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Glaçante bulle démographique

Glaçante bulle démographique

Il devient de plus en plus difficile d’amortir l’impact du vieillissement sur les finances publiques.

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La bulle démographique a cela de d’effrayant qu’elle ne doit rien ou presque à la spéculation. Ni les marchés, ni les banques centrales n’arrêteront le vieillissement de la population. La part des plus de 65 ans dans le monde aura plus que doublé en 2050, passant de 7,6% actuellement à 16,2%, selon une étude de Standard&Poor’s publiée hier.

L’agence de notation financière s’est livrée à une nouvelle simulation au constat très alarmant.  «Amortir l’impact de l’évolution démographique et garantir la pérennité des finances publiques sur le très long terme semblent particulièrement difficile», estiment Marko Mrsnik et Moritz Kraemer, respectivement directeur délégué et responsable pour l’Europe de la notation des Etats chez S&P.

Dans l’hypothèse d’un maintien des tendances démographiques et d’une structure inchangée des dépenses liées au vieillissement, une croissance insoutenable des déficits et de l’endettement publics apparaîtrait dès 2015. Cette projection sur 50 pays n’a certes pas valeur de prévision, tant il est peu probable qu’un Etat laisse déraper sa dette et ses déficits publics sur une telle période. Il n’en demeure pas moins que les hypothèses et scénarios employés fournissent une image déprimante.

En 2050, la dette publique dépasserait 400% du PIB en Allemagne et en France. 100% en Suisse (intégrée pour la première fois dans l’étude). L’Espagne verrait elle son endettement bondir à 550% du PIB.

Si rien ne change en effet, S&P estime que la dette médiane parmi les 50 pays passés en revue pourrait représenter 245% du PIB en 2050, contre 36% cette année. La France, pour laquelle l’étude ne tient pas compte d’une réforme des retraites non encore finalisée, afficherait un ratio de 404%, médian au sein du G7, contre 82% en 2010. Si la croissance économique seule restera bien impuissante, elle devrait favoriser un comportement moins médiocre des pays émergents (avec un ratio médian de 126% contre 329% pour les économies aujourd’hui, développées), le ratio de l’Inde perdant même 13 points sur la période à 63%. Au Japon, il serait multiplié par 7 à 753%.

Le déficit médian des pays grimperait de 4,5% à plus de 6% d’ici le milieu des années 2020 si aucun changement de politique n’intervenait. Le poids du secteur public dans l’économie augmenterait lui aussi de façon sensible, les dépenses publiques s’élevant à 60% du PIB, contre 44% actuellement.

S&P étudie depuis 2002 l’impact des changements démographiques sur les notes souveraines par le biais de simulations. En 2006, les projections faisaient état d’une détérioration générale de la solvabilité de 32 pays de l’Union européenne et de l’OCDE passés au crible de l’agence de notation. Cette année, le panel de S&P s’est élargi à plusieurs économies émergentes, dont les pays BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine).

Depuis la dernière étude publiée en septembre 2007, la crise financière a interrompu les efforts entrepris par les gouvernements pour réduire les dépenses liées au vieillissement, constate S&P.

La bulle démographique représente un danger de premier ordre pour les notes souveraines. Actuellement, le niveau élevé des déficits publics compliquent les mesures à prendre rapidement pour assainir la situation budgétaire.

Dans ses précédents rapports, S&P avait considéré que la décennie actuelle offrait une fenêtre d’opportunité pour résoudre les défis posés par le vieillissement sur la durabilité des finances publiques. Mais cette fenêtre pourrait se refermer dès 2020 déjà, avec l’accélération attendue des postes de dépenses publiques sensible à l’évolution démographique (santé, retraites, dépendances des personnes âgées, etc.). «De notre point de vue, la marge de manœuvre s’est réduite et des retards dans l’implémentation de politiques publiques risquent de générer des coûts supplémentaires aux niveaux politique, économique et budgétaire.»

