Art de la guerre monétaire et économique

L’Edito / Le Pacte avec le Diable : la défense de l’usure par Bruno Bertez

L’Edito / Le Pacte avec le Diable : la défense de l’usure par Bruno Bertez

L’actualité est d’une telle richesse que le chroniqueur a du mal non seulement à y voir clair, mais en conséquence, à choisir son thème. 

Pêle-mêle, nous avons le rapport sur la GFC, la Great Financial Crisis ; le Forum de Davos ; le soulèvement égyptien ; la déstabilisation de nombreux pays pauvres ; le discours de l’Etat de l’Union d’Obama ; les réunions européennes destinées à renforcer l’euro et à éviter le retour des crises sur le marché de la dette des pays fragiles ; la hausse historique des cours des produits agricoles ; le chômage dangereusement élevé… 

Cela fait beaucoup et il est évident qu’un article journalistique, même excessivement long, ne peut suffire à balayer, à ratisser un champ aussi large. 

Dans ces conditions, face à cette difficulté, nous choisissons, non pas de ratisser large, mais de creuser profond.

PLUS DE BERTEZ EN SUIVANT :

 Nous vous livrons de suite, sans plus attendre, le résultat de notre recherche : ce qui est enfoui, ce qui est dissimulé en dessous de cette apparente diversité de l’actualité, c’est une seule réalité, une seule vérité : nous sommes en plein dans les conséquences, voulues et non voulues, des politiques qui ont été mises en place pour faire face à la grande crise financière de 2008. 

Le prétexte de nos écrits étant les marchés financiers, nous commencerons par eux, si vous le voulez bien. 

Les actions des pays industrialisés sont orientées à la hausse, sous la conduite des valeurs américaines. Les émergents sont à la traîne, victimes des tensions inflationnistes et des politiques qui sont mises en place pour les contrer. Alternativement, les actions montent, soit sur le thème de la reprise économique, soit sur celui du Safety Trade. Le résultat est une tendance positive qui ne se dément pas malgré le net besoin technique de pause et de consolidation

source bespoke 

Les taux d’intérêt longs sont orientés à la hausse. Les portefeuilles obligataires continuent de perdre. Du côté des marchés directeurs, ceux du 10 ans et du 30 ans américains, les taux sont sur des seuils critiques. Il faudrait peu de choses pour qu’ils basculent et qu’une hausse plus nette ne se précise. C’est le cas en particulier du niveau des 3,5% sur le 10 ans. 

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L’or est en baisse. C’est normal puisque les anticipations de taux sont à la hausse et que les autorités donnent l’illusion d’avoir repris le contrôle de la situation. L’or ne bénéficie pas du Safety Trade. 

chart of the day, gold vs egyptian cds, feb 2011

En revanche, les matières premières, surtout agricoles, continuent de flamber. Nous vous rappelons quelques performances, si l’on peut appeler cela des performances, sur un an : coton +150%, café +85%, maïs +85%, blé +75%, soja +55%, bétail +30%. 

chart of the day, food prices, feb 2011

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algeria morocco egypt tunisia libya jordan syria

Le pétrole brut n’a gagné que 20% environ ;  mais nous dirons que l’enjeu de la période actuelle, c’est le prix du brut. Pour reprendre une expression en vogue du temps où l’on parlait de Saddam Hussein et de l’Irak, c’est l’équation pétrole contre nourriture. Si l’on passe les 100$ sur le WTI, c’est une nouvelle mécanique spéculative qui s’enclenche. L’Arabie Saoudite a fait ce qu’il fallait en menaçant d’augmenter sa production pour calmer les marchés. Mais si ce couvercle saoudien saute, les prix peuvent galoper. Une poursuite de la hausse du brut serait, à notre avis, un élément susceptible de changer la donne de l’économie globale et de sa régulation.

Nous sommes depuis début décembre 2010 « überbullish » sur les actions américaines, c’est à dire sur le S&P500. 

Pour trois raisons au moins :

1) la liquidité est surabondante grâce au QE et aux POMO ;

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2) l’économie connaît une belle embellie et elle va durer plusieurs mois ;
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 3) la psychologie a été renversée, les animal spirits se sont réveillés. L’échec du QE2 sur les taux est le symétrique positif de son succès sur la psychologie. Les liquidités, au lieu de fuir le système américain et de se déverser sur le reste du monde, restent car la situation relative meilleure des Etats-Unis s’est réaffirmée. La fragilité fondamentale du reste du monde est en train de réapparaître tant au plan économique qu’au plan structurel et au plan social. 

