Les dangers de l’Etat providence
Il produit de nombreuses incitations perverses et modifie le comportement des membres de la société. Au contraire de la charité privée.
PLUS/MOINS DETAT PROVIDENCE :
(…) Les politiciens paternalistes qui proposent d’élargir l’État providence se considèrent implicitementcomme supérieurs à leurs concitoyens. (…) D’après eux, il serait justifié moralement d’utiliser le pouvoir coercitif de l’État pour prendre aux uns, en règle générale les plus prospères, et donner aux autres. Si un citoyen innocent refuse qu’on lui prenne une partie de son revenu ou de sa fortune à des fins de redistribution sociale, les paternalistes estiment clairement que l’État a le droit d’utiliserla force, allant même jusqu’à l’usage de la violence, dans le but de procurer à quelqu’un d’autre un coupon de nourriture, un logement ou une visite médicale.
Si cette argumentation paraît extrême ou exagérée, le sceptique pourra tester lui-même la réaction de l’État s’il informe l’autorité fiscale, le jour où il doit renvoyer sa déclaration d’impôt, qu’il accepte de payer sa contribution au financementde la police, des tribunaux et de la défense nationale, mais qu’il ne souhaite pas payer pour le subventionnement des systèmes sociaux, car il considère cette action inutile et immorale. Il pourrait se retrouver en prison plus vite qu’il ne le pense s’il résiste aux saisies confiscatoires de ses biens effectuées en cas d’impôts impayés.
Un grand nombre d’économistes, tels le prix Nobel James Buchanan, ont montré que l’action politique, à travers la redistribution ou l’intervention de l’État, est loin de trouver ses sources dans un quelconque «bien public» ou «intérêt général».
Steven Horwitz : Démocratie, déficit et Dettes… (cliquez sur le lien)
(…) Supposons à titre purement illustratif que, dans un pays de trente millions de contribuables, le gouvernement prenne un franc suisse à chaque citoyen puis redistribue les trente millions ainsi obtenus à un groupe de trente mille individus.
Chaque contribuable aura vu sa taxation augmentée d’un franc alors que chacun des trente mille bénéficiaires gagnera mille francs supplémentaires. Les trente mille bénéficiaires ont donc une forte incitation à effectuer du lobbying, à faire pression voire même à corrompre, ne serait-ce que moralement, les politiciens pour qu’ils votent une loi redistributionniste. Ils s’emploient ainsi à obtenir l’argent d’autrui par le processus politique, à la place de s’efforcer de le gagner honnêtement à travers le libre jeu de la concurrence sur les marchés. Chaque contribuable, de son côté, n’a qu’une petite incitation à passer son temps à s’efforcer d’influencer les politiciens pour économiser un franc d’impôt.
Par conséquent, la démocratie moderne a dégénéré et a évolué vers un système de pillage perpétré par les politiciens dans le but d’octroyer des privilèges spéciaux, au détriment des consommateurs, des contribuables, de la société civile et des producteurs compétitifs.
Un autre prix Nobel d’économie, Friedrich Hayek, a montré de façon convaincante qu’il n’existe pas de signification véritable à l’idée de «justice sociale», et ce même si l’on suppose que les politiciens paternalistes ont les meilleurs intentions possibles. La «justice sociale», nous prévient Hayek, est un mirage.
L’adieu à la justice sociale…. (cliquez sur le lien)
Le marché ne récompense pas en premier lieu un hypothétique mérite. Le marché rétribue les services:
un individu a-t-il réussi à offrir aux autres un service dont la valeur a été jugée suffisamment élevée par les autres pour qu’ilssoient prêts à payer un certain prix pour en bénéficier? Il n’existe aucune façon objective de mesurer le «vrai mérite», la « vraie valeur» ou un «vrai besoin»: ces dimensions relèvent de l’appréciation personnelle.
