Art de la guerre monétaire et économique

Nous ne sommes plus ni en régime capitaliste, ni en régime néo-libéral ! L’économie s’effondre, les grandes fortunes prospèrent: «Une politique débile qui favorise les riches»

Le capitalisme actuel se nie lui même, il prétend comme le fait Macron se justifier par le risque, mais le risque est pris en charge par l’état, la banque centrale, le contribuable, on vient de le constater, pour des montants considérables par centaines de milliards. Pourquoi est il légitime de refuser le capitalisme moderne? Parce qu’il n’est plus légitime, il n’accomplit plus ses fonctions. Ses risques, comme on vient de le constater une fois de plus sont couverts par les gouvernements, banques centrales, le crédit et la création monétaire. BRUNO BERTEZ

Pendant longtemps, nous avions vécu dans le monde après Jésus-Christ. Puis, nous sommes entrés dans l’ère Post 11 Septembre. Le 11 septembre ayant épuisé tout son potentiel, nous voici dans le Nouveau Normal du Covid. ALDO STERONE

Le mot convenant le mieux pour désigner un système qui gomme les frontières entre le Gouvernement avec un G majuscule et l’Entreprise avec un E majuscule n’est ni libéral, ni conservateur, ni capitaliste. Ce serait plutôt corporatiste. Il se caractérise au premier chef par d’immenses transferts de ressources publiques vers le secteur privé, démarche qui s’accompagne souvent d’une explosion de l’endettement, d’un accroissement de l’écart entre les riches à outrance et les pauvres sans importance et d’un nationalisme exacerbé qui justifie des dépenses colossales dans le domaine de la sécurité. Pour ceux qui font partie de la bulle d’extrême richesse ainsi créée, il n’y a pas de moyen plus rentable d’organiser la société. Étant donné les désavantages manifestes pour la vaste majorité des citoyens condamnés à rester en marge, l’État corporatiste doit adopter d’autres tactiques : le resserrement de la surveillance, le recours massif aux emprisonnements, le rétrécissement des libertés civiles, la torture. NAOMI KLEIN

L’économie s’effondre, les grandes fortunes prospèrent: «Une politique débile qui favorise les riches»

 

La France s’enfonce dans la récession, mais le patrimoine des 500 plus grandes fortunes du pays a continué de s’accroître, malgré la crise du coronavirus. Un phénomène semblable s’observe aux États-Unis. Charles Gave, président de l’Institut des Libertés, analyse la situation pour Sputnik.

Alors que la Commission européenne prévoit désormais un plongeon historique du Produit intérieur brut français (PIB), qui devrait décroître de 10,6% en 2020, les citoyens les plus nantis de l’Hexagone ne connaissent pas la crise.

​Le dernier classement de Challenges des 500 plus grandes fortunes de France est là pour le démontrer. Le montant cumulé de ces dernières atteint le niveau record de 730 milliards d’euros. Un chiffre en progression de 3% en 2020. Un magot qui représente «l’équivalent du tiers du PIB attendu cette année», d’après Challenges, qui note que cette part a été multipliée par dix depuis 1996.

Les politiques des Banques centrales responsables?

Comment expliquer de telles performances dans un contexte économique aussi morose? Pour l’essayiste, financier et entrepreneur français Charles Gave, la réponse est très simple:

«Les taux d’intérêt des Banques centrales sont extraordinairement bas, voire négatifs. Les riches possèdent des actifs. Ces derniers leur servent à emprunter auprès des banques en les mettant en garantie. L’argent emprunté servira donc à acheter d’autres actifs.»

La Banque centrale européenne (BCE) a en effet sorti la sulfateuse à liquidités pour lutter contre la crise économique. Avec un taux de refinancement à zéro, un taux de dépôt à -0,5% et un taux de prêt marginal à 0,25%, l’institut monétaire basé à Francfort a également mis en place un plan de rachat d’actifs pour un montant de 1.600 milliards d’euros.