Les Etats-Unis sont au Centre. Ils sont le Centre. La solidité de leur économie, de leur système financier, est peut-être écornée, mais leur solidité institutionnelle et organisationnelle est intacte. Le capital qui est enfoui dans les institutions américaines est considérable alors que les bases, les fondations des compétiteurs stratégiques du reste du monde sont fragiles, vulnérables, trop récentes. Tout se passe comme si l’on comparait un immeuble traditionnel construit de briques et de mortier avec une construction préfabriquée. Ce que nous disons est vrai pour l’ensemble du reste du monde, y compris pour l’Europe. L’Europe a beau être composée de vieux pays, en tant que système, elle est récente, fragile, bâclée. Nous y reviendrons plus bas. 

Encore quelques mots sur l’embellie américaine. Elle va durer au moins un an, peut-être plus. La croissance va monter jusqu’à 4% ; l’emploi privé va s’améliorer même si c’est modestement. On va croire qu’une croissance organique est devenue possible. Les taux d’intérêt vont monter. La préférence pour la liquidité va faiblir, les masses monétaires vont accélérer. Les prix aussi. Est-ce que cela se verra dans les indices officiels ? Ce n’est pas sûr, mais cela se ressentira dans les budgets des ménages. 

La reprise est fondée sur la consommation, elle est alimentée par la rechute du taux d’épargne. Cette reprise va s’étouffer faute de carburant, c’est à dire faute de pouvoir d’achat. Nous faisons le pari que les dépenses d’équipements, c’est à dire l’investissement des entreprises ne prendra pas le relais. Ceci explique que l’emploi ne repartira pas puisque, comme chacun sait, l’emploi est corrélé à l’investissement des firmes privées et non pas à la consommation. 

Figure 4
Actual and fitted saving rates

Actual and fitted saving ratesFigure 1
Household net worth and personal saving rate

Household net worth and personal saving rate

Figure 2
Household debt and personal saving rate

Household debt and personal saving rate  source FRBSF

Figure 3
Household debt and credit availability

Household debt and credit availability 

Venons en donc à l’Europe. Grâce au « extend and pretend » généralisé, l’Europe a passé le cap du début d’année. Les interventions visibles et occultes sur les marchés ont crucifié la spéculation. L’euro a remonté, les spreads se sont détendus, les CDS se sont dégonflés. 

Chart

Image: CMA Datavision

Les marchés sont tenus en laisse par une forte pression médiatique des autorités et le calendrier des réunions. A notre avis, jusqu’à fin mars, les marchés sont neutralisés. 

Pendant ce temps,  l’Allemagne œuvre afin que les pertes qui sont enfouies dans les bilans des banques ne soient pas extériorisées, afin que les ratios continuent d’être truqués, afin que les capitaux propres restent ce qu’ils sont, c’est à dire fictifs. 

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Les propositions sur la compétitivité sont de la cosmétique politique. Elles sont irréalisables dans le volet social, comme l’âge de la retraite et les protections sociales ; elles sont ridicules au plan économique. La compétitivité est une affaire de long terme, générationnelle. Elle passe par un effort d’investissement soutenu. Qui va aller investir dans des pays périphériques, en difficultés, alors qu’aucune des conditions propices à l’investissement n’est remplie. Dans ces pays, l’incertitude, l’instabilité, l’insuffisance des taux de profit sont des obstacles à un investissement soutenu, susceptible de renverser les tendances longues de l’économie.  Par ailleurs, le modèle allemand n’est absolument pas extrapolable ; tout le monde ne peut copier la spécialisation industrielle de ce pays. 

Le thème de la compétitivité n’est qu’une façon de gagner du temps pour neutraliser les  marchés. Il montre à l’évidence que, du côté allemand, on n’a toujours pas compris les origines de la crise et que l’on continue de faire l’autruche sur le problème fondamental, à savoir l’insolvabilité conjointe des souverains et des banques. 

