La Pravda américaine : Elon Musk, Kanye West, et des cibles bien plus risquées
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Par Ron Unz − Le 21 novembre 2022 − Source Unz Review
Bien qu’il soit trop tôt pour l’affirmer avec certitude, les premiers signes ne sont pas bons autour du rachat de Twitter par Elon Musk pour 44 milliards de dollars, ce qui démontre une fois de plus la facilité avec laquelle le pouvoir concentré des médias peut détruire quiconque il décide de mettre à bas.
L’entrepreneur technologique sud-africain était entré dans la bataille avec apparemment de très beaux atouts en main. Il était déjà classé comme personnalité la plus riche au monde, et de très loin. Son entreprise Tesla Motor, qui constitue le cœur de sa fortune, a exploré le marché des véhicules électriques qui sont devenus un symbole majeur des libéraux affluents et, malgré un déclin considérable de ses actions en bourse, elle restait comparable en valeur au total combiné des six fabricants automobiles mondiaux du classement. Il a été à la fois PDG de SpaceX, le meilleur espoir des États-Unis pour une domination sans interruption de l’espace, et son réseau associé de satellites Starlink s’est récemment avéré constituer un facteur considérable dans la guerre moderne. Musk a été non seulement loué comme un colossal héros technologique, mais il a également accumulé une influence médiatique considérable en propre, avec ses 118 millions de followers sur Twitter qui lui accordent sans doute la portée d’une célébrité télévisuelle majeure ou même carrément d’une chaîne de télévision.
De fait, Twitter est devenue tellement importante à ses yeux qu’en début d’année 2022, il a hardiment proposé de racheter le réseau social en difficulté et d’en faire sa propriété. Il y a une dizaine d’années, un dirigeant haut-placé de Twitter avait marqué les esprits en décrivant l’entreprise comme représentant « la branche liberté d’expression du parti de la liberté d’expression, » et il semblait bien avoir pour ambition de résorber la vague montante de censure et remettre Twitter dans cette position.
Des générations durant, la « liberté d’expression » avait constitué l’une des valeurs les plus universellement vénérées aux États-Unis, mais après que Donald Trump a fait usage du pouvoir de sa liberté d’expression sur Twitter pour remporter la Maison-Blanche par surprise, ce sentiment dominant avait très rapidement changé, et la nécessité d’exclure les « fake news » et de supprimer les « discours de haine » sont devenus les priorités acceptées par toutes les personnes bien pensantes obéissant au narratif propagé par les médias dominants. Ayant commencé avec quelques cas extrêmes ci et là, les purges qui en avaient résulté sur Twitter avaient cru de manière exponentielle jusqu’à, en début d’année 2020, atteindre le président en exercice des États-Unis ; et des éléments puissants de la société étasunienne étaient très préoccupés à l’idée que Musk puisse essayer de revenir en arrière sur ce processus. Aussi, sa prise de contrôle de Twitter, financée substantiellement de sa poche, a été considérée par de nombreux observateurs comme une menace horrible et potentiellement dangereuse envers les valeurs étasuniennes, avec un Musk de plus en plus dépeint comme un super-méchant digne d’un James Bond par la ruche frémissante des médias, un usurpateur dont les infâmes projets devaient être contrés à tout prix.
Twitter avait déjà commencé à perdre de l’argent et les 14 milliards de dollars de dette que Musk a levés pour l’aider à financer son rachat ont largement empiré la situation. Après que les les médias l’ont dépeint comme un dangereux mal-pensant et que Twitter soit subitement devenu « controversé », ses annonceurs timorés — qui apportaient presque l’ensemble des revenus de la société — se sont mis à s’enfuir, chacune de ces désertions étant relayée lourdement par le mégaphone hostile des médias.
Tous ces contrecoups majeurs se sont produits en dépit du retour partiel pratiqué par Musk sur son auto-proclamé « absolutisme de la liberté d’expression », car il a promis de maintenir nombre de limitations en place sur Twitter et, en dehors d’un certain ancien président, il n’a rétabli que les plus timorés des comptes Twitter purgés. Le demi-tour pratiqué par Musk lui a immédiatement valu d’apres dénonciations de la part de certains de ceux qui avaient commencé par soutenir son rachat.
Lorsque les dépenses augmentent et que les revenus chutent, on fait face à des problèmes financiers, et les journalistes ont rapporté que Musk avait énoncé en privé les risques de faillite en préparant des coupes drastiques dans les effectifs enflés de Twitter. Dans le même temps, la plupart des hauts-dirigeants auparavant en place dans la société ont été licenciés ou sont partis.
Début novembre 2022, Musk a intentionnellement réduit l’effectif de Twitter de 50%, mais jeudi dernier, les médias qui le critiquent ont joyeusement rapporté qu’un tiers de l’effectif restant était parti subitement, si bien que de nombreuses équipes d’ingénierie logicielle, centrales au fonctionnement de Twitter, ont presque totalement disparu. Le titre affiché en première page d’un New York Times hostile a été « Twitter Teeters on the Edge« [Tweeter vacille au bord] et suggérait sombrement que l’entreprise était peut-être en train d’entrer dans une spirale mortifère, une nouvelle bien peu encourageante pour les annonceurs qui restent si nécessaires à sa survie. Je n’ai moi-même guère utilisé Twitter, mais si j’avais investi des années d’efforts pour amalgamer des millions de followers, je me sentirais actuellement très chagrin.
Peut-être que Musk va réussir une fois de plus à triompher face aux embûches, et parvenir à créer le service universel à la WeChat qu’il a prévu. Mais pour l’instant, je pense qu’il est bien plus probable que le géant fragile des réseaux sociaux continue de décliner pour finir en d’autres mains. Et si nos médias peuvent avec une telle rapidité et une telle facilité écraser les aspirations de l’homme le plus riche du monde, en lui coûtant au passage, ainsi qu’à ses soutiens financiers, les 44 milliards de dollars qu’ils ont investis, qui oserait à l’avenir prendre le risque d’un tel défi ?