«C’est une politique débile qui favorise les riches. Le prix des actifs monte. Personne ne fait d’investissements, car il est toujours plus facile d’acheter une maison ou un hôtel existant que d’en bâtir un nouveau. Le manque d’investissements fait baisser la productivité du travail et les pauvres deviennent plus pauvres», analyse Charles Gave.

«Les taux bas sont une politique faite par les riches pour les riches et pour appauvrir les pauvres. Les Banques centrales sont au service des riches», poursuit-il.

L’Hexagone n’est pas seul à être concerné par une évolution à la hausse de la richesse de ses grandes fortunes. Un phénomène semblable s’observe aux États-Unis. En juin dernier, Business Insider, en se basant sur les travaux de l’Institute for Policy Studies, un think tank basé à Washington, notait que les milliardaires américains étaient 20% plus riches qu’avant le début de la pandémie.

Leur fortune cumulée avait grimpé de 565 milliards de dollars. Jeff Bezos, patron d’Amazon et homme le plus riche de la planète, Elon Musk, le fantasque boss de Tesla ou encore Eric Yuan, fondateur de l’application Zoom, ont tous vu leur fortune s’accroître malgré une économie américaine ravagée par une pandémie qui ne faiblit pas et qui a déjà fait perdre leur emploi à des dizaines de millions d’Américains.

Aux États-Unis, + 20% pour les milliardaires

Cette dichotomie entre de grandes fortunes qui continuent de progresser et un environnement économique hostile se retrouve dans le comportement des marchés financiers. Lors du mois de mars dernier, quand la gravité de la crise sanitaire ne faisait plus de doute, les places boursières de la planète ont vécu des semaines très difficiles. Les grands indices de référence avaient perdu 30 à 40% de leur valeur. Et cette tempête sur les marchés avait fait –potentiellement– perdre des milliards de dollars en quelques jours aux individus les plus riches de la planète.

Depuis, les marchés financiers ont repris du poil de la bête. Et avec eux la santé des fortunes des nantis. Il faut dire que la Réserve fédérale américaine n’a pas hésité à mettre les moyens pour contrer les effets économiques néfastes de la pandémie de coronavirus. Elle s’est dite prête à injecter 2.300 milliards de dollars afin de soutenir l’économie et a ramené son taux directeur proche de zéro.

«Si vous injectez des milliards dans les marchés, ils serviront à acheter des actions. Et tout cela avec des taux extrêmement bas. Encore une fois, tout cela est organisé de manière à rendre les riches encore plus riches», insiste Charles Gave.

D’après lui, la corrélation entre reprise des marchés actions et augmentation de la fortune des plus riches est évidente:

«Le contexte actuel permet aux individus d’acheter des produits qui offrent plusieurs pour cent de rentabilité tout en ayant emprunté à presque zéro. Les investisseurs se dirigent donc vers les actifs existants et plus personne ne cherche à créer de nouveaux actifs. Cela fait monter le prix des actifs et rend plus riches les riches.»

Point intéressant noté par Challenges: alors que la valeur cumulée des 500 plus grandes fortunes de France a augmenté pendant cette crise du coronavirus, elle avait chuté de 27% en 2009 en pleine crise des «subprimes».

Un risque sur les monnaies?

Une fois encore, Charles Gave pense avoir trouvé l’explication: «Lors de la crise des “subprimes”, ce sont les banques commerciales qui avaient prêté l’argent. Quand elles “sautent”, elles rappellent leurs prêts et il est nécessaire que les investisseurs vendent leurs titres. Dans la crise actuelle, ce sont les Banques centrales qui prêtent avec de l’argent qui n’existe pas. Une bulle peut soit être financée par des banques commerciales et dans ce cas-là quand elle explose, elles “sautent”. Ou elle peut être financée par les Banques centrales et en cas de problème, ce sera la monnaie qui baissera.»