Il n’existe par conséquent pas de moyen impartial qui permette à l’État d’attribuer une part du revenu national à chaque membre de la société qui soit «socialement juste» et méritée. Il est donc préférable de laisser le soin de la charité, lorsqu’il s’agit d’aider des nécessiteux, aux individus ou aux associations qui font don de leur argent selon leurs critères.(…)
L’État providence, au contraire de la charité privée, produit au fil du temps de nombreuses incitations perverses et modifie le comportement des membres de la société.
Ce phénomène est nommé «aléa moral» par les économistes. En effet, si les coûts et les conséquences des actions et des mauvais jugements personnels sont pris en charge par les autres, une personne effectuant de mauvais choix n’a pas d’incitation à apprendre de ses erreurs et à agir plus prudemment dans le futur. L’incitation créée est donc celle de persévérer dans l’erreur et dans les mauvais choix. De plus, on montre aux autres membres de la société qu’ils peuvent eux aussi agir de manière irresponsable tout en profitant de l’assurance que quelqu’un – le contribuable – viendra réparer leurs erreurs.
Récemment, à cause des sauvetages préalables, certaines banques «trop grandes pour faire faillite» ont cru qu’elles pouvaient gérer imprudemment l’argent de leurs clients car elles pensaient – souvent à raison – que l’État viendrait les sauver au cas où leur stratégie «créative» d’investissement venait à ne pas fonctionner. De même, si les individus attendent du gouvernement qu’il s’occupe de leur retraite, subventionne leur assurance maladie, supervise l’éducation de leurs enfants, leur procure un travail, contrôle ce qu’ils mangent, boivent ou fument et qu’il les prenne en charge en cas de mauvaises décisions, comment et pourquoi ces individus sont-ils supposés vouloir assumer leurs responsabilités dans leurs affaires quotidiennes?
Une telle déresponsabilisation est particulièrement néfaste pour la prospérité à long terme d’une société.
En s’élargissant, l’État providence a besoin d’un financement de plus en plus étendu pour payer l’application des règlementations et des redistributions. Dépourvues d’une obligation constitutionnelle imposant un budget public équilibré ou limitant les dépenses publiques, les démocraties modernes se sont enfoncées de plus en plus profondément dans les déficits et dans l’endettement.
(…) Tout endettement public représente une hypothèque sur les revenus futurs des citoyens, puisque la dette et l’intérêt doivent être payés lorsqu’ils arrivent à échéance. Par conséquent, les déficits actuels entraînent une augmentation des impôts ou un emprunt encore plus élevé à l’avenir, pour payer les intérêts sur la dette déjà accumulée. Mais il faut également réaliser que la société paie pour l’endettement public également au moment où il est contracté, et non seulement au moment du remboursement. En effet, chaque franc emprunté aujourd’hui par l’État est nécessairement pris quelque part.
Ce franc n’est par conséquent plus disponible pour le secteur privé qui aurait pu l’investir et l’utiliser. Les ressources de la société sont toujours limitées: ces ressources sont donc utilisées soit par les individus dans le secteur privé, soit par le gouvernement. Elles ne peuvent pas être utilisées en même temps par les deux. Ainsi, chaque franc emprunté par l’État aujourd’hui ne peut pas être utilisé par les entreprises pour, par exemple, accumuler du capital, innover ou améliorerle savoir-faire des travailleurs afin d’augmenter leur productivité.
A la place, ce franc est utilisé par l’État pour une consommation présente: les prestations sociales, les rentes en tous genres, les salaires des fonctionnaires. Par conséquent, plus l’Etat social absorbe de ressources, plus la société s’appauvrità long terme, car les ressources sont utilisées pour une consommation présente, à la place d’être accumulées pour former un capital qui assurera les investissements nécessaires à un niveau de vie plus élevé à l’avenir.
Ces considérations, et d’autres qui n’ont pas été évoquées ici, mettent en évidence les dangers de l’État providence et son immoralité. L’Etat social a toujours été et restera une menace nous menant vers une nouvelle «route de la servitude» au long de laquelle nos vies sont de plus en plus contrôlées, réglementées et manipulées par le pouvoir politique qui réclamele droit de nous dicter notre mode de vie. (…)
RICHARD EBELING Université Northwood et Institut Constant de Rebecque juil10