Art de la guerre monétaire et économique

Géopolitique Friction du Dimanche 27 Avrul 2014: Ukraine, la propagande n’est plus ce qu’elle était Par Bruno Bertez

Géopolitique Friction du Dimanche 27 Avrul 2014: Ukraine, la propagande n’est plus ce qu’elle était Par Bruno Bertez

 Il y a quelques jours les autorités américaines avec l’aide du New York Times tentaient de fournir des preuves de l’implication des forces spéciales russes dans le soulèvement en Est Ukraine. Permalien de l'image intégréePermalien de l'image intégrée

Le New York Times publiait des clichés  de soldat russe dans une foule en Ukraine. Ce même soldat aurait figuré sur une autre photo prise en Russie. Si le même soldat avait pu être photographié en Russie puis en Ukraine, c’est bien la preuve de l’intervention russe. Ceci était présenté comme une preuve que la Russie manipulait les évènements et qu’elle était derrière les troubles dans cette région de l’Ukraine. C’était le chant de la victoire pour le camp occidental, ils tenaient une preuve accablante. Permalien de l'image intégrée

Deux jours plus tard, le New York Times, presque de façon discrète, révélait que la série de clichés soulevait la suspicion. Ces photos utilisées par l’armée américaine et le journal en définitive se sont avérées ne rien prouver. Le Journal a reconnu le fait et expliqué «  il s’est avéré que cette photo mise en avant par Obama était douteuse, elle constitue une ombre sur une preuve considérée comme convaincante  qui a été largement diffusée ».  Permalien de l'image intégrée

Avant, la presse vérifiait préalablement à la publication, maintenant on vérifie après, et on corrige en petites lettres, à l’intérieur du journal,  mais c’était avant n’est-ce pas …. 

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En fait la situation est confuse, voilà la réalité. Les russes ne semblent pas avoir le contrôle des pro-russes qui se soulèvent et les modérés du « gouvernement » sont plus ou moins débordées par des extrémistes va-t’en guerre qui veulent mettre le feu aux poudres. C’est en ce sens que la situation est dangereuse. 

Les conversations de Genève étaient une imbécillité, elles ont échoué comme prévu. Comment avoir des conversations utiles en n’invitant pas les premiers concernés, c’est à dire les représentants de Ukrainiens de l’Est, ceux de Crimée et ceux de la République du Donetsk? Moscou ne peut parler au nom des séparatistes pour la bonne raison qu’il ne les contrôle pas ! Il est symptomatique que les gens  de la République du Donetsk affirment avec force « Poutine ne parle pas pour nous », ce qui veut dire qu’il n’est pas notre porte-parole. Les séparatistes ne veulent pas d’un accord sur leur dos, ils font valoir que leur mouvement est aussi légitime que celui de la place Maidan, ni plus ni moins. Ils refusent le deux poids deux mesures. Permalien de l'image intégrée

En fait, chacun, essaie d’utiliser des éléments qu’il ne contrôle pas : 

  • Les Américains avaient mis en place des fantoches corrompus et compromis qu’ils pensaient contrôler, hélas le gouvernement minoritaire ainsi formé est débordé par l’extrême droite jusqu’au- boutiste. 
  • Les Russes courent derrière les séparatistes mais ces derniers refusent de servir de monnaie d’échange, ils veulent que ce soient leurs propres objectifs qui prévalent.

 Tout cela rappelle les erreurs d’appréciation qui ont conduit à la guerre 14, avec le fanatique Gavrilo Princip et le jeu des sociétés secrètes dans les Balkans. Les protagonistes se sont trouvés entrainés à la guerre par mauvais calculs successifs. 

La politique d’Obama et de ses supplétifs européens n’a aucun sens. Vouloir transformer la Russie en paria international comme on l’a fait avec le Corée du Nord est une stupidité sans nom. La Russie est un grand pays, puissant, avec des ressources et des capacités. L’histoire montre que chaque fois que les USA ont tenté cette voie, soit au moment de la guerre des 6 jours, soit au moment de Cuba, ils ont fait machine arrière rapidement et retendu la main. L’ordre international au plan bancaire, financier et sécurité est trop fragile pour que l’on puisse aller dans cette voie sans risque, Obama est dans la seringue et ses alliés avec lui. Il n’y a pas d’alternative militaire, armer Kiev serait une folie criminelle. La seule option est de faire machine arrière, souplement en camouflant l’échec et les erreurs avec l’aide de Poutine. Poutine ne veut pas que l’Ukraine tombe dans l’OTAN. Il faut trouver une modalité qui lui donne satisfaction et habiller tout cela de cosmétique qui permet de sauver la face. 

