Behaviorisme et Finance Comportementale

Twitter, une nouvelle boussole pour les traders ?

Twitter, une nouvelle boussole pour les traders

 Le réseau social peut prédire quatre jours à l’avance les variations boursières, estiment des chercheurs britanniques.

 

« Plombée par les banques, Wall Street chute », « Les marchés sont en proie à une forte volatilité… », « Pas d’histoire hein, la crise est responsable de seulement un tiers du déficit », « L’économie entre dans une ‘phase dangereuse’ pour le patron de la Banque mondiale »…

Twitter, c’est 140 lettres ou espaces maximum et des idées ou informations pas toujours cohérentes ni vérifiées, parfois anodines.

Mais on sait désormais que le réseau social créé en 2006 est plus efficace que 10.000 armes à feu dans une révolution (ou dans des émeutes sans foi ni loi, comme dernièrement à Londres), et que le succès commercial d’un film peut être prévu dès les premières centaines de tweets.

Maintenant, les traders commencent à découvrir que Twitter — qui a encore accusé des pertes en 2010 du fait d’un business model toujours aussi flou -, peut leur permettre d’avoir un sérieux coup d’avance.

Monétiser les sentiments humains, c’est possible

Car Twitter semble être à ce jour la meilleure matérialisation de la part éminemment psychologique des évolutions boursières.

La preuve avec Derwent Capital, ce hedge fund lancé l’hiver dernier et qui se présente comme le premier fond au monde à définir sa stratégie de trading à partir des données récoltées sur un réseau social.

Les premières semaines d’existence de Derwent Capital Absolute Return Fund sont prometteuses puisque le rendement a atteint 1,85 % sur le premier mois officiel d’exercice, en juillet. Dans le même temps, le S & P 500 perdait 2,2 %…

Derwent indique avoir analysé 10 % des tweets financiers disponibles (sur un total de 200 millions de tweets postés chaque jour à travers le monde), pour parvenir à un algorithme de prédiction des mouvements boursiers pertinent à 88 %.

Basé dans le quartier des hedge funds à l’ouest de Londres, près de Buckingham Palace, Derwent Capital a su être opportuniste en s’attachant les services exclusifs des trois principaux spécialistes de la question: Xiao-Jun Zeng, professeur en sciences informatiques à l’Université de Manchester, ainsi que Johan Bollen et Huina Mao, spécialistes des réseaux sociaux à l’université d’Indiana.

Les trois chercheurs avaient été repérés suite à la sortie d’un rapport l’an dernier: « Twitter mood predicts the stock market ».

Six humeurs, de « heureux » à « en alerte »

L’étude initiale avait été menée de février à décembre 2008. « Nous avons d’abord été très surpris que cela fonctionne », expliquait récemment John Bollen dans le magazine Wired. « En fait, nous utilisons Twitter comme si c’était un patient en psychiatrie. Nous mesurons son humeur à travers six états différents ».

Quelques dizaines d’adjectifs ou de mots typiques sont scrutés, permettant d’établir six humeurs principales: calme, confiant, en alerte, critique, tranquille et heureux.

L’intérêt n’est pas seulement d’établir une corrélation claire entre les émotions des twittos et les variations des marchés, mais d’avoir suffisamment d’avance pour que lesdites émotions fassent sens.

C’est le cas selon les trois chercheurs, qui expliquent dans leur étude que les mouvements apparus dans Twitter précédaient en moyenne de trois ou quatre jours les évolutions « physiques » du Dow Jones, avec une pertinence de 87,6 %.

Le calcul de ces prévisions est bien entendu beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît, avec l’application de formules ultra-sophistiquées, ainsi que des coefficients dont l’application ressemble beaucoup à une recette de cuisine éprouvée.

L’ensemble repose sur le test de causalité mis au point par Clive Granger, système qui lui a permis de remporter le Prix Nobel d’économie en 2003.

News trading

Divers outils de news trading fleurissent sur internet depuis quelque temps.

C’est par exemple le cas de TweetTrader.net, qui compile les derniers tweets liés à Wall Street et établit une tendance pour chaque valeur sur cette base.

Le « Current Twitter sentiment » met en exergue des variations fortes à deux chiffres, permettant de dégager une tendance claire, en amont de la réalité « matérielle » des marchés.

Reste à anticiper ce qui pourrait bien devenir un fléau: la manipulation de cours via le microblogging…

19 août 2011 par Johann Harscoët /L’Echo

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