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Pas de bulle spéculative sur l’or ?

Pas de bulle spéculative sur l’or ?

Inclure de l’or dans un portefeuille diversifié garde encore aujourd’hui tout son sens. Le cours peut continuer de progresser à un rythme modéré.

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Ces dernières semaines, le prix de l’or est monté vers de nouveaux sommets. Certains investisseurs disent reconnaître les signes avant-coureurs d’une bulle spéculative, d’autres croient plutôt à un phénomène lié à une reprise de l’inflation. Depuis la fin de la convertibilité du dollar en or suite aux accords du Smithsonian Institute de 1971, l’or offre une faible protection contre l’inflation. Suite aux chocs pétroliers de 1973-1974 et de 1979, les taux d’inflation sont fortement montés. Le prix de l’or a également fortement progressé et a atteint au début de 1980 un prix record, qui était réputé encore quelques années auparavant comme pratiquement inatteignable. Durant toutes les années 1980 et 1990, les taux d’inflation et le prix de l’or baissèrent de concert. Mais depuis le début des années 2000, la relation directe entre le taux d’inflation et le prix de l’or s’est rompue: bien que l’inflation fût orientée à la baisse, le prix de l’or n’a cessé de grimper et a atteint, après le déclenchement de la crise financière, des nouveaux sommets. Dans les prochains paragraphes, nous allons vous expliquer pourquoi nous ne pensons pas que le prix de l’or se trouve dans une bulle spéculative.

Cherté de l’or malgré une basse inflation

Nous avons montré que l’inflation seule ne suffisait pas à expliquer les variations du prix de l’or. Contrairement aux actions et obligations, une modélisation du prix de l’or ne peut pas se faire par une méthode d’évaluation classique de type valeur actuelle nette. Sa rentabilité n’est expliquée que par des variations de prix. C’est pourquoi le juste prix de l’or est si difficile à estimer par les économistes. Pour de nombreux analystes, la récente explosion du prix de l’or est la meilleure preuve de l’exubérance irrationnelle de ce marché. Notre analyse montre que les variations du prix de l’or sont corrélées négativement avec les taux d’intérêts réels (taux nominaux moins l’inflation). Des taux d’intérêts réels élevés sont liés à une baisse de l’or alors que des taux bas entraînent une hausse de celui-ci. L’or ne profite d’une inflation élevée que dans le cas où cette dernière pèse sur le niveau des taux réels. Les taux d’intérêt réels inhabituellement bas de ces dernières années ne sont pas dus à une inflation élevée mais à des taux nominaux très bas. Si l’or est devenu si cher, c’est moins dû à l’inflation actuelle qu’à des taux réels tombés ces dernières années à des niveaux extrêmement bas et qui évoluent même en territoire négatif depuis la crise financière.

Wicksell comme point de départ d’un modèle d’évaluation du prix de l’or

L’économiste suédois Knut Wicksell a montré dans ses travaux que les cycles conjoncturels sont influencés par des déséquilibres entre les taux du marché et ceux auxquels les banques prêtent de l’argent. En 1898, il a écrit dans Interest and Prices: «There is a certain rate of interest on loans which is neutral in respect to commodity prices, and tends neither to raise nor to lower them». Il est possible de traduire cette phrase par: il existe un certain taux d’intérêt sur les crédits qui est neutre sur le prix des matières premières et donc qui empêche celles-ci de s’apprécier ou de se déprécier. Notre modèle utilise ce concept. Le prix de l’or dépend des écarts du taux réel US par rapport à sa valeur d’équilibre à long terme supposée. Dans nos calculs, nous estimons que le taux réel neutre à long terme pour le marché monétaire US est de 2%. C’est d’ailleurs la même valeur que John Taylor utilise dans ses travaux sur la détermination d’un taux d’intérêt cible dans le cadre de la politique monétaire américaine. Notre modèle, qui est relativement simple, permet de retracer presque parfaitement l’évolution du prix de l’or de ces 40 dernières années.

