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Trappe à Dettes : Les scénarios de solvabilité grecque

Les scénarios de solvabilité grecque

Moody’s a estimé l’impact d’un défaut grec sur la notation souveraine et sur les banques grecques. Sans compter le risque de contagion en Europe.

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PLUS DE RESTRUCTURATION EN SUIVANT :

Une restructuration de la dette grecque aurait des conséquences négatives, y compris pour d’autres pays européens, et reléguerait la note de la Grèce dans la catégorie «C» (La dette grecque à long terme est actuellement notée «B1»), dernière note avant le défaut de paiement, assure Moody’s dans un rapport publié mardi 24 mai.

Moody’s a tenté d’estimer l’impact d’un défaut grec sur la notation souveraine, sur les banques grecques et sur la possible contagion aux autres pays européens. L’agence de notation estime qu’un défaut entrainerait une dégradation de la note de la Grèce dans les catégories Ca ou C qui, après le défaut, resterait ensuite longtemps dans les catégories Ca ou Caa . Il n’existe aucun précédent concernant le défaut d’un pays développé mais Moody’s estime qu’une décote importante serait nécessaire pour avoir un impact significatif sur la dette de la Grèce. N’oublions pas que le marché financier a déjà effectué cette décote.

Les banques grecques auraient besoin d’être recapitalisées après les pertes subies sur les dettes souveraines et malgré le soutien financier de la BCE. Une fois ce soutien acquis, leurs notes devraient se situer en catégorie simple-B. Quoiqu’il en soit, un défaut souverain serait suivi par une sorte de défaut sur la dette bancaire.

Les autres pays périphériques, tels l’Irlande et le Portugal mais aussi l’Espagne, l’Italie et la Belgique, seraient impactés: leur accès aux marchés financiers deviendrait beaucoup plus cher, ce qui, in fine, impacterait leur qualité de crédit. Dès lors, la zone euro se bipolariserait avec d’un côté les pays solides bénéficiant d’une notation élevée ou très élevée, et de l’autre côté les pays faibles se débattant pour conserver une notation Investment grade.

Selon Moody’s, toute restructuration impliquera une perte pour les créanciers privés au moins équivalente à la moyenne historique (taux de recouvrement historique moyen de 53% sur un défaut souverain).

Au-delà des dernières déclarations du premier ministre grec Papandréou sur le fait que la Grèce doit éviter une restructuration de sa dette et persévérer dans son programme d’austérité et de privatisations, que signifierait réellement la restructuration de la dette du pays et quelles en seraient les implications réelles?

Rappelons que les plus gros créanciers d’obligations souveraines grecques sont les banques grecques (22% de la dette, soit 72 milliards d’euro), la BCE (environs 20% de la dette), l’Union européenne et le FMI (environs 11%) et les banques européennes (environs 11%).

Une restructuration lourde de la dette grecque signifie que les pays européens s’engageraient à financer cette dette tout en organisant des transferts plus importants. L’Allemagne, principal bailleur de fonds de l’Europe, passerait donc à la caisse. La situation grecque sur le court terme s’améliorerait mais la compétitivité du pays ne serait pas restaurée pour autant et il conserverait des coûts supérieurs à son taux de productivité. Du coup, ce ne serait qu’un nouveau moyen de financer ses énormes déficits commerciaux.  Le constat est amer, mais cette situation court-termiste ne relancerait en rien la croissance du pays et ne ferait pas baisser le taux de chômage grec.

Un parallèle peut être fait ici avec la situation argentine de 1998 à 2002. Le pays avait du faire appel au FMI avant de faire défaut et finalement devoir procéder à la dévaluation de sa monnaie. Avec une monnaie indexée sur le dollar américain de 1992 à 2001, l’Argentine était capable de contrôler l’inflation. Cependant, cette politique rendait les produits argentins relativement chers par rapport à ses voisins (exactement ce qui se passe en Grèce), ce qui ralentissait les exportations. Le gouvernement argentin élargira la dette extérieure du pays et échouera à la mise en place de mesures correctives. A la fin de l’année 2001, le gouvernement instaura de sévères contrôles monétaires, ainsi que des limites très strictes à l’accès de comptes bancaires privés.

Il y a en fait trois autres solutions qui pourraient refaire surface de la plus soft à la plus radicale:

l De nouveaux prêts pour permettre à la Grèce de renouer avec la croissance, c’est-à-dire la poursuite de la même politique avec un grand doute sur l’objectif à atteindre.

lUne restructuration soft où les créanciers accordent volontairement un plus long délai de remboursement et des intérêts moins élevés.

lUne sortie de la zone euro…   

Il s’avère que l’Europe essayera de tout faire pour sauver la Grèce. Selon les stress test déjà établis, les banques européennes et la zone euro pourraient tout à fait absorber une restructuration de la dette grecque. Cependant, tout comme en 2008, le crédit interbancaire risque à nouveau de se bloquer, les banques cessant de se faire confiance entre elles, menaçant finalement les établissements les plus fragiles et ralentissant ainsi la consommation.

Mais, comme nous l’avons déjà souligné à moult reprises, l’Allemagne, comme leader européen, devra mettre la main à la poche (tout comme la France).

Pour sauver la zone Euro, tous les pays seront obligés d’avoir leur propre plan d’austérité, le problème de la dette publique étant susceptible d’être un problème européen pour au moins les 5 à 10 prochaines années.

Le problème fondamental n’est donc pas la Grèce (sa dette publique ne représentant que 4% de la zone euro), mais bien un risque de contagion beaucoup plus violent que celui que nous avons actuellement.

John-F. Plassard Louis Capital Markets Genève mai11

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