Dans l’actu : FTX n’est pas la seule plateforme d’échange en difficulté.

• C’est la panique. De nombreux investisseurs se pressent pour retirer leurs billes. En conséquence, plusieurs plateformes d’échange connaissent des problèmes de liquidité et ferment temporairement.
• Ce n’est pas très compliqué à comprendre : comparez cette situation avec la crise bancaire et financière de 2008-2009, les Grecs se précipitaient aux guichets des banques pour retirer leur argent à temps. Certaines institutions ont été contraintes de fermer temporairement leurs portes.
• Après le désastre de FTX, qui n’est rien de plus qu’un vol organisé par son fondateur, Sam Bankman-Fried, d’autres plateformes voient leurs clients se précipiter pour retirer leurs pions. C’est le cas de AAX, BitCoke ou encore de Crypto.com, la 10e plateformes d’échange de cryptos la plus importante au monde, basée à Singapour. Le volume quotidien de Crypto.com s’est effondré, passant de 5 milliards de dollars par jour en mai dernier à 278 millions de dollars sur 24 heures ce lundi. 
• Crypto.com tente de rassurer les investisseurs, avançant un « bilan très solide ». La plateforme doit montrer qu’elle détient les actifs de ses clients, et qu’ils ne sont pas envolés dans des paris risqués, à l’instar de FTX.
• CZ, le patron de Binance, la plus grande plateforme de cryptomonnaies, encourage ses concurrents à faire preuve de transparence, en publiant leurs adresses, pour montrer la santé de leur entreprise et leurs avoirs en cryptomonnaies. C’est ainsi que Binance dit détenir plus de 71 milliards de dollars d’actifs au cours actuel des cryptomonnaies.

L’avenir proche : les cryptomonnaies se préparent à recevoir un nouveau coup sur la tête.

• JP Morgan prévoit une autre chute de 25% pour le bitcoin, la première des cryptomonnaies, qui influence toutes les autres dans son sillage. En un an, le bitcoin a perdu 75% de sa valeur.
• La panique actuelle n’en est pas la cause unique : la politique des banques centrales, qui met en place des hausses des taux d’intérêt en vue de refroidir l’économie, réduit les liquidités. Les cryptomonnaies, comme les actions, en sont les premières victimes.
• Moins d’argent disponible signifie plus d’aversion au risque : les investisseurs se dirigent vers les actifs plus sûrs, ce qui n’est bien sûr pas le cas des cryptos. Cette tendance devrait perdurer l’année prochaine, prévoit JP Morgan.

L’avenir lointain : les acteurs institutionnels croient toujours aux cryptos, mais voient un autre grand danger à l’horizon.

• La technologie qui sous-entend le bitcoin reste une technologie prometteuse. Les grands investisseurs ne pensent pas qu’on en ait fini avec les cryptos.
• C’est le cas d’Ark Invest, le fonds d’investissement géré par Cathie Wood, qui ne nie pas que le drame de FTX a sérieusement écorné l’image des cryptos, mais qui voit plutôt cette séquence comme une marche arrière plutôt qu’un arrêt définitif : « À notre avis, l’insolvabilité de FTX est l’un des événements les plus dommageables de l’histoire de la crypto », a déclaré ARK dans un bulletin d’information. « Cela pourrait retarder l’adoption de la crypto de plusieurs années et peut-être donner aux régulateurs une licence pour prendre des mesures draconiennes. »
• Ark Invest pointe en fait le plus grand danger qui se dresse face aux cryptos : la volonté des régulateurs de mettre des règles strictes sous prétexte de protéger les petits investisseurs. Soit tout l’inverse du combat originel des cryptos : la décentralisation.
• De son côté, Elon Musk, qui n’est sans doute pas la voix la plus fiable en ce moment mais qui reste l’homme le plus riche du monde, ne croit pas en la fin des cryptos : « Le bitcoin va y arriver, mais il pourrait connaitre un hiver très long ».

Alors que de nombreux commentateurs assimilent à tort la fraude record d’une personne – à savoir l’orgueil de SBF qui pense bénéficier d’une immunité totale contre les poursuites judiciaires simplement parce qu’il est un donateur démocrate important – aux échecs de l’ensemble de l’espace cryptographique (il est étrange que personne n’ait dit que la fraude de Jon Corzine qui a entraîné la chute de MF Global a exposé les échecs des monnaies fiduciaires), au cours des dernières 24 heures, nous avons vu deux voix très inattendues prendre la défense des crypto-monnaies.

La première vient de la Deutsche Bank, qui note qu’il y a tout juste un an, en novembre 2021, le prix d’un bitcoin dépassait les 65 000 dollars, atteignant ainsi un sommet historique, alors que la semaine dernière, le bitcoin a atteint son niveau le plus bas depuis deux ans, à un peu moins de 16 000 dollars, et que le marché d’échange de crypto-monnaies FTX s’est effondré.

