Arabie Saoudite

Etats Unis-Néocons : Donald D’Arabie

Donald D’Arabie

par Fernand Le Pic ANTIPRESSE Le 28 Mai 2017

Donald Trump a renoué avec les objectifs stratégiques de l’Arabie, en particulier face à l’Iran. Pour son premier voyage officiel, il a donc répondu favorablement à l’invitation du Roi Salman, qui accueillait également tous les émirs du Golfe.

Trump, qui dénonçait les versants obscurs de l’Islam durant sa campagne électorale, s’est pourtant plié aux coutumes d’allégeance à son hôte. Il a reçu le collier de l’ordre d’Abd el Aziz, l’obligeant à se courber devant le roi du wahhabisme, matrice hyperactive du radicalisme sunnite.

Il s’est ensuite prêté à la fameuse danse du sabre, l’Al-Ardah Al-Najdiyah («la parade du Nejd»), empoignant le saïf, sabre lourd du jihad, sous l’étendard vert, brodé de la chahada (la profession de foi en l’islam). Cette danse de guerre, ramenée du désert par Abdelaziz ben Abderrahmane Al Saoud, le cheikh fondateur de l’Arabie saoudite, ranime l’ardeur au combat «dans le sentier d’Allah», épaule contre épaule. Le sens de ce faux folklore, mais vrai rite d’emprise, échappe évidemment aux Occidentaux ignares et hébétés. Les incantations martiales qui accompagnent son rythme lancinant sont pourtant limpides. En voici un couplet glorifiant la ruse et moquant xla stupidité de l’ennemi, qui ne voit rien venir:

O Allah, nous nous soumettons à ta volonté

Dès que nous entendons l’annonce de la bataille imminente.

Notre Cheikh nous confère sa force

Afin d’endurer le temps des épreuves et T’en remercier.

Notre ennemi qui ne connaît rien de nos ingéniosités, est confondu.

Nous nous déplaçons dans l’oued du désert

Comme l’eau de pluie poussée par les rafales de vent.

Nous surgissons des sables

Et remportons les plus grandes victoires.

Rien d’anormal qu’après une telle entrée en matière, les 110 milliards de dollars de contrats d’armement fussent ratifiés par les deux chefs de guerre. Préparés du temps d’Obama, prix Nobel de la paix, ils furent finalisés par Jared Kushner, le gendre de Trump, et Ahmed Al-Khateeb, ancien CEO du fonds islamique Jadwa Investment et protégé du vice-prince héritier et ministre de la défense Mohammed bin Salman. Ahemd Al-Khateb est aujourd’hui administrateur de la SAMI (Saudi Arabia Military Industries), dont l’objet est de faire de l’Arabie, non plus un client prodigue mais un véritable centre de production militaire local. Le plus grand évidemment.

Avant de quitter la direction de Jadwa Investment, il y côtoyait le prince Faisal bin Salman, cinquième fils du roi Salman (81 ans), né en 1970 et gouverneur de la province de Médine. La louange officielle que le fils fit à son père de roi pour le succès du «reset» des relations américano-arabes, dévoile l’évidence de l’enjeu:

«Nous sommes tous des combattants à ton service, afin de réaliser tes objectifs suprêmes qui ne sont autres que ceux du noble peuple d’Arabie Saoudite».

Fort du retour américain au désert, l’objectif du souverain wahhabite est bien le combat et sa menace directe envers l’Iran n’a eu que peu d’échos dans la presse occidentale, malgré sa limpidité:

«Le régime iranien pensait à tort que notre silence était un signe de faiblesse et notre sagesse un retrait. Nous en avons assez de ses pratiques et interventions hostiles, comme nous l’avons vu au Yémen et dans d’autres pays de la région».

Or, en général, menaces + achats massifs d’armements = guerre imminente. La guerre du Yemen n’était bien que travaux pratiques.