Dans son scénario hypothétique, les perspectives budgétaires sont globalement incompatibles avec les notations actuelles de la dette des pays concernés, situées en catégorie dite «d’investissement», préviennent les responsables de S&P. Le déclassement progressif des notations (déjà amorcée depuis 2004) connaîtrait alors une accélération à l’horizon 2020.

frédéric mamaïs/ agefi oct10

EN COMPLEMENT : L’agence de notation S&P dévoile des projections alarmistes pour les finances des États. Dès 2030, tous les États perdraient leur rating AAA

Le déficit belge à 25,3% du Produit intérieur brut en 2050? Ce chiffre fait froid dans le dos. Il est évidemment purement hypothétique. Il provient d’une simulation réalisée par Standard & Poor’s dans une étude sur le vieillissement de la population. En tablant sur un PIB d’environ 400 milliards d’ici 40 ans, cela ferait donc 100 milliards de déficit! Inimaginable, évidemment. 

L’institut a évalué la manière dont se dégraderaient les finances publiques de 50 pays dans le monde sous la pression du vieillissement de la population. La projection est faite à politique inchangée, avec des taux et une démographie stable. Peu de risques, donc, qu’on en arrive là.  « Cette étude démontre néanmoins à quel point le vieillissement aura un impact déterminant sur les finances publiques, sur la croissance économique, et donc sur les politiques à mener dans le long terme, explique S&P. Si rien ne bouge, au niveau politique surtout, le poids du vieillissement deviendra insoutenable », ajoute en substance l’institut.

Globalement, pour les 50 pays, le déficit connaîtrait une relative stabilité pendant 10 ans avant de grimper à 17,3% du PIB en 2050, contre 5,3% actuellement. Aux Etats-Unis, ce déficit représenterait à terme (2050) 30% du PIB, contre 10,4% actuellement. En Europe, on atteindrait 23,3% du PIB, contre 5,5% aujourd’hui. 

 L’institut a aussi évalué comment évoluerait la dette des pays.  Là aussi, les chiffres ont de quoi donner des sueurs froides aux dirigeants. La dette belge à 353% du PIB en 2050. En moyenne, pour les 50 pays étudiés, la dette grimperait à 245% du PIB, contre un peu moins de 40% actuellement.  Aux États-Unis, elle exploserait à 415,1% du PIB, en Europe, 315%. 

 Cela fait longtemps maintenant que l’on tire la sonnette d’alarme face à l’évolution démographique. En Belgique  , le Comité d’étude sur le vieillissement (CEV) a actualisé, l’été dernier, ses données. Le CEV a ainsi calculé que le coût budgétaire du vieillissement passera de 25,5% du PIB actuellement à 31,8% en 2060. Soit une hausse de 6,3% entre 2009 et 2060. 

Dégradation des notes

 Pour Standard & Poor’s, si aucune mesure n’est prise, ces chiffres auront aussi un impact redoutable sur la notation des dettes souveraines des pays. C’est bien simple, à politique inchangée, dès 2030, plus aucun pays ne bénéficiera de la meilleure notation AAA.  »Dès le milieu des années 2030, précise S & P, les caractéristiques budgétaires de la majorité des États seraient comparables à celle de pays dont la dette est de nature ‘spéculative’ ». 

Si, par contre, les gouvernements mettaient tout en œuvre pour contrer le processus en cours, la dégradation des notes souveraines n’aurait pas lieu.  

Standard & Poor’s reste néanmoins optimiste.  »Les gouvernements semblent avoir pris la masure du défi », constate l’institution. Mais les changements ne se mettront pas en place aisément. Notamment car les seniors risquent de s’opposer à des réformes défavorables pour eux. Or, ils seront de plus en plus nombreux… 

source echo oct10

EN COMPLEMENTS INDISPENSABLES : De l’utilité des stress tests démographiques par Henri Schwamm

Démographie et croissance économique par Bernard Marois

1 réponse »

  1. Vendredi 8 octobre 2010 :

    En septembre 2010, le chiffre officiel du chômage aux Etats-Unis est de 9,6 %.
    Le chiffre officiel se trouve dans la rubrique « U-3 » (lien ci-dessous).

    Mais quel est le chiffre réel du chômage aux Etats-Unis ?
    Le chiffre réel se trouve dans la rubrique « U-6 ».
    Le chiffre réel comptabilise les temps partiels contraints et les chômeurs découragés de rechercher un emploi.

    Les données corrigées des variations saisonnières (= Seasonally adjusted) montrent que le taux de chômage réel est de 17,1 %.

    Il ne faut donc pas confondre deux choses :

    1- Le chiffre officiel : 9,6 % de chômage.

    2- Le chiffre réel : 17,1 % de chômage.

    http://www.bls.gov/news.release/empsit.t15.htm

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