Art de la guerre monétaire et économique

La baisse du prix du pétrole frappe davantage la Russie que les sanctions

La baisse du prix du pétrole frappe davantage la Russie que les sanctions

Le pétrole entraîne la devise russe dans sa chute, forçant le Kremlin et les Russes à puiser dans leurs réserves

La baisse continue des cours du pétrole depuis juin fait grincer les dents à Moscou. Les exportations d’hydrocarbures représentent plus de la moitié des recettes fiscales de l’Etat. La Russie a elle-même contribué à la baisse du cours du pétrole en établissant un nouveau record de production post-soviétique en septembre, avec 10,61 millions de barils par jour. Mais avec un baril de Brent tombé à 89 dollars, l’équilibre du budget russe (fixé à 96 dollars le baril) est remis en cause, et la devise russe dérape. Effet secondaire, la fuite de capitaux, qui devrait atteindre les 100 milliards de dollars en 2014, selon les prévisions de la Banque centrale russe (BCR). La réticence à investir en Russie est due à la détérioration du climat d’affaires et politique, mais la chute du pétrole ne fait qu’aggraver ce phénomène récurrent. Tous ces facteurs vont gripper encore davantage l’économie russe, dont la croissance a déjà calé depuis le début de l’année. Elle ne devrait pas dépasser les 0,5% cette année, le plus faible taux depuis 2009.

Le rouble s’affaiblit depuis déjà cinq semaines sans discontinuer. La dévalorisation est le résultat de la baisse du cours du pétrole et des sanctions financières contre la Russie, qui ont coupé l’accès des grandes sociétés et banques russes aux crédits occidentaux. La devise russe a perdu 7% en un mois par rapport au dollar et presque 20% depuis janvier 2014.

Pour défendre le rouble, la BCR a dépensé pas moins de 55 milliards de dollars cette année, sans avoir pu arrêter la glissade. Ses ­réserves sont aujourd’hui de 454 milliards de dollars (il s’agit en fait d’une corbeille composée à 45% de dollars, 45% d’euros et 10% de métaux précieux). En principe, la BCR a prévu de laisser le rouble en «nage libre» à partir de janvier 2015, c’est-à-dire qu’elle cessera d’intervenir pour maintenir la devise dans un «corridor» fixé par rapport au dollar et à l’euro. Ses interventions seront limitées au soutien de la stabilité du système financier. Une perspective qui accroît la nervosité autour du rouble. Une partie des analystes envisage un dévissage immédiat de la devise russe dès le premier jour de «nage libre».

Une partie du marché s’attend à ce que la BCR relève son taux directeur de 0,5% pour réduire la pression sur le rouble, même si ce ne sera pas forcément suffisant pour calmer l’appétit pour les devises étrangères. Les sociétés russes doivent rembourser un total de 47 milliards de dollars d’ici à la fin de l’année à leurs créanciers internationaux. A cause des sanctions, seule la BCR est en mesure d’aider ces sociétés privées de refinancements. Le ministre des Finances Anton Silouanov ne se fait pas prier pour énoncer ses recommandations à la BCR, en principe indépendante. «Nous considérons qu’il est juste dans les conditions actuelles de chute du cours du pétrole et de fuite importante des capitaux, que le cours du rouble soit plus souple, afin que la banque centrale ne gaspille pas ses réserves en devises et en or», a-t-il déclaré vendredi à la télévision publique russe. Anton Silouanov a prédit qu’un «nouvel équilibre» va bientôt «se faire sentir non loin des cours actuels», soit 40,2 roubles pour 1 dollar et 51 roubles pour 1 euro. Du point de vue du ministre, le plus important est d’arriver à une «prévisibilité» du rouble. Outre le coussin financier apporté par les réserves en devises de la banque centrale, la Russie peut se targuer d’avoir deux indicateurs rassurants: une balance commerciale positive et un faible endettement de l’Etat.

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Mais c’est une maigre consolation pour les Russes, qui subissent déjà une forte augmentation des prix (+10% depuis janvier), alors que 43% des biens de consommation sont importés. 30% de la population active russe est directement rétribuée par l’Etat russe (police, armée, fonctionnaires, personnel de santé, éducation…). Ils sont exposés à des coupes de salaires (ou au minimum un gel), tandis que l’inflation s’accélère, d’où une sérieuse érosion de leur pouvoir d’achat. Et ils ne sont pas les plus menacés: depuis le début de l’année, 300 000 Russes sont passés sous le seuil de pauvreté, où vivent désormais près de 20 millions d’individus.

PAR EMMANUEL GRYNSZPAN MOSCOU/ LE Temps 13/10/2014

http://www.letemps.ch/Page/Uuid/32b12060-5240-11e4-a701-a0e5a8a72efd/La_baisse_du_prix_du_p%C3%A9trole_frappe_davantage_la_Russie_que_les_sanctions

5 réponses »

  1. La guerre impitoyable Arabie Saoudite aux ordres de l’Oncle Sam ils ont déjà fait le coup à l’époque de l’Union Soviétique mais ça c’était avant la Chine difficile de rejouer deux fois la même parti, la Russie a toujours un à deux coups d’avance pour l’instant, intéressant à observer nous qui sommes dans les gradins à compter les points, bon c’est pas gratuit et cela va rien nous rapporter c’est toujours la même histoire avec les perdants….

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