A Chaud!!!!!

L’Edito du Dimanche 3 Novembre 2013: De 2009 à 2017, survol de la Bourse et de la crise Par Bruno Bertez

L’Edito du Dimanche 3 Novembre 2013: De 2009 à 2017, survol de la Bourse et de la crise Par Bruno Bertez 

Résumé: Il faut avoir des actions pour se protéger contre l’avilissement accéléré de la monnaie qui  se manifestera à un moment donné, non prévisible. Le scénario d’avilissement de la monnaie passe par une nouvelle crise sur les marchés et la prise de conscience que les remèdes administrés depuis 2008 ne marcheront pas.  A un moment donné, les taux d’intérêt monteront, ce sera peut-être le facteur déclenchant de la nouvelle crise sur les marchés d’actifs. Ce sera une volatilité extrême.  La volatilité est votre ennemi, seule une stratégie de « buy and hold », acheter et conserver,  avec des achats dans la future chute, vous permettra de vous en sortir. 

 Il nous parait opportun de refaire une synthèse à usage boursier. En particulier de rappeler notre position car elle est complexe. Nous n’en avons pas changé depuis novembre 2009 puis mars 2010, puis décembre 2010.  Ceux qui nous suivent le savent, car nous avons jalonné ce chemin de petits cailloux blancs, comme le petit Poucet. Nous renvoyons en particulier aux deux articles de synthèse écrits en décembre 2010, articles volontairement provocants «  Ich bin uberbullish ».

La complexité vient à la fois de la réalité elle-même, car il y a eu des périodes de doutes et des périodes d’emballement, des cycles provoqués par la maturation des quantitative easing. Mais elle vient aussi du fait que, quelquefois, certains avis étaient des avis de court terme donnés dans une optique de trading.  Nous avons cessé depuis quelque temps de donner des avis ou sentiments sur le trading  en raison de notre conviction que la volatilité joue systématiquement contre les investisseurs ou opérateurs particuliers. Conscients  que le télescopage entre le court terme de trading et le long terme pouvait nuire à notre lisibilité si  un jour nous offrons une analyse qui vise notre position de long terme, nous insisterons pour que cela soit bien compris et identifié. 

Essayons donc de mettre un peu d’ordre.

 Vers Novembre 2009, nous sommes redevenus haussiers pour deux raisons: 

-Les marchés ne prenaient pas en compte à notre avis, les différentes mesures prises ou en préparation. 

-La voie choisie pour traiter la crise était à l’évidence la fuite en avant. On refusait la destruction. On avait choisi de  faire « plus » de tous les excès qui avaient été faits. 

-Nous démontrions et concluions, tout au long de 2010, que la politique monétaire de création de liquidités et de taux zéro avait pour objectif: 

  • -De rendre liquides les marchés grippés.
  • -De solvabiliser le secteur bancaire et shadow bancaire. 
  • -De gonfler la valeur des assets et collatéraux par  l’effet mécanique des taux, 
  • -De remplacer un système solvabilisé par les cash flows et revenus par un système adossé sur les assets, le sinistre système à la John Law. La Great Experiment de Law étant l’autre nom de ce que l’on appelle l’effet de richesse. 

En décembre 2010, nous relevions que l’on voulait « embarquer » les marchés, on ne se contentait plus de soutenir, on voulait sur-stimuler: « Tout est en place pour attirer les joueurs et rafler leur mise ». 

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Toutes les mesures  ont  été complétées entre temps, par la décision,  discrète, la plus importante dans la gestion de la crise, prise à mi-mars 2009,  la suspension des règles comptables FASB (FASB 157: C’est la fin de la fair value et du mark to market ,cela a été exigé par le Congrès qui l’a imposé au BOARD le 12 Mars 2009.) : la fin des bilans sincères. Nous avons expliqué que c’était en fait, la mesure la plus importante et qu’elle faisait entrer le système global dans la voie japonaise du « Extend and Pretend » pour longtemps. Lequel système, vous l’avez remarqué, a échoué, mais on tente le tout pour le tout, après deux décennies de pataugeage,  par l’expérience désespérée de Abe. Ce « tout pour le tout », ce « quoi que cela coûte » préfigure ce qui va se passer pour le Système global dans son entier. 

