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Business as usual : il y a quelque chose de pourri au royaume des cieux /9% du Dow Jones en une seule minute

Business as usual : il y a quelque chose de pourri au royaume des cieux /9% du Dow Jones en une seule minute

Vendredi dernier, des traders ont réitérés leur coup d’il y a quelques mois: ils ont apparemment placé massivement des ordres d’achat limités à -10% sur les actions du Dow Jones, puis vendu massivement les actions du Dow Jones à découvert, déclenchant à la minute suivante les ordres de ventes stop loss, et donc leurs achats limités à -10%.

PLUS/MOINS DE MANIPULATION EN SUIVANT :

 Ils se sont donc retrouvés avec de grandes quantités d’actions acquises à -10%, qu’ils ont revendues quelques minutes plus tard à -1%! Sur le graphique du Dow Jones, avec une mesure moyenne toutes les 15 minutes, on ne voit qu’une petite chute de -1%! Les investisseurs qui avaient placé des ordres stop loss à -5%, retrouvent donc leurs actions vendues à -10%, mais ils devront les racheter à plein tarif. Les traders en question ont gagné +9% du Dow Jones en une minute. A aucun moment ils n’ont dû payer ces actions, puisque le cash est prélevé le lendemain des transactions, et que leurs achats et ventes se compensent. Je crois qu’il y a vraiment un jour où il faudra mettre fin à ce genre d’agissement.

Jean-Francois Morf Charrat (suisse) courrier agefi oct10

EN COMPLEMENTS : Des bots coupables? 

D’après MarketWach, les traders à haute fréquence seraient à l’origine du krach éclair du 6 mai dernier. La Securities and Exchange Commission et la Commodity Futures Trading Commission pointeraient dans leur rapport deux crises de liquidités provoquées par les Bots lors de ce jour fatidique. 

Un fonds du Kansas à l’origine du mini-krach du 6 mai de Wall Street ?

Mais d’après Reuters, ceux-ci ne seraient pas les seuls coupables. Le krach du 6 mai trouverait son origine dans une vente massive sur les futures sur le S&P500. Le vendeur a été identifié: il s’agit de Waddell&Reed Financial, un gestionnaire de fonds basé au Kansas.

Kansas? Tiens, tiens… C’est aussi le domicile de BATS, et de Tradeworx, une firme de trading algorithmique. Tradeworx a reconnu avoir coupé ses programmes devant la hausse de volatilité des marchés ce jour-là.

Waddell&Reed, le fat finger des marchés, a juste provoqué une avalanche d’ordres de vente derrière lui. Il faut rappeler que ce jour-là, les marchés étaient particulièrement nerveux en raison du flux de nouvelles négatives sur l’économie et la crise de la dette souveraine en Europe. Mais c’est étrange comme la vitesse de cette vente s’est propagée au reste des acteurs.

Les bots agressifs, ceux-ci qui captent les mouvements sur les marchés, ont dû renifler très tôt ce mouvement. Une étude montre que juste avant l’effondrement du Dow Jones, vers 14h40 heure locale, une quantité importante d’ordres avait afflué sur les marchés américains. Le flux a même déclenché des annulations d’ordres sur certaines Bourses.

Les conclusions de ce rapport vont sans doute pousser la SEC à serrer la vis sur le trading à haute fréquence.

Et en Europe, alors que la Commission européenne s’interroge sur l’utilité des bots, il se pourrait bien aussi que le cas américain serve d’exemple.

Jennifer Nille/Fair Trade oct10

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« Chez Goldman Sachs, il y a une absence de morale terrifiante »

Dans « La Banque, Comment Goldman Sachs dirige le monde », Marc Roche, correspondant du Monde à la City de Londres depuis vingt ans, dévoile les méthodes, souvent immorales, de la banque d’affaires américaine la plus puissante de Wall Street. Le journaliste y explique comment Goldman Sachs est passé en trois décennies du statut de banque d’affaires traditionnelle réputée pour sa prudence à ce qui ressemble à un vaste casino.

Dans « La Banque », Marc Roche démonte aussi les rouages de la banque américaine, gangrenée par les conflits d’intérêt.

 Goldman Sachs et l’avènement du facteur de risque médiatique

Interview Carine Mathieu/ ECHO10

Trois semaines après sa publication, 25.000 exemplaires de votre livre ont déjà été vendus. Vous vous attendiez à un tel succès?

Sans y croire, je suis parvenu à attirer un tout nouveau public, qui n’entend rien à la technique financière mais qui a une soif de comprendre la crise et le fonctionnement des banques depuis que ce sont les contribuables qui ont dû sauver les banques.