En Russie on parle beaucoup de conspiration; c’est l’un des axes de défense ou d’attaque comme l’on veut du gouvernement pour souder le peuple derrière lui. L’une des hypothèses qui circule est celle d’un procès Gorbatchev considéré comme responsable de l’humiliation subie par l’URSS.

Une rumeur a circulé il y a quelques années qui voulait que Gorbatchev ait été un « asset » des Américains et ait été manipulé par la CIA par l’intermédiaire d’émissaires français du 86 Boulevard Haussman. De l’argent, du gros argent aurait même circulé. A l’époque nous n’y avions guère prêté attention malgré la qualité de la source, mais dans l’ambiance actuelle, tout peut ressortir.

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Comme le dit Kissinger « La démonisation de Poutine n’est pas une politique,  c’est un alibi pour masquer le fait que l’on n’a pas de politique ». 

Si Obama et ses vassaux continuent dans la voie absurde actuelle, tout ce qu’ils vont réussir à faire, c’est recréer l’axe Moscou-Pékin, cet axe qui mettrait en danger le système monétaire si profitable aux Américains et qui est à la base de leur impérialisme. Obama détruirait ainsi les deux grandes réussites de Nixon, l’impérialisme monétaire US et la grande division, le fossé entre la Chine et la Russie. Permalien de l'image intégréePermalien de l'image intégrée

BRUNO BERTEZ Le Dimanche 27 Avril 2014

illustrations et mise en page by THE WOLF

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FRANCE:…bombe à 17 milliards des emprunts toxiques….trop d’effectifs des collectivités locales…trop de fonctionnaires

http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/finance-marches/actu/0203460885559-emprunts-toxiques-l-etat-veut-se-defaire-d-une-bombe-de-17-milliards-666851.php

http://videos.lesechos.fr/news/graphiques-vittori/collectivites-locales-pourquoi-il-est-urgent-de-s-en-occuper-les-graphiques-de-vittori-45-3499829930001.html

http://www.atlantico.fr/decryptage/et-chiffres-tomberent-toujours-plus-fonctionnaires-en-france-comparaison-dans-detail-avec-que-font-nos-voisins-europeens-nicolas-1052936.html

FRANCE:…reprise molle dans la restauration rapide…voyageurs prennent moins les trains SNCF…S&P maintient le AA…10 milliards à trouver dans l’assurance maladie…trop de fonctionnaires…5 ans de mauvaises prévisions gouvernementales…plan d’économies financé par l’Etat

http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/service-distribution/actu/0203461175735-vers-une-reprise-molle-dans-la-restauration-rapide-666748.php

http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/auto-transport/actu/0203458312115-les-voyageurs-prennent-moins-les-trains-de-la-sncf-666474.php

http://www.atlantico.fr/pepites/standard-poor-maintient-note-francaise-aa-1053207.html

http://www.atlantico.fr/pepites/assurance-maladie-marisol-touraine-detaille-plan-10-milliards-euros-economies-ici-2017-1053184.html

http://www.challenges.fr/economie/20140425.CHA3120/assurance-maladie-comment-marisol-touraine-veut-economiser-10-milliards-d-ici-2017.html

http://www.atlantico.fr/decryptage/tricheurs-deliberes-ou-drogues-erreur-retour-5-annees-previsions-economiques-gouvernementales-cote-plaque-jean-michel-rocchi-1052967.html

http://www.lecontrarien.com/plan-deconomies-de-la-france-un-scenario-optimiste-auquel-letat-sera-le-plus-gros-contributeur-presse-25-04-2014-france

FRANCE:…appel à la grève magistrats/greffiers le 29 avril…80% des Français ne croient pas à l’inversion de la courbe du chômage…

http://www.lexisnexis.fr/depeches/index2.jsp?depeche=25-04-2014/01#top

http://www.atlantico.fr/pepites/chomage-chiffres-mars-publies-vendredi-80-demandeurs-emploi-ne-croient-pas-inversion-courbe-1053242.html