L’EXPOSITION DES BANQUES EUROPENNES ET PAR PAYS AUX PAYS A RISQUE (CLIQUEZ SUR LE LIEN POUR CETTE EXCELLENTE INFOGRAPHIE) 

Pendant ce temps, le « run » silencieux sur les banques des périphériques continue. C’est lui qu’il faut surveiller, plus que les marchés (muselés). Les capitaux et les dépôts, en particulier étrangers, votent avec leurs pieds, ils quittent les banques des PIIGS. On en est déjà aux subterfuges et à la création monétaire officieuse pour le dissimuler.

 Les responsables européens réunis à Davos ont émis un message à peu près unanime : cela va bien, mais il y a des risques. La ministre français, Christine Lagarde, a rabroué Dominique Strauss-Kahn lorsque, à Singapour, il s’est permis de tirer la sonnette d’alarme et d’insister sur la gravité des dangers

Nous voudrions insister et corriger le discours politiquement correct : il est abusif et trompeur de dire qu’il y a des risques. Il n’y a pas des risques, il y a des coûts réels, certains, incontournables, associés aux politiques actuelles

Le premier, c’est l’inflation. Il n’existe pas d’exemple dans l’histoire que la création de liquidités, la surabondance monétaire, les taux d’intérêt négatifs, les déficits fiscaux colossaux ne se traduisent pas par une hausse des prix. Celle-ci peut-être masquée, différée, mais elle réapparaît comme une vengeance sitôt que l’activité économique accélère. 

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Le second, c’est le chômage. La volonté de faire payer la reconstruction du système bancaire au sens large par les classes moyennes et les salariés est doublement déflationniste : en terme de pouvoir d’achat et d’emploi. Les ressources prélevées sont détournées de la consommation et de l’épargne, de la vraie épargne. La destruction et les ponctions en cours sur l’épargne obèrent le potentiel d’investissement et elles vont peser longtemps sur le potentiel économique lui-même. 

 
  
Le thème européen lancé par Merkel, de la compétitivité, n’est rien d’autre qu’un autre habillage de l’austérité. L’obsession allemande reste inchangée : les autres vivent au-dessus de leurs moyens. 

Le troisième, c’est l’instabilité généralisée. Quand toutes les données sont faussées, dissimulées, travesties, les comportements économiques et sociaux rationnels sont découragés. Quand l’opacité  s’installe, l’incertitude augmente. L’esprit de jeu et de spéculation prend le dessus. Les activités réellement productives sont découragées. L’absence de transparence et de visibilité est aggravée par le perpétuel  changement des règles du jeu fiscales et monétaires. Ceci suscite et entretient les désordres, sape la légitimité des élites et favorise l’agitation sociale. 

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L’un des coûts les plus élevés associé à la mauvaise gestion de la crise est aussi l’un des plus cachés : c’est la destruction en profondeur du consensus sur lequel reposent nos sociétés

 

En octobre 2010, lorsque les contours du second round de QE américain se sont précisés, Thomas Hoenig, Président de la Federal Reserve Bank de Kansas City a déclaré : « you are making a bargain, I am afraid, with the devil ». Dans son Investment Outlook du tout début février, Bill Gross, patron de Pimco, le plus gros investisseur obligataire du monde, choisit pour titre : « Devil’s Bargain ». 

Pacte avec le Diable. On ne peut mieux caractériser les politiques actuelles. Le Pacte avec le Diable consiste à refuser de faire payer ceux qui ont failli et à faire supporter la charge de leurs erreurs à ceux qui, tout en n’étant pas responsables, sont les plus faibles. Ce pacte consiste pour sauver un ordre établi qui a évolué dans un sens pervers à créer un désordre, une déstabilisation planétaire. Ce qui se passe en Egypte, Tunisie, Indonésie, Syrie, Inde, bientôt au Pakistan, n’est qu’un avant-goût des conséquences du choix qui a été fait de la défense de l’usure. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Historiquement, anciennement, l’usure, ce n’est pas le taux d’intérêt abusif, c’est l’intérêt tout court.

BRUNO BERTEZ le 3 Fevrier 2011

EDITO PRECEDENT :

L’Edito : Le scénario 2010 vole en éclats, attention aux pertes par Bruno Bertez

EN BANDE SON :

 

 

 

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  1. Le ministre des finances belge, Didier Reynders, s’est prononcé jeudi 13 janvier en faveur d’un doublement des capacités d’aide mises à la disposition de la zone euro, à 1 500 milliards d’euros, et a indiqué que des discussions en ce sens avaient actuellement lieu en Europe.