Goldman Sachs cultive un goût obsessionnel pour le secret et cadenasse sa communication. Avez-vous eu des contacts avec la banque?

Quand je les ai contactés pour le livre, ils étaient prêts à collaborer. J’ai envoyé une centaine de questions. Goldman Sachs a alors refusé de collaborer. Peu avant la publication, j’ai rencontré un associé de Goldman Sachs à Londres qui a permis de corriger le factuel. Mais ce livre est non autorisé par Goldman Sachs, contrairement aux deux ouvrages publiés sur la banque jusqu’à présent.

Sur base de quels témoignages avez-vous alors écrit votre ouvrage?

J’ai écrit précédemment une biographie de la reine d’Angleterre, Elizabeth II, et le problème est le même que pour Goldman Sachs: les gens qui parlent ne savent pas et les gens qui savent ne parlent pas. Je me suis donc tourné vers les concurrents de Goldman Sachs, les banques qui travaillent sur des deals avec la banque, les anciens collaborateurs, les employés actuels mécontents et les employés actuels satisfaits, mais ces derniers fournissent peu d’informations.

La bulle technologique, la création des produits subprimes, l’effondrement de Bear Stearns, la faillite de Lehman Brothers, le trucage des comptes grecs, la chute de l’euro et même la marée noire de BP…. Goldman Sachs est lié à tous ces événements?

Directement et indirectement. Goldman Sachs est devenu un supermarché de la finance, offrant tous les produits de la banque: le conseil aux entreprises, le trading, la gestion de patrimoine, les hedge funds, le capital-investissement…

Il y a inévitablement des conflits d’intérêt. Goldman Sachs est derrière tous les événements que vous avez cités à cause de son omniprésence dans tous les métiers, son savoir-faire unique, son réseau d’influence et surtout parce que la morale passe toujours en second plan, derrière la recherche de profits.

Chez Goldman Sachs, il y a une absence de morale véritablement terrifiante.

La banque utilise les informations glanées dans le cadre du conseil pour spéculer contre ses clients, comme dans le cas de la Grèce: Goldman Sachs se faisait rémunérer comme banquier conseil du gouvernement grec et spéculait de l’autre côté sur la dette du pays.

Est-ce légal?

Goldman Sachs n’est pas stupide. Un délit d’initié est très préjudiciable à l’enseigne. Leurs contrôleurs de risque sont meilleurs que dans les autres banques. Mais contrairement aux autres entreprises où il y a rétention des informations, il y a un échange d’informations chez Goldman Sachs. L’esprit d’équipe est essentiel et il n’y a pas de place pour l’individu.

On entre chez Goldman Sachs comme on entre en religion.

Aucune vie personnelle n’est possible. Un employé de la banque a été escroqué de 4 millions d’euros par sa secrétaire et ne s’en est pas rendu compte!

Les banquiers sont entourés d’une kyrielle d’assistants qui s’occupent du nettoyage à sec, de l’école, des enfants…

Ces gens vivent sous une cloche dorée, dans des limousines, des hôtels 5 étoiles, et ne sont pas du tout en prise avec la vie quotidienne.

Les anciens de Goldman occupent des fonctions de haut niveau et constituent un véritable réseau d’influence.

Vous passez un accord faustien avec Goldman: vous sacrifiez tout et si vous survivez, vous quittez la banque millionnaire à quarante ans. Seul un petit nombre d’associés passe dans l’état-major. Et à partir de là, toutes les portes s’ouvrent. De nombreux anciens de Goldman créent des hedge funds, certains vont dans la fonction publique, ce qui crée des conflits d’intérêt comme on avec Henry Paulson. En Europe, Goldman recrute les anciens banquiers centraux et les anciens commissaires européens. Quand Otmar Issing s’oppose au sauvetage de la Grèce, il ne dit pas qu’il travaille pour Goldman!

Détestée par l’opinion, accablée de tous les maux, Goldman Sachs est la banque à abattre. Vous nuancez ces attaques.

Le grand danger du livre était de tomber dans l’altermondialisme: tous les banquiers sont pourris et cupides, on n’a pas besoin des banques… On ne peut pas envisager un monde sans Goldman Sachs, Morgan Stanley,… Les entreprises doivent se financer, fusionner, acheter, les gouvernements doivent se financer. La grande question est de savoir si le trading est nécessaire. La manière d’assainir les dérives à la Goldman passe par la régulation et par le fait que les actionnaires de Goldman Sachs, comme les fonds de pension, doivent faire leur travail. Dans mon livre, j’ai voulu faire la part des choses.

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