Les fraudeurs s’attaquent au marché du CO2
Les fraudeurs ont été particulièrement actifs et imaginatifs. Les régulateurs sont par ailleurs dépassés par le nombre considérable des projets ouvrant droit à des certificats et par le volume des transactions.
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Le marché des certificats de CO2 représentait un volume de 132 milliards d’euros en 2009, et pourrait atteindre les 3000 milliards en 2020. Initialement créé pour compenser les émissions de CO2, il tend à devenir un marché d’arbitrage et de spéculation.
Ce constat nous replonge des années en arrière et nous laisse à penser que nous n’avons pas su tirer les leçons du passé. Les fraudeurs ont ici aussi été particulièrement actifs et imaginatifs. Les régulateurs sont par ailleurs dépassés par le nombre considérable des projets ouvrant droit à des certificats et par le volume des transactions.
La première catégorie des fraudes relevées concerne l’évaluation des émissions de CO2 par le secteur privé. Le risque est aujourd’hui limité car les États allouent gratuitement des quotas. Cependant, la tentation de sous-estimer les émissions afin de négocier le surplus de crédit disponible existe toujours.
La deuxième typologie concerne les projets ouvrant droit à des crédits. Qui garantit que 10 000 hectares de forêt ont bien été plantés dans un désert? Comment évaluer l’électricité produite par une éolienne, en sachant que certaines ont un système non écologique de production annexe? Il existe des organismes en charge de certifier ces projets. Cependant, leur fiabilité peut être contestée.
De plus, les fonds reçus pour certains projets sont parfois détournés pour d’autres projets, à des fins de corruption ou d’enrichissement personnel. Ceci est d’autant plus préoccupant que ces investissements sont parfois effectués par des fonds de placement; ils touchent donc à l’épargne, voire même aux retraites.
Concernant les opérations de trading, nous retombons dans le schéma classique du trader fou qui investit dans des produits complexes et crée un risque de perte souvent négligé, cette dernière étant camouflée par le jeu d’écritures comptables. Un risque de manipulation des prix existe également à cet égard.
Une autre menace provient de «cyber attacks», soit par pénétration directe dans les registres officiels («European Emissions Trading System») où sont conservés les montants des crédits par entreprise, soit par l’utilisation de virus ou autres techniques pour soustraire les mots de passe, comme tel a récemment été le cas en Allemagne.
Enfin, et ce n’est pas la moindre, la fraude à la TVA génère un manque à gagner considérable pour les gouvernements européens et a donc un impact indirect sur le contribuable. Si les techniques utilisées ne sont pas nouvelles (carrousel ou «missing trader»), elles sont cependant rendues plus difficilement contrôlables notamment en raison de la rapidité et de la nature immatérielle des transactions effectuées. Il est donc temps que les différents acteurs se coordonnent afin de prévenir tout dérapage et de construire un modèle durable et viable de réduction des gaz à effet de serre.
Par Maxime Chrétien Responsable Forensic Services pour la Suisse romande chez PricewaterhouseCoopers. AOUT10
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