gouvernement.
Les ministres ont eu à définir l’utilité de leurs services et les actions qui nécessitent vraiment des fonctionnaires.
Pouvaient-elles être mieux réalisées par des organismes privés ou par le public luimême?
Avec un ministre de réforme plutôt qu’un ministre des Finances en charge, tout le monde a perçu cela comme une refonte complète de la façon dont l’État servait les citoyens – et pas seulement comme un remake de l’Avare.
Il n’y avait pas moyen de se dérober aux décisions difficiles. La pressions a été maintenues grâce aux séminaires du Cabinet: les performances des ministres y étaient évaluées et les nouveaux objectifs fixés. Ils devaient parler d’une seule voix, sans querelles interne.
Un groupe de travail ministériel a transposé des techniques efficaces d’un ministère à l’autre. On reconnaissait que certains services publics demeuraient essentiels, tandis que d’autres pouvaient être complètement repensés, voire éliminés.
Le résultat final fut des coupes légères (ou même des augmentations) dans certains départements, mais d’importantes économies dans d’autres – des coupes massives dans les subventions aux transports et agricoles, par exemple, mais une augmentation des prestations pour les personnes âgées.
En trois ans, le déficit budgétaire du Canada a été absorbé et la dette était en baisse. En moins de cinq ans, la taille de la fonction publique avait rétrécit de 23%, sans grèves et sans troubles sociaux.
Avec tant de gouvernements aujourd’hui si lourdement endettés, la stratégie du Canada semble exactement le bon modèle. Il faut nommer un ministre chargé de procéder à un examen minutieux de ce que fait le gouvernement, ce qu’il doit faire, comment mieux le faire, et ce qu’il pourrait déléguer à d’autres. Il faut repenser l’État et les économies suivront.
EAMONN BUTLER Institut Adam Smith à Londres.mars10
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