LUXEMBOURG:…hausse du nombre de demandeurs d’emploi

http://www.lecontrarien.com/luxembourg-le-nombre-de-demandeurs-demploi-augmente-de-88-sur-un-an-25-04-2014-europe

RUSSIE:…dégradé par S&P

http://money.cnn.com/2014/04/25/news/economy/russia-sp-credit-rating/

CHINE:. Décès d’un banquier…déficit de 33 milliards au 1e T dans les services

http://www.zerohedge.com/news/2014-04-23/banker-death-epidemic-spreads-china

http://www.lecontrarien.com/la-chine-rapporte-un-deficit-de-33-milliards-de-dollars-dans-le-commerce-des-services-au-premier-trimestre-25-04-2014-chine

MONDE:…carte des coûts de production chamboulée (=baisse des salaires)

http://www.lemonde.fr/economie/article/2014/04/25/la-geographie-des-couts-de-production-chamboulee_4407385_3234.html

14 réponses »

  1. A propos de propagande

    En Russie on parle beaucoup de conspiration; c’est l’un des axes de défense ou d’attaque comme l’on veut du gouvernement pour souder le peuple derrière lui. L’une des hypothèses qui circule est celle d’un procès Gorbatchev considéré comme responsable de l’humiliation subie par l’URSS.
    Une rumeur a circulé il y a quelques années qui voulait que Gorbatchev ait été un « asset » des Américains et ait été manipulé par la CIA par l’intermédiaire d’émissaires français du 86 Boulevard Haussman. De l’argent, du gros argent aurait même circulé. A l’époque nous n’y avions guère prêté attention malgré la qualité de la source, mais dans l’ambiance actuelle, tout peut ressortir.

    • Merci pour ce tableau de la dette US, vous êtes un chou, il me semble qu’il n’y était pas là lors de ma première lecture. Je vais le mettre dans mon petit blog avec votre permission .

      Je ne m’étais jamais intéressée à la Russie , à part quelques lectures quand j’étais jeune Le Rouge et le Noir, et Guerre et Paix. Mais aujourd’hui je la regarde , devrais-je dire je regarde Poutine différemment ,je
      constate qu’il a le calme et l’envergure d’un homme d’état . Tout le contraire d’Obama et bien d’autres.

      PROPAGANDA…c’est la nature même du « politicoidiologie », les USA qui étaient les King de la matière , cela leur réussi moins aujourd’hui .

      Malgré que, si je dois être honnête je préfère vivre aux USA qu’en Russie.
      Gortbatchev me semblait un Honnête homme , je pense pour ma part qu’il ne sait pas enrichi comme d’autres. Mais s’il a été un asset….., il y a tellement d’asset aujourd’hui voir nos « Genies de Prix Nobel » made in UE, Borroso et le Flamingant Van Rompuy…Draghi..ect..

      Merci encore BB,
      Un grand Bonsoir depuis Madrid

      • Bien vu Marian le tableau sur la dette us n’était pas là lors de la 1ère édition, nous procédons souvent ainsi à faire quelques ajouts de ci de là au fil du temps….destinés aux non fans de lecture rapide!

  2. Comme vous le savez je traduis vos textes pertinents en espagñol, bien sur a ma façon sans trahir votre essence même, pour que les lecteurs espagnols sortent un peu du charabia officiel . (Nous parlions des USA, Russie, Chine ..)
    Voici ce que me répond un intervenant , avocat et intelligent en apparence . Je vous traduis..

    La machine faire des billets c’est l’oncle Sam qui la détient, elle peut imprimer jusqu’a l’infini .

    ( bien sur quand il y aura autant de Dolar que d’imbéciles , chose qui semble chaque jour plus probable..(ça s’est moi qui le pense) ). Les chinois peuvent inonder le marche en vendant leurs Dolars , les USA vendent leur Dolar massivement celà ne leur est pas nuisible me dit -il.

