Art de la guerre monétaire et économique

Comment Tsipras S’est Mis À Genoux Face À L’europe/ Grèce : Syriza, les manoeuvres de Washington et la victoire de Berlin/ [Capitulation ?] La zone euro impose à la Grèce le prix fort pour prolonger son aide de 4 mois/ Un nouveau ‘plan Z’? La BCE travaillerait sur un scénario de sortie de la Grèce de l’euro

Comment Tsipras S’est Mis À Genoux Face À L’europe

Tsipras

Tsipras nous avait promis du sang, de la sueur et des larmes sur le sable chaud de l’arène européenne. Moins d’un mois après son élection, il a déjà tout cédé à l’Europe!

Tsipras roulait encore des mécaniques il y a huit jours

Décidément, ces Grecs sont d’incorrigibles Tartarin! Il suffisait de lire les déclarations de Tsipras à la presse allemande il y a une semaine encore:

« Je m’attends à des négociations difficiles lundi. Pour autant, je suis tout à fait confiant(…) Nous ne voulons pas de nouveaux prêts d’aide. (…) Au lieu d’argent, nous avons besoin de temps pour mettre en oeuvre notre plan de réformes. Je vous le promets: après ça la Grèce sera un autre pays dans six mois (…) Je veux une solution gagnant-gagnant. Je veux sauver la Grèce d’une tragédie et préserver l’Europe de la division »

Quel farceur de Tsipras! A l’approche de l’Eurogroupe de lundi dernier, la position de la Grèce était pourtant compliquée: après les échecs de la semaine précédente, les taux d’emprunt continuaient à flirter avec les 10%, et les agences de notations multipliaient les avertissements.

Malgré tous ces évidents signaux d’alerte, le porte-parole du gouvernement continuait à déclarer:

« La Grèce ne poursuivra pas dans la voie d’un programme qui a les caractéristiques des programmes des précédents gouvernements », a déclaré Gabriel Sakellaridis.

Tsipras était clairement prévenu par ses partenaires

En arrivant à Bruxelles, lundi, à l’Eurogroupe, le ministre grec Varoufakis était pourtant clairement prévenu sur les positions européennes.

Il suffisait d’écouter les propos du ministre allemand Schaüble à la radio allemande sur les possibilités d’un accord:

« D’après ce que j’ai entendu dire des négociations techniques au cours du week-end, je suis très sceptique, mais un rapport nous sera remis aujourd’hui et nous verrons à ce moment-là. (…) Le problème est que la Grèce a vécu au-dessus de ses moyens pendant longtemps et que personne ne veut plus (lui) donner de l’argent sans garanties ». Wolfgang Schäuble a par ailleurs jugé que le nouveau gouvernement grec se comportait de façon « assez irresponsable » et que cela n’apportait rien d’insulter ceux qui avaient soutenu le pays dans le passé.

Même Moscovici, qui n’est pourtant jamais avare d’une niaiserie de bisounours, avait déclaré:

Il y aura « une discussion dont je sais qu’elle sera compliquée et que j’aborde avec la certitude qu’on peut aboutir », a déclaré Pierre Moscovici à son arrivée à la réunion des ministres des Finances de la zone euro. « Il faut aboutir, on peut aboutir. Quand on a la capacité et la volonté, on peut aboutir », a-t-il insisté, tout en excluant de travailler à un nouveau programme d’aide pour la Grèce.

Difficile, dans ces conditions, de ne pas subodorer que le passage du Cap Horn s’annonçait de plus en plus dangereux.

Le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, avait d’ailleurs posé:

Il est « très clair que le prochain pas doit venir des autorités grecques (…) et au vu du calendrier, on peut utiliser cette semaine, mais c’est à peu près tout », a déclaré lors d’une conférence de presse le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, après l’interruption abrupte des négociations entre ministres des Finances des Etats membres de la zone euro à Bruxelles.

Il a évoqué la possibilité d’une nouvelle réunion exceptionnelle des mêmes ministres vendredi. « A condition que les Grecs demandent une extension et présentent une requête valable », selon l’entourage de M. Dijsselbloem.

Moscovici a-t-il planté l’Eurogroupe de lundi?

Du coup, le « clash » qui est survenu lundi soir en conclusion de l’Eurogroupe consacré à la Grèce n’était pas une véritable surprise. Mais… les propos de Varoufakis à l’issue de la réunion ont jeté le trouble sur une possible nouvelle gaffe de Moscovici.

