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Du Vel d’Hiv au Vel Nat’ : l’éternel retour de la soumission

C’est bien connu, les peuples heureux n’ont pas d’histoire. Vieux cliché ? Hm, peut-être pas tant que ça.

Je sais pourquoi les cours d’Histoire m’ennuyaient mortellement à l’école : parce qu’en fin de compte, l’Histoire consistait en une simple liste de dates et d’évènements qui avaient conduit certains hommes à employer des techniques de plus en plus sophistiquées et destructrices pour obtenir la soumission d’autres hommes. Siècle après siècle, il n’était jamais question que de cela. C’était toujours la même histoire.

Le 16 juillet 1942, quelque 7 000 policiers et gendarmes sont mobilisés à Paris sous les ordres d’un jeune fonctionnaire du gouvernement de Vichy. Si la rafle concerne 13 152 personnes, seules les familles avec enfant sont entassées au Vel D’hiv, soit 8 000 personnes, avant d’être envoyées dans des camps d’internement, puis des camps d’extermination.

La rafle du Vel d’Hiv nous révèle que la population française d’alors, dans sa majorité, était capable de consentir collectivement à un crime de masse se déroulant sous ses yeux.

La peur, lorsqu’elle est bien orchestrée, peut emporter notre décision de croire ceux qui tentent de justifier l’injustifiable, et c’est ainsi que se construit l’Histoire : de soumission en soumission, de consentement en consentement, de justification en justification.

Les victimes de la rafle ont été menées au Vel d’Hiv par la force. Les personnes qui feront la queue devant le Vel Nat’ pour y être vaccinées en masse, le feront de leur plein gré. Si on avait proposé à ces même personnes il y a trois ans, de se voir injecter une substance insuffisamment testée, sans en connaître la composition ni les risques d’effets indésirables, auraient-elles accepté de le faire ?

En 2018, on lisait encore des articles comme celui-ci : « Les pharmaceutiques hors de contrôle ?« , ou celui-là : « Scandals Leave a Black Eye on the Pharma Industry » (en anglais). A l’époque, le sort des victimes de la fraude scientifique organisée par certains laboratoires pharmaceutiques importait encore à nos concitoyens.

Mais depuis que le monde s’est engagé comme un seul homme dans l’Ère du Covid, qui s’intéresse encore aux victimes du Distilbène ? Du Diane 35 ? De la Dépakine ? Le jugement final de l’affaire du Mediator a été rendu ce matin, mais en parlera-t-on encore demain ?

Notre vie en 2021, comme en 1942, semble devoir se résumer à ceci : craindre, consentir, fermer les yeux.

Pourtant, la rafle du Vel d’Hiv a eu des effets heureux que le régime de Vichy n’avait pas prévus : elle a éveillé les consciences de beaucoup d’hommes et de femmes qui jusque-là s’étaient réfugiés dans l’indifférence ou l’attentisme. Parmi eux figurent bien des vrais Résistants qui ont contribué à la disparition (provisoire) du nazisme du sol français. Pour beaucoup, cet évènement tragique a sonné l’heure du réveil, l’heure de la décision de ne plus s’en laisser conter, de se mettre à réfléchir au lieu de réagir au coup par coup, de cesser de consentir aveuglément.

Souhaitons qu’aucune tragédie d’une ampleur similaire ne soit nécessaire pour déclencher notre réveil collectif.

« Jamais nous n’avons été plus libres que sous l’occupation allemande. Nous avions perdu tous nos droits et d’abord celui de parler ; on nous insultait en face chaque jour et il fallait nous taire ; on nous déportait en masse, comme travailleurs, comme Juifs, comme prisonniers politiques ; partout sur les murs, dans les journaux, sur l’écran, nous retrouvions cet immonde visage que nos oppresseurs voulaient nous donner de nous-mêmes : à cause de tout cela nous étions libres. Puisque le venin nazi se glissait jusque dans notre pensée, chaque pensée juste était une conquête ; puisqu’une police toute-puissante cherchait à nous contraindre au silence, chaque parole devenait précieuse comme une déclaration de principe (…) » J.P Sartre, « La République du silence » – 1944

Marilis Valo est écrivain.

Auteur(s): Marilis Valo, pour France Soir

Source : Du Vel d’Hiv au Vel Nat’ : l’éternel retour de la soumission

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3 réponses »

  1. Une personne qui a vécu l’occupation m’a dit; « pendant la guerre on avait faim on risquait de mourir
    mais nous avions encore notre liberté, je ne me sentais pas aussi mal qu’aujourd’hui »

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