Les progrès de l’UE passent inaperçus par Roy Damary
La volonté de l’Union européenne de ne pas dépenser plus que ses moyens s’avérera importante à long terme. En dépit de l’assouplissement quantitatif.
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QE2, acronyme désignant jadis un luxueux transatlantique définit dorénavant le deuxième service d’un assouplissement quantitatif (quantitative easing) qui sent le réchauffé. A l’instar de nombreux autres analystes, nous pensons que la monétisation de la dette aux Etats-Unis tout comme au Royaume-Uni n’est plus qu’une question de jours. Pour faire bonne mesure au Japon, les yens supplémentaires ainsi habilement créés seront destinés à l’intervention sur le marché des changes. Certes Bernanke ne voit pas cette pratique d’un très bon œil et bien qu’il soit rejoint depuis la semaine dernière par quelques aficionados, au sein même de la Fed, cette option reste très largement dans les cartes. Au premier rang de ceux qui la préconisent, on trouve pléthore de politiciens qui savent combien les programmes d’austérité sont choses douloureuses à imposer à une Amérique d’ordinaire prodigue.
Visiblement, les préoccupations des européens ne sont pas très éloignées de celle de leurs cousins d’Outre-Atlantique, car la rigueur budgétaire n’est pas plus populaire là-bas qu’ici. La rentrée risque d’être chaude en France où l’instauration d’un âge de la retraite à 62 ans (pourtant attrayante vue de Suisse) pourrait bien se heurter à une vive opposition. Le Royaume-Uni, où une déclaration de lutte générale par le Congrès des syndicats est au menu des festivités automnales, n’est pas non plus épargné. Ces manifestations montrent que ni les hommes politiques, ni le grand public, n’ont encore pleinement accepté la nécessité de rétablir la confiance dans les marchés financiers, d’où leur détour par la probité financière et monétaire.
En Europe, la bataille s’est déplacée de l’économie à la politique. Bien sûr le dommage à la première par des actions collectives ne pourra pas être évité, mais il semble que les gouvernements européens n’aient pas d’autre alternative que de tenir bon. Le choix est simple: rétablir la confiance ou voir l’euro boire la tasse et l’inflation s’installer.
En partie parce que les titres des journaux ont été focalisés sur Bâle III et le dilemme de la Fed sur l’assouplissement quantitatif, les progrès au sein de l’Union européenne passent largement inaperçus. Qu’est-il arrivé, par exemple, au Fond européen de la stabilité financière qui devait venir à la rescousse d’obligations douteuses, qu’elles soient souveraines ou bancaires? Ses gérants négocient encore avec les agences de notation avant que le fond ne devienne le supra-émetteur que nous attendions. Dans l’intervalle, le pacte de stabilité et de croissance est en révision et le FMI est maintenant présent physiquement en Grèce aux côtés du gouvernement dans l’espoir de l’aider à régler ses problèmes budgétaires.
Notre optimisme sur l’Europe (comparée aux Etats-Unis) reste intact. En dépit de l’assouplissement quantitatif, la volonté de l’UE de ne pas dépenser plus que ses moyens s’avérera important à long terme. S’il est vrai que le Royaume-Uni et les États périphériques avaient trop vite adopté les manies dépensières américaines, ils ont au moins le mérite d’avoir reconnu le problème et sont prêts à l’affronter aujourd’hui.
Bâle III a des implications pour le marché à taux fixe. Il faut favoriser les tiers 1 et 2 «anciens» de la dette bancaire. Ceux-ci ne pourront plus être émis dans l’avenir. Les exigences de Bâle III concernant la part de fonds propres ou équivalent conduiront inévitablement à des fusions, notamment de petites banques par les grandes, en particulier en Allemagne et en Espagne. C’est peut-être là une implication aussi importante que l’amélioration des marges de sécurité et de risque. Bâle II avait pourtant déjà beaucoup planché sur la gestion du risque. On peut alors se demander pourquoi tant de comités n’avaient pas identifié le défaut des subprime, soit une couverture inexistante des fonds propres.
Dans un sens, la performance du franc suisse est vue comme un test de confiance des gouvernements. Un euro en-dessous de CHF 1,30 et un dollar à parité, ne peut guère aider l’industrie suisse! Pourtant, l’intervention de style japonais s’est déjà avérée inefficace et coûteuse. Tout un dilemme pour Berne!
roy damary bridport Investor Services sep10
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