    Je me tue a expliquer que acheter de la dette , c’est très diferent que d’acheter des billets verts…ce n’est pas la même signification. Quelle manie de confondre Dette et monnaie.
    J ‘explique par a et par b, que si l’on détient des actions US ..comme c’est mon cas, si on met la machine a imprimer 42h sur 24 ce dollar ne vaudra rien. Car les USA ne tiennent que parce-que leur monnaie est la seule pour l’instant dans le commerce international.Chose qui peut changer..il n’y a rien d’inamovible.

    Excuser-moi pour les fautes d’orthographe , aujourd’hui je ne prends pas de gants.

    Voilà ou nous en somme ici , les gens mêmes dit intelligents ..pensent ainsi. C’est désespérant !

    Un grand bonsoir de Madrid

  3. Pardonnez-moi, c’est encore l’espagnole de service..jaja.
    Mais les chiffres de la dette que détient la Chine est pharaonique , MAIS là ou je perd mon Latin c’est de voir ce que détient la petite Belgique, mais dites moi..les moules frites c’est de l’or en barre! Est-ce vraiment la Belgique qui détient cette immense dette US ou est-ce un prête nom? voir la UE a travers la Belgique?

    Bonsoir depuis Madrid

    • C’est un déposiataire belge (Euroclear). Il est impossible de connaître l’identité et la nationalité de l’acheteur qui possède ces titres. Peut-être est-ce un fonds souverain chinois… on en sait rien.

      • Merci Surya,
        Euroclear , oui je connais, c’est peut-être même un fonds Americain ..ou nous tous européens.

        Dans toute cette opacité il est très difficile de voir..pléonasme qui vient à point!

        Un grand bonjour depuis Madrid

  4. Les entreprises Françaises ne sont pas une proie

    Cette phrase de Montebourg fait le tour des médias. sans analyse, sans critique.

    Il faut savoir qu’en politique comme en publicité on ouvre sa g….e pour pratiquer ce que l’on appelle
    « la dénégation », la Verneinung Freudienne. Quand on a un petit cognac à vendre, sur la bouteille, on écrit « Grand Cognac »; le principe de la propagande consiste à souffler aux gens ce que l’on veut qu’ils pensent et disent. Et donc à corriger le négatif.
    Donc Montebourg nie que les entreprises Françaises soient une proie. Se sent il coupable ou concerné par le fait qu’elles soient devenues une proie? Se sent-il responsable?

    Il est vrai qu’il y a de quoi! Avoir tellement mal géré les dossiers Grands Magasins, Peugeot , puis SFR qu’ils sont passés sous la coupe de l’étranger, il faut , il fallait le faire. La France se voit dépouillée de ses bijoux de famille, un à un, cela fait des décennies. Sans compter tout ce que l’on a laissé filer sous prétexte d’européanisation discrète.

    Le principe est simple, on met des boulets aux pieds des entreprises et des dirigeants, on leur confisque la liberté de gestion, on les fait dépendre de l’Etat, on refuse l’adaptation, bref on en fait des éclopés. Puis quand on a réussi ce qui au fond est l’objectif, c’est à dire la constitution d’un rapport de forces, ou plutôt de faiblesses, on se présente comme le sauveur. On prétend protéger, donner des conseils, des aides, des béquilles. Le tout avec la complicité d’un patronat acquis certes aux idées du capitalisme managérial, mais surtout pas à celui du capitalisme des propriétaires.

    Les gouvernements successifs, de fausse droite et fausse gauche sont un peu comme les picadors dans les corridas, ils piquent, harcèlent pour affaiblir la bête afin que le bourreau matador flamboyant puisse achever son œuvre. Et au dernier moment, comme les spectateurs au cœur sensible, ils s’indignent de la boucherie.

    Le capital productif, le vrai, peut de moins en moins supporter la concurrence de l’étranger dans un marché mondial qui se rétrécit. Sa rentabilité est trop faible, ses fonds propres insuffisants voire fictifs, sa trésorerie n’est que bancaire, sa stratégie est biaisée par l’interventionnisme et l’objectif du maintien à tout prix de l’emploi.