Vers 18 heures, au bout de trois heures de réunion, l’information tombait: la délégation se retirait des discussions après que Jeroen Dijsselbloem eut distribué un texte « inacceptable ».

Selon ce document, les Grecs devaient s’engager à « accepter de conclure avec succès le plan d’aide ». Les Européens, eux, s’engageaient à » utiliser toutes les flexibilités que recèle le programme actuel ».

Et un ministre grec ajoutait:

« Ce n’était pas du tout ce dont nous avions discuté avant l’Eurogroupe avec Pierre Moscovici [le commissaire européen à l’économie], avec qui nous avons eu un échange très constructif », a assuré une source gouvernementale grecque.

De fait, il est étonnant que le président de l’Eurogroupe ait distribué en séance, après deux heures de discussion, un texte qui ait surpris à ce point la délégation grecque. Il existe donc trois possibilités: soit les Grecs mentent ou n’avaient pas compris le texte avant la réunion, soit Moscovici les a enfumés parce qu’il a parlé sans savoir, soit Moscovici était de bonne foi et c’est Dijsselbloem qui a pris sur lui de distribuer un texte que ni Moscovici ni les Grecs n’avaient lu (position soutenue par la Grèce le lendemain).

Dans tous les cas, la réunion de lundi a tourné court et l’Europe a affiché une nouvelle fois ses divisions.

La BCE évite discrètement le drame

Le lendemain de cet échec cuisant, Tsipras continuait à jouer dangereusement avec le feu enannonçant pour la fin de la semaine le vote de mesures sociales. Ce choix n’était pas innocent: il s’agissait d’un nouveau pied de nez à l’Union, qui avait fixé au vendredi l’ultimatum pour trouver un accord avec la Grèce.

Pendant que Tsipras fanfaronnait, la situation financière grecque devenait critique. Varoufakis avait beau déclarer que la Grèce n’avait pas besoin d’argent mais de temps, le gouvernement grec tirait la sonnette d’alarme auprès de la BCE. Le pays demandait 5 milliards de rallonge sur les prêts d’urgence pour éviter la faillite du système bancaire.

La BCE décidait finalement de relever son plafond de 3,3 milliards, montant jugé suffisant pour alimenter les banques grecques jusqu’au lundi suivant un éventuel constat de désaccord entre la Grèce et l’Eurogroupe. Dans le même temps, la rumeur, propagée vendredi par le Spiegel, commençait à courir selon laquelle la BCE préparait pour ce week-end un plan de crise sur le Grexit.

Tsipras met un premier genou à terre jeudi

Alors que la tension atteignait son comble, Tsipras posait un premier genou à terre jeudi matin. Après une nuit d’intenses négociations téléphoniques et numériques entre Juncker et Tsipras, Varoufakis envoyait en effet cette lettre au président de l’Eurogroupe Jeroen Dijsselbloem:

Le gouvernement grec demandait donc officiellement l’extension pour 6 mois du programme d’aide en cours, le Master Financial Assistance Facility Agreement. Cette demande était assortie de plusieurs annonces: le respect des objectifs fiscaux grecs et le financement neutre des nouvelles mesures du gouvernement Tsipras, le maintien d’une supervision par un groupe qui ne s’appellerait plus « troïka » mais qui y ressemblerait furieusement, et la préparation d’un plan de croissance respectueux des engagements grecs.

La Grèce se décidait donc à remplir les conditions imposées par l’Eurogroupe pour obtenir une aide de l’Union: demander officiellement l’extension du plan actuel et prendre des engagements sur le respect de ses obligations.

L’Allemagne fait boire à Tsipras le calice jusqu’à la lie

Après avoir été comparé à Hitler voulant faire du savon avec le gras des Grecs dans le journal Avghi, soutien de Tsipras, le cruel Dr Schaüble voulait prendre sa revanche. Il s’est donc offert un petit plaisir, celui de maintenir la tête de Tsipras dans la baignoire malgré ses évidents signes de reddition.

« En vérité, elle vise à obtenir un financement-relais, sans remplir les exigences du programme. Le courrier ne remplit pas les critères définis lundi par l’Eurogroupe », a également déclaré Martin Jäger, porte-parole de Wolfgang Schäuble, ministre des Finances, dans un bref communiqué.