Nous avons sans cesse rappelé notre conviction, à savoir que dans la voie suivie, le système avait « brûlé ses vaisseaux  » et qu’il n’y a avait pas de possibilité de demi-tour ou marche arrière. Nous avons régulièrement insisté sur le « No Exit ». Vous êtes resté, comme nous, sur cette position puisque nous la répétons régulièrement, au risque de passer pour des radoteurs.

Nous avons développé une thèse complexe, à savoir que les tendances spontanées des économies étaient à la déflation sous le poids des dettes, des surinvestissements, des mauvaises allocations de capital, des capacités de production inemployées, de l’excès de dépenses improductives. Tendance à la déflation manifestée par une autre tendance qui est son prolongement, la tendance à déleverager, autrement dit à se désendetter. Retenez bien, c’est une tendance. 

Nous avons expliqué que le sens de l’action des prétendus responsables était de s’opposer au déleveraging, de faire boire l’âne qui avait encore soif mais avait l’estomac plein, et que la technique utilisée, celle de l’entonnoir, allait compenser les limites aux capacités de l’âne. On allait le gaver comme on gave les oies pour le foie gras, avant de les tuer. Tout ceci a été mis en place, sous divers noms ou appellations, créer du crédit, favoriser la prise de risque, réveiller les « animal spirits », relancer la transmission, etc. Les objectifs apparemment plus techniques ou plus sophistiqués de cette volonté de relancer ont nom: fixation d’un seuil maximum pour le chômage, fixation d’un objectif d’inflation minimum, et bientôt fixation d’un objectif de GDP nominal. 

Nous sommes restés détenteurs d’actions, investis en portefeuille,  au-delà des péripéties de moyen terme, n’avons jamais fait vendre. Nous n’avons pas non plus fait racheter et compléter sauf en une rare occasion, car rapidement, dans notre conception prudente, on risquait des accès de forte volatilité. 

 

Quand nous étions baissiers de court ou moyen terme, nous nous sommes contentés d’attirer l’attention sur la volatilité coûteuse pour les individus, rémunératrice pour les banques, et nous avons déconseillé systématiquement de participer aux mouvements en trading. Nous bannissons la bougeotte. La volatilité est le moyen de vous tondre,  avons-nous écrit et réécrit. Nous avons expliqué que la volatilité faisait partie de la panoplie de la répression financière laquelle vise à faire passer votre argent dans la poche des banques et des gouvernements. La volatilité est une sorte d’impôt sur les joueurs. 

Pourquoi sommes-nous restés haussiers contre vents et marées? A cause de notre conviction fondamentale: à savoir que, dans la voie suivie de la fuite en avant, il n’y avait pas le choix, c’était marche ou crève. Et nous faisions le pari qu’il n’y aurait pas de sortie des politiques non conventionnelles, que c’était impossible sans prendre le risque d’instabilité financière, c’est à dire le risque de rechuter dans une autre crise. Nous n’avons pas fait vendre car, malgré les tentations de sortir et de sécuriser, nous étions sûrs qu’il serait impossible de «  rentrer » dans de bonnes conditions. Les marchés montent et baissent dans la nuit, les banques  « front-runnent » les particuliers. Elles confisquent les écarts. Elles tondent et scalpent les particuliers et les institutions qui les représentent. 

Le fond de de notre position est le pari à long terme de la destruction de la monnaie. Ce que nous pointons du nom de « hausse de misère ». Pour soutenir le prix des assets « impaired », abimés, et soutenir la demande conjoncturelle, il faut aller de plus en plus loin et ceci évoque l’image du chasse neige qui repousse devant lui, toujours de plus en plus de neige. En attendant que le soleil, la chaleur, c’est à dire l’inflation, la fassent fondre. 

Nous insistons, nous sommes dans le camp déflationniste, c’est clair, c’est net.  Les mesures non conventionnelles ne sont pas productrices d’inflation parce qu’elles ne se transforment pas en revenus et en masses monétaires. Le multiplicateur de crédit s’est durablement effondré. Le « set-aside », ce que les banques mettent de côté et ne prêtent pas, par prudence et faute de bons débiteurs,  est de près de 30%, ce qui est colossal. Avant, on était autour des 12%. L’échelle de perroquet des prix et des salaires, l’inflation ne peut être grimpée sans transmission des largesses monétaires. Elles ne trouvent pas leur chemin vers le pouvoir d’achat. Elles provoquent à 99% l’inflation du prix des assets.  Avant, c’étaient  les assets financiers, puis, à partir de 2012, grâce à la monétisation par les Blackrock, Blackstone et compagnie, les assets immobiliers destinés à la location. 