    Il suffit de tourner son regard vers Areva, cette autre catastrophe en attente d’arriver grâce aux actions conjointes de la Droite, de la Gauche et d’une PDG incapable…. mais récompensée néanmoins.
    Hélas, la collusion entre les patrons et le monde politique est totale, sans pudeur. Ne parle-t-on pas de sauver Bouygues actionnaire d’Alstom par erreur en faisant racheter sa part ? Attendez vous, si on décolle Bouygues à ce que, comme Le Figaro, TF1 tourne casaque et serve les intérêts bien compris du pouvoir. Comme le disait Edgar, ce n’est pas moi la girouette qui tourne, c’est le vent !

  5. Euroclear : « ‘On notera que la BCE, la BRI, aussi vraisemblablement la BNS, et plusieurs grandes entreprises européennes, achètent depuis la fin de l’année 2013 massivement les obligations d’Etat US en dollars US, via Euroclear (dont le siège social est en Belgique ce qui explique la raison pour laquelle dans les statistiques US ce petit pays apparait comme le premier souscripteur desdites obligations), ce qui a pour effet de limiter la hausse de l’euro, de soutenir le dollar US et de faire monter les cours des obligations d’Etat US. » Bruno Bertez.

    « tout ce qu’ils vont réussir à faire, c’est recréer l’axe Moscou-Pékin ». Emballé c’est pesé.

  6. Peter Van Ham et le journaliste européiste Jean Quatremer avaient déjà annoncé la couleur en septembre 2008 :

    Puisque les 28 peuples européens aiment de moins en moins l’Union Européenne, il faut maintenant trouver un ennemi commun pour obliger les 28 peuples européens à faire l’Europe.

    C’est le seul moyen qui reste aux européistes pour forcer les 28 peuples européens à faire l’Europe : trouver un ennemi commun, et faire une propagande médiatique contre cet ennemi commun … l’Europe par l’épée en quelque sorte.

    Lisez cet article très inquiétant.

    Cet article est révélateur de l’état d’esprit des européistes en septembre 2008 … et en mai 2014 :

    De «l’Europe par la paix» à «l’Europe par l’épée»

    Jean QUATREMER 9 septembre 2008

    Et si Vladimir Poutine avait rendu un service à la construction européenne en envahissant la Géorgie ? En envoyant son armée à l’extérieur de ses frontières pour la première fois depuis l’implosion de l’Union soviétique, en décembre 1991, la Russie a mis fin par la même occasion à l’indolence de ceux, nombreux, qui ont gobé le mythe du triomphe de la paix, de la démocratie et de l’économie de marché. Depuis la chute du mur de Berlin, les Européens se sont persuadés que les menaces ne les concernaient plus directement et que la guerre était l’affaire de quelques peuples attardés et bien sûr des Etats-Unis, gendarmes autoproclamés de la planète. Or, si la Géorgie ou encore l’Ukraine sont les marches de la Russie, ce sont aussi les nôtres depuis les élargissements successifs, et les intérêts de l’Union – voire son territoire – sont désormais directement exposés aux périls extérieurs. On peut se demander si un «ennemi» n’est pas la condition sine qua non, surtout pour une société européenne qui n’a même plus conscience du confort dans laquelle elle vit, pour qu’émergent une identité commune et un sentiment d’appartenance, deux éléments qui font aujourd’hui cruellement défaut à l’Union pour qu’elle se constitue en puissance mondiale crédible ?

    Les Etats se sont tous créés contre «l’autre» : l’Europe, fondée sur la paix, peut-elle paradoxalement échapper à l’épreuve du feu ? Curieusement, les Européens ont refusé de voir avec une constance troublante les signaux alarmants qui se sont développés depuis 1991 – multiplications des conflits armés à travers le monde, y compris en Europe, croissance géométrique des dépenses militaires dans le monde (1), raréfaction des matières premières, changement climatique, émergence d’«Etats voyous» ou malformés, terrorisme. L’Europe, qui se pense comme une «puissance douce», une «puissance civile», ne serait là que pour exporter ses normes de droit et son art du compromis. Cette vision du monde «woodstockienne» a volé en éclats avec l’irruption des chars russes en Géorgie : «Le problème est que nous vivons dans notre Europe postmoderne où tout le monde est beau et gentil, constate le président estonien, Toomas Hendrik Ilves, et tout à coup, nous nous retrouvons avec une grande puissance du XIXe siècle. L’Europe n’est pas prête pour ça.» La possibilité d’une guerre entre donc dans le champ du réel européen comme le reconnaît Nicolas Sarkozy en proclamant que l’Europe «veut la paix», manière d’admettre qu’elle est belle et bien menacée.