Angela Merkel déclarait pour sa part:

Il y a « encore un besoin considérable d’amélioration de la substance des propositions pour que nous puissions obtenir un accord au Bundestag », le Parlement allemand, a prévenu Mme Merkel.

L’Eurogroupe de vendredi s’annonçait donc sous haute tension.

Tsipras sort le drapeau blanc

Alors que le texte proposé par Dijsselbloem le lundi précédent était encore flou, Varoufakis s’est présenté à l’Eurogroupe vendredi une corde au cou, face à des partenaires de plus en plus incrédules, et de moins en moins décidés à se laisser enfumer. Alors que l’ouverture de la réunion était prévue pour 15 heures, les ministres européens n’ont commencé leurs travaux qu’à 16h30. A 20 heures, Reuters annonçait qu’un projet d’accord était sur la table, prévoyant qu’Athènes devait envoyer lundi soir au plus tard une liste de réformes à adopter.

A 21 heures, le communiqué suivant était publié:

The Greek authorities will present a first list of reform measures, based on the current arrangement, by the end of Monday February 23. The institutions will provide a first view whether this is sufficiently comprehensive to be a valid starting point for a successful conclusion of the review. This list will be further specified and then agreed with the institutions by the end of April. 

Only approval of the conclusion of the review of the extended arrangement by the institutions in turn will allow for any disbursement of the outstanding tranche of the current EFSF programme and the transfer of the 2014 SMP profits. Both are again subject to approval by the Eurogroup.

« Les autorités grecques présenteront une première liste de réformes, fondées sur l’accord actuel, au plus tard le lundi 23 février. Les institutions se livreront à une première lecture pour savoir si ces propositions sont suffisantes pour constituer un point de départ pour une conclusion positive de l’examen global. La liste sera ensuite précisée et soumise à l’agrément final des institutions à la fin du mois d’avril. Seule l’approbation de la conclusion de l’examen global (…) permettra de débourser la tranche prévue (…). »

On le voit, la Grèce est désormais placée sous haute surveillance, et l’accord trouvé vendredi soir n’est qu’un accord de principe, très éloigné d’un blanc-seing. De nombreuses confirmations doivent encore intervenir avec une conclusion définitive. Tsipras n’est donc pas tiré d’affaire, bien au contraire.

Dans le long communiqué de l’Eurogroupe, on lira aussi:

The Greek authorities reiterate their unequivocal commitment to honour their financial obligations to all their creditors fully and timely.

Tsipras a donc officiellement renoncé à toute prétention sur la renégociation de la dette grecque. Le romantisme de Syriza n’aura pas fait long feu! S’engage maintenant, pour la Grèce, un compte à rebours qui doit s’achever fin avril…

La France bientôt soumise au régime grec?

Les Français feraient bien de méditer longuement l’exemple grec, car rien ne dit qu’ils n’y échapperont pas tôt ou tard.

En apparence, la France a éteint pas mal d’incendies qui la menaçaient, et elle a obtenu plusieurs arrangements avec la Commission. Dans une lettre envoyée cette semaine, Michel Sapin a d’ailleurs obtenu un quasi-report des engagements de la France à revenir à un déficit public sous les 3% de PIB pour… 2018, c’est-à-dire après les présidentielles.

Toutefois…

« Je tenais à réaffirmer l’engagement de la France à respecter en 2015 l’ajustement structurel de référence prévu par les règles européennes, soit 0,5% du Produit intérieur brut, » écrit en particulier le ministre dans ce courrier dont l’AFP a vu une copie, tout en reconnaissant une « divergence d’appréciation » avec l’exécutif européen.

Il subsiste encore quelques désaccords d’interprétation sur l’engagement français, désaccords qui tiennent principalement à l’étendue du déficit de 2014. Pour la Commission, la France doit restreindre son déficit de 0,5 point par rapport au déficit estimé de 2014. Si celui-ci devait être plus important que prévu, la Commission estime que la France devrait corriger son effort, alors que Sapin ne l’entend pas de cette oreille.

