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La Commission de la concurrence (Comco) suisse suspecte de nombreuses banques au niveau mondial d’avoir manipulé les taux de référence

 La Commission de la concurrence (Comco) suisse suspecte de nombreuses banques d’avoir manipulé les taux de référence

La Comco suspecte de nombreuses banques d’avoir manipulé les taux de référence Le gendarme de la concurrence suisse a ouvert une enquête, entre autres contre Credit Suisse et UBS. Des investigations autour du Libor sont aussi en cours dans d’autres pays

La Commission de la concurrence (Comco) ne s’en cache pas. C’est l’enquête la plus complexe de son histoire qu’elle vient d’ouvrir vendredi. Elle sera difficile, longue, un à deux ans, et aura des ramifications bien au-delà des frontières du pays, puisque des investigations similaires sont en cours ou en passe de l’être au Japon, aux Etats-Unis, au Canada et dans l’Union européenne ou les autorités suisses ont ouvert une enquête concernant des accords cartellaires entre une dizaine de banques européennes, qui auraient collaboré pour influencer les taux interbancaires. En France, Société Générale est concernée.

Infographie. Un reflet de la confiance

 Preuve de son importance, le gendarme de la concurrence suisse travaille sur ce dossier depuis près d’une année. C’est début 2011 qu’elle a eu en effet vent de l’affaire. Une personne ou une banque, cela n’a pas été précisé, lui a transmis une série de documents, sous forme de mails et de chats hautement sensibles. Leur contenu? Des éléments suggérant «de possibles accords cartellaires entre des banques qui auraient collaboré pour influencer les taux de référence Libor et Tibor ainsi que le commerce sur dérivés», selon un communiqué de presse publié hier. C’est une auto-dénonciation qui est à la base de cette investigation. Etablis par des associations bancaires, le Libor et le Tibor correspondent aux taux d’intérêt moyens que les banques pratiquent lorsqu’elles se prêtent de l’argent entre elles sur les places financières de Londres et Tokyo

«Nous avons des informations suffisantes pour nous lancer», d’après Olivier Schaller, en charge de l’enquête avec quatre autres collaborateurs. Les faits auraient duré de 2006 à 2010. Dans le collimateur de la Comco se trouvent UBS et Credit Suisse. Mais également une kyrielle d’autres banques, parmi les plus importantes du secteur. Il s’agit de Bank of Tokyo-Mitsubishi, Citigroup, Deutsche Bank, HSBC, JP Morgan, Mizuho Financial, Rabobank, Royal Bank of Scotland, Société Générale et Sumitomo Mitsui.

«Spreads» incriminés

«Vu le nombre d’établissements mentionnés, cela donne l’impression d’une entente à large échelle. Dans ces conditions, difficile de croire qu’il s’agit de quelques traders isolés, agissant individuellement. L’un ou l’autre échelon hiérarchique de ces banques a dû avoir vent des pratiques, voire les avoir soutenues», estime Christian Bovet, professeur et doyen de la Faculté de droit de l’Université de Genève. Les bénéfices tirés d’agissements n’ont pour l’heure pas été détaillés

Le gendarme de la concurrence soupçonne également les spécialistes en négoce des établissements visés de s’être concertés sur les «spreads», à savoir les différences entre les cours d’achat et de vente, pour des produits dérivés.

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UBS déjà épinglée

Ces affaires ne sont pas vraiment nouvelles. A la fin de l’année dernière, le gendarme européen de la concurrence avait même perquisitionné des sociétés financières en raison d’un même soupçon de cartel. Ce qui n’a pas été le cas en Suisse. La Comco a simplement envoyé un questionnaire aux banques leur demandant de fournir des informations. Pour UBS et Credit Suisse, cette récolte ne devrait pas poser problème puisqu’elles sont contraintes de le faire par la loi. D’ailleurs, UBS a déclaré «prendre l’enquête de la Comco très au sérieux» et dit «coopérer pleinement avec les autorités». Idem pour Credit Suisse, qui n’a été informé qu’hier matin de l’investigation. Ce n’est pas la première fois que la grande banque est accusée de telles pratiques. Le régulateur financier du Japon avait ordonné fin 2011 la suspension temporaire de ses activités dans les dérivés. L’an dernier aussi, les autorités de marché américaine et japonaise ont déjà enquêté sur une vingtaine de grandes banques, dont UBS. Les investigations concernaient principalement les données fournies avant et pendant la crise financière (2006-2008) et sur le mode de calcul du taux Libor en dollars. Pour les banques étrangères, sans siège en Suisse, il sera par contre plus difficile d’avoir accès à toutes les données, de l’aveu d’Olivier Schaller.