    Mikhaïl Gorbatchev, le dernier chef de l’URSS, a lui aussi mis en garde le monde, dans son texte adressé le 26 août à l’agence de presse russe Itar-Tass : «La situation provoquée par les événements dans le Caucase a déclenché des mécanismes politiques et militaires en Amérique, en Europe et en Russie. [.] Le danger d’une nouvelle scission est apparu et la menace d’un cataclysme mondial s’accroît.» Cette prise de conscience que l’Union a des ennemis – le mot est encore tabou – qui menacent ses intérêts ne peut que la contraindre à accélérer la mise en place d’une défense européenne, comme le souhaite la France, au moment où les Américains se sont largement désengagés du théâtre européen. Aujourd’hui, l’Union n’a ni les instruments théoriques ni les moyens militaires pour assurer sa propre défense et encore moins pour intervenir sur un théâtre extérieur autrement que pour faire du «maintien de la paix». Elle est un tigre de papier et Moscou se fait un plaisir de le lui faire sentir.

    Le choix qui se pose désormais à l’Union est brutal : la soumission ou l’affirmation de sa puissance militaire. Il ne s’agit évidemment pas de prôner la guerre contre la Russie. Mais aujourd’hui, la diplomatie de l’Union n’a qu’une arme, l’élargissement, ce qui est totalement insuffisant. Pour être crédible, il faut disposer de moyens de puissance et donc être armé. Or ce passage d’une Europe puissance civile à une Europe puissance militaire ne peut se faire que si les citoyens européens admettent qu’il y a un «eux» et un «nous», un territoire commun et des valeurs à défendre face au reste du monde, autant de préalables indispensables à l’émergence d’une identité européenne et donc d’une Europe politique. En clair, la guerre ou plutôt la possibilité d’une guerre est la condition pour que l’Union s’affirme selon les mêmes mécanismes qui ont permis aux Etats-nations de se construire. De «l’Europe par la paix» à «l’Europe par l’épée», en quelque sorte.

    Peter Van Ham, professeur néerlandais de sciences politiques au Collège d’Europe, fait justement le constat que «les limites de la campagne classique d’intégration ont été atteintes», comme le montrent les référendums négatifs en France, aux Pays-Bas et en Irlande (2).

    Les citoyens ne croient plus au mythe fondateur européen, celui d’une construction communautaire dépassant les antagonismes des Etats-nations pour établir la paix et une «sphère de prospérité». Un «idéal idyllique» qui ne correspond pas à l’état du monde et qui «entrave la formation de l’identité européenne» : l’Union n’est pas perçue comme un territoire doté de frontières qu’il faut défendre. L’irruption de menaces immédiates change la donne. Un ensemble de 460 millions de personnes (7 % de la population mondiale) est mieux à même de résister à des superpuissances et de peser sur le cours du monde. Le réarmement de l’Europe est donc à la fois idéologique – passer d’une sphère de prospérité à une sphère d’influence -, mais aussi matériel. Peter Van Ham va plus loin : l’Union doit se montrer «méchante» et «collectionner les scalps» afin de se faire «respecter».

    La guerre jouerait donc le rôle cristallisateur d’identité : déjà au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, l’Union avait identifié une série «d’ennemis», dessinant un monde «barbare» menaçant l’espace de paix kantien européen. Elle a donc déjà esquissé une «raison de nation» à la poursuite de l’intégration européenne, une raison «plus martiale et énergique». Vladimir Poutine, en réveillant les pulsions impériales de la Russie éternelle, va obliger les Européens à prendre plus rapidement leur destin en mains.

    Notes :

    (1) Contrairement à l’Europe où les dépenses militaires ont chuté au profit du financement de l’Etat social (les fameux «dividendes de la paix»).

    (2) In Visions d’Europe, par Bronislaw Geremek et Robert Picht, éd. Odile Jacob, 2007.

    QUATREMER Jean

    http://www.liberation.fr/tribune/2008/09/09/de-l-europe-par-la-paix-a-l-europe-par-l-epee_79763

    • Merci, article ignoble qui, comme tel, mérite diffusion.
      Bravo d’y avoir songé .

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