Mais alors que Marion Laboure de la DB écrit que les investisseurs ont subi des pertes importantes, elle croit également que « ce deuxième « hiver cryptographique » sera un positif net parce que l’effondrement de FTX rapprochera l’écosystème cryptographique du secteur financier établi. » Plus précisément, l’analyste de la DB écrit que le krach de FTX a mis en lumière des problèmes structurels bien connus dans l’écosystème cryptographique : « des réserves insuffisantes, des conflits d’intérêts, un manque de réglementation et de transparence, et des données peu fiables. » Et à la suite de l’effondrement de FTX, « la concentration du marché est plus grande que jamais, Binance étant le plus grand gagnant. »

La banque allemande poursuit en notant que « chaque fois qu’un acteur majeur du secteur des crypto-monnaies fait faillite, l’écosystème subit une crise de confiance. Il y a des pertes importantes pour les consommateurs et les détaillants, mais jusqu’à présent, il n’y a pas de risque systémique ». Cependant, cette crise de confiance oblige les investisseurs en crypto à faire encore plus confiance à « l’effet Clochette » ; en d’autres termes, la valeur d’un actif crypto dépendra entièrement de ce que les gens croient qu’il vaut. »

La stratège de la Deutsche conclut que « comme nous l’avons vu, les crypto-actifs sont des produits à haut risque qui peuvent entraîner des pertes personnelles massives. C’est pourquoi nous continuons de soutenir que les régulateurs devraient rapidement exiger des sociétés de crypto qu’elles se conforment aux règles imposées aux produits d’investissement traditionnels. Cela limiterait la possibilité pour les sociétés de crypto de pêcher des consommateurs financièrement analphabètes tandis que les gouvernements élaborent des cadres réglementaires globaux. Le besoin est urgent. Plusieurs facteurs se sont alignés pour créer une situation potentiellement lamentable pour les consommateurs moyens qui peuvent être sensibles aux informations trompeuses. »

Une défense plus surprenante des cryptos est venue de l’analyste crypto de la JPMorgan, Steven Alexopoulos, qui – quelques heures seulement après que Nick Panigirtzoglou de la JPM a déclaré qu’il s’attendait à plus de contagion et plus de liquidations à la suite de l’effondrement de FTX – a écrit que loin de sonner le glas du secteur crypto, « l’effondrement de FTX est un pas en arrière douloureux mais pourrait s’avérer être le catalyseur qui fera avancer les cryptos de deux pas en avant. » Nous publions ci-dessous un extrait de la note de JPM (disponible pour les abonnés pro à l’endroit habituel).

Alors que FTX est apparu plus tôt cette année comme un chevalier blanc, renflouant les entreprises en difficulté liées aux crypto-monnaies, la nouvelle de la chute de FTX cette semaine a provoqué une onde de choc sur les marchés des crypto-monnaies. Bien qu’il s’agisse certainement d’un revers majeur à court terme, nous considérons que l’effondrement largement médiatisé de FTX pourrait accélérer considérablement le calendrier d’introduction de la réglementation liée aux crypto-monnaies (similaire à la nouvelle réglementation bancaire qui a suivi le GFC).

Par conséquent, nous considérons les nouvelles entourant FTX comme un pas en arrière, mais qui pourrait s’avérer être le catalyseur pour faire avancer la crypto-économie de deux pas en avant (en débloquant davantage la valeur utilitaire de la blockchain). En fait, nous voyons l’établissement d’un cadre réglementaire comme le catalyseur nécessaire pour accélérer massivement l’adoption institutionnelle de la crypto.

Et la punchline que nous faisons depuis que la nouvelle de l’effondrement de FTX est apparue :

De plus, alors que la nouvelle de la chute de FTX donne du pouvoir aux crypto-sceptiques, nous soulignons que tous les effondrements récents dans l’écosystème cryptographique ont été le fait d’acteurs centralisés et non de protocoles décentralisés.

Combien de temps avant que Jamie Dimon, qui, il y a cinq ans, a averti de manière infâme qu’il licencierait tout employé surpris à négocier des bitcoins avant de capituler et de faire de la crypto un point central de la croissance de sa banque, et qui maintenant profite certainement du crash de la crypto pour accumuler agressivement, ayant appris ses leçons de la première fois, ne devienne l’un des évangélistes les plus vocaux des monnaies numériques ?

SOURCE

Jim Rogers : « Le bitcoin ressemble en tout point à toutes les bulles économiques que j’ai pu observer. » Novembre 2017

EN BANDE SON :