Gentleman cambrioleur

Emmanuel Macron frôlerait les 3000 pourcents dans le dernier sondage Ipsos-TNS Sofrès- Jerusalem Times. Eric Zemmour se traîne lui à un score respectable de pi pourcents (je ne connais pas le raccourci clavier pour le nombre pi). Bon trêve de galéjade, mais l’élection du mois prochain ne s’annonce pas bien glorieuse pour le camp national. Et voilà qui ne nous pousse pas à l’enthousiasme. Ça tire la gueule dans les bureaux de Reconquête, dans la rédaction de Valeurs Actuelles aussi, qui se trouve par un concours de circonstance assez improbable à un endroit différent. Vladimir a fait réélire Emmanuel. Et plus il guerroie plus il le fait réélire. Il y a une corrélation strictement proportionnelle entre la quantité de kilotonnes de TNT déversé par jour sur Kiev et la progression d’Emmanuel Macron dans les enquêtes d’opinion à propos de la prochaine élection présidentielle française. Les Français sont des veaux, on vous l’a déjà dit. Par un infâme réflexe grégaire, ils se réfugient dans les boucles blondes du président quand des obus éclatent à deux mille kilomètres de Paris. Ça ne respire pas le courage. C’est pas ambiance Rocroi, et il faudrait ici diatriber un max contre la modernité qui prive du rapport à la mort et ôte par conséquent tout courage à ses fidèles. Bon nous n’avons plus le temps pour ça. Pour quoi avons-nous le temps ? Ah oui, pour dire que cette élection est volée et que c’est une excellente chose.

Parce que vous savez quoi ? Ukraine ou pas, Manu l’aurait gagnée tout de même. Eh oui, sa position centrale sur l’échiquier politique est un code de triche que je n’aurais pas osé utiliser sans rougir sur GTA San Andreas. Surtout alliée à son art assez rôdé du louvoiement politique, du repositionnement tacticien, un coup à droite un coup à gauche, souvent dans le meilleur des timings. Et voilà, malgré gilets jaunes et autre gestion fantaisiste de la crise sanitaire, Macron sera le premier président-quinquennat à être réélu. Même le premier président depuis Giscard en 1978 à gagner deux fois d’affilés des grandes élections nationales (présidentielles ou législatives). Ça vous la coupe, votre petite chique, hein ? Alors finalement la guerre russo-ukrainienne est une divine surprise. Eh oui, une fois la fièvre retombée, les canons tus, les sphincters relâchés, une vilaine gueule de bois empâtera les cerveaux de nos chers concitoyens. Et là, au milieu des draps chauds mais froissés, ils tourneront lentement la tête pour voir avec qui ils ont ému leur nuit. A la vue du visage de faux-dur-vrai-premier-de-la-classe de Manu, y aura des envies sévères de disparition avant les croissants. Mais non. On ne quitte pas une élection comme ça, comme un voleur. D’ailleurs il n’y a pas de porte dérobée dans l’isoloir. Alors zébardi pour cinq ans de concubinage avec votre ex Manu, qui sifflote déjà une mélodie bêtement joyeuse en sortant le jus d’orange du frigo. « Tu veux un peu de réforme des retraites avec tes œufs brouillés mon chéri ? » Pas facile. Eh oui, l’illégitimité d’une élection au score mobutuesque motivée en grande partie par une crise internationale habilement instrumentalisée est de nature à créer un malaise politique comme notre pays n’en a pas connu depuis des décennies. Surtout quand on se souvient que juste avant le covid, les braises du mouvement gilets jaunes étaient encore incandescentes. Quand les crises actuelles, covido-kieviennes, s’apaiseront, une crise sismique déchirera probablement le pays. Et on ne parle même pas des banlieues islamisées, poudrières aussi sensibles que toutes mes ex après leur largage.

Ce scénario n’est évidemment pas souhaitable. Il est peut-être malheureusement le seul possible. L’état de décrépitude de notre amoureuse la France est tel que, pour déloger de son bars le jeune gigolo qui prétend la protéger contre les bandits et les rigueurs de l’avenir tout en lui promettant de danser dans les bars les plus branchés de Paris, il faudra peut-être durcir nos poings. Les grands amours méritent les grandes batailles. Alors ne te réjouis pas trop vite Manu. Ou plutôt réjouis-toi, bois beaucoup et d’une traite. Paris ne sera pas toujours pour toi une fête.

Ange Appino L’incorrect

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