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SUR LA FINLANDE (Jean Barbier)

SUR LA FINLANDE

Jour historique, et funeste. Les Finlandais échangent la paix chèrement conquise dont ils jouissaient depuis soixante-dix ans, contre une obligation d’intervention en mer de Chine ou partout ailleurs, en Afghanistan, en Irak, au Nicaragua, là où l’Alliance leur demandera de mener une nouvelle guerre préventive contre quiconque contrarie les intérêts des États-Unis. C’est la fin de la neutralité finlandaise, de facto la violation des termes du Traité de Paris de 1947, sa caducité, la rupture de l’armistice de Moscou conclu le 19 septembre 1944, le retour juridique à l’état de guerre entre la Finlande et l’État successeur de l’URSS du fait de la rupture du dit armistice. Selon le jeu des alliances qui nous est familier, la Finlande pourrait demain devenir juridiquement parlant l’agresseur de la Russie, comme la France devint l’agresseur de l’Allemagne suite à l’agression de la Pologne.
Or Napoléon, Hitler, l’ont appris à leurs dépens, on ne fait pas la guerre à la Russie, on négocie avec les Russes, chose que les Finlandais ont su faire admirablement pendant plus d’un demi-siècle. La Russie respecte sa voisine, un respect que la Finlande a gagné par le sang, par le courage, et chacun a pu sentir dans la réaction russe à cette demande d’adhésion, qu’elle était comprise comme un coup bas, comme la trahison d’un peuple ami, d’un voisin, une trahison qui se paiera, n’en doutons pas.
La Finlande m’est précieuse, plus que précieuse, parce que j’y ai vécu plusieurs années, parce que j’y ai des amis, des gens infiniment chers à mon cœur, parce que j’aime sa géographie, son Histoire, ses écrivains, ses architectes, ses peintres, ses musiciens. Ce fut son vœu, mon fils cadet y achève ses études. J’aime aussi son esprit d’entreprise, sa créativité, cette alchimie si singulière dont elle sait faire preuve, entre tradition et modernité, cette capacité qu’ont les Finnois de vivre au fond des bois dans la plus grande frugalité, tout en inventant le téléphone portable, ceci expliquant bien sûr cela. J’aime plus que tout le nihilisme obscur des Finnois, cette névrose contre laquelle les femmes luttent de leur force vitale, elles qui sont les obligées de leur race, contraintes de la perpétuer, tandis que les hommes vivent dans le doute perpétuel, dans l’incertitude des gens intelligents par instinct, ne sachant rien, dès lors sachant tout. Et puis son antithèse, comment ne pas évoquer le “sisu”, le cœur de l’âme finlandaise, l’acharnement patient qui permit aux Finlandais de surmonter toutes les situations, le “sisu” est ce qu’on pourrait appeler la résilience, avec un surcroît de spiritualité.
Que Diable un tel peuple va t-il se fourvoyer dans une alliance dont ils ne tirera aucun bénéfice, aucune gloire, il n’a eu besoin de personne pour cela, mais au contraire risque d’y trouver son asservissement, cet asservissement, cette soumission, qu’il refusa toujours, et aux Suédois et aux Russes ? Il n’y a de paix avec les Russes que dans le respect, la considération mutuelle. Personne ne sait mieux cela que les Finnois. Le Russe ne fait la paix que parce qu’il y consent. Il l’a fait avec les Finnois, il ne la fera jamais avec la valetaille atlantiste. Pourquoi les Finlandais oublient soudain que cette immense frontière qu’ils partagent avec la Russie, n’est pas une faiblesse mais une force ? Pourquoi oublient t-ils aussi que leur faible nombre, cinq-millions d’habitants, n’est pas plus une faiblesse mais au contraire aussi leur force ? La Russie a besoin de la Finlande telle qu’elle existait, dans le respect, l’estime réciproque, le meilleur des deux mondes, une ambassade de confiance. Madame Sanna Marin a de beaux yeux, mais elle n’est pas Mannerheim, tout au plus une de ces jolies socialo-progressistes pétries de bons principes, dont les idéaux vont se fracasser contre le mur des réalités. Jamais Mannerheim n’aurait engagé la Finlande dans une telle voie de péril, lui le fin stratège qui sut renverser toutes les alliances, avec la Suède, avec l’Allemagne nazie, avec l’URSS, quand il fallut, comme il fallut, en vrai patriote qu’il était et que Madame Marin n’est pas, sa patrie à elle étant le monde des bons sentiments, dont la société post-historique, hédoniste et consumériste, fait son beurre.

JEAN BARBIER via Facebook

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