Le 49-3, une exigence européenne

C’est à la lumière de ces petits débats qu’il faut relire la péripétie du 49-3 en France. Beaucoup se demandaient pourquoi Manuel Valls avait choisi une voie aussi exposée pour faire passer la loi Macron. C’est une déclaration d’Angela Merkel qui a éclairé le sujet vendredi lors d’une conférence de presse conjointe avec François Hollande, à l’issue d’un déjeuner:

« La France n’a pas besoin de mes encouragements ni de mes félicitations, mais je crois que c’est une bonne chose que cette loi ait été adoptée. Il y a une véritable capacité d’agir qui existe », a-t-elle ajouté.

En réalité, la loi Macron est un atout maître dans le dispositif français de réponse aux exigences de l’Union Européenne, et les ruades de poulain fougueux poussées par Manuel Valls sont d’abord faites pour éviter des sanctions imposées par la Commission (avec un chaleureux soutien prussien) contre nos dérapages budgétaires incessants.

Il restera à voir si le prix (notamment politique) à payer pour éviter les sanctions européennes ne se révèlera pas supérieur à leur bénéfice…

La folie financière reprend l’Europe

Pendant ce temps, la Commission a décidé de reprendre la marche du marché unique des capitaux, en ouvrant une consultation auprès des Etats membres sur les adaptations nécessaires de la réglementation existantes. L’ensemble devrait déboucher sur une directive en 2019.

Dans ce cadre, un accès sera mis sur la titrisation, procédure bien connue qui consiste à accorder des crédits et à céder leur recouvrement à un autre acteur. Cette technique a déjà tué l’économie mondiale en 2008, en encourageant les créances douteuses selon le bon principe: le prêteur n’est pas le payeur…

La Commission s’est mise en tête d’assurer le financement des PME par cette technique. On mesure la folie qui règne encore dans les esprits bruxellois.

L’Ukraine toujours en guerre

François Hollande continue à accompagner Angela Merkel dans ses réunions avec Poutine. Cet escort boy de luxe adore répéter à l’envi que les accords de Minsk 2 doivent permettre de garantir la paix en Ukraine.

En dehors d’un échange de prisonniers, on voit mal à ce stade l’apport de ces négociations. Les combats continuent (à l’avantage des Russes), et l’Ukraine est au bord de l’effondrement financier. Mais Hollande trouve là de bonnes occasions de faire des déclarations positives de bisounours pour tenter de redorer son blason.

http://www.eric-verhaeghe.fr/comment-tsipras-sest-mis-a-genoux-face-a-leurope/

Grèce : Syriza, les manoeuvres de Washington et la victoire de Berlin 

imageAprès les nombreux effets de manche du gouvernement d’extrême-gauche grec de ces derniers jours, la réalité s’est imposée à Athènes. Tsipras a accepté de se soumettre lors de la rencontre des ministres des Finances de l’Eurozone. Ayant accepté toutes les conditions fondamentales de l’Eurogroupe (états membres de la zone euro), Tsipras doit présenter la semaine prochaine des réformes qui devront être validées par la “Troïka”.Sur quoi a capitulé la Grèce ?1) La Grèce a globalement accepté de compléter la restructuration entreprise avec l’aide de la Troïka. Celle-ci repose sur un soutien financier via des taux à intérêts très bas en échange de réformes structurelles. Syriza avait campagne contre le “memorandum” – du nom du programme négocié entre la Grèce, la Commission Européenne, la BCE et le FMI – et pour mettre fin au “plan de sauvetage” qu’il détaillait.Tsipras déclarait encore la semaine dernière que ce plan était “fini” et que la Grèce n’accepterait plus d’argent de ses créditeurs. La faillite inéluctable qui pointait à l’horizon en cas d’échec hier a eu raison du démagogue d’extrême-gauche.2) La Troïka, que Tsipras avait présenté comme “morte”, est toujours bien en place. Dans les documents officiels elle est désormais désignée sous le terme “institutions” (BCE – UE – FMI), pour modérer l’humiliation de Syriza. Il n’empêche, les institutions en charge de veiller à la mise en oeuvre du plan de sauvetage ne sont rien moins que celles qui constituent la Troïka. C’était une condition sine qua none de tout soutien à Grèce : difficile en effet d’aider un pays qui refuse de discuter avec ceux qui le financent.3) La Grèce remboursera la totalité de sa dette. Alors que Tsipras annonçait que la dette ne serait pas remboursée puis qu’il escomptait un abandon de la part des créditeurs du pays de 50% de celle-ci, son gouvernement a accepté par écrit hier d’honorer la totalité de sa dette qui s’élève à 320 milliards d’euros.4) Les fonds de recapitalisation des banques grecques demeurent sous contrôle européen. Le gouvernement d’extrême-gauche voulait que les fonds de l’actuelle tranche du plan de sauvetage restants soient donnés au Fonds Hellénique de Stabilisation Financière. Une manoeuvre évidente pour disposer de liquidés très rapidement et arroser ainsi à sa discrétion ses clientèles électorales. Les Européens ont refusé et Tsipras a du là encore capituler. On ne rasera pas gratis ces prochains mois en Grèce.5) Le gouvernement grec accepte que le FMI continue d’intervenir dans le processus économique grec. Tsipras a signé le document de l’Eurogroupe stipulant : “Nous acceptons que le FMI continue de jouer son rôle”. Un revirement à 180° puisque cet acteur essentiel de la Troïka continue d’agir.

