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Ces États qui cultivent des bulles financières et en profitent

Ces États qui cultivent des bulles financières et en profitent

Quelle est la faiblesse des réformes de la régulation de la finance mondiale ? Celles-ci ignorent le rôle des gouvernements, qui encouragent la création de bulles spéculatives.

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Ces mêmes gouvernements, qui régulent le crédit et contrôlent la politique monétaire, profitent généralement de ces bulles spéculatives, malgré les dommages qu’elles causent ! C’est ce qu’écrit le Financial Times dans un article intitulé « How states nurture bubbles and strife » (Comment les États entretiennent les bulles et en profitent).

L’auteur, le commentateur Edward Chancellor, donne des exemples : les bulles spéculatives immobilières chinoises à répétition, les swaps de défaut de crédit ou couvertures de défaillance (credit default swaps, ou CDS) utilisés comme alternative aux réserves de liquidités bancaires, l’implication des gouvernements dans l’accession à la propriété (Fannie Mae et Freddie Mac), qui transforment les États en « preneurs de risque », la politique monétaire à taux zéro ou très bas, qui encourage la dépendance au crédit facile, etc.

Dans le cas des Chinois, les autorités espéraient tripler le portefeuille de prêts des banques d’État. Il en est résulté une hausse rapide et importante des prix de l’immobilier. Et un décollage de l’industrie de la construction. Le prix des terrains a explosé. Comme par hasard, les principaux vendeurs de terrains sont les gouvernements locauxEt ces ventes appuient, du même coup, des prêts de milliards de yuans aux gouvernements locaux pour la construction d’infrastructures.

Les dangers de la finance chinoise

Tchin-tchin la coupe est pleine: Les finances locales chinoises criblées de dettes

Entre-temps, les banques chinoises titrisent les prêts pour les revendre aux investisseurs. Un scénario que connaissent bien les investisseurs occidentaux. Beijing saura-t-elle gérer ce genre de situation qui a engendré la crise financière de 2008-2009 ?

Juge et partie

Il y a un conflit d’intérêts intrinsèque dans le rôle de réguler le crédit et de contrôler la politique monétaire. Ce conflit a été exacerbé aux États-Unis par la récente réforme de la finance, qui a accentué les pouvoirs de Ben Bernanke, le président de la Réserve Fédérale

Le Roi Bernanke

D’un côté, les gouvernements laissent les marchés à leur sort et profitent de la crise. Par la suite, ils adoptent de timides réformes qu’ils présentent comme décisives. Toutefois, la nouvelle réglementation constitue souvent le mauvais remède à un mal difficilement circonscrit.

Plusieurs auteurs défendent une telle théorie, comme Kevin Dowd et Martin Hutchison, dans leur livre « Alchemists of Loss » (Wiley). Ces derniers affirment que la réglementation bancaire internationale se fonde sur des modèles de risques qui ne fonctionnent pas.

http://www.wikiberal.org/wiki/Kevin_Dowd

On en a eu la preuve avec les bulles immobilières américaines et européennes. Les régulateurs n’ont pourtant jamais vu venir cet « événement imprévisible ».

D’autant plus que sous la direction d’Alan Greenspan, la Fed a autorisé les banques à faire massivement appel aux CDS pour alléger leurs réserves de liquidités. Mais ils n’ont jamais vérifié la qualité des réserves des fournisseurs de ces CDS, comme AIG.

Autre réglementation qui a accentué la crise : on a confirmé dans la réglementation les pouvoirs des agences de notation. Ces dernières ont ensuite attribué une note AAA aux produits structurés sous standards (subprime).

Un autre auteur, Ross Levine, de l’Université Brown, affirme que la SEC a manqué à son devoir d’encadrement des titans de Wall Street. Dans son article intitulé « Autopsy of the US Financial System » (Autopsie du système financier américain), il constate qu’en 2004 (toujours sous la gouverne de Greenspan), les restrictions sur l’endettement ont été levées pour les courtiers qui prêtaient à leurs clients.

De plus, Fannie Mae et Freddie Mac étaient encouragés par Washington à étendre la disponibilité du crédit aux ménages américains. Ces vénérables institutions ont donc multiplié les prêts subprimes. Mais le taux d’accession à la propriété, lui, a grimpé en flèche… au grand plaisir des politiciens. D’autant plus que sous la Fed de Greenspan, les taux d’intérêt au plancher ont créé une culture de dépendance au crédit. Cependant, la croissance économique a été manifeste pendant plus d’une décennie.
Qui prend le risque ?

Ce que constatent les chercheurs, c’est que les bulles spéculatives se produisent lorsque les gouvernements s’improvisent souscripteurs. Il en résulterait un « risque moral » (moral hasard) systémique. Un exemple ? Le système d’assurance dépôt : il a rendu les clients des banques indifférents à la solvabilité des institutions financières.

Les autorités ont également facilité l’instauration de géants de la finance, des institutions trop grandes pour faire faillite (too big to fail) en abolissant les frontières entre les piliers de la finance, qui avaient été prévues dans la réglementation qui a suivi la Grande Dépression des années 1930. Les mégabanques ont encore grossi lorsque les autorités ont forcé le mariage de quelques-unes d’entre elles pour éviter une autre déconfiture à la Bear Stearns.

La réforme adoptée sous la présidence d’Obama empêche les banques de spéculer en utilisant leurs propres réserves. La volonté de changement chez le législateur mérite d’être soulignée. Cependant, après chaque crise suivie d’une réforme de la réglementation, les ingénieurs financiers imaginent de nouvelles façons de contourner l’esprit de la loi et les systèmes de sécurité mis en place par les régulateurs.

Crise après crise, les régulateurs construisent de nouvelles, mais futiles, Lignes Maginot, rapidement contournées par le marché. Ce qui n’empêchera pas l’éclosion de crises financières dans le futur. Précédées de lucratives bulles spéculatives pour les gouvernements…

source F&I SEP10

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