Sacrifier l’euro au profit d’un «système sain et responsable»
«L’Europe est dans une spirale interventionniste parce qu’elle a supprimé le mécanisme des prix et la valeur de ce signal», a-t-il expliqué. Les politiciens se placent au-dessus des lois et du marché, ce qui ne peut fonctionner très longtemps. Très hayékien, Joachim Starbatty a rappelé que personne ne détenait le savoir et n’était capable de maîtriser le cours des événements.
Le soutien financier à la Grèce a été vivement critiqué lors des journées Hayek, en Allemagne. Les professeurs invités ont fustigé le dirigisme de l’Union européenne
source Financial Times
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En 1939 déjà, l’économiste et philosophe Friedrich von Hayek écrivait qu’une intégration économique n’était possible que sur la base d’un accord politique en faveur d’un ordre libéral et de l’économie de marché. Walter Eucken l’a rappelé en 1949, puis Wilhelm Röpke en 1958, a expliqué Alfred Schüller, lauréat 2011 de la médaille Hayek, à l’occasion des deux jours consacrés à cette figure marquante du libéralisme, jeudi et vendredi en Allemagne, à Fribourg-en-Brisgau.
L’Union européenne a choisi la voie de la moindre résistance politique et du dirigisme, ce qui ne peut mener qu’au désastre, selon Alfred Schüller. L’UE n’est pas en odeur de sainteté dans les milieux libéraux. A l’ouverture du congrès, Gerhard Schwarz, président de la Société Friedrich von Hayek, a été vivement applaudi lorsqu’il a annoncé que seuls 19% des Suisses approuvaient l’adhésion à l’UE.
L’euro ne l’est guère davantage. Invité à une table ronde sur l’avenir de la monnaie unique, le professeur Joachim Starbatty de l’Université de Tübingen, lequel avait porté plainte contre la constitutionnalité de l’euro et une seconde fois contre celle du plan de sauvetage de la Grèce, a demandé la sortie de la Grèce de l’euro.
«L’Europe est dans une spirale interventionniste parce qu’elle a supprimé le mécanisme des prix et la valeur de ce signal», a-t-il expliqué. Les politiciens se placent au-dessus des lois et du marché, ce qui ne peut fonctionner très longtemps. Très hayékien, Joachim Starbatty a rappelé que personne ne détenait le savoir et n’était capable de maîtriser le cours des événements.
Le système économique manque aussi d’éléments de sanction. La crise de la dette n’est pas une catastrophe naturelle. Elle résulte de l’absence de responsabilité des acteurs face à leurs actes, selon lui. Les politiciens font alors appel à la solidarité et transforment l’UE en union des transferts sociaux. Or la seule mention de ce terme fait fuir la grande majorité des Allemands. Pour Joachim Starbatty, l’Europe est en pleine spirale interventionniste: «Il n’y a plus de démocratie en Grèce. C’est la troïka (FMI, BCE et UE) qui définit la politique grecque. Mais ses projets d’austérité et de privatisation n’auront jamais le soutien de la population», selon lui. D’ailleurs il n’appartient pas à la BCE de s’immiscer dans les affaires politiques d’un pays. Elle devrait se limiter à la stabilité des prix.
La principale préoccupation d’Erich Weede, professeur à l’Université de Bonn, n’est pourtant pas la Grèce, mais la démocratie occidentale.
L’explosion de la quote-part de l’Etat depuis un demi-siècle a créé un système d’incitations qui pénalise les individus qui réussissent et encourage les gens à échouer. Les premiers sont donc poussés à partir en Suisse et aux Etats-Unis, alors que les habitants de Turquie, de Tunisie ou d’autres pays pauvres gagnent à immigrer en Europe.
Avec la crise de la dette, les mêmes incitations sont employées au niveau des Etats. L’économiste propose à l’Allemagne de créer un référendum pour les questions financières et un frein à l’endettement selon le mode suisse.
Et l’Union européenne? Erich Weede «préfère un système économique sain et responsable – appelons-le capitalisme – à l’UE actuelle». L’économiste observe avec anxiété l’augmentation de la dette et le risque de forte inflation auquel elle devrait conduire. La multiplication des transferts financiers ne résoudra pas la crise de la dette et ne renforcera pas les faibles, selon lui. «D’ailleurs ni la péréquation, ni l’aide publique au développement n’ont présenté des résultats probants», dit-il.
Pour Lars Feld, professeur à l’Université de Fribourg, la solution à la crise passe par un ré-échelonnement de la dette grecque, avec participation des créanciers privés, comme l’a proposé le ministre allemand des Finances. Par contre, la BCE doit participer aux problèmes qu’elle a créés. Lars Feld critique également le mécanisme de stabilité et le système de transferts qu’il risque de provoquer.
Par Emmanuel Garessus/ Fribourg-en-Brisgau /le temps juin11