D’après le président de l’Institut des Libertés, c’est là que se situe le vrai danger des politiques actuelles des Banques centrales:

«Le risque est sur la dévaluation des monnaies et il existe une grande probabilité de voir plonger leur valeur par rapport à celle d’autres devises», conclut-il.

Nous ne sommes plus ni en régime capitaliste, ni en régime néo-libéral.

La monnaie n’est ni neutre ni transparente, contrairement à ce qu’affirment certains ; et à mesure que les masses monétaires augmentent, la monnaie elle-même se déprécie. Les politiques monétaires transfèrent des ressources considérables en toute opacité. 

Nous ne sommes bien entendu plus en système capitaliste : nous sommes dans un autre système. Nous ne sommes plus en régime neo libéral, nous sommes dans un regime de pillage par le biais de la monnaie et du crédit.

Ce nouveau système, pour arnaquer les gens, a popularisé un mythe – il en a même assuré la transmission académique. C’est le mythe de la neutralité de la monnaie et du crédit. Il a invisibilisé la monnaie afin de mieux en assurer les fonctions spoliatrices.

Non, la monnaie n’est ni neutre ni transparente. Non, le crédit n’est pas la mobilisation de l’épargne. Monnaie et crédit sont des outils opaques, de transfert de richesse de la poche des uns vers celle des autres.

Le marché boursier américain fait la fête pendant que l’Amérique brûle – c’est du moins ainsi que les choses semblent à beaucoup de gens.

Bien sûr, c’est une apparence.

La valeur réelle des « actifs » boursiers, ce n’est pas ce qui est donné chaque jour par le Wall Street Journal ; la valeur réelle, c’est ce qui se manifestera au travers des oscillations de hausse et de baisse au cours du cycle complet, c’est-à-dire au cours des 12 prochaines années.

Là, on verra que cette valeur réelle, déflatée, est bien inférieure à ce qu’elle paraissait être en 2020 ou 2021. Je dis bien déflatée – corrigée de la valeur de la monnaie qui sert à exprimer/quantifier les valeurs.

Promesses et appauvrissement

Comment voulez-vous que la masse des actifs financiers – qui n’est qu’une masse de promesses sur le futur – puisse traduire un enrichissement réel alors que le monde entier s’appauvrit… et que cet appauvrissement va accélérer avec la destruction en cours, la destruction des chaînes de production globales, la destruction par l’idéologie du climat.

Les actifs financiers, c’est le passif, c’est la somme des promesses – inconsidérées – que fait le système. C’est une inversion familière du système capitaliste… Ce qui est dû, ce qui est une dette – soit sous forme d’action, soit sous forme d’obligation – est considéré comme un actif !

Le morceau de papier contractuel, qui ne vaut en lui-même rien, est considéré comme un fétiche qui vaut en lui-même.

La vraie richesse, cependant, ce ne sont pas les promesses, mais les moyens de les honorer ! Or ces moyens sont en train de s’effondrer.

Les productions de richesses chutent avec les PIB. Les actifs matériels sont dépréciés car ils tournent moins et deviennent obsolètes, caducs et, pour couronner le tout, l’idéologie climatique va pousser les élites à gaspiller des ressources considérables qui vont nous appauvrir durablement.

L’avenir du monde réel, celui de l’actif du système, ce n’est pas, ce n’est plus la richesse, c’est plus de rareté. Plus de frugalité.

Comment comprendre tout cela ?

C’est simple, c’est l’éléphant dans la pièce, mais comme toujours, on ne le voit pas. Une masse boursière s’écrit de la façon suivante :

X promesses financières = Y signes monétaires

Exemple : S&P 500 = 3 000

Une masse boursière trace une équivalence dont personne ne prend conscience. C’est un échange entre d’un côté une promesse/activité, et de l‘autre côté une quantité de monnaie.

L’équivalence est radicale, absolue, elle se lit dans les deux sens.

