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Revoilà les Daltons : Les bonus baissent, mais les banques savent compenser ce recul affiché

Revoilà les Daltons : Les bonus baissent, mais les banques savent compenser ce recul affiché

L’opacité du mode de calcul et des sommes en jeu est toujours totale.

Ces jours-ci, l’atmosphère des salles de marché de Wall Street comme de la City est plus électrique que d’ordinaire. Chacun est sur les charbons ardents et les nerfs sont à fleur de peau. L’heure des bonus 2011, qui seront versés à partir de février, est arrivée. Mais, à l’inverse de 2009 et de 2010, quand les professionnels de la finance avaient renoué avec des rémunérations exorbitantes, les primes de 2011 accusent une forte baisse.

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Wall Street Indemnisation 2007-2010

 Petit graphique montrant la rémunération et les avantages à Wall Street. Comme vous pouvez voir la rémunération est demeurée à peu près le même pendant ces quatre dernières années. En valeurs nominales avec  la compensation de la baisse de 2008 (127 to 112 milliards de dollars), et en valeurs relatives, baisses en 2008 (36,2% à 33,1%) et 2009 (33,1% à 31,15) puis remontée dès 2010

source Wall Street Journal

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A lire une récente enquête du Wall Street Journal, les bonus discrétionnaires, basés sur la performance individuelle, des équipes et de la banque sont en effet tombés au niveau de 2008, l' »année noire » de la quasi-faillite du système financier.

Le cas de Morgan Stanley est assez frappant. La banque d’affaires américaine a plafonné les versements à 125 000 dollars (98 108 euros) par employé, tout en différant le paiement à ses dirigeants jusqu’à la fin de l’année 2012, voire 2013.  Chez JP Morgan Chase, les rémunérations totales de la banque d’investissement ont chuté de 9 % en 2011.

 Goldman Sachs a de son côté a prévenu ses associés que l’enveloppe globale qui leur est réservée a été réduite de moitié et a donc décidé de poursuivre sa politique de réduction des bonus accordés aux employés, et ce pour la troisième année consécutive. Le salaire moyen annuel d’un banquier dans cette institution avoisine les 367.000 dollars, bonus inclus.Le montant total des bonus annuels au sein de l’entreprise, qui a licencié 2.400 personnes en 2011, est en baisse de 21% par rapport à l’année précédente.Les 33.300 employés de Goldman Sachs ont obtenu en moyenne 367.057 dollars en 2011, bonus inclus. En 2010, ce chiffre s’élevait à 430.700 dollars. Les membres du personnel restent les mieux payés de Wall Street, devant ceux de JPMorgan Chase & Co, qui touchent eux la bagatelle de 341.522 dollars annuels en moyenne

source Bespoke

Les établissements européens, plus attentifs à la corrélation entre salaires, résultats et performance boursière, font eux aussi preuve de retenue. Les émoluments variables au Crédit suisse ont ainsi été amputés de 40 %. Bob Diamond, le directeur général du groupe britannique Barclays, a évoqué une année « très difficile » en termes de feuille de paie.

L’objectif de cette parcimonie est de réduire les coûts dans un environnement des affaires morose. Selon une enquête auprès de huit banques internationales réalisée par l’hebdomadaire londonien Financial News, portant sur les neuf premiers mois de 2011, la rémunération totale y a baissé de 4,7 % alors que les revenus nets chutaient de 10 % et les profits de 36 % par rapport à la période correspondante de 2010.

Tous les secteurs d’activité sont touchés. Les fusions-acquisitions souffrent du marasme économique, le négoce de la crise obligataire ; la gestion de patrimoine est pénalisée par les faibles rendements des placements financiers.

« Il ne suffit pas que le capitalisme fonctionne de manière efficiente ; il doit le faire de manière équitable » : comment dans ces circonstances expliquer cette virulente attaque lancée mardi 17 janvier par le gouverneur de la Banque d’Angleterre, Mervyn King, devant la commission des finances du Parlement britannique ?

OPACITÉ

La politique affichée de rigueur salariale dresse en fait un rideau trompeur. En effet, l’augmentation de la rémunération de base a largement compensé la contraction des primes. Une stratégie qui accroît le coût des licenciements calculé sur la partie fixe de ce qui est versé. De plus, le report sur les exercices ultérieurs des versements augmente les frais incompressibles des années à venir au moment où les banques doivent renforcer leurs fonds propres d’ici à 2019 dans le cadre du processus dit de Bâle 3.

Ensuite, l’opacité du mode de calcul et des sommes en jeu est toujours totale. Dans la plupart des institutions, les primes sont regroupées dans la catégorie fourre-tout des « frais opérationnels ». Le laxisme des règles comptables leur permet en toute légalité de gonfler artificiellement les profits, donc les bonus.

Par ailleurs, les comités de rémunération chargés du contrôle sont trop proches de la direction pour lui imposer des montants plus modestes répondant aux attentes de l’opinion comme des milieux politiques.

A entendre l’employeur, la rémunération variable est l’équivalent de l’à-valoir pour l’écrivain, soit la mesure la plus simple et la plus équitable d’un savoir-faire unique. L’argument clé est que faute de bonus dignes de ce nom, dans cet univers très concurrentiel, les experts de haut vol peuvent facilement se réfugier dans des entités plus généreuses.

Marc Roche/le monde+ agences janv12

Article paru dans l’édition du 19.01.12

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