
La société McKinsey a été fondée en 1926 par James O. McKinsey. L’idée lui vint lorsque, étudiant en comptabilité à Chicago, il fut mobilisé en 1917 par l’armée américaine au sein du département des matériels et des munitions, avec mission de faire le tour des industriels impliqués dans l’effort de guerre. Il fut effaré par ce qu’il vit : absence d’organisation, direction dépassée par les commandes, livres mal tenus etc. Les patrons de l’époque ne s’occupaient pas de leur tambouille interne, qui commençait à être impactée par l’augmentation des normes. McKinsey prit cela pour un manque de gestion. Après la guerre il devint professeur de comptabilité à l’université et inventa une méthode pour appréhender la totalité de la situation d’une entreprise en analysant son organisation, ses finances, ses achats, ventes, etc. Il créa la société pour commercialiser cette méthode. Il termina sa carrière à la tête de son plus grand client. Près d’un siècle plus tard, McKinsey est une réussite, avec 130 bureaux dans 65 pays, 30 000 employés, plus de 34 000 anciens employés et presque autant de dirigeants, dont 13 des 50 plus grands groupes américains. Le groupe ne publie pas son chiffre d’affaire, mais il a été estimé en 2019 par Forbes à 10,5 milliards de dollars.
Désormais McKinsey est un conseil en stratégie. Ses hommes interviennent en amont d’une prise de décision, ou en aval pour aider à son application. Si vous êtes dans les affaires, McKinsey ne vous apportera pas le début du commencement d’une idée originale. Mais, en appliquant leur méthode, ils vous diront comment votre entreprise peut améliorer son rendement. Ce sont des techniciens pointus. C’est pourquoi il est beaucoup question de valeurs chez McKinsey, qui les collectionne : diversité, inclusion, racisme antiblanc, tout y est, à condition qu’elles ne soient pas morales.
Le cabinet n’intervient chez ses clients que de façon temporaire, ce qui permet, sur le papier, d’éviter toute responsabilité si la stratégie foire. Le cabinet a été rattrapé plusieurs fois. Dans l’affaire Enron, c’est lui qui avait conseillé la mise en place du mécanisme comptable douteux qui a provoqué la chute du géant. Chez Boeing, une présentation powerpoint de McKinsey a été rendue publique, dans laquelle les consultants identifiaient huit fonctionnaires indiens à corrompre. On trouve les consultants dans la crise des subprimes de 2007 et 2008. La société a ardemment encouragé les banques à vendre ces dettes titrisées, et sa crédibilité a pesé pour que les banques accroissent leur exposition au risque, facilitant la brutalité de l’effondrement. En 2012, le directeur général de McKinsey a même été condamné à 2 ans de prison pour délit d’initié. La presse a révélé en 2016 que trois autres consultants ont commis le même délit dans une autre affaire. En 2020, une condamnation a carrément frappé le groupe tout entier dans le scandale des opioïdes. Il avait recommandé aux laboratoires de vendre des produits ayant le dosages le plus élevé car ils étaient les plus lucratifs. Pris la main dans le sac, le cabinet accepta de verser 573 millions de dollars pour mettre fin aux poursuites.
En France McKinsey n’est présent qu’à travers des succursales ou des bureaux de liaison.
En 2012, le directeur général de McKinsey a même été condamné à 2 ans de prison pour délit d’initié
Le bureau de liaison ne sert que pour aller chercher des clients, il ne peut signer aucun contrat. Un bureau de liaison n’est pas assujetti à l’impôt. Les choses sérieuses ont lieu dans la maison-mère, à l’étranger. De son côté une succursale est une espèce d’agence rattachée au siège social étranger. Elle a le droit de signer des contrats mais ne possède aucune autonomie juridique. Toutefois elle paye des impôts en France sur ses bénéfices, si elle en a.
Quelles sont donc les types de filiale de McKinsey présentes en France ?
Vous trouvez d’abord des bureaux de liaison. Il en existe pour la Russie, le Royaume-Uni, le Chili, Dubaï, le Danemark, le Kazakhstan, l’Inde et la Chine. Ils servent à utiliser les services de McKinsey dans tous ces pays. Aucun impôt n’est payé en France sur ces contrats.