Des taux réels US bas: le résultat – en partie seulement –d’une politique monétaire US hyper-expansive

En plus de la politique monétaire de la Réserve fédérale, un autre facteur semble avoir un impact important sur le niveau des taux réels aux Etats-Unis ainsi qu’en Europe. Ce sont les excédents budgétaires réalisés par les grands pays asiatiques et les nations exportatrices de pétrole qui sont recyclés dans les marchés des capitaux et monétaires des pays occidentaux. Ces excédents se reflètent dans la forte hausse des réserves de change de ces pays . Notre analyse montre que la poursuite de la hausse du prix de l’or deviendra plus difficile lorsque les taux réels se normaliseront graduellement. Par contre, nous pensons qu’une forte correction du prix de l’or ne se manifestera que lorsque les taux réels seront fortement montés. Dans ce sens, l’or ressemble aux emprunts indexés à l’inflation. Dans quel environnement une forte hausse des taux réels est-elle possible? Le FMI a énoncé dans sa dernière publication sur l’évolution de l’économie le facteur de risque suivant: si le potentiel de croissance de l’économie mondiale, et spécialement de l’économie américaine, a été surestimé – à cause d’une sous-évaluation du taux de chômage structurel aux Etats-Unis – le taux d’inflation de base pourrait fortement accélérer. Ceci imposerait à la Réserve Fédérale un changement de cap de sa politique monétaire qui aurait pour effet une hausse des taux réels.

Des taux réels US bas aussi dus à des «recyclages» sur le dollar

Une fin abrupte des exportations nettes de capitaux en provenance des pays en développement aurait un effet similaire. Pour le moment, tant le scénario d’une surestimation de la croissance US que celui de la fin des afflux de capitaux des pays émergents nous paraissent peu vraisemblables. Nous pensons plutôt que les taux d’intérêt réels vont augmenter graduellement suite à un resserrement progressif de la politique monétaire américaine dans un environnement conjoncturel toujours orienté positivement. Le lissage graduel des déséquilibres commerciaux globaux devrait également aller dans cette direction. Dans un tel scénario, le prix de l’or pourrait certes continuer à s’apprécier, mais à un rythme bien plus modéré que ces dernières années. De ce fait, mais également grâce à la faible corrélation de l’or avec d’autres classes d’actifs, nous pensons qu’inclure de l’or dans un portefeuille diversifié garde encore aujourd’hui tout son sens, malgré la hausse considérable de son prix depuis le début des années 2000.

daniel witschi, richard mayr, grégoire baudin Les Fils Dreyfus et Cie.mai11

Acheter de l’or physique

Les investisseurs intéressés à l’or doivent savoir s’ils veulent investir dans des barres standard de 12,4 kg, des lingots de différentes tailles ou des pièces ou plutôt dans des actions de sociétés aurifères (des mines d’or) ou des ETFs. Afin de faire le meilleur choix d’investissement, trois éléments sont importants: la rentabilité, la volatilité – les variations de cours – ainsi que la corrélation avec les autres classes d’actifs.

Rentabilité. Depuis le milieu des années 1990, l’or physique a offert pratiquement la même rentabilité que les actions des sociétés minières.

Volatilité. La volatilité des actions aurifères est bien plus élevée que celle de l’or physique.

Correlation. L’or physique possède une corrélation plus faible que celle des actions minières avec les autres actifs, particulièrement avec l’indice global des actions. Ce dernier indicateur montre tout l’intérêt de l’or physique comme outil de diversification de portefeuille.n

4 réponses »

  1. Très bon article. Il est vrai qu’il peut être intéressant de posséder de l’or pour diversifier.

  2. Selon vous, ils seraient judicieux de revendre des bijoux en or? si oui, où ça?

    • Sauf cas de force majeure je ne vendrais pas. Par les temps qui courent et les dettes et les taxes qui s’accumulent l’or est la meilleure des assurances possibles, une sorte de poire pour la soif !!!

  3. tout dépend du cour de l’or et de ton besoin actuel. Le mieux est de surveiller l’évolution du cour de l’or. Ensuite si c’est vraiment urgent, genre fin de mois difficile, tu as les sociétés genre orpostal, où la transaction se fait par correspondance et où tu reçois rapidement l’argent. Après, il y a les bijoutiers naturellement!

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