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Le COVID, Israël et le code de Nuremberg : quelques réflexions libertariennes Par Éric Verhaeghe

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Le COVID, Israël et le code de Nuremberg : quelques réflexions libertariennes

Éric Verhaeghe  16 Mars 2021 Le Courrier des Stratèges

Une polémique sous la ceinture sévit dans la presse : en Israël, des avocats ont monté une plainte contre l’Etat hébreu qu’ils ont déposée devant la Cour Pénale Internationale. Les motivations de la plainte semblent simples (mais nous n’avons pas lu son texte, pas plus que l’essentiel des journalistes qui en parlent) : la vaccination obligatoire enfreint le Code de Nuremberg… édicté en son temps pour empêcher que ne se reproduisent des expérimentations médicales telles qu’elles furent menés dans l’univers concentrationnaire nazi sur des déportés souvent juifs. Il n’en fallait pas plus pour que la presse mainstream crie au complotisme, à l’antisémitisme et au fascisme. Cette affaire mérite bien un petit débriefing tant sur le fond de la plainte que sur la réaction des médias amis du pouvoir.

Peut-on encore évoquer l’actualité d’Israël sans être immédiatement soupçonné ou taxé d’antisémitisme par les zélateurs de la pensée officielle ? Et la vie politique israélienne (au sens large) doit-elle appartenir à une sorte de domaine réservé où la liberté d’expression serait bannie et sévèrement punie ? 

L’affaire de la plainte déposée (par des avocats israéliens) contre la vaccination obligatoire montre en tout cas comment le moindre argument est bon, dans la presse mainstream, pour insinuer que la défense des libertés appartient à la sphère du complot, de l’extrême droite et de l’antisémitisme. Ce qui en dit long sur la servilité des journalistes subventionnés, comme ceux du Parisien, et sur leur oubli de ce qu’est, en principe, leur métier. 

Israël et le Code de Nuremberg

Rappelons d’abord les faits. Selon la presse israélienne elle-même (mais le site i24News semble avoir retiré l’article depuis sa parution), largement reprise en France, deux avocats israéliens ont déposé une plainte devant la Cour Pénale Internationale pour violation du Code de Nuremberg. Ces avocats considèrent que la vaccination obligatoire est contraire à ce code et viole donc le droit international en vigueur. 

La Cour Pénale Internationale a accusé réception de la plainte et a indiqué qu’elle la soumettait à un premier examen de recevabilité. En soi, l’affaire passerait totalement inaperçue si elle concernait le Zimbabwe ou le Costa Rica. Mais là, il s’agit d’Israël et du code de Nuremberg, issu d’un procès où les expérimentations du docteur Mengele sur les déportés juifs ont horrifié la communauté internationale. 

Chacun mesure intuitivement le poids des symboles qui compliquent singulièrement l’examen de ce sujet simple : a-t-on ou non le droit de rendre la vaccination obligatoire sur des adultes ? 

Une question universelle de liberté

Il se trouve qu’effectivement l’Etat d’Israël est le seul qui a décidé de rendre la vaccination contre le COVID obligatoire, au moyen de vaccins encore peu testés (ce qui ne signifie pas que le travail ait été bâclé, mais il ne peut se targuer d’une vraie ancienneté). Les polémiques qui entourent le vaccin AstraZeneca le montrent : tous les effets secondaires de ces vaccins ne sont pas encore connus. On peut vociférer à l’envi contre ceux qui préfèrent ne pas tenter l’expérience, il n’en reste pas moins que, factuellement, il n’existe pas d’étude scientifique qui ait examiné les effets durables de ces tout nouveaux vaccins.

Dans ce cas précis, un Etat peut-il obliger tous les citoyens à recevoir ce vaccin ? 

La question interpelle forcément les partisans de la liberté, dans la mesure où l’on comprend mal pour quelle raison nous serions obligés d’accepter des soins, et particulièrement des soins dont les risques ne sont pas encore tous identifiés. C’est la liberté de chacun, après tout, de choisir ou non de mourir plutôt que de vivre. Il est assez paradoxal de voir que, parmi de nombreux partisans de la vaccination obligatoire, ou du passeport sanitaire, on trouve aussi des partisans d’un assouplissement de la législation sur le suicide ou sur l’euthanasie. 

Intellectuellement, il ne fait pas de doute que chacun doit avoir le droit de décider s’il souhaite ou non recevoir des soins ou un vaccin, pour des raisons qui ne regardent que lui. Et l’on peut difficilement, dans le même raisonnement, être contre ce droit mais revendiquer le droit à l’euthanasie. 

Ça commence par un vaccin obligatoire, ça se termine où ?