    Peu après, la ministre de l’économie française, Christine Lagarde, a déclaré qu’une augmentation du fonds de secours européen pourrait être décidée « si nécessaire » afin de « démontrer [la] détermination [de la France] à défendre la stabilité de la zone euro ».

    « Je pense que ce serait un objectif tout à fait raisonnable de doubler les moyens » du Fonds de soutien de la zone euro, a indiqué M. Reynders. « Je pense que doubler le fonds, la facilité actuelle et le mécanisme permanent pour l’avenir [qui sera mis en place à partir de la mi-2013], ce serait la bonne logique », a-t-il précisé.

    Les pays de la zone euro ont mis en place un fonds de secours doté de garanties de prêts à hauteur de 440 milliards d’euros. A ce montant s’ajoutent 250 milliards d’euro de prêts du Fonds monétaire international et 60 milliards d’euros de prêts de l’UE. Les capacités d’aide pour les Etats qui connaîtraient des difficultés atteignent donc au total 750 milliards d’euros.

    DES CAPACITÉS D’AIDE PORTÉES À 1 500 MILLIARDS AU TOTAL.

    Si l’idée du doublement est retenue, « ça voudrait dire doubler les garanties [de la zone euro], qui étaient jusqu’à présent de 440 milliards », a expliqué M. Reynders.

    Le dispositif total portant sur 750 milliards d’euros, « si nous prenons la même démarche, en doublant, on arriverait à 1 500 milliards d’euros », a-t-il ajouté.

    Interrogé pour savoir si les discussions en cours en Europe portaient sur ce montant, M. Reynders a répondu : « Tout à fait. »

    « La Commission européenne, la Banque centrale européenne commencent à évoquer ce genre de possibilités également » dans le cadre de ces discussions, a-t-il ajouté. Les responsables européens ont engagé un débat sur le renforcement des capacités de prêts du Fonds de secours de la zone euro.

    http://www.lemonde.fr/economie/article/2011/01/13/zone-euro-discussions-sur-un-doublement-du-fonds-de-soutien_1465331_3234.html

    Aujourd’hui, vendredi 4 février 2011, nous pouvons comparer cette annonce (le Fonds de soutien va atteindre 1500 milliards d’euros) et la réalité.

    Dans la réalité, ils sont où, les 1500 milliards d’euros ?

    Où sont passés ces fameux 1500 milliards d’euros ?

  2. Samedi 5 février 2011 :

    Avec son Pacte, Berlin sème la zone.

    La zone euro va-t-elle ressembler à une grande Allemagne ? Angela Merkel, qui a dû accepter une solidarité financière dont elle ne voulait pas pour sauver la Grèce, l’Irlande et sans doute la monnaie unique, présente sa facture à l’Europe. Et elle est salée.

    Plusieurs gouvernements se sont étranglés lorsqu’ils ont pris connaissance, juste avant l’ouverture du Conseil européen des chefs d’Etat et de gouvernement réuni vendredi à Bruxelles, des sévères réformes que Berlin voudrait introduire dans le futur «pacte de compétitivité» que devront signer les pays de la zone euro afin de renforcer leur intégration économique.

    La Belgique, l’Autriche ou encore l’Irlande ont estimé que c’était leur «modèle» qui était menacé. «L’offensive allemande dans les Ardennes a commencé», grinçait un diplomate belge. Ambiance.

    Parmi les réformes que Berlin veut imposer à ses partenaires pour assurer une solidarité financière ? L’abandon de l’indexation automatique des salaires qui existe encore en Belgique, en Autriche, au Portugal, au Luxembourg ou en Espagne. L’inscription dans les constitutions nationales de l’équilibre budgétaire. Le recul de l’âge de la retraite à 67 ans. L’harmonisation de l’impôt sur les sociétés. L’introduction d’un mécanisme de résolution des crises bancaires. Ou encore une augmentation des dépenses de recherche.

    Berlin a fait fuiter ces conditions juste avant le sommet en laissant entendre que Paris était sur la même ligne, afin de forcer la main de ses partenaires.

