Agefi Suisse

Bulle Immobilière : Les prix en France arrivés au sommet

Bulle Immobilière : Les prix en France arrivés au sommet

Le volume de nouveaux crédits en forte baisse par rapport à 2011.

L’argument le plus surprenant de Standard & Poor’s pour dégrader les perspectives de dix banques françaises est celui d’une surchauffe du marché immobilier de la Grande Nation. Comme sa consœur Moody’s l’avait déjà fait l’année précédente. Notre voisin se trouverait donc dans une situation similaire, voire encore plus préoccupante que celle de la Suisse. Les critères qu’utilise The Economist pour son classement trimestriel des marchés immobiliers les plus surévalués au monde favorisent la deuxième option, largement répercutée notamment dans d’autres médias anglo-saxons. Les prix des maisons résidentielles sont 49% trop chers par rapport à la moyenne pluriannuelle des loyers, et encore 38% par rapport aux revenus disponibles par habitant. Les chiffres respectifs pour la Suisse ne se montent qu’à 0%, et même -7%! Du point de vue de la croissance des prix sans hausse de revenus correspondante, la France paraît encore plus menacée de bulle, puisque sur ce critère, elle occupe la première place mondiale! 

Cependant, la France a déjà connu une bulle immobilière dans les années 1980, qui était restée fortement concentrée sur la région parisienne. Et cette dernière enregistre à nouveau le plus d’exagérations, puisque les prix y ont bondi de plus de 40% depuis 2005. De manière plus globale, la majeure partie de la dernière hausse de prix a eu lieu au début des années 2000 (avec la sortie des prix des logements comparé au revenu annuel des ménages du «tunnel historique» entre 90 et 110 par rapport au niveau de 1965 pour se rapprocher de 190), la forte césure provoquée par la crise financière en 2008 ayant été résorbée. Même l’OCDE, basée à Paris, a remarqué qu’une «période prolongée de financement facilité pourrait déboucher sur une bulle de prix pouvant mettre en danger les banques françaises». Ce qui se vérifie notamment avec la situation très délicate de Crédit Immobilier de France (CIF), dont la viabilité est notée un cran au-dessus de la faillite par Moody’s depuis le 28 août, qui a obtenu au début de ce mois une garantie sur les dépôts plafonnée à 12 milliards d’euros, ainsi qu’une garantie sur les nouvelles émissions de 16 milliards d’euros maximum. La forte concurrence entre prêteurs hypothécaires à conduit à une érosion des marges, qui ne peut que difficilement être corrigée dans le scénario d’une hausse des pertes liés à des cas de défaut. 

Cette année, le marché affiche quelques signes de détente, puisque les prix au troisième trimestre se sont inscrit en légère baisse sur un an de 0,6%, un peu plus forte dans la région parisienne  (-1,1%) que dans le reste du pays (-0,4%), poursuivant ainsi la tendance de 2012, incluant également une diminution parfois très marquée des volumes de ventes. Le changement de paradigme est encore plus net au niveau des nouveaux crédits immobiliers accordés, qui ont baissé de plus d’un tiers par rapport à l’année précédente. Un signe très manifeste que les banques sont forcées à devenir plus restrictives, non seulement en raison du scepticisme exprimé par les agences Standard & Poor’s et Moody’s, mais aussi des exigences en capital propre de Bâle III.

Selon les prévisions du cabinet indépendant de recherche économique et financière PrimeView, particulièrement pessimistes, l’impact négatif sur la capacité d’emprunt ainsi que «la disparition progressive du soutien inconditionnel que l’Etat portait au secteur depuis plus de 15 ans» (le programme Scelliers, le dernier en date de grande importance, arrive à échéance fin 2012), devraient provoquer une baisse de 30% à 40% des prix immobiliers sur les 5 à dix prochaines années.n

Christian Affolter/Agefi oct12

9 réponses »

  1. Les bulles précédentes se passaient dans un climat coté acheteur ou l’endettement était bien moindre (le crédit individuel en général en France a beaucoup augmenté depuis 1990, ceci est une autre bulle en période de montée du chômage !!!) et le potentiel d’achat qui pour une part, particulièrement à Paris, se fonde sur les achats étrangers diminue fortement parce que les français n’ont plus les moyens (surendettés) et les étrangers ne sont plus attirés que par le tourisme (les dernières mesures du gouvernement sont dissuasives)

    D’autre part la qualité des gestionnaires, syndics, etc.; des « acteurs » de l’achat (bureaux de vente, notaires, etc.); des banquiers preteurs (taux faisant fi de la garantie totale qu’offre le système d’hypothèque déposée) est bien plus mauvaise qu’en Allemagne, Belgique, Suisse, etc.