Les partisans de la vaccination obligatoire devraient prendre le temps de réfléchir (au lieu de reprocher à tous ceux qui ont un doute d’être de dangereux complotistes antisémites mus par leurs passions). On commence par obliger tout le monde à recevoir un vaccin tout nouveau tout beau. Et ensuite ? on oblige tout le monde à accepter des chimiothérapies intrusives pour soigner son cancer ? Et seuls les médecins décident, un jour, si tel ou tel patient mérite d’être soigné ?

Le cas du cancer est très signifiant. Certains traitements sont très éprouvants et très incertains. Le droit actuel reconnaît au patient la possibilité de les refuser. Et cela peut se comprendre : certains patients considèrent qu’ils ont suffisamment bien vécu et ne veulent pas prolonger leur existence de quelques années au prix de souffrances importantes. C’est une affaire de choix individuel. 

De quel droit l’Etat foule-t-il ce droit au pied en instaurant des obligations de soin ? La limite qui est franchie, au nom de notre protection, dans la mise entre parenthèses de nos libertés, est particulièrement inquiétante, surtout lorsqu’elle est légitimée par des arguments dont l’absence de fondement sérieux confine au fanatisme ordinaire. 

Les arguments à la petite semaine des étatistes font pitié

Toutes ces questions qui touchent à la liberté et à la vie (ou à la mort), sont éminemment sensibles et compliquées. Elles ne peuvent pas raisonnablement se traiter à coups de slogans ou d’insinuations, même si elles se posent en Israël. Il n’y a pas de raison que le droit de ne pas être vacciné se pose différemment en Israël, sous prétexte que les Juifs ont fait l’objet d’une destruction massive en Europe. 

Dans l’article que j’ai déjà cité du Parisien, qui suggère de façon pitoyable (c’est-à-dire avec des arguments juridiquement infondés et mal maîtrisés) que le droit en France ne s’oppose pas à une vaccination obligatoire, on lit notamment cette phrase indigne, placée dans la bouche du médecin Emmanuel Hirsch :

C’est indécent de mobiliser la mémoire de la Shoah dans ce contexte. Il y a quelque chose de dérangeant que l’on renvoie à la barbarie de scientifiques, non de médecins, qui avaient bafoué le code d’éthique médicale.

Mais c’est quoi ce délire ? Des avocats israéliens (ou autres d’ailleurs) n’auraient donc pas le droit d’accuser l’Etat d’Israël de violer le code de Nuremberg ? Il y aurait des restrictions à la liberté sous prétexte qu’Israël ne pourrait, par principe, être soupçonné de violer des textes protecteurs des droits humains ? Mais qui, ici, « mobilise la mémoire de la Shoah » à des fins politiques ?

Sommes-nous sûrs que les premiers à instrumentaliser la destruction massive des Juifs ne sont pas ceux qui considèrent qu’une plainte devant le Tribunal Pénal International contre Israël est un détournement de mémoire ?

En tout cas, si le seul argument que les étatistes trouvent aujourd’hui pour justifier la vaccination obligatoire tient à ce point Godwin, on peut se poser la question de l’intelligence profonde de leurs raisonnements. 

Israël et la Cour Pénale Internationale 

Au passage, les commentateurs dotés d’une carte de presse, appelés « journalistes », aiment à rappeler que l’Etat d’Israël ne reconnaît pas la Cour Pénale Internationale. Assez curieusement, personne n’interroge cette particularité un peu surprenante. Pourtant, le fait que, comme la presse le souligne, le Code de Nuremberg soit directement lié au fait concentrationnaire dont les Juifs ont été les principales victimes, devrait rendre les Israéliens sensibles à cette thématique. D’où vient qu’un Etat créé pour réparer une telle souffrance du fait des guerres et de la barbarie, n’adhère pas à une institution qui prolonge le combat du tribunal de Nuremberg ?

Mais cette question est peut-être taboue…

La défense des libertés est bien mal en point dans notre microcosme

Une conclusion majeure s’impose : le tir de barrage dans cette affaire de plainte contre Israël illustre la fragilité de l’esprit de liberté en France. La presse ne manque pas de plumitifs prêts à faire l’éloge de l’autorité, de la tyrannie, des obligations en tous genres, et prêts à diaboliser les droits de l’Homme et leur défense. 

Tel est l’esprit du temps à Paris : pour y paraître intelligent, il faut maudire l’héritage de 1789, et faire l’éloge de cette prétendue start-up nation où tout le monde est surveillé en permanence, confiné, et obligé de recevoir des vaccins sans mot dire. Cillez d’un seul clignement, et vous basculez dans le complotisme d’extrême droite.

Quand des élites en arrivent à ce degré zéro de la pensée et de l’esprit critique, c’est ordinairement le signal qu’il n’y aura guère d’effort à fournir pour les remplacer. Les fruits pourris tombent toujours tout seuls de l’arbre. 

Le COVID, Israël et le code de Nuremberg : quelques réflexions libertariennes

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