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Douce France /Réforme des retraites : l’épargne retraite évolue aussi

Douce France /Réforme des retraites : l’épargne retraite évolue aussi 

La réforme des retraites par répartition est l’objet de toutes les attentions. Mais l’Assemblée nationale a aussi réformé les produits d’épargne retraite. Retour sur ces évolutions.

PLUS/MOINS DE CAPITALISATION EN SUIVANT :

 Examiné par le Sénat depuis le 5 octobre, le projet de loi sur la réforme des retraites, voté par l’Assemblée Nationale en première lecture, comporte des évolutions importantes qui intéressent les produits d’épargne retraite : Perco (plan épargne retraite collective), Perp (plan épargne retraite populaire), Pere (plan épargne retraite entreprise), contrats article 83 (assurance groupe qui s’impose à certaines catégories définies ou à la totalité du personnel en entreprises), etc. 

A côté de la retraite par répartition, le législateur est bien conscient qu’il faut améliorer les dispositifs d’épargne retraite volontaire. Ceux-ci seront d’autant mis à contribution que le régime par répartition s’essouffle par manque de cotisants alors que, dans le même temps, l’espérance de vie et le risque de dépendance augmentent. 

Ainsi, sans trop de bruit, peut-être de crainte d’être vue comme encourageant les assureurs privés au détriment de la retraite « publique », l’Assemblée nationale a pris des mesures dans deux directions principales :améliorer les possibilités de gestion des produits ; élargir les sources d’alimentation des produits d’épargne retraite. 

Alimenter les produits d’épargne retraite 

Le Perco est le premier, mais non le seul, bénéficiaire des mesures facilitant l’alimentation des plans d’épargne retraite. Il faut rappeler que le Perco, mis en place dans les entreprises qui en prennent l’initiative, peut être alimenté par la participation, l’intéressement, les sommes issues d’autres plans d’épargne salariale (PEE), les versements volontaires du salarié et l’abondement de son employeur.

Première nouveauté introduite par l’Assemblée dans le projet de loi, le Perco pourrait désormais être alimenté par une affectation par défaut de la participation à hauteur de 50%.

Autre changement, le transfert des jours de congés accumulés sur un CET (compte épargne temps) vers le Perco, ou vers un Pere, serait facilité. Le maximum de jours ainsi transférables vers les produits d’épargne retraite serait en effet relevé de 10 par an à 20 par an. Amélioration supplémentaire, en l’absence de CET, les jours de congés non pris pourraient être affectés au Perco (avec un maximum de 5 jours par an).

A relever également : les représentants salariés et patronaux au niveau des branches auraient l’obligation d’engager des pourparlers sur l’adoption des Perco, cela afin de favoriser leur introduction dans les PME.

A noter enfin que les contrats article 83, mis en place volontairement dans certaines entreprises, pourraient désormais faire l’objet de versements individuels. 

Mieux gérer les produits d’épargne retraite 

S’agissant du Perco, l’Assemblé a également prévu de mieux encadrer la gestion des supports financiers. Il faut dire que les encours du Perco sont investis en moyenne à près de 40% en actions, ce qui en fait un produit risqué. Aussi, les députés ont-ils voté la mise en place d’une convention de gestion pour chaque Perco, qui devra préciser les modalités de réduction des risques de fluctuation de l’épargne à l’approche de la retraite.

Mais l’évolution la plus spectaculaire concerne les Perp. Ces produits, ouverts à tous les Français, salariés ou non, et permettant de bénéficier d’un avantage fiscal (déduction du revenu taxable) lors de l’alimentation du plan, souffrent d’un handicap : ils ne peuvent être dénoués que sous la forme d’une rente viagère. Et les épargnants français n’aiment pas ces produits, leur préférant ceux permettant des sorties en capital (assurance vie notamment). Les députés ont donc voté l’instauration d’une sortie en capital à hauteur de 20% pour les Perp, espérant ainsi améliorer leur attractivité.

 source tpv oct10

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  COMMENTAIRE DU WOLF : des progrès vers une épargne retraite plus efficace 

Toutes ces mesures vont dans le bon sens, celui d’une amélioration de l’efficacité des produits d’épargne retraite dont l’utilité est indiscutable. Mais beaucoup peut encore être fait pour faciliter l’accès à ces produits et en simplifier le fonctionnement. Les débats qui continuent devant le Sénat pourraient donc révéler quelques bonnes surprises supplémentaires pour les épargnants.