6) Le gouvernement grec ne prendra “aucune initiative unilatérale”. C’est-à-dire qu’il accepte de ne pas voter de lois sans l’aval des capitales européennes d’ici à juin, du genre de celles qu’entendait appliquer Tsipras. Le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem, et le commissaire européen à l’économie, Pierre Moscovici, ont annoncé en conférence de presse que cela s’appliquerait aussi aux annonces tapageuses faites par Tsipras lors de son discours au parlement grec dans lequel il voulait remettre en cause les réformes du marché du travail réalisées précédemment.

7) 4 mois plutôt que 6 mois. Le gouvernement grec demandait une allonge de 6 mois de son financement sans droit de regard de la part de ses créditeurs européens, le temps pour elle de mettre en place “ses” réformes qui se chiffrent à 20 milliards d’euros. C’était seulement “après ces six mois”, que le gouvernement grec entendait “renégocier” son “plan de sauvetage”.

Comme on l’a vu, ces réformes ne verront jamais le jour hormis celles d’ordre cosmétique. L’Eurogroupe a refusé d’étendre à 6 mois son plan d’aide en le réduisant à 4 mois et ce sous condition. C’est un point fondamental car cela signifie que le plan transitoire expire au mois de juin. Or la Grèce doit rembourser la Banque Centrale Européenne de 6,7 milliards d’euros en juillet et août.

En d’autres termes, le plan de sauvetage défendu par l’Eurogroupe est maintenu pendant 4 mois, sans condition. Et au mois de juin, le gouvernement grec sera dans une situation encore plus difficile financièrement qu’à présent et ses soutiens en Grèce auront largement déchanté quant aux promesses de campagne de Syriza.

Comme l’a déclaré le ministre allemand des Finances, très satisfait : “le gouvernement grec aura beaucoup de difficultés à expliquer l’accord à ses électeurs”.

Le Parti Communiste Français, membre du Front de Gauche, était quant à lui trop occupé à sauver la face pour rentrer dans le détail de l’accord :

Cet accord-pont est 1 victoire du peuple grec & la preuve que le changement est possible @tsipras_eu#Eurogrouppic.twitter.com/e7WrTtFvSY

— Pierre Laurent (@plaurent_pcf) 20 Février 2015

De la même manière, Jean Luc Mélenchon s’est empressé de faire passer cette capitulation de Syriza en “victoire”, au risque de se solidariser de l’énorme désillusion qui va s’emparer de l’électorat d’extrême-gauche :

@JLMelenchon Hourra ! L’ignoble Schäuble n’a pas eu le dernier mot ! Félicitations au gouvernement grec !
22:15 – 20 Févr 2015

Source : http://breizatao.com/2015/02/21/tsipras-capitule-totalement-bruxelles-et-valide-le-plan-de-sauvetage-de-la-troika/

http://civilwarineurope.com/2015/02/21/grece-syriza-les-manoeuvres-de-washington-et-la-victoire-de-berlin-video/

Ils sont forts quand même les eurocrates…

Mais bon, comme Syriza n’est pas prête à sortir de l’euro, elle n’obtiendra en effet rien de plus que ces petits assouplissements – qui ne sont certes pas négligeables non plus…

Ca devrait quand même swinger à Athènes ce we…

Ca relève quand même de la psychiatrie cette volonté de garder une monnaie totalement inadaptée à son économie…

À suivre lundi pour la conclusion (après tout, on verra ce que les Grecs proposent et si la kommandantur l’accepte…) – et à voir dans 4 mois.