Il s’agit peut-être d’une coïncidence, mais une controverse assez semblable s’est récemment déroulée, mettant en jeu un personnage très en vue quoique différent : Kanye West, le chanteur de rap et concepteur de vêtements de mode. Bien que je n’ai eu par le passé qu’une impression des plus vagues à son sujet, il a apparemment été une célébrité connue à l’international, et l’un des Étasuniens noirs les plus riches qui aient jamais vécu, disposant de dizaines de millions de followers sur Twitter ainsi que sur d’autres réseaux.
Il semble que pour une raison ou pour une autre, il s’est énervé et agité au sujet de ce qu’il a vu comme une influence juive écrasante dans les mondes des affaires et des médias, et s’est mis à l’affirmer avec force sur ses diverses scènes de spectacle et sur ses réseaux sociaux. Comme on pouvait s’y attendre, la réaction des médias a été rapide et dévastatrice, le décrivant comme un lépreux moral, ce qui a contraint la plupart de ses partenaires d’affaires à couper les liens qu’ils entretenaient avec lui et lui a coûté très cher. Il semble que 25% des bénéfices du géant des chaussures Adidas venait de la ligne de baskets de West, mais qu’Adidas a abandonné le contrat à long terme pour un coût de presque 650 millions de dollars lorsque leurs maîtres médiatiques ont clamé qu’il s’agissait d’un problème de moralité fondamental. À l’autre bout du spectre, Goodwill Industries [une association caritative de retour à l’emploi, NdT] a annoncé que l’organisation ne proposerait plus à sa clientèle pauvre les invendus associés à un antisémite aussi vil. La banque qui hébergeait depuis longtemps les comptes du chanteur de rap a même fermé ceux-ci et refuse de le compter désormais parmi ses clients.
Le résultat immédiat de tous ces coups coordonnés a été que le plus gros de la vaste fortune de West s’est subitement évaporé, cependant que son entraîneur personnel (juif) a publiquement déclaré que s’il persistait dans sa mauvaise conduite, l’ancien milliardaire pourrait terminer sa vie sous drogues lourdes et emprisonné dans une institution mentale. Parmi les célébrités noires proches de lui, bien peu de gens se sont ralliés à lui, ou s’ils l’ont fait, je n’en ai pas entendu parler. Les médias ont vite arrêté de couvrir ce sujet, mettant ainsi sur la touche la célébrité noire qui fut jadis une icône mondiale.
Les transgressions de haut niveau formulées par West avaient mis en état d’alerte élevée nos surveillants idéologiques, et cela a sans doute joué dans la nouvelle controverse qui a ensuite englouti la star du basketball Kyrie Irving, qui s’est retrouvé pris dans une tourmente médiatique pour le simple fait d’avoir tweeté un lien vers un documentaire afro-centrique disponible sur Amazon. Les affirmations controversées formulées dans cette vidéo ont agacé l’ADL [American Defense League, NdT], et Irving a rapidement présenté ses excuses publiques et réalisé un versement de 500000 dollars pour sauver sa carrière sportive. Mais cette tentative de rattrapage s’est noyée du fait de remarques maladroites qu’il a faites par la suite, et il a été suspendu de ses activités de basket-baller, cependant que Nike a annulé sa ligne personnelle de baskets. Un nouvel enseignement abject qui prouve que même les personnalités les plus élevées et les plus puissantes feraient bien de réfléchir à deux fois avant d’exercer leur droit à la libre expression. Les médias créent la réalité, et s’ils décident de vous prendre comme cible, vous prenez rapidement l’apparence d’un coussin à épingles.
Dans les années 1990, Bill Gates était souvent le sujet des médias, sa fortune de 100 milliards de dollars le faisant à l’époque l’homme le plus riche du monde, une position qu’il a conservée pendant tant d’années qu’elle a pu sembler définitive. Son système d’exploitation Windows jouissait d’un quasi-monopole sur tous les ordinateurs personnels, si bien que ses produits contrôlaient l’infrastructure technologique de tous les pays, jusqu’à chaque écrivain et chaque financier dépendant de ses programmes omniprésents Word et Excel. Avec des actifs aussi puissants, on l’a parfois décrit, en blaguant à demi-mot, comme la personne la plus puissante au monde, disposant d’une influence réduisant au statut de nain celle de n’importe quel président ou du Pape.
Quoique je ne remette pas en question nécessairement une telle évaluation, j’ai toujours souligné les limites importantes de sa position. Je proposai une expérience de pensée au cours de laquelle le Monarque de Microsoft prononçait sans précautions des opinions très inconvenantes sur plusieurs sujets tout à fait sensibles. Avec tout son argent et son influence, il se serait sans doute fait annihiler en vitesse et cuire à l’état de chips par une explosion médiatique concentrée, suivie d’une vague de répulsion publique massive, perdant très possiblement son entreprise et une grande partie de sa gigantesque fortune. Bill Gates pouvait disposer d’un vaste pouvoir, mais les médias auraient pu le détruire d’un coup, en le soufflant comme une bougie dans une tempête de vent. Les destins que connaissent actuellement Elon Musk, Kanye West et d’autres suggèrent que j’avais sans doute raison.
L’ADL semble avoir joué un rôle central au sein de toutes les controverses en cours discutées ci-avant, avec un Musk se pliant rapidement à son autorité et sollicitant ses conseils, cependant que l’organisation menait des attaques réussies contre West et Irving. Des développements comme ceux-ci ne sont guère surprenant au vu de