    Evidemment, ceux-ci ont hurlé au «diktat franco-allemand». D’autant plus inacceptable que des éléments clés des systèmes sociaux sont menacés.

    Ainsi, les Belges, en pleine crise politique, n’ont aucune envie d’ajouter une crise sociale en abandonnant l’indexation salariale.

    Les Autrichiens estiment eux aussi que les salaires et les retraites doivent rester du domaine national.

    Les Irlandais, pourtant bénéficiaires de l’aide européenne, ne veulent toujours pas renoncer à leur impôt sur les sociétés, l’un des plus bas du monde.

    Même la Confédération européenne des syndicats a fustigé «un pacte nuisible», qui créera «davantage d’inégalités».

    La méthode employée par Berlin n’a guère été appréciée par l’Elysée, qui parle d’une «version allemande du pacte de compétitivité qui décrit une vision allemande de l’Europe».

    Le ouiste Jean Quatremer, sur son blog bruxelles.blogs.liberation.fr

    Fin de citation.

    « Le pacte Merkel » pose la question suivante :

    Est-ce que cette Europe allemande créera de la stabilité ?

    Ou alors est-ce que cette Europe allemande créera des réactions nationalistes partout en Europe ?

  3. Dimanche 6 février 2011 :

    Le groupe pétrolier Total menacé par un arbitrage à 170 milliards de dollars.

    Total risque de devoir payer une pénalité de 125 milliards d’euros pour ne pas avoir exécuté un contrat en Russie du temps d’Elf.

    Derrière ce dossier vieux de 1992, on retrouve André Guelfi, «Dédé la sardine», mais aussi bien d’autres noms rencontrés dans la chronique judiciaire depuis vingt ans.

    http://www.mediapart.fr/journal/economie/060211/total-menace-par-un-arbitrage-170-milliards-de-dollars

  4. Mercredi 9 février 2011 :

    Moody’s pointe le risque d’une restructuration des dettes périphériques.

    Un analyste de Moody’s a fait valoir hier que les pays « périphériques » de la zone euro, comme la Grèce, le Portugal et l’Espagne, avaient du mal à stabiliser leur niveau de dette et il a averti que le risque de restructuration avait augmenté.

    Les marchés ruminent cette idée depuis des semaines au sujet de la dette grecque, dont le niveau paraît peu supportable.

    Certains opérateurs se sont même positionnés sur les obligations grecques de très longue maturité pour contourner un risque qu’ils jugent imminent.

    Lundi 7 février, Jean-Claude Trichet a souligné qu’un rachat de titres grecs avec une décote profiterait aux intervenants qui ont pris des paris à la baisse sur les obligations en question.

    Le marché évoque dès lors l’hypothèse d’un échange de titres contre d’autres ayant une maturité plus longue.

    http://www.lesechos.fr/journal20110209/lec2_marches/0201135796702-moody-s-pointe-le-risque-d-une-restructuration-des-dettes-peripheriques-.htm

    • l’Arabie Saoudite fait son travail habituel qui consiste a parler pour calmer les cours du petrole
      cela ne veut pas dire qu’elle peut ou qu’elle veut empecher la hausse des prix
      l’envolee des prix alimentaires rend dans une certaine mesure necessaire une hausse des prix du brut pour les pays producteurs a population nombreuse
      le besoin de stabilite pour ces pays a ete renforce par les mouvements sociaux recents et on voit mal les saoudiens prendre le risque de casser les prix du petrole si ils montent
      ce qui est leader dans le mouvement actuel des prix des commodities c’est l’alimentaire et si la tendance a la hausse se poursuit le petrole suivra malgre les gesticulations saoudiennes

  5. Samedi 12 février 2011 :

    La Grèce dénonce une ingérence de l’Union Européenne et du FMI.

    La Grèce a accusé samedi l’Union européenne et le Fonds monétaire international d’ingérence dans ses affaires intérieures, après avoir été invitée par ses créanciers à accélérer ses réformes et à procéder à davantage de privatisations.

    Vendredi, des inspecteurs de l’UE et du FMI sont venus en Grèce examiner la mise en oeuvre du plan de sauvetage qui a permis à Athènes d’échapper à la faillite. Ils ont donné leur feu vert au déblocage d’une tranche d’aide de 15 milliards d’euros, mais ils ont été plus critiques que lors de leurs précédentes visites.