Un compromis a été trouvé in fine. Le président de l’eurogroupe parle d’une confiance retrouvée. Mais elle est encore très fragile. Lundi, le gouvernement grec doit déposer la liste de ses réformes.

Est-ce enfin la bonne? Un peu avant 21 heures, les ministres des Finances de la zone euro sont parvenus à un compromis sur le sauvetage de la Grèce . Enfermés depuis le début d’après-midi dans le Justus Lipsius, le siège du Conseil européen, les grands argentiers se sont entendus sur un texte d’accord sur la prolongation du plan d’aides à Athènes qui expire le 28 février prochain.

Un texte rigoureux qui encadre le processus de négociations avec les Grecs dans un corsage très serré. Un texte négocié avant même le début officiel de la réunion par Jeroen Dijsselbloem, le président de l’Eurogroupe (l’instance réunissant les ministres des Finances de la zone euro) avec les principaux acteurs du dossier (BCE, FMI, Allemagne, et Grèce). L’extension accordée ne vaut finalement que pour 4 mois jusqu’à fin juin. Pour le gouvernement grec, la couleuvre à avaler est rude. Dès lundi, ils doivent soumettre leur programme de réformes et les trois institutions, Commission européenne, FMI et BCE doivent juger s’il est suffisamment solide pour que ce programme soit jugé comme un « point de départ valide » pour aller vers une conclusion positive du programme. Si c’est oui, l’Eurogroupe donnera par téléphone son feu vert à l’extension du programme.

Si c’est non, il faudra convoquer un nouvel Eurogroupe mardi. Mais chacun est déterminé à tout faire pour l’éviter. Le ministre des finances grecs a beau eu déclaré qu’il se réjouissait d’avoir la liberté d’écrire son propre scénario et non celui imposé dans l’ancien programme, son stylo sera sous contrôle.

Pour le reste, la Grèce accepte l’accord, promet de rembourser ses créanciers, devra se conformer aux anciennes procédures, et donc n’obtiendra d’argent que si elle obtient un feu vert des institutions fin avril. Elle s’engage à ne prendre aucune mesure de manière unilatérale,ni à revenir en arrière sur les réformes déjà accomplies. Le FMI confirme sa place tandis que la BCE obtient de bloquer 10 milliards d’euros d’aides pour la recapitalisation des banques, alors que cette somme était disponible pour le budget avant les élections grecques. Mais les chiffres ont parlé, ne laissant au premier ministre Alexis Tsipras que peu de choix. Les Grecs ont retiré 2 milliards d’euros de leurs comptes bancaires en une semaine, la télévision grecque évoquant même un milliard de retrait au cours des deux derniers jours. Pour les banques grecques, la situation devenait insoutenable dès la semaine prochaine. Grâce à l’accord, on évite un contrôle des capitaux imminent, se réjouissait une source proche de la BCE.

Dans ce contexte, la réunion a démarré dans un incroyable niveau de tension. Lors de négociations difficiles, il est d’usage que les principaux protagonistes se retrouvent seuls dans une pièce isolée, avant la réunion entre les 19 ministres, pour rapprocher leurs points de vue. Une petite table, pas de témoins, et une discussion à bâtons rompus pour aplanir les difficultés. C’est ce qui passé vendredi avec Wolfgang Schäuble et Yanis Varoufakis… sauf que les deux ministres n’étaient même pas dans la même pièce. Jeroen Dijsselbloem, le président de l’eurogroupe, Pierre Moscovici, le commissaire en charge des affaires économiques et Christine Lagarde, la directrice générale du FMI, en étaient réduits à faire la navette entre les deux protagonistes, qui ne peuvent visiblement plus se souffrir. « Il ne faut plus que Schäuble et Varoufakis soient dans la même pièce, il faut sortir de ce psychodrame », avait prévenu un officiel européen de haut rang deux jours avant la réunion.