 

 

Contrairement aux illusions et erreurs de Bernanke et de son Maître Greenspan, cette inflation des assets est déflationniste et non pas inflationniste. Elle conduit les firmes à privilégier les marges, les bénéfices, à rechercher la productivité, les buy-back, les opérations financières  et la constitution de trésors de guerre, etc, elle ne conduit pas à des dépenses d’équipement, à la création  d’emplois rémunérateurs et à la distribution de revenus accrus. De même, la hausse de l’immobilier locatif obtenue par la monétisation des QE chez les Blackstone et autres ne provoque pas une vraie reprise du housing, mais une flambée spéculative malsaine qui produit une forte hausse des loyers, et ponctionne le pouvoir d’achat disponible des locataires. Elle évince les locataires du marché, il y a eu un très bel article de Bloomberg sur ces questions récemment. 

Here is a chart of the Wilshire Real Estate fund versus real median household income.

wilsmed

And here is the Case-Shiller house price index against real median household income.

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Nous sommes les seuls à considérer que mécaniquement, organiquement, les QE tels qu’ils sont conçus ne sont pas inflationnistes, mais déflationnistes. Ceci tient à une théorie que nous n’avons pas la place de développer ici, qui repose sur l’idée que l’on se trompe sur le concept de coût du capital. Nous y reviendrons un jour. La hausse du prix des assets réclame une hausse des cash-flows pour les mettre en valeur, elle réclame une croissance des bénéfices,  donc elle renforce l’exigence de profit présent et futur  et le renforcement de l’exigence de profit dans un système est toujours déflationniste. La valeur élevée d’un asset (1) oblige à ce que l’on appelle « délivrer », c’est à dire à produire un cash-flow qui soutient le prix atteint par cet asset et c’est ce qui est à l’œuvre dans la hausse des loyers, et c’est ce qui est l’œuvre dans le gonflement exceptionnel des marges bénéficiaires des firmes. Les bulles d’assets réclamant en quelque sorte leur cash-flow croissant, elles forcent à la baisse des coûts, à la productivité à tous crins, aux délocalisations, aux  dégraissages, elles font pression sur la main-d’œuvre et les revenus. Le capitaliste qui achète cher en veut pour son argent, il exige un renforcement, une croissance des profits. Il exige qu’on serre la vis. N’est-ce pas Monsieur Icahn ? 

Le soi-disant effet de richesse recherché par Bernanke, effet de richesse qui viendrait du fait que les gens consomment une fraction de leurs plus-values, ce soi-disant effet de richesse est quasi-nul, deux cents par dollar au plus.  Pourquoi? Parce que pour concrétiser cet effet de richesse, il faut s’endetter et que les agents particuliers privés se sont aperçus de la dangerosité de l’endettement. Ils le voient chaque trimestre  quand ils regardent leur compte retraite -401k- qui ne progresse pas et leurs masses de dettes qui, elles, s’accumulent. Ce qui amusant, c’est que c’est le Maître de Bernanke, Friedman qui l’a démontré! Il démontre que les gens ne dépensent que ce qu’ils considèrent comme permanent. Par ailleurs, l’effet moutonnier est fort, on dépense aussi en fonction de ce que font ses voisins et relations. Il semble, par ailleurs, que Bernanke ait mal interprété une idée phare de Greenspan qui soutient que la hausse de la bourse « produit » de la croissance économique. A notre avis, Bernanke devrait inviter Greenspan à déjeuner et en discuter avec lui. Si la Fed se tient à ce mythe, c’est parce qu’il lui donne l’alibi de faire semblant d’œuvrer pour l’économie réelle et de masquer ainsi le fait qu’elle n’agit que pour le profit des banques, pour préserver la stabilité financière, tout en aggravant les risques de crash spéculatif! Copper correlation with U.S. equities Il n’existe que deux  moyen de transformer les QE en revenus et en demande: 

  • -Le premier est d’accroitre la demande et le déficit public et de les financer monétairement 
  • -Le second, c’est d’utiliser le vrai hélicoptère qu’avait en tête Bernanke, celui qui fait pleuvoir des billets de 100 dollars sur les consommateurs, distribue du pouvoir d’achat tombé du ciel. C’est le moyen qu’il conseillait d’utiliser  aux japonais en Décembre 1999.