    Après s’être vu reprocher par des médias locaux de n’avoir pas réagi à ces critiques, le gouvernement grec a déclaré que l’approche des inspecteurs était inacceptable.

    Le Premier ministre George Papandréou s’est entretenu avec le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, et avec le commissaire européen aux Affaires monétaires, Olli Rehn, a rapporté son secrétariat.

    Dans sa conversation téléphonique avec Dominique Strauss-Kahn, George Papandréou a « transmis le message du gouvernement grec concernant le comportement inacceptable des représentants de la Commission européenne, de la BCE (Banque centrale européenne) et du FMI lors de la conférence de presse d’hier », dit un communiqué du secrétariat de Papandréou.

    Georges Petalotis, porte-parole du gouvernement grec, avait quelques heures auparavant déclaré : « Nous ne demandons à personne de s’ingérer dans les affaires intérieures. Nous ne prenons nos ordres que du peuple grec. »

    Les inspecteurs étaient venus à Athènes évaluer les progrès réalisés au quatrième trimestre sur le plan de consolidation budgétaire de 110 milliards d’euros.

    Ils ont reconnu que le programme était « sur les rails » et ils ont débloqué une nouvelle tranche de 15 milliards d’euros, mais ils ont estimé que le gouvernement grec devait procéder à beaucoup plus de privatisations.

    Les prêteurs ont fixé un ambitieux programme, estimant que les privatisations devraient permettre de recueillir 50 milliards d’euros en 2011-2015. Le précédent objectif du gouvernement était de sept milliards d’euros en 2011-2013.

    Lors de la conférence de presse, Poul Thomsen, chef de la délégation du FMI, a invité les Grecs à ne pas laisser « ceux qui ont des intérêts » personnels empêcher le plus grand nombre de profiter des privatisations.

    Evoquant des groupes opposés à l’ouverture de professions strictement règlementées, Poul Thomsen a dit : « Certains des groupes qui descendent dans les rues, les chauffeurs routiers, les pharmaciens (…) se cachent derrière leurs privilèges qui leur permettent d’extorquer des prix élevés, d’imposer un lourd fardeau au reste de la société ».

    Le ministre des Infrastructures, Dimitris Reppas, a jugé que le nouvel objectif pour les privatisations n’était pas réaliste.

    « Recueillir 50 milliards d’euros d’ici 2015 grâce à la privatisation de biens de l’Etat n’est pas possible », a-t-il affirmé samedi à la télévision publique TV Net.

    Un responsable du ministère des Finances avait néanmoins assuré vendredi que la Grèce avait accepté le nouvel objectif de 50 milliards d’euros.

    Un porte-parole du FMI a déclaré que lors de sa conversation avec Papandréou, Strauss-Kahn avait dit que le programme budgétaire était sur les rails et avait « réaffirmé son respect le plus profond pour le gouvernement et le peuple grecs dans leurs efforts pour relever les défis économiques auxquels leur pays est confronté ».

    http://www.lepoint.fr/fil-info-reuters/la-grece-denonce-une-ingerence-de-l-ue-et-du-fmi-12-02-2011-1294793_240.php

  6. Dimanche 13 février 2011 :

    Tollé en Grèce sur des privatisations : « regrettable » selon l’Union Européenne et le FMI.

    L’Union européenne et le FMI ont jugé « regrettable » dimanche le tollé provoqué en Grèce par les nouvelles demandes de privatisations massives dont ces institutions ont assorti la poursuite de leur assistance financière.

    « Nous reconnaissons les défis difficiles auxquels est confrontée l’économie grecque et nous avons le plus profond respect face aux efforts énormes consentis par la population grecque », ont déclaré le Fonds monétaire international, l’Union européenne et la Banque centrale européenne, dans un communiqué commun.

    « Il est regrettable qu’une impression différente ait pu avoir été perçue. Notre collaboration avec la Grèce est fondée depuis toujours sur la confiance mutuelle et le restera », ont-ils ajouté.

    Samedi, le gouvernement socialiste grec a jugé « inacceptable la conduite » de ces trois institutions.