Le ministre allemand n’est toutefois pas le seul à peu goûter les méthodes du très médiatique dirigeant grec. En entrant dans le bâtiment du Conseil, Valdis Dombrovskis, le vice-président de la Commission, assénait sans langue de bois que « la rhétorique changeante des autorités grecques a sapé la confiance ». Il faut dire que le nouveau gouvernement Syriza a visiblement des manières assez déroutantes. Devant le refus net provoqué côté allemand par sa lettre de demande d’extension envoyée jeudi, les Grecs ont songé vendredi à une manœuvre abracadabrantesque : prétendre que le courrier envoyé la veille n’était pas le bon, et renvoyer une nouvelle missive, bien plus conforme aux demandes allemandes, en assurant que celle-ci était la bonne depuis le début. Un subterfuge digne d’un collégien, auxquels les Grecs ont finalement renoncé, mais qui a malgré tout été ébruité par le quotidien allemand « Bild ».

Yanis Varoufakis a démenti cette nouvelle sur twitter vendredi après-midi, mais le niveau de défiance avait atteint un point de non retour. Au point que ce dernier a été évincé au fil des discussions de vendredi. Jeroen Dijsselbloem a très vite appelé directement à Athènes Alexis Tsipras, le Premier ministre grec, pour régler les détails de l’accord, selon des sources européennes. Angela Merkel est aussi intervenue par-dessus le dos de son ministre des finances, Wolfgang Schauble, trop remonté contre la Grèce pour parvenir au moindre compromis. En petit comité, l’accord a ainsi été élaboré, avant d’être présenté à l’ensemble des ministres des finances de la zone euro dont la plupart attendaient la fumée blanche à l’écart.

Quand ils sont entrés dans la salle de réunion vers 19 heures, il leur a fallu examiner ligne par ligne ce texte que les Européens tentent désespérément d’écrire depuis deux semaines. Après un premier tour de table fastidieux, un second a permis de lever les malentendus. Athènes a obtenu un répit, avant de nouvelles négociations, cette fois pour un nouveau plan d’aides. Les prochains mois promettent donc d’être encore difficiles pour Athènes et la question de la sortie du pays de la zone euro devrait encore continuer à flotter quelque temps. Car Jeroen Dijsselbloem a beau eu se féliciter que cette dernière réunion ait permis de rebâtir la confiance, une ligne a été franchie. « Je crois qu’on a atteint un point où [les pays les plus remontés] vont dire à la Grèce : ”si vous voulez vraiment partir, et bien partez !” », avait averti avant la réunion Edward Scicluna, le ministre maltais des Finances.

Anne Bauer et Renaud Honoré (à Bruxelles), Les Echos, 20/02/2015

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La Grèce devra remettre sa copie lundi

Ce projet indique que la Grèce demande «une extension» de l’accord-cadre d’assistance financière (MFAFA) garantissant sa survie financière et «inclut des éléments qui éclaircissent» ses engagements. Athènes a accepté d’aller bien plus loin qu’elle ne l’entendait au début des négociations, entamées il y a dix jours.

Athènes devra présenter lundi soir ses réformes structurelles (lutte contre la fraude fiscale, corruption et administration publique). «Les institutions (UE, BCE et FMI) donneront ensuite une première opinion pour dire si cela est suffisant comme point de départ pour terminer la revue» des créanciers, a indiqué la zone euro dans un communiqué.

L’Eurogroupe se prononcera ensuite sur ce paquet de mesures, probablement par téléconférence, a laissé entendre le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici. «Nous avons franchi une étape importante. Il en reste d’autres jusqu’au 28 février (date initiale de la fin du programme grec, Ndlr). Il en restera beaucoup d’autres», a-t-il ajouté.

«La Grèce laisse le mémorandum derrière elle et devient coauteur des réformes et de sa destinée», a estimé Yanis Varoufakis à l’issue d’une réunion de l’ Eurogroupe qui a permis de trouver un compromis indispensable au maintien de son pays dans la zone euro.

«Le gouvernement grec va poursuivre calmement son travail, la société grecque à ses côtés, et poursuivra les négociations jusqu’à un accord final cet été», a ajouté une source gouvernementale. (Le Parisien)

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Accord officiel :

Eurogroup statement on Greece – 20/02/2015 21:00

The Eurogroup reiterates its appreciation for the remarkable adjustment efforts undertaken by Greece and the Greek people over the last years. During the last few weeks, we have, together with the institutions, engaged in an intensive and constructive dialogue with the new Greek authorities and reached common ground today.

