Art de la guerre monétaire et économique

L’inéluctable choc pétrolier par Pierre Leconte

L’inéluctable choc pétrolier par Pierre Leconte

Regardez les deux graphiques ci-dessous.

Le premier, c’est celui de la production mondiale probable de pétrole (1965 – 2100), qui a commencé de baisser nettement puisque le “peak oil” a déjà été dépassé.

Et le second, c’est celui de l’augmentation probable de la population mondiale (1800 – 2100) avec les 3 scénarios possibles, le deuxième scénario d’une augmentation de la population mondiale de 7,3 milliards d’individus actuellement à 9 milliards vers 2040 étant le plus probable).

Le prochain choc pétrolier ne proviendra donc pas de la reprise de la croissance économique occidentale ou mondiale, mais d’un déséquilibre structurel entre offre et demande de pétrole dû au fait que la population mondiale continue à croître massivement alors que l’on a passé le pic de production pétrolier et que l’on s’achemine de la sorte vers une diminution massive inévitable de ladite production jusqu’à la quasi disparition de cette source d’énergie.

Il en est d’ailleurs de même de la plupart des ressources naturelles existant par définition en quantité limitée alors que les besoins sont illimités.

Quant au pétrole non conventionnel, extrait de la roche grâce aux techniques de fracturation hydraulique –à l’instar du gaz de schiste- qui avait jusqu’à maintenant un rôle marginal dans la production pétrolière mondiale, il ne permettra pas de renverser rapidement le déséquilibre structurel précité, pour autant qu’il le renverse un jour ce qui est peu probable. Parce que son coût est exorbitant et qu’il ne sera pas rentable avant que le pétrole monte au moins vers 150 USD le baril et s’y maintienne. Ainsi l’idée que les USA, premier consommateur mondial d’or noir, deviendraient à l’horizon de quelques années auto-suffisants en pétrole du fait de la mise en exploitation croissante de ce pétrole non conventionnel sur leur territoire n’est qu’un thème de propagande sans base scientifique visant à permettre aux sociétés pétrolières US d’obtenir de l’administration Obama toutes sortes de dérogations environnementales, réglementaires et fiscales au nom de la prétendue “sécurité nationale américaine” qu’elles brandissent en permanence mais ne servant en réalité qu’à augmenter leurs profits financiers. En outre, les capacités globales de raffinage et d’acheminement du pétrole sont devenues insuffisantes, d’où des goulets d’étranglement à certaines périodes de pic de consommation ou de tensions géopolitiques. Enfin, la sortie de plusieurs pays du nucléaire et la diminution de cette source d’énergie (qui évidemment pose des risques qu’il faudrait mieux maitriser comme le montre la situation catastrophique japonaise) accroitra significativement et rapidement le déséquilibre énergétique mondial.

Indépendamment des effets du pic de production pétrolière qui est déjà dépassé et des capacités de raffinage et d’acheminement insuffisantes précitées, l’instabilité politique, sociale et économique dans les régions productrices de pétrole au Proche et au Moyen Orient, du fait du conflit radical entre sunnites et chiites pour la domination de l’islam et des révolutions arabes ayant mis au pouvoir dans plusieurs pays (Iran, Afghanistan, Turquie, etc… il y a un certain temps déjà, puis Égypte, Libye, Tunisie, etc… plus récemment) des islamistes, ensuite rejetés par les populations n’aspirant qu’à plus de démocratie et de prospérité et non pas à plus d’intolérance religieuse intégriste, joue un rôle majeur dans la fixation des prix pétroliers et gaziers (les seconds étant indexés sur les premiers). La plupart des chocs des prix pétroliers jusqu’ici ont été provoqués par des conflits ouverts ou latents dans la région du Proche et du Moyen Orient.