    Celles-ci ont accepté vendredi le versement de la quatrième tranche d’un prêt accordé en mai 2010 par la zone euro et le FMI pour éviter la faillite du pays.

    Mais, malgré de gros efforts d’assainissement budgétaire déjà réalisés, elles ont aussi exigé une « accélération significative » et un « élargissement » des réformes structurelles.

    L’annonce qui a le plus frappé les esprits porte sur la révision à la hausse de l’objectif de privatisations souhaité par la troïka : 50 milliards d’euros d’ici à 2015, au lieu de 7 milliards sur trois ans initialement annoncé.

    Dans un premier temps, le ministère grec des Finances a diffusé un document informel semblant avaliser la création d’un portefeuille d’actifs promis à une privatisation et pouvant rapporter « au moins 50 milliards d’euros ». Mais samedi, le gouvernement a fait volte-face et fait réagir son porte-parole, George Petalotis.

    « Nous sommes dans le besoin, mais nous avons aussi des limites (…) Nous ne négocierons les limites de notre dignité avec personne. Nous prenons des ordres seulement auprès du peuple grec », a déclaré M. Petalotis, en soulignant notamment qu’aucune terre appartenant à l’Etat ne serait vendue.

    Tandis que la presse grecque, y compris celle proche des socialistes au pouvoir, se déchaînait, le Premier ministre George Papandreou a fait savoir qu’il s’était plaint personnellement auprès du FMI et de la Commission européenne.

    De son côté, le représentant de la Commission européenne Servaas Deroose a alimenté la fureur grecque en proposant dans le quotidien To Vilma, de « vendre les plages pour développer le tourisme et le marché des propriétés touristiques ».

    La Grèce pourrait facilement lever cinq milliards d’euros en vendant l’ancien aéroport d’Athènes, situé dans une zone côtière lucrative, a-t-il suggéré dans une autre interview à Proto Thema, préconisant la vente de terrains, d’aéroports régionaux et de ports pour un bénéfice de 35 milliards d’euros.

    Des propos jugés dimanche « pour le moins déplacés » par le ministre grec des Finances George Papaconstantinou.

    Le chef de la mission du FMI Poul Thomsen y est allé lui-aussi de ses encouragements à « vendre des terrains, y compris l’ancien aéroport » d’Athènes.

    « Nous sommes à un point crucial où nous avons besoin d’une accélération des réformes », a encore déclaré M. Thomsen, cité par le quotidien Kathimerini.

    (Dépêche AFP)

  7. Lundi 14 février 2011 :

    Italie : la dette publique a progressé de 4,5 % en 2010 à 1843 milliards d’euros.

    Milan (awp/afp) – La dette publique de l’Italie, l’une des plus élevées du monde en valeur absolue, s’élevait à 1843 milliards d’euros fin 2010, soit une progression d’environ 4,5 % par rapport à fin 2009, a annoncé lundi la Banque d’Italie.

    Fin décembre, la dette avait en revanche reculé par rapport au record historique de 1869 milliards d’euros atteint fin novembre.

    La Banque d’Italie n’indique pas ce que représente la dette publique en pourcentage du produit intérieur brut (PIB).

    Dans ses dernières prévisions économiques datant de fin septembre, le ministère de l’Economie avait indiqué tabler sur une dette de 118,5% du PIB en 2010, contre 115,9% en 2009.

    En 2011, la dette devrait encore progresser à 119,2 %, avant de diminuer à 117,5 % en 2012, et 115,2 % en 2013, toujours selon les prévisions du ministère.

    http://www.romandie.com/infos/news/201102141330160AWP.asp

    Les prévisions du ministère de l’Economie italienne sont beaucoup trop optimistes selon le FMI.

    En 2012, la dette publique de l’Italie sera de 120,1 % du PIB (ce sont les dernières prévisions du FMI).

    C’est à la page 2 :

    http://www.imf.org/external/french/pubs/ft/fm/2011/01/update/fmindexf.pdf

  8. Pourquoi la survie à long terme de l’euro est improbable.

    Dans un long entretien à La Tribune, Niall Ferguson, professeur d’histoire à l’université de Harvard, porte un regard pessimiste sur l’Europe.

    La Tribune : Vous voyez un risque d’éclatement de la zone euro ?