Autorité de tutelle des banques, la Finma a déclaré au Temps être en contact à ce sujet avec les établissements incriminés. A ce stade, elle ne veut pas faire de commentaire supplémentaire, mais Christian Bovet estime qu’elle pourrait elle aussi lancer sa propre enquête, «pour éventuelle violation des normes protégeant l’intégrité du marché, voire en raison de la violation du droit de la concurrence, ou pour non-respect de la garantie d’une activité irréprochable». Ou elle pourrait du moins assister la Comco dans ses démarches.

Peut-être plus que le simple lucre/ Quelles motivations derrière ces supposées manipulations?

Selon un courtier genevois , les banques visées par l’enquête ont pu se mettre d’accord pour fixer un taux, grâce auquel elles se prêtent de l’argent ou se refinancent, inférieur à celui du marché. Elles ont ainsi pu empocher au passage la différence entre le «vrai» taux et celui qu’elles fixaient aux intermédiaires ou aux clients. Une pratique toutefois très difficile à mettre en place et qui nécessite une coordination à large échelle. «Presque inimaginable vu le nombre d’intervenants et la liquidité de ce marché», selon notre interlocuteur. La Comco parle sobrement «d’une distorsion […] en faveur de ces établissements».

Simple appât du gain donc? Un autre courtier brandit une autre hypothèse: «Les banques les plus fragiles, surtout lors de la crise de 2008, auraient caché les taux réels auxquels elles empruntaient pour ne pas inquiéter les marchés sur leur capacité à accéder aux liquidités.» Le maintien du Libor à un certain niveau ne serait donc pas un but en soi, mais une conséquence de la volonté de certaines banques de rassurer sur leur solidité. Il faut rappeler qu’à l’époque la plus grande défiance régnait entre elles, renforcée encore par la faillite de Lehman Brothers. Un banquier genevois abonde dans ce sens. «Le Libor ne voulait plus rien dire à ce moment-là. Il avait perdu tout son sens. C’était le chaos.» 

Libor, suprême indice de référence /La valeur des produits indexés au Libor atteindrait 350 000 milliards de dollars

Ce n’est pas la première fois que le Libor est accusé de manquer de transparence, rappelait récemment Le Figaro. Mais dans l’enquête de la Comco, c’est le calcul du London Interbank Offered Rate (taux interbancaire offert à Londres) qui est directement remis en cause.

De quoi s’agit-il?

Le Libor, de un à douze mois, est considéré comme le principal indicateur de la santé financière mondiale. Il désigne une série de taux de référence, calculés sur la base de la moyenne des taux auxquels se prêtent les banques entre elles à Londres, à une échéance et pour une devise donnée. Idem pour le Tibor, mais à Tokyo. Le Libor concerne une dizaine de devises, comme le dollar, le franc, la livre sterling, l’euro ou encore la couronne suédoise. Le Libor est calculé tous les jours à 11h00 par la British Bankers’Association en fonction des taux d’intérêt auxquels un panel de grandes banques déclarent se prêter les unes aux autres sur le marché londonien.

Prêts aux entreprises

Libor et Tibor servent aussi au calcul des taux d’intérêt pratiqués sur d’autres types de prêts, comme ceux accordés aux entreprises. Ils sont également utilisés pour de multiples autres contrats financiers. En Suisse, de nombreuses hypothèques immobilières (celles à taux variables) se fondent sur le Libor ou y sont adossées. Selon le Financial Times, la valeur des produits financiers indexés au Libor se monterait à 350 000 milliards de dollars.

Par Bastien Buss /Le temps fev12

2 réponses »

  1. Ah ! Je cherche une rime en « OUILLE »

    Andouillle ? Magouille ? Fripouille ? Paire de ……. ?

    Pas facile. Donc, j’écrirais pas de chanson aujourd’hui ! Dommage hein ?

  2. ben on n’est pas vraiment surpris.un banquier m’avait montré comment,a une époque le titre peugeot etait travaillé toujours a la meme heure ,a la hausse.c’est pour cela que tous ceux qui se sont fait nettoyer a la bourse en sont partis définitivement.reste t-il beaucoup de particuliers sur le marché?

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