 Les conditions politiques et culturelles ne se prêtant ni à l’un ni à l’autre, on reste dans le mythe, l’invocation, qui consiste à ajouter des zéros dans les livres de comptes et à prier pour qu’ils produisent des richesses et de l’emploi. La comparaison avec l’incantation n’est pas fortuite, nous sommes dans le délire de gens qui créent des représentations, des modèles, et qui finissent par croire que leurs représentations constituent la réalité. Nous sommes dans une sorte de faille/faillite de la pensée magique. En réalité, il s’agit d’une faillite de la pensée anglo-saxonne dite empirique, nous y reviendrons un jour. 

La politique monétaire étant un succès dans le gonflement de la valeur des assets et, en même temps,  un échec en matière de relance économique, la divergence entre la Sphère financière et la Sphère Réelle s’accroit sans cesse. Au lieu que la crise réconcilie les deux sphères, elle aggrave leur divergence, voilà le fond de notre diagnostic et la base de notre conviction.  Attention, des bouffées de réconciliations partielles sont toujours possibles, nous le disons souvent, mais précisons-le encore. 

Les forces de déflation ne faiblissent pas, elles se renforcent. Et ainsi nous arrivons au basculement de notre analyse. Comme les forces de déflation sont de plus en plus puissantes, comme le poids du boulet financier est de plus en plus lourd, alors, les mesures qu’il faudra prendre pour les contrer à un moment donné devront être encore plus radicales, audacieuses. En clair, plus la déflation menace et plus, pour s’y opposer, il faut prendre le risque de l’inflation de monnaie, de l’ultra-accommodation. Du gonflement du bilan de la Banque Centrale.  Dialectiquement, le renforcement des tendances à la déflation produit un besoin de plus considérable de son contraire, de son antidote: l’inflation monétaire, laquelle inflation monétaire, à un moment donné, mutera en inflation des prix des biens  et des services, en dévalorisation de l’unité monétaire.   On peut être à la fois déflationniste à tout crin et, en même temps, inflationniste forcené, ce que nous sommes. Mais il faut, comme nous le faisons, expliciter et surtout bien montrer que les phénomènes se passent à des moments différents. 

Et nous arrivons ainsi au fond de notre position sur le marché. La voie initiale choisie étant la fuite en avant, le cheminement diabolique que nous avons analysé est en place,  la déflation va muter, un jour,  en son contraire. La logique trace le chemin, met à nu le processus, elle ne permet pas de caractériser ou de dater ce qui va se passer. Ce peut être dans un an, dans deux ans, dans cinq ans. Notre pari est: vers 2017.

 Nous parions  sur la poursuite du gonflement des bilans des Banques Centrales et singulièrement celui de la Fed; nous parions sur l’absence de résultat significatif de cette politique;  nous parions sur la prise de conscience que « cela ne marche pas »; nous parions sur la venue d’un nouveau choc sur les marchés provoqué par la prise de conscience de l’échec; nous parions sur une perte de maîtrise des taux d’intérêt,  nous parions sur une nouvelle fragilité sur les marchés d’actifs à risque;  nous parions sur un redoublement de l’ultra-accommodation qui débouche –enfin, pourrait-on dire- sur l’inflation des prix et des services tant attendue et recherchée. Comme le dit Greenspan, c’est première fois depuis 1930 que la Banque  Centrale se fixe comme objectif de faire monter l’inflation. Plus elle tarde à réussir, plus elle prend le risque de sur-action. Or l’inflation est encore, c’est dramatique, en phase de ralentissement. 

Nous y insistons, la datation logique de la séquence est impossible. Ce peut être n’importe quand, car, pour déclencher une crise qui révèle la force des tendances déflationnistes et la fragilité de l’édifice financier construit pour les masquer, il faut un catalyseur, un évènement, un accident. Comme celui des subprimes, comme celui de la Grèce pour l’Europe, comme celui du Brésil ou de l’Inde en cours. Une crise sur les marchés n’est jamais provoquée par la surévaluation, on ne baisse jamais parce que l’on est trop cher, les surévaluations se valident d’elles-mêmes en marchant;  non,  pour chuter, crever une bulle, il faut un catalyseur, une piqure d’épingle. Le maitre du calendrier c’est le hasard, le random, cousin du chaos. 