Autrement dit, sans vous en rendre compte, quand vous achetez le S&P 500, vous échangez de la monnaie contre autre chose. Vous donnez une valeur à la monnaie.

Si vous faites monter le prix de l’actif qu’est le S&P 500, il est évident que sa réalité ne varie pas : il est ce qu’il est. Mais sans vous en rendre compte, vous dépréciez la monnaie.

Le fonctionnement de la dépréciation

Plus vous faites monter le prix des actifs réels, plus vous dépréciez la monnaie. Le fait que les prix à la consommation, les prix des biens et services actuels, ne montent pas ne change rien à l ‘affaire.

Il est évident qu’ils ne montent pas puisque, dans ces périodes de crises terribles, presque toute la monnaie est stockée, neutralisée ; c’est comme si elle n’existait pas. Pour brouiller le tout, on dit en langage obscur que la vitesse de circulation de la monnaie (vélocité) ralentit.

Dire que la vitesse de circulation de la monnaie ralentit revient à dire qu’il y a trop de monnaie par rapport à la production de richesses actuelle.

Cette monnaie excédentaire, où va-t-elle ? Là où elle ne peut qu’aller, c’est-à-dire dans le marché boursier, dans l’immobilier, dans les œuvres d’art, dans l’or, etc.

Cette monnaie excédentaire créée par les élites pour masquer la crise va faire une hernie dans le prix des biens énoncés ci-dessus.

Il n’empêche qu’elle est potentiellement dévalorisée et que, un jour ou l’autre, cela va se manifester. C’est une certitude, une nécessité… mais personne ne sait quand. Tout ce qu’on sait, en raisonnant par l’absurde, c’est que la situation actuelle ne pourra durer pendant un nouveau cycle de 10 à 12 ans.

La hausse des Bourses ne signifie rien d’autre que ceci : il y a beaucoup plus de monnaie à échanger que d’actifs boursiers disponibles. Il n’y a pas assez de profit dans le système pour qu’il y ait plus d’actifs boursiers, donc ils deviennent relativement rares.

Il y a un rapport que jamais aucun économiste n’a étudié entre la masse d’actifs boursiers disponibles, son prix, la masse de profit dans le système et la masse de monnaie imprimée par les élites et leurs larbins.

BRUNO BERTEZ

« LE COURAGE, C’EST D’ALLER À L’IDÉAL ET DE COMPRENDRE LE RÉEL »

Le courage, c’est d’être tout ensemble, et quel que soit le métier, un praticien et un philosophe.

Le courage, c’est de comprendre sa propre vie, de la préciser, de l’approfondir, de l’établir et de la coordonner cependant à la vie générale. […]

Le courage, c’est d’accepter les conditions nouvelles que la vie fait à la science et à l’art, d’accueillir, d’explorer la complexité presque infinie des faits et des détails, et cependant d’éclairer cette réalité énorme et confuse par des idées générales, de l’organiser et de la soulever par la beauté sacrée des formes et des rythmes.

Le courage, c’est de dominer ses propres fautes, d’en souffrir mais de n’en pas être accablé et de continuer son chemin.

Le courage, c’est d’aimer la vie et de regarder la mort d’un regard tranquille ; c’est d’aller à l’idéal et de comprendre le réel ; c’est d’agir et de se donner aux grandes causes sans savoir quelle récompense réserve à notre effort l’univers profond, ni s’il lui réserve une récompense.

Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire […]

Jean Jaurès – Discours à la jeunesse, Albi (1903)

EN BANDE SON :

2 réponses »

  1. On est dans période très paradoxale. D’un côté on sent une grande tempête arriver, et d’un autre des cours de bourse qui ont rattrapé (presque) toutes les pertes causées par le confinement. Le Nasdaq se paie même le luxe de voler de record en record! Tesla vaut plus que Toyota alors qu’elle produit 35 fois moins de voitures! On marche sur la tête!! Mais l’explosion sera très destructrice.

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