La France est aussi une tour de contrôle du groupe pour une zone plus vaste. Par exemple, McKinsey Global Limited est le bureau de liaison de la société londonienne du même nom, dirigée par Ozgur Tanrikulu, basé à Paris et manager mondial pour la région EEMA. C’est à dire l’Europe de l’Est, l’Afrique, les états du Commonwealth et de l’Asie Centrale, le Moyen-Orient et la Turquie. Pas d’impôt en France. Tout part à Londres.
McKinsey Recovery & Transformation Services France Company est la succursale française de la compagnie du même nom, domiciliée dans le Delaware. Cet état américain est un paradis fiscal qui compte plus de boîtes aux lettres d’entreprises que d’habitants. Ce fief électoral de Joe Biden a envoyé un transsexuel au Congrès. La succursale française est présidée par Stephen Hall, un des grands associés américains de McKinsey, plus particulièrement en charge du secteur de l’éducation au Moyen Orient et en Afrique. La succursale dispose d’une boîte aux lettres très discrète au 4 rue de Marivaux dans Paris, et non au siège social du Groupe sur les Champs Elysées. Cette succursale ne publie pas ses comptes.
La société suivante est McKinsey Danismanlik Hizmetleri Limited Sirketi, succursale d’une société turque, avec une boîte aux lettres rue Marivaux. Elle est dirigé par Homayoun Hatami, lui aussi basé au bureau de Paris. Ce franco-iranien, centralien, est une star car il appartient aux grands patrons du cabinet. Il est responsable à l’échelle mondiale des pôles de compétence fonctionnels du cabinet ainsi que des grandes priorités en matière d’innovation. Il a fait partie en 2021 des dix derniers finalistes pour devenir président du groupe. Ce sont les 650 associés seniors qui votent pour élire le président à la fin de son mandat. Cette succursale ne publie pas ses comptes.
Parlons tout de même de McKinsey SAS. Cette société publie ses compte et réalise entre 6 et 10 millions d’euros de chiffre d’affaire entre 2017 et 2019, pour un résultat qui varie entre un bénéfice de 1 million et une perte du même montant. Les impôts varie donc entre 200 000 et zéro sur plusieurs années. Cette société est présidée par Jalil Bensouda et sert pour l’Afrique francophone.
Il faudrait prouver que d’autres sociétés pourraient rendre le même service pour moins cher. Cela impliquerait de connaître les chiffres de McKinsey… qui ne les publie pas
Enfin, voici venir McKinsey & Company Inc. France. Le gros morceau. Il s’agit d’une autre succursale du Delaware. Le greffe vous dira qu’elle emploie entre 500 et 999 salariés. Elle est dirigée par Clarisse Magnin, directeur général de McKinsey en France. Elle ne publie pas ses comptes mais le Sénat s’est fâché et la commission d’enquête s’est rendue à Bercy pour consulter ses liasses fiscales. La communiste Eliane Assassi, rapporteur de la commission, a ainsi révélé que le chiffre d’affaire France de McKinsey en 2020 a été de 320 millions d’euros. Le secteur public en représente 5%, soit 16 millions, dont le responsable est Karim Tadjeddine, qui a siégé avec Macron à la commission Attali et l’a soutenu à partir de 2016. Pendant l’audition sénatoriale, il a révélé que la société emploie 600 « professionnels », car tout le monde n’est pas salarié chez McKinsey, surtout pour des raisons fiscales.
Certes, McKinsey France est assujetti à l’impôt sur les sociétés en France. Mais depuis dix ans, le montant annuel payé a été de 0 euros. Chaque année, la société-mère du Delaware envoie à sa succursale une facture pour services rendus. Elle est tellement importante que la pauvre filiale française ne fait plus assez de bénéfice pour être imposable. Et c’est légal. Ou alors il faudrait prouver que d’autres sociétés pourraient rendre le même service pour moins cher. Cela impliquerait de connaître les chiffres de McKinsey… qui ne les publie pas.
Ce résultat nul emporte une autre conséquence. De notoriété publique, McKinsey rémunère en partie au résultat ses employés et associés. C’est particulièrement vrai pour les associés. Or McKinsey France ne produit aucun résultat fiscal. La rémunération de tout le monde serait-elle amputée d’un variable assis sur le résultat ? Difficile à croire. Se pourrait-il que les Français de McKinsey soient intéressés à un autre résultat ? Par exemple celui de la maison-mère dans le paradis fiscal du Delaware ? Contacté par nos soins, McKinsey n’a pas répondu à nos questions.
Des techniciens de pointe on vous dit.
« La brièveté est sœur du talent »
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