Donc nous répétons, l’issue ce sera l’inflation et la destruction des monnaies et quasi monnaies. 

Mais dans la gamme des quasi-monnaies, tout ne s’équivaut pas. Certaines sont un peu moins « bidons » que d’autres. Certaines ont un peu plus de consistance.  Les actions, qui recouvrent des activités, du travail vivant, sont un peu moins « bidons » que les obligations et fonds d’Etat. Nous supposons que vous avez compris ce que vaut la parole des Etats: rien. Elles sont encore –pour quelque temps -des droits de propriété assis sur du réel.  

Nous sommes dans la situation difficile à comprendre et donc à expliquer où le prix des actions diverge d’avec leur valeur fondamentale, elles sont intrinsèquement surévaluées selon les critères historiques du Nobel Shiller, mais, en même temps, si on fait ce que nous disons sans cesse, si on réintroduit dans l’équation la monnaie, si on dit que l’on échange une action, part d’entreprise vivante, contre du cash  mort et surtout menacé de dilution présente et future, alors il faut conserver ses actions. Si nous étions l’un des idiots comme Fama, l’autre prix Nobel, qui considère que les marchés sont efficaces, nous ferions la pirouette suivante: les marchés savent que la monnaie in fine ne vaudra plus rien,  par conséquent ils traduisent ce savoir progressivement,  dans les prix, en surévaluant les actions en regard du cash, en regard de la monnaie émise et à émettre. 

Sur le calendrier et la datation. Nous répétons  que c’est imprévisible.  Il peut y avoir de multiples embellies apparentes, comme  on en voit maintenant dans l’économie réelle, et il peut y avoir des rechutes, tout cela c’est le hasard, le sort.  Il peut y avoir des embellies malgré les Cassandres car ils (ou elles) considèrent que, la situation étant mauvaise, et les mesures inefficaces, elle ne peut s’améliorer. C’est une erreur. La crise des subprimes, le révélateur, le symptôme, s’est manifestée alors que le ratio dettes du système était, mettons à 370% – de tête-, depuis il a globalement progressé, mais localement régressé, rien ne s’oppose à ce que, localement,  on puisse re-dépasser les records de 2008, absolument rien. Les liquidités sont abondantes, les taux sont nuls, le « put » est toujours là, les gens sont inconscients, la propagande est quotidienne, on peut faire un bout de chemin au-delà des records, surtout si le flot des nouvelles est positif. Les records  n’ont été  interrompus à la date  où ils ont été interrompus, nous le répétons, que par accident.   

Mais une chose est importante à retenir. Dans notre analyse, à un moment donné, il y aura une nouvelle grosse alerte sur les marchés dits de risque. Et c’est parce qu’il y aura cette grosse alerte, menaçante pour la stabilité financière, qu’il y aura un nouveau round, une nouvelle étape qui sera enclenchée. Et là, les choses ne se passeront pas comme prévu, plus qu’un apprentissage ou une répétition,  ce qui se produira, ce sera une prise conscience, un réveil, une perte de confiance. 

La situation des Etats-Unis parait meilleure qu’ailleurs. Une détente des paramètres de risque et de fragilité semble acquise aux Etats-Unis. 

Les risques d’accident sont, pensons-nous, ailleurs. Ils peuvent être en Europe qui connait un répit instable, ou encore chez les émergents. Là où certains pays sont, toujours selon nous, en phase terminale de décomposition systémique. Nous visons les émergents –stabilisés en ce moment grâce au no-taper- et singulièrement le Brésil et l’Inde. 

Le gros, très gros morceau étant la Chine. Elle nous parait vraiment en phase termina(b)le avec des dirigeants et régulateurs coincés. Ils sont dans l’impasse, dans le corner. Ils ont tenté un assainissement en Juin, ils ont raté leur coup; ils rouvrent les vannes actuellement. Les excès reprennent, on dérape à vitesse grand V!  La Chine est la clé de voute de tout le Système. Pourquoi? Parce que c’est elle qui accumule les dollars émis et qui ne servent, sont neutralisés. C’est la Chine qui détient la clé des multiplicateurs de crédit, de la vélocité monétaire mondiale.