    Niall Ferguson : Ce risque est réel et je pense que ce serait une grande erreur de croire que simplement parce que l’Euro existe maintenant, il sera toujours là dans 10 ans. Le manque de volonté politique en Allemagne, et la désintégration structurelle à l’œuvre dans la zone euro, sont les deux facteurs qui rendent la survie à long terme de l’euro improbable. Parallèlement, du point de vue allemand, l’euro est un mal nécessaire, parce que sans lui, ils auraient les mêmes problèmes que la suisse d’une monnaie trop forte. Le meilleur argument pour la survie de la zone euro est qu’elle sert très efficacement les intérêts de l’industrie allemande.

    Vous voulez dire à cause de son taux de change ?

    Exactement ! Rappelez vous de la signification de la zone euro : il s’agit d’un accord qui donnait aux pays excessivement endettés comme la Belgique ou l’Italie les taux d’intérêt bas allemands, l’Allemagne bénéficiant en retour d’un taux de change plus faible. C’était le deal ! Mais le problème aujourd’hui, est qu’en l’absence de transferts du centre vers la périphérie sans une véritable intégration du marché du travail, le seul moyen de maintenir la zone euro dans sa forme actuelle passe par la déflation dans les pays périphériques, ou alors il faudrait que la banque centrale européenne introduise des assouplissements quantitatifs, du type QE2 et se montre beaucoup plus agressive dans la monétisation de la dette.

    Ca vous parait possible ?

    La solution la plus simple pour résoudre la crise de la zone euro serait que Trichet se transforme en Bernanke, et adopte le QE2 et achète des obligations, et affaiblisse un peu l’euro. Les chinois pourraient répondre favorablement à cela en achetant encore plus de la dette des Pigs. L’autre solution, plus dure, serait de demander aux Grecs ou au Irlandais de transformer leur déficit de 10 % du PIB en un excédent de 5 % du PIB, et c’est impossible ! D’autant qu’il y a un facteur qu’il ne faut jamais sous estimer en période d’après crise, ce sont les conséquences politiques.

    Jusqu’à présent, on est plutôt parvenu à les éviter…

    Oui, mais il s’agit d’une combustion lente ! Les gens ont souvent du mal à réaliser que l’histoire ne se déroule pas au rythme d’un match de football. Les événements vont à leur rythme, mais déjà nous voyons dans de nombreux pays européens des tournants politiques majeurs, brisant de façon irréversible le consensus qui existait entre les chrétiens et sociaux démocrates depuis l’après guerre. Je suis convaincu que le populisme va devenir de plus en plus puissant en europe. Or il est difficile de croire que les populistes seront de vibrants défenseurs du projet européen, car leur fonds de commerce c’est le nationalisme et la xénophobie.

    Quand on regarde l’Histoire, quelle est la meilleure solution pour sortir d’une crise de la dette ? Et combien de temps cela peut prendre ?

    Il y a bien eu un pays qui avait une dette dépassant 200 % de son PIB, qui n’a pas fait défaut, et qui n’a pas connu l’inflation. Il s’agit de la Grande Bretagne après la bataille de Waterloo. Entre 1815 et 1914, la dette britannique a été réduite, grâce à une croissance forte, grâce à des excédents du budget primaire et grâce enfin à des taux d’intérêts bas. La Grande Bretagne pouvait, c’est vrai, compter sur deux avantages : la révolution industrielle et l’apport de son empire colonial. Malheureusement c’est le seul cas que je connaisse. Et en dehors de cette exception, tous les pays ayant accumulé des dettes trop importantes au regard de leur PIB ont été conduits au défaut ou à l’inflation, selon que la dette était libellée dans leur propre monnaie ou dans une devise étrangère. Nous voyons donc bien ce qui risque de se passer : les pays qui ne peuvent pas imprimer de la monnaie vont faire défaut, comme l’Irlande, la Grèce et peut-être d’autres ? Les autres, qui peuvent créer de la monnaie, à commencer par les Etats-Unis, connaitront l’inflation et des dépréciations monétaires. C’est ça la leçon de l’histoire.

    Propos recueillis par Eric Chol et François Lenglet – 15/02/2011

    http://www.latribune.fr/actualites/economie/international/20110215trib000601439/pourquoi-la-survie-a-long-terme-de-l-euro-est-improbable.html

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