Art de la guerre monétaire et économique

Gueule de bois ou optimisme : le Bitcoin a perdu les 2/3 de sa valeur sur les 8 derniers mois

Le Bitcoin a eu 10 ans ce mois-ci. C’est en effet le 18 août 2008 – au cœur de la crise des subprimes et de la plus grosse crise de confiance à l’égard des banques – qu’un nom de domaine bitcoin.org a été déposé sur Internet pour le Bitcoin, la première monnaie virtuelle, qui est encore aujourd’hui la plus célèbre. Le 17 novembre dernier, le cours du bitcoin culminait à 19.891 dollars. La semaine dernière, il a chuté en-dessous de 6.000 $ (environ 5.200 euros).
Sur les 8 derniers mois, la monnaie virtuelle a perdu plus de 2/3 de sa valeur. Pour d’autres monnaies virtuelles, c’est encore pire. Certains investisseurs, qui avaient parié sur ces monnaies virtuelles au moment de leur ICO (Pour « Initial Coin Offerings », ce sont des levées de fonds en cryptomonnaie), les revendent maintenant, parce qu’il s’inquiètent de la fonte rapide des capitaux qui ont été collectés lors de ces levées de fonds, ce qui accélère la chute des cours.Mais ce ne sont pas les seules misères qu’ont essuyées les monnaies virtuelles. Le marché a été entaché par les pratiques de certains spéculateurs qui ont entretenu la hausse des cours, afin d’y attirer les investisseurs et de revendre leur encaisse de cryptomonnaie à meilleur compte. Des pays ont limité l’usage de la monnaie virtuelle, comme la Chine, et d’autres l’ont même totalement interdit, comme l’Arabie saoudite.

Les investisseurs opportunistes, entrés sur le marché fin de l’année dernière, sont les plus nombreux

Les investisseurs qui ont misé sur des monnaies virtuelles à la fin de l’année dernière, au moment du “boom” des monnaies virtuelles, sont plus nombreux que ceux qui avaient investi au cours des neuf années précédentes. Entre octobre et mars, Coinbase, le plus grand courtier en cryptomonnaie aux États-Unis, a doublé le nombre de ses clients.

Tous ceux qui ont conservé les encours de monnaie virtuelle qu’ils avaient acquises à ce moment-là ont perdu de l’argent. C’est au Japon et en Corée du Sud – des pays où l’on a rapidement vu apparaître de nombreuses agences pour acheter des monnaies virtuelles – que les récits de ruine à la suite de ces investissements sont les plus nombreux, indique le New York Times.

Des drames

“Je pensais que les cryptomonnaies étaient l’opportunité d’une vie pour les travailleurs ordinaires comme nous. J’ai cru que ma famille et moi pourrions échapper aux difficultés et vivre plus confortablement, mais cela s’est avéré être le contraire”, déplore Kim Hyon-jeong, une enseignante séoulite qui a retiré toutes ses économies et emprunté pour investir dans les monnaies virtuelles, et qui a aujourd’hui perdu 90 % de cet argent.

Les pertes sont particulièrement fortes sur les monnaies virtuelles alternatives [autres que les cryptomonnaies les plus connues, telles que Bitcoin, Ether, ou Monero, par exemple), les “alt coins”. Souvent, les investisseurs ont acheté des “jetons” lors d’ICO. Les créateurs de ces monnaies étaient censés développer de nouveaux logiciels avec la contrepartie de ces achats. Mais presque aucune de ces sociétés n’a livré le logiciel qu’elles avaient promis, et ces jetons sont donc devenus des actifs spéculatifs. Dans certains cas, il est même apparu que ces ICO n’étaient que des arnaques.

Ces investisseurs confient parfois leur désespoir sur les réseaux sociaux. “C’est vraiment dur d’encaisser le fait que j’ai perdu tout l’argent que j’avais eu tant de mal à gagner. Je viens de craquer et j’ai pleuré”, écrit l’un d’eux.