L’originalité de la situation qui prévaut depuis 30 ans, c’est qu’une partie colossale de la monnaie émise est neutralisée, tout ce passe comme si elle n’existait pas. Deux cinquièmes des dollars émis sont gelés, ils ne partent pas à la recherche de leur contrevaleur. Ils acceptent même d’être dépréciés à condition que cela ne soit pas trop. Ceci autorise tout… ou presque… du moins pendant un certain temps. Pas à l’échelle de l’Histoire. 

Si nous avions un pari à faire, nous dirions que nous sommes, en Chine, dans la situation de 2006 aux Etats-Unis. Phase terminale des excès de crédit. Phase de fissures. 

(1) Note: En finance, la valeur d’un asset est la somme actualisée du cash-flow qu’il génère. En pratique pour les actions, 50ans. Si on inflate, si on fait monter monétairement le prix des assets, on fait monter,  de l’autre côté de l’équivalence, la somme actualisée des cash-flows qu’il faut générer pour justifier, pour soutenir le prix de cet asset.  Si on gonfle le flux des cash-flows nécessaires pour    valider le prix  en bourse, cela revient à hausser l’exigence de rentabilité donc à éliminer les investissements les moins rentables.  Alors il faut  rendre l’argent aux actionnaires sous forme de buy-backs. Ce que choisissent de faire beaucoup de sociétés.  La hausse monétaire du prix des actions contient en fait des anticipations de hausse de cash-flows qu’il faut valider, elle ne fait pas baisser l’exigence de profit, elle la renforce. 

BRUNO BERTEZ Le Dimanche 3 Novembre 2013

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12 réponses »

  1. merci pour la synthèse! la remontée des taux n’est pas un effet simple.la fed reverse les intérets au gouvernement us,et la bce doit gagner beaucoup d’argent avec les obligs espagnoles ou grecques.ensuite je pense que la bourse us ne peut que monter car elle est le garant de leur système de retraites.je pense qu’on ne peut plus parler d’une manière générale d’inflation ou déflation:les deux s’appliquent dans des secteurs différents sans qu’une tendance globale se dégage:inflation de la finance,et des secteurs associés(consulting, immobilier,avocats etc..)déflation de l’économie industrielle.

  2. Bien d insister sur la necessite d un element declencheur, c’est rare que les « analystes » precisent ce point capital.

    Interessante l idee, pas completement developpee, que la baisse de valeur de la monnaie soit dans les cours… Il y aurait a aller plus loin.

    Il y a plusieurs hypotheses. Les plus evidentes ne sont pas nouvelles ni interessantes, la question est comment se sortir de la bulle gonflee aux dollars au bon moment…

  3. Pour relancer l’économie réelle, Mario Draghi pensait avoir une idée géniale : le LTRO. En décembre 2011 et février 2012, la BCE a prêté 1018 milliards d’euros aux banques européennes. Durée : 3 ans. Taux d’intérêt : 1 %.

    Résultat : avec cet argent, les banques européennes ont massivement acheté des obligations d’État. Leurs achats ont augmenté de 26%, soit une augmentation de 550 milliards d’euros.

    Dans le même temps, les banques européennes ont réduit de 9 % leurs prêts aux entreprises privées ! Cela correspond à une baisse de 440 milliards d’euros !

    Depuis deux ans, les banques européennes ont de moins en moins financé l’économie réelle. Ces centaines de milliards d’euros de liquidités n’ont pas servi l’économie réelle. La dette des Etats européens a explosé. La dette des ménages a explosé. Le chômage en Europe a explosé.

    Le LTRO est un échec total.

    Mario Draghi est un neuneu.

    Mardi 5 novembre 2013 :

    Les banques européennes ont réduit de 9% leurs prêts aux entreprises en 2 ans.

    http://www.express.be/business/fr/economy/les-banques-europeennes-ont-reduit-de-9-leurs-prets-aux-entreprises-en-2-ans/198035.htm

  4. C’est très clair et j’adhère au raisonnement. Je m’interroge cependant sur l’éventualité d’une faillite du système bancaire. Dans cette hypothèse, nous serions dépossédés de nos actifs. Où ranger notre portefeuille?

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