    Ces deux éléments très brièvement résumés fondent la crainte d’une bulle, particulièrement dans le neuf !

  2. Merci beaucoup. Je me demande quelle est la méthode employée. Par exemple, le revenu belge moyen est égal au revenu français moyen. Les prix immobiliers belges sont 2 à 3 fois inférieurs aux prix français. Et pourtant le tableau montre l’immobilier belge plus surévalué par rapport au revenu que l’immobilier français (47 contre 38). Cela fait question.

    • c’est simple, pour chaque pays le prix de l’immobilier s’évalue en fonction du PIB de ce pays, de la moyenne salariale, de la densité de population, des revenus de la population etc… donc jamais une même maison ne sera au même prix en Belgique qu’en Allemagne. c’est la même chose avec bien des produits si vous analysez correctement les choses.

      • Merci Gaetan pour votre tentative de réponse, mais je crois que vous n’avez pas compris. On sait que les prix sont différents d’un pays à l’autre, ça n’est pas le point. C’est précisément le rapport entre prix de l’immobilier (trois fois inférieur en Belgique) et revenu (équivalent en Belgique et en France) qui cloche. Par rapport au revenu moyen, La France est beaucoup plus surévaluée (2 à 3 fois). Or le tableau donne le résultat inverse, « si vous analysez correctement les choses ».

  3. On ne peut pas comparer la bulle des années 90 à la hausse récénte. Dans les années 90, ils s’agissaient du jeu de la patate chaude avec des marchands de biens surendettés. Aujourd’hui les gens ont acheté pour se loger, ils revendent et achètent plus grands quand ils le peuvent. S’ils n’arrivent plus à revendre, ils gardent… résultats moins de transactions mais des prix qui tiennent. On nous annonce depuis longtemps une baisse des prix qui ne vient pas…Beaucoup de gens ne comprennent pas la tenue des prix or elle s’explique comme ça selon moi. Et puis il y a une pénurie structurelle de logements en France et c’est un vrai facteur de soutien.

    • Oui c’est juste (sou réserve de la pénurie structurelle de logements, qui me semble être un mythe) . De plus certains acteurs anticipant une forte hausse de l’inflation, ils sont naturellement incités à acheter ou à garder de l’immobilier. S’ajoutent à cela des taux d’intérêt maintenus artificiellement bas, qui dévient les décisions d’investissement vers de l’achat avec levier (voir par exemple futures le blog de Jean-Christophe Bataille qui recommande l’achat d’immobilier avec financement par la dette). Tout cela devrait se retourner en cas de hausse des taux. Charles Gave disait avant-hier sur BFM qu’en cas d’élection de Romney, la politique de taux réels négatis de la FED devrait prendre fin.

  4. @seb Je vous rejoins sur le fait que la bulle de 90 n’a rien à voir avec celle d’aujourd’hui. Dans les années 1990, c’est surtout la région parisienne qui était impactée et les professionnels (marchands de biens and co). Aujourd’hui, la plupart des particuliers ont spéculés sur les prix pour leur logement (achat petit en espérant une plus-value pour acheter plus grand, retirer l’idée d’une plus-value est la demande réelle fond comme neige au soleil) ou pour du locatif (tout le monde en veut d’un placement qui fait +10% par an sans rien faire, enfin jusqu’en 2008 en Province…).

    La pénurie structurelle est surtout très localisée dans les très grandes villes. Pour le reste, on est loin de réellement manquer de logements, seulement de logements à prix ou loyers abordables en regard de la capacité de financement des Français…

Laisser un commentaire