Où est la droite ?
La droite, c’est exactement comme le sexe. Plus il y en a, moins elle est présente. Dans notre société permissive, pornolâtre, qui a placé les pathologies sexuelles en véritables étendards de la liberté individuelle, le sexe n’a jamais été aussi morne, banni, voué à se répandre tragiquement sur nos écrans. De façon identique, on pourrait se féliciter, pour faire taire les tragiques boomers de la Gauche Républicaine, que la droite se soit décomplexée, qu’elle soit enfin relayé massivement par des chaines d’information, que la jeunesse française puisse s’en revendiquer sans être immédiatement conspuée. Et pourtant, votre humble serviteur ne peut s’empêcher, comme c’est son habitude, de grommeler dans son coin et de froncer le sourcil. Car enfin, la droite conservatrice qui s’affiche en ce moment, qui pérore sur C News ou sur la réseaushère, n’est peut être que son ombre, sa parodie. On peut se féliciter que des amuseurs publics comme Marsault, Papacito et autres youtubeurs puissent contribuer à dédramatiser la pensée de droite, voire à la rendre sexy. Le problème, c’est qu’ils la cantonnent bien souvent à une réaction épidermique, finalement très américaine, finalement très « protestante » : la droite réactionnaire ne vaudra que pour son amour de la bidoche, de la picole, des saillies et des punchlines, pour son masculinisme régressif… Mais où sont les intellectuels qui pourraient combler le vide entre Patrick Buisson et Papacito, entre le flamboyant Gomez-Davila et le terne Obertone ? On se le demande. On aimerait nos hussards à nous, on aimerait nos destins tragiques, nos Sunsarié, nos Drieu suicidés trois fois, nos Julius Evola, nos barons Ungern, nos cancres et nos génies de droite, on aimerait nos écrivains furibards et mystiques, on aimerait que la droite enfin retrouve son cœur, celui du Christ.
Malheureusement, entre les droitards qui cultivent le clientélisme chez les catholiques (Eric Zemmour et Alain Soral, même combat), entre les pimbêches des réseaux qui voient dans le conservatisme un simple « tag » marrant et subversif à accoler à leurs soubresauts sur Tik Tok, entre les éditorialistes qui ramonent sans fin les mêmes idées éculées, entre les anciens libertaires qui retournent leurs vestes comme les bon sociaux-traîtres qu’ils sont (ils se reconnaîtront), entre les vulgarisateurs gominés à la Julien Rochedy qui passent plus de temps chez Franck Provost qu’à étudier Saint Thomas, entre les sinistres “babtous solides” qui se font assassins au détour d’une soirée biture, on peut légitimement se demander si cette droite décomplexée a de l’avenir, si elle n’est pas qu’un soubresaut de plus du progressisme, qui l’accepte, la tolère, l’entretient pour mieux la digérer, pour mieux consumer ses acteurs dans leur ego.
Car la Machine technico-progressiste, le Dispositif comme l’appellent certains, est précisément un composteur aux dimensions cosmiques, un vaste mécanisme dans lequel plus aucune hiérarchie, plus aucun « mouvement » n’est possible – j’entends par là un mouvement réel, radical, qu’il soit poétique, philosophique ou politique. La Reconquête d’Eric Zemmour en est sûrement l’exemple le plus flagrant : en soi, c’est un parti créé par le Système, comme spontanément, pour saborder la droite de l’intérieur, presque à son insu. Que nous reste-il pour penser à droite, pour aimer à droite, pour ressentir à droite ? L’Incorrect, peut-être ? Les auto-célébrations ointes au Syrah et au Cabernet ? Les tractations des cravatés dans les business school et dans les soirées coke ? La droite française n’est pas réactionnaire, elle est simplement cantonnée à quelques stimuli, elle prospère inféconde, elle se répand sans produire de sens, elle n’est plus qu’un tag, qu’une marque de fabrique.
Mais… n’est ce pas au fond une déformation historiologique que de ne pas comprendre ses mouvements de fond, que de ne pas saisir qu’il se passe peut-être quelque chose malgré tout, dans le secret d’une Histoire qui avance toujours par pas chassés ? Peut-être que les lamentations du triste gratte-papier que je suis ne font que grossir encore cette panse de vide et d’abjection qu’est la pensée moderne, remplie jusqu’à ras-bord de vermine et d’helminthes.
Simone Weil citait Thucylide (« Nous croyons par tradition au sujet des dieux, et nous voyons par expérience au sujet des hommes que toujours, par une nécessité de nature, tout être exerce tout le pouvoir dont il dispose » pour mieux prouver que le Dieu des chrétiens avait précisément choisi de ne pas s’étendre au maximum, comme un gaz ou un parasite, mais au contraire de laisser de l’espace vacant. Cet espace vacant, c’est la grâce, c’est la liberté ontologique qui fait de nous des hommes. Aujourd’hui, même la droite qui se veut chrétienne, morale et probe se répand précisément comme un gaz, en oubliant que pour exister, il faut se retirer. Droitards, cesser de commenter, de gloser, de twitter. Produisez du silence et de la piété. Retrouver en vous le cœur battant de la France, qui est celui du Christ.
Marc Obregon L’Incorrect
« J’appelle ici de droite, par pure convention, l’attitude consistant à considérer la diversité du monde et, par suite, les inégalités relatives qui en sont nécessairement le produit, comme un bien, et l’homogénéisation progressive du monde, prônée et réalisée par le discours bimillénaire de l’idéologie égalitaire, comme un mal. »
— Alain de Benoist, Vu de droite (1977)

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la droite pas plus que la gauche n’existent ,ce n’est qu’une fausse alternative il n’existe que des mondialistes ou des souverainistes