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Quand seul le marché bat monnaie

Quand seul le marché bat monnaie

La perte de souveraineté financière des Etats explique en partie leur surendettement.

Peu d’économistes osent publiquement attirer l’attention sur le rôle des marchés des capitaux dans la crise de la dette publique. Il est pourtant difficile d’ignorer la corrélation potentielle entre ces deux réalités. Avant l’entrée en vigueur de lois interdisant aux états d’emprunter directement auprès de la banque centrale, les pouvoirs publics avaient le droit de battre monnaie. Charge aujourd’hui largement déléguée aux banques privées, ce qui fait naître le soupçon que celles-ci en profitent pour s’enrichir aux dépends de l’intérêt général.

 

Qu’on se rappelle les remarques sévères de l’économiste libéral et protectionniste Maurice Allais, dans son livre La crise mondiale d’aujourd’hui, en 1999, le seul français à avoir reçu le prix Nobel: «Dans son essence, la création monétaire ex nihilo actuelle par le système bancaire est identique, je n’hésite pas à le dire pour bien faire comprendre ce qui est réellement en cause, à la création de monnaie par des faux-monnayeurs, si justement condamnée par la loi. Concrètement, elle aboutit aux mêmes résultats. La seule différence est que ceux qui en profitent sont différents».

Les Etat s’appuient de plus en plus fortement sur le système bancaire pour consolider leur dette flottante. Phénomène qui, durant les années d’après guerre, prend une régularité nouvelle, pour devenir systématique. «En France, après 1918, l’Etat non seulement utilise le potentiel de placement des banques mais il les élève au premier rang des établissements placeurs», notait déjà en 2001 Laure Quennouëlle-Corre, chargée de recherche au CNRS, à l’occasion de la publication, par le Comité pour l’histoire économique et financière de la France, des actes des Journées du Centre de Recherches Historiques.

Pour l’Etat, l’intérêt est de pouvoir s’appuyer sur les grands établissements à guichets, dont le réseau d’agences est à même de placer auprès de leurs clients les émissions publiques. «L’intérêt bien compris des banques tient au montant de la commission de placement, qui s’établit entre 33,5 pour mille et 15 pour mille suivant les types d’émission, à leur durée ainsi qu’au montant du service financier, qui oscille entre 0,15% et 0,30%.»

Mais Laure Quennouëlle-Corre souligne aussi la «pression extérieure», «la poussée vers l’internationalisation des marchés financiers», qui ont entraîné les pays occidentaux dans l’aventure de la déréglementation financière. «Le rôle prépondérant de l’Etat dans le processus de modernisation et de libéralisation qui peut apparaître comme un trait spécifique de la France, est perceptible dans d’autres pays développés comme l’Italie, le Japon et la République Fédérale d’Allemagne au tournant  des années 1980. Tandis que les pays anglo-saxons, États-Unis, Grande-Bretagne et Canada, avaient déjà effectué la mutation de leur système financier dans les années 1970.»

Toutefois, il convient de mentionner les cas des pays scandinaves, du Canada ou des pays des marchés émergents ayant également recours aux marchés des capitaux sans que cela s’accompagne d’une dette insoutenable. Du moins pour la période d’après la crise asiatique de la fin des années 1990.

Levi-sergio Mutemba/Agefi oct11

2 réponses »

  1. Bonjour,
    avant la loi de 1973, est ce que les emprunts de l’état à la banque centrale étaient remboursés à un moment ou est ce que ça revenait juste à combler les déficits de l’état en créant de l’argent ? Et est ce que ces déficits étaient aussi important avant qu’après cette loi hors remboursement des intérêts ?
    Merci

    • La mise en place de la grande dérégulation financière visant à permettre aux gouvernements du monde entier de s’endetter à outrance à pris son point d’appui en 1971 avec la libération par Nixon de toute contrainte vis à vis du dollar…Pour la France elle s’est poursuivi en 73 puis à culminer en 83 sous l’égide de bérégovoy et fabius tous 2 socialistes et permettant ainsi d’emprunter sans discontinu depuis (les néokeynésiens de droite comme de gauche appliquant les mèmes recettes) sur les marchés financiers sans entrave et pour arriver à la situation cataclysmique d’aujourd’hui : une dette majoritairement entre les mains des étrangers et une charge d’intéret qui en fait un des principales postes de dépense budgétaire de l’état français…….

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