Art de la guerre monétaire et économique

Marché : La folie du marché des obligations pourries européennes !

Les efforts de la BCE visant à acheter des obligations d’entreprise dans le cadre de son généreux programme d’achats d’actifs ont poussé le rendement de nombreuses obligations d’État en territoire négatif, garantissant aux investisseurs une perte s’ils conservent leurs obligations jusqu’à maturité. Mais ils ont réussi un exploit probablement encore plus notoire sur le marché européen des obligations pourries.

Il est devenu complètement fou. Ou plutôt, les investisseurs et les algorithmes qui prennent les décisions d’achat sont devenus fous. Le rendement moyen des obligations pourries a baissé jusqu’à un plus bas record de 2,42 %.

Essayons de comprendre ce que cela signifie. Cette moyenne se base sur un panier d’obligations d’entreprises libellées en euros qui ne sont pas considérées comme sûres. Bien souvent, les émetteurs sont des sociétés américaines considérées « à risque » qui disposent de succursales européennes. On appelle ça dans le jargon des « Yankees déguisés » (« reverse Yankees »).

Parmi ces obligations on trouve les plus risquées des marchés. Elles seront nombreuses à faire défaut, les pertes seront douloureuses. Les investisseurs, les humains comme les algorithmes, le savent aussi : ce n’est pas un secret. C’est d’ailleurs pourquoi on parle d’obligations pourries. Pourtant, les acheteurs ne s’en soucient pas. Il s’agit d’investisseurs institutionnels qui gèrent l’argent des autres, ils n’ont donc pas trop de souci à se faire.

Le plus mauvais investissement du monde ?

Investir dans des actifs risqués n’est pas un problème à partir du moment où vous êtes payé pour le faire et que la possibilité de faire un beau bénéfice existe. Lorsque vous achetez de l’or ou de l’argent, vous savez que vous pouvez gagner ou perdre beaucoup. Mais avec un rendement de 2,42 %, ces obligations pourries ne vous rapporteront pas grand-chose si vous les conservez jusqu’à maturité. Au mieux, elles compenseront l’inflation. Alors que les risques de perte, notamment en cas de défaut, sont importants. Les investisseurs ne sont pas rémunérés à hauteur du risque encouru. Il s’agit de l’une des propositions financières les plus déséquilibrées que vous puissiez trouver.

Le rendement moyen de ces obligations pourries n’est jamais passé en dessous de 5 % avant octobre 2013. Durant l’été 2012, durant la sale période de la crise de la dette, au moment même où Draghi annonça qu’il « ferait tout ce qui est nécessaire », ces obligations affichaient un rendement moyen de 9 %, ce qui devait être plus ou moins juste.

Depuis, les taux ont plongé. En route vers zéro ? Ce devrait être un trait d’humour mais on ne sait jamais. Le graphique ci-dessus offre une perspective sur ce miracle rendu possible par les manipulations des banques centrales. En remontant jusqu’à 2006, on voit que le taux moyen des obligations pourries a explosé jusqu’à 25 % durant la crise financière provoquée par les États-Unis. La réaction fut bien plus modeste durant la crise de la dette européenne.Où se situent ces rendements dans l’univers de la finance ? Par rapport aux obligations américaines, par exemple ? On les considère comme l’actif le plus liquide et le plus sûr. S’il y en a bien un qui se rapproche du risque zéro, c’est celui-là. Pourtant, il apparaît qu’entre novembre 2016 et aujourd’hui, le rendement des obligations américaines sur 10 ans est passé de 2,14 à 2,62 %, pour être donc aujourd’hui bien au-dessus du rendement moyen des obligations pourries européennes de 2,42 %.

Ci-dessous, le graphique montre en rouge le BofA Merrill Lynch Euro High Yield Index (rendement moyen des obligations pourries en euro) et en noir, le rendement des Treasuries sur 10 ans. Avant, il s’agissait de deux mondes à part. L’écart explosait lorsque les investisseurs percevaient à nouveau du risque.

Pour un rendement de 2,4 %, que choisiriez-vous ? Une obligation affichant une probabilité de défaut élevée ou celle qui est considérée comme la plus sûre du monde ? Il s’agit bien entendu d’une question rhétorique. Mais pas dans le monde dingue de Draghi. Cette course effrénée au rendement, qui peut sembler très amusante aujourd’hui, poussera de nombreux investisseurs à s’arracher les cheveux par la suite. On sait déjà qui seront les victimes : les clients des investisseurs institutionnels, les titulaires d’une assurance vie, les infortunés qui ont investi dans des fonds obligataires, etc.De façon plus générale… lorsqu’on devient incapable de mesurer le risque, lorsqu’on arrive au point absurde où les obligations américaines et les obligations d’entreprises pourries européennes affichent le même rendement, cela signifie que de nombreuses mauvaises décisions d’investissement sont prises. On pourra dire merci à Mario Draghi pour ce beau foutoir.

Traduction de l’article de Wolf Richter, publié le 4 août 2017 sur WolfStreet.com

EN BANDE SON : 

The imitation picks you up like a habit
Writing in the glow of the TV’s static
Taking out the trash to the man
Give the people something they’d understand

A stick man flashing a fine-lined smile
Junk bond trader trying to sell a sucker a style
Rich man in a poor man’s clothes
The permanent installment of the daily dose

And you tell off when you tell it like it is
Your world’s no wider than your hatred of his
Checking into a small reality
Boring as a drug you take too regularly

The athlete’s laugh, the broken crutch
The first true love that folded at the slightest touch
Brought down like an old hotel
People digging through rubble for things they can resell

Happy holidays, sad sick savior
The leaving lover that I still favor
I won’t take your medicine, 
I don’t need a remedy
To be everything I’m supposed to be
I don’t want nobody else
I can do it by myself
We’re meant to be together

Now I’m a policeman directing traffic
Keeping everything moving, everything static
I’m a hitchhiker you’ll recognize passing
On your way to some everlasting
Better sell it while you can (x4)

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