 EN COMPLEMENT INDISPENSABLE : La préparation au défi du vieillissement est mesurable

Un nouvel indice est né: celui du degré de préparation au vieillissement global (GAP-The Global Aging Preparedness Index). Ses concepteurs sont Richard Jackson, Neil Howe et Keisuko Nakashima, du Center for Strategic and International Studies (CSIS), basé à Washington. Ils viennent de le présenter comme un moyen d’évaluer quantitativement les efforts consentis par 20 pays développés et en développement à travers le monde pour se préparer, d’ici à 2040, au vieillissement des populations. Le GAP doit beaucoup aux travaux de l’Association de Genève pour l’étude de l’économie de l’assurance et à ses programmes de recherche sur la sécurité sociale, l’assurance et la retraite (The Four Pillars) et Health and Productive Aging.

The Global Aging Preparedness Index
GAP Index
Country Rankings
Fiscal Sustainability
Index
Income Adequacy
Index
Note: Countries are ranked from best to worst.
1 India 1 Netherlands
2 Mexico 2 Brazil
3 Chile 3 US
4 China 4 Germany
5 Russia 5 UK
6 Poland 6 Australia
7 Australia 7 Sweden
8 Japan 8 Chile
9 Canada 9 Spain
10 Sweden 10 India
11 US 11 Canada
12 Korea 12 Japan
13 Switzerland 13 Poland
14 Germany 14 Switzerland
15 UK 15 Russia
16 Italy 16 France
17 France 17 Italy
18 Brazil 18 China
19 Netherlands 19 Korea
20 Spain 20 Mexico

 Le GAP se décompose en deux sous-indices: l’indice budgétaire (capacité publique à financer le vieillissement) et l’indice de revenu (moyens financiers des seniors comparés à ceux des jeunes). Très peu de pays font un bon score dans les deux cas. Trois des sept pays les plus capables budgétairement parlant (Mexique, Chine et Russie) font partie des sept pays les moins bien notés en ce qui concerne le revenu adéquat. Quatre des sept pays bénéficiant du meilleur indice de revenu (Pays-Bas, Brésil, Allemagne et Royaume-Uni) se classent parmi les sept pays les moins bien évalués en termes budgétaires.

Deux pays – la France et l’Italie – se trouvent en bas de l’échelle pour les deux sous-indices. Ils ont tous deux décidé de procéder à d’importantes coupures dans leurs systèmes de retraite publics. Coupures qui menacent de réduire progressivement le niveau de vie des seniors. Et malgré ces amputations, les systèmes de retraite restent tellement chers dans ces deux pays qu’ils feront peser une charge importante et croissante sur les épaules des jeunes.

Il y a heureusement des exceptions à cette tendance lourde. L’Australie en est l’illustration. Ce pays combine système public de protection des personnes âgées pauvres et régime de retraite privé entièrement autofinancé (par cotisation). Et se classe dans la première moitié du tableau pour les deux sous-indices. Le Chili, qui pratique un dosage similaire de politiques de retraite, réalise un score comparable. La Suisse se situe au-dessous de la moyenne pour les deux paramètres mais à peu près au même niveau puisqu’elle est treizième pour l’indice budgétaire et quatorzième pour l’indice de revenu.

Plusieurs autres pays s’orientent clairement dans la bonne direction. Comme la France et l’Italie, l’Allemagne et la Suède ont programmé des réductions de dépenses au titre des systèmes publics de retraite. Mais à la différence de la France et de l’Italie, l’Allemagne et la Suède ont décidé de compenser le découvert qui en résulte pour le niveau de vie des seniors en renforçant les plans d’épargne-retraite et en allongeant le temps de travail. Bien que leurs charges budgétaires restent élevées, les autorités allemandes et suédoises ont veillé à les réduire sans trop compromettre le niveau de vie des personnes âgées.

La plupart des économies développées du monde devront restreindre leurs prestations en matière de retraite. Des pays en développement comme le Brésil ou la Corée seront obligés d’en faire autant. Mais les réformes devront aussi veiller à assurer un niveau de vie adéquat aux personnes âgées, faute de quoi elles ne seront pas politiquement acceptables. Epargner d’avantage et travailler plus longtemps sont les meilleurs moyens – en fait les seuls – permettant de consolider le niveau de vie des anciens sans imposer un nouvel impôt ou des charges familiales accrues aux jeunes.

Est-ce vraiment le moment de s’attaquer à ce formidable défi de long terme que représente le vieillissement global ? Après tout, la crise économique n’est pas terminée et beaucoup de gens en subissent encore les conséquences. Les trois chercheurs du CSIS sont convaincus que la crise confère au contraire un caractère d’urgence à une action appropriée dans ce domaine. La crise a drastiquement amputé les ressources budgétaires de la plupart des Etats et les force à ajuster les allocations vieillesse. Une grande partie des personnes du troisième âge sont devenues plus vulnérables sous l’effet de la crise. S’attaquer à bras-le-corps dès maintenant aux réformes de toute façon inéluctables à terme ne peut qu’inspirer confiance aux principaux intéressés.

Henri SCHWAMM  Université de Genève oct10

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