A l’étape israélienne, Benjamin Netanyahu a quant à lui formulé le vœu qu’un jour prochain un premier ministre israélien puisse se rendre à Riyadh, faute pour l’ambassade américaine de pouvoir se déplacer à Jérusalem.

Restait à la servile Europe de passer à la caisse pour préparer le conflit qui couve. Trump a de nouveau sévèrement tancé l’Allemagne autant pour le scandale Volkswagen que pour sa lésinerie à l’effort de guerre allié. «The Germans are bad, very bad» s’est-il permis lors de son entrevue avec Jean-Claude Juncker, Donald Tusk et quelques autres ducs de Bruxelles. Il a par ailleurs rappelé à l’ensemble des pays de l’OTAN qu’ils devaient des «sommes massives» aux États-Unis pour le bénéfice de son parapluie militaire et qu’il en exigeait le règlement immédiat, la clause de défense mutuelle («article 5») étant implicitement suspendue entre-temps. A y regarder de près, on se demande tout de même où se trouve la dette envers Washington. Les pays membres se sont certes engagés à faire passer la part militaire de leur budget national à 2% du PIB, mais il s’agit de dépenses dans leurs propres forces, (l’OTAN n’ayant pas d’armée), pas d’une dette envers le Pentagone. Contractuellement, ils ont d’ailleurs jusqu’en 2024 pour y arriver. A moins que Trump ait constaté un défaut concernant les contributions au fonctionnement administratif et aux opérations extérieures de l’OTAN? Là encore, la répartition se fait, conventionnellement, en fonction des facultés contributives de chaque membre, dont 22% pour les États-Unis, 14,6% pour l’Allemagne, 10,6% pour la France, 9,84 pour le Royaume-Uni, etc. Et là encore, tout le monde paye. Alors? De quelle dette parle-t-il? On a certes déjà bien saisi la méthode de négociation de Trump plutôt retapée: arriver avec la massue, quitte à ce qu’elle lui échappe des mains, avant de lâcher des broutilles en se donnant l’air généreux.

Mais quelle négociation militaire poindrait à l’ordre du jour si ce n’est l’Iran? Quelle dette alors, si ce n’est l’effort de guerre à venir?

L’Organisation de l’Atlantique Nord, nord qu’elle a tout de même complètement perdu depuis les années 1990, est en effet priée de mobiliser pour aller combattre le Hezbollah en Assyrie, aux côtés du roi du wahhabisme.

Il ne restait plus qu’à réaffirmer la qualité d’ennemi ontologique de la Russie pour boucler la boucle et se faire à l’idée d’un joli conflit moyen-oriental à venir, gribouillé au crayon-feutre. Trump aura au moins tenu une promesse de campagne: des emplois pour l’armement. C’est à ce jeu de rôle qu’on distingue le lit asséché de la rivière démocratique: l’oued de l’Ouest.

EN BANDE SON :

4 réponses »

  1. TRUMP retourne sa veste, il joue le « Lèche-Babouches » ,
    lui qui voulait en finir définitivement avec DAESH et le terrorisme islamique,
    il fini par ne valoir guère mieux que les imposteurs et margoulins démocrates qu’il dénonçait durant sa campagne électorale,
    Bientot, il lui faudra aussi retourner son pantalon !!!
    Je crains qu’il ne cherche ensuite avec le soutien actif des faucons du Pentagone, à ce que les USA s’en prennent de nouveau à la Russie sous un prétexte bidon, faisant ainsi de l’Europe le terrain de jeu d’une future possible guerre nucléaire pour satisfaire les lobbys industrialo-militaires et les fous de guerre du Pentagone.
    Triste Donald, marionnette qui se met à genoux devant le Bédouin-Calife de l’Arabie Saoudite.

  2. Trump fidèle à lui-même. Dans le fond : sans doute indéfectiblement. Seule loi.
    On glisse alors, par quelque effet de spectateur ennuyé (ou répugné), vers le cas français… où la jeunesse de l’autre risque de nous faire découvrir des ambitions personnelles tout aussi sauvages et déterminées.


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