Malgré ce pessimisme, beaucoup ont conservé leurs encaisses de cryptomonnaies, dans l’espoir que les cours remontent. Ils misent sur l’utilité future de ces monnaies. De nombreux groupes qui ont collecté des fonds l’année dernière dans le cadre d’ICO travaillent toujours sur ces projets.

Selon certains, avec les cours au plus bas, c’est même un bon moment pour acheter de la monnaie virtuelle.

Quel avenir pour le Bitcoin ?

Pour Franck Vranken, chef stratégiste chez Puilaetco Dewaay, « c’est l’heure de vérité pour le Bitcoin et les autres cryptomonnaies ». « Alors que la technologie de la blockchain est partie pour durer, les devises sous-jacentes pourraient être vouées à l’échec ».

Philippe Herlin, un économiste français auteur de l’ouvrage J’achète du Bitcoin, guide pratique pour miser sur les nouveaux placements : Bitcoin, Ethereum, Token, Ico, ne partage pas tout à fait cet avis. Il souligne que le Bitcoin n’est pas qu’un produit de spéculation, c’est aussi un moyen de paiement alternatif qui permet de contourner les difficultés des citoyens de certains pays confrontés à une inflation galopante ou aux manipulations de la monnaie locale, telle que les mesures de contrôle de change instaurées par les gouvernements qui empêchent les citoyens de virer de l’argent à l’étranger, par exemple.

“Le Bitcoin apparaît comme une réponse à ces monnaies, qui en fait sont peut-être plus volatiles que le Bitcoin. Il y a beaucoup de pays dans le monde [où ces contraintes existent], c’est même une large majorité”, affirme Herlin. Dans ce cas, le Bitcoin apporte une véritable solution et est de plus en plus utilisé, notamment en Amérique du Sud et en Afrique. “Le Bitcoin est utilisé au Venezuela [un pays victime d’une hyperinflation qui pourrait atteindre 1000000 % d’ici la fin de cette année, selon le FMI], et ceux qui en ont peuvent manger à leur faim. (…) Au Nigeria, près de 100 000 commerçants acceptent le Bitcoin”, observe l’économiste.

Quant à l’aspect spéculatif de la monnaie, elle est comparable à celle qui existe pour toutes les autres monnaies, selon Herlin. Mais les monnaies virtuelles ont suscité la création d’un écosystème qui continue à se développer et qui est facteur de développement économique, ce qui justifie leur existence : “C’est pour ça qu’on peut rester optimiste à long terme”, conclut Herlin, précisant que la prudence est de mise et qu’il ne faut investir que les sommes que l’on est disposé à perdre.

Et les mineurs de Bitcoin ?

Enfin, il y a les mineurs de Bitcoins, qui cherchent à gagner des Bitcoins en enregistrant les transactions liées à la monnaie virtuelle. Cette opération s’exécute en résolvant des équations complexes et réclame donc des installations informatiques sophistiquées très gourmandes en énergie. Pour assurer une rentabilité supplémentaire, il faut donc que ces équipements soient situés dans des pays à climat frais et à électricité bon marché.

Selon certaines études, le seuil de rentabilité de cette activité est dépassé lorsque le cours du Bitcoin atteint 6.400 dollars (environ 5.550 euros). Pour Morgan Stanley, il grimpe même à 8.000 dollars (environ 6.940 euros)… autant de mauvaises nouvelles pour les mineurs individuels, compte tenu du cours actuel (aux alentours de 6.400 dollars).

Ceux qui n’ont pas investi au moment du boom du Bitcoin et n’en ont pas profité pour acquérir du matériel performant risquent d’être les grands perdants, explique le journal Suisse Le Temps. Cette activité semble d’ailleurs en déclin. Le fabricant de puces électroniques Nvidia rapporte que son chiffre d’affaires du second trimestre sur le matériel de minage plafonne à 18 millions de dollars (environ 15,6 millions d’euros). Le géant californien avait pourtant provisionné 100 millions de dollars (environ 87 millions d’euros) de revenus pour ce poste…

OK+++++++++++++++++++++++++++++++

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