The Eurogroup notes, in the framework of the existing arrangement, the request from the Greek authorities for an extension of the Master Financial Assistance Facility Agreement (MFFA), which is underpinned by a set of commitments. The purpose of the extension is the successful completion of the review on the basis of the conditions in the current arrangement, making best use of the given flexibility which will be considered jointly with the Greek authorities and the institutions. This extension would also bridge the time for discussions on a possible follow-up arrangement between the Eurogroup, the institutions and Greece.

The Greek authorities will present a first list of reform measures, based on the current arrangement, by the end of Monday February 23. The institutions will provide a first view whether this is sufficiently comprehensive to be a valid starting point for a successful conclusion of the review. This list will be further specified and then agreed with the institutions by the end of April.

Only approval of the conclusion of the review of the extended arrangement by the institutions in turn will allow for any disbursement of the outstanding tranche of the current EFSF programme and the transfer of the 2014 SMP profits. Both are again subject to approval by the Eurogroup.

In view of the assessment of the institutions the Eurogroup agrees that the funds, so far available in the HFSF buffer, should be held by the EFSF, free of third party rights for the duration of the MFFA extension. The funds continue to be available for the duration of the MFFA extension and can only be used for bank recapitalisation and resolution costs. They will only be released on request by the ECB/SSM.

In this light, we welcome the commitment by the Greek authorities to work in close agreement with European and international institutions and partners. Against this background we recall the independence of the European Central Bank. We also agreed that the IMF would continue to play its role.

The Greek authorities have expressed their strong commitment to a broader and deeper structural reform process aimed at durably improving growth and employment prospects, ensuring stability and resilience of the financial sector and enhancing social fairness. The authorities commit to implementing long overdue reforms to tackle corruption and tax evasion, and improving the efficiency of the public sector. In this context, the Greek authorities undertake to make best use of the continued provision of technical assistance.

The Greek authorities reiterate their unequivocal commitment to honour their financial obligations to all their creditors fully and timely.

The Greek authorities have also committed to ensure the appropriate primary fiscal surpluses or financing proceeds required to guarantee debt sustainability in line with the November 2012 Eurogroup statement. The institutions will, for the 2015 primary surplus target, take the economic circumstances in 2015 into account.

In light of these commitments, we welcome that in a number of areas the Greek policy priorities can contribute to a strengthening and better implementation of the current arrangement. The Greek authorities commit to refrain from any rollback of measures and unilateral changes to the policies and structural reforms that would negatively impact fiscal targets, economic recovery or financial stability, as assessed by the institutions.

On the basis of the request, the commitments by the Greek authorities, the advice of the institutions, and today’s agreement, we will launch the national procedures with a view to reaching a final decision on the extension of the current EFSF Master Financial Assistance Facility Agreement for up to four months by the EFSF Board of Directors. We also invite the institutions and the Greek authorities to resume immediately the work that would allow the successful conclusion of the review.

We remain committed to provide adequate support to Greece until it has regained full market access as long as it honours its commitments within the agreed framework.

Source

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Analyse en anglais dans ce billet de Paul Mason si vous souhaitez approfondir

http://www.les-crises.fr/capitulation-la-zone-euro-impose-a-la-grece-le-prix-fort-pour-prolonger-son-aide-de-4-mois/

Un nouveau ‘plan Z’? La BCE travaillerait sur un scénario de sortie de la Grèce de l’euro

La Banque centrale Européenne (BCE) se préparerait à un « Grexit » , rapporte le magazine allemand Der Spiegel. Il affirme que le personnel de la BCE a été invité à préparer des plans d’urgence visant à éviter la dislocation de la zone euro, sur la base de simulations.

3 réponses »

  1. Le plus étonnant c’est qu’à chaque fois on ne demande pas clairement au peuple ce qu’il veut tout en lui expliquant qu’il est difficile d’obtenir à la fois le beurre, l’argent du beurre et se taper la crémière !…

  2. Tsipras a eu son heure de gloire, il a pu impressionner les opinions avec son référendum et son discours au Parlement. Mais quand on n’a aucun atout dans sa manche, c’est ridicule. Il a trompé les Grecs et ceux qui voulaient y croire, et ulcéré ceux qui ont le pouvoir. Maintenant, il est complètement discrédité politiquement. (sauf peut-être pour les Grecs qui se comportent comme une femme battue qui refuse de quitter son mari. On pense alors : elle ne doit pas être si à plaindre en fait)
    Je lui conseillerais de se reconvertir et de devenir représentant en paillassons.

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