Comme tout indique que le processus révolutionnaire islamiste récupéré par les intégristes (attisé par la Turquie et le Qatar mais aussi par les monarchies du Golfe -Arabie saoudite, etc.- qui jouent double-jeu) fera à terme tâche d’huile (aux dites monarchies elles-mêmes qui ne pourront que difficilement s’en protéger) et qu’Israël et les USA pourraient, avec ou sans leurs supplétifs anglais et français, intervenir (pour préserver un équilibre régional dont la rupture menace croient-ils leurs intérêts fondamentaux) de plus en plus directement en Syrie, au Liban, en Égypte voire en Iran ou au Pakistan, on peut peut-être s’attendre à une forte hausse des prix du pétrole brut (crude oil), de l’essence (gazoline) et du mazout (heating oil) d’ici FIN 2013 – DÉBUT 2014 consécutif à UN POSSIBLE EMBRASEMENT MILITAIRE dans la région accélérant l”inéluctable choc pétrolier. MÊME SI LA GUERRE N’EST PAS NOTRE SCENARIO PRIVILÉGIÉ. Étant donné que toute opération militaire occidentale serait, sans l’aval du Conseil de sécurité de l’ONU, illégale et vouée à l’échec parce qu’aggravant encore le nombre des victimes et l’ampleur des destructions, tout en risquant de devenir une guerre régionale globale concernant la plupart des pays du Moyen Orient, voire pouvant même provoquer une implication plus forte de la Russie et de la Chine et devenir ainsi mondiale ! Sans compter qu’elle achèverait de plonger dans une nouvelle récession les économies occidentales , en croissance actuellement zéro, comme celles de la plupart des pays émergents, généralement consommatrices nettes d’or noir et de ses produits dérivés.

http://www.zerohedge.com/news/2013-08-28/22-reasons-why-starting-world-war-3-middle-east-really-bad-idea

De toutes façons, le double krach des obligations a déjà commencé et celui des actions arrive. Le processus actuel de STAGFLATION (croissance économique faible ou nulle accompagnée de tensions inflationnistes croissantes) s’approfondissant puisque la hausse des prix de l’énergie est au centre du renchérissement des prix de toute nature. Ainsi, une forte hausse des cours du pétrole brut favorise l’envolée des prix agricoles et alimentaires en faisant chuter la production de moins en moins rentable desdits biens, pourtant essentiels à la survie de centaines de millions de gens dans le monde qui ne parviennent pas à se nourrir correctement. Dans des pays comme l’Égypte et dans la plupart des autres en Orient, comme dans presque toute l’Afrique voire dans plusieurs pays en Asie et en Amérique latine, ce sera le retour des révoltes de la faim. A noter que les politiques monétaires ultra laxistes et de dévaluation compétitive des principales banques centrales occidentales, créatrices d’inflation dans les pays pauvres et émergents qu’elles obligent à remonter leurs taux d’intérêt à court terme pour la limiter (comme le fait le Brésil actuellement), portent elles-aussi une grande responsabilité dans les déséquilibres énergétiques, agricoles, alimentaires, etc… croissants entre le Nord et le Sud. Bernanke et ses pairs ne sont pas seulement des faux-monnayeurs mais aussi les affameurs des pays émergents et du Tiers Monde !

SOURCE ET REMERCIEMENTS: FORUM MONETAIRE DE GENEVE  30/8/2013

http://www.forum-monetaire.com/?p=9514

5 réponses »

  1. Oui, bon, ce n’est jamais que la centième fois qu’on nous la fait celle-là : voilà, au moins, quarante ans, qu’on nous l’annonce pour demain, la fin du pétrole. Mais apparemment, il y en a toujours qui croient dur comme fer à leur projection.
    Quant au soi-disant pic-huile, on en reparlera dans 10 ans, comme d’habitude…

  2. Choc pétrolier ou inflation plus que proportionnelle à l’inflation globale (d’ici quelques années ou quelques mois selon les politiques monétaires et quelques autres paramètres) ? Et pour quelle durée ?

    Quant au fameux peak-oil qui recouvre tant de fantasmes, je m’en remettrai à plus de prudence, à l’instar de ce qui s’est produit pour le charbon pour lequel on hurlait aussi à la fin du charbon avec des trémolos dans la voix et de l’angoisse bien scénarisée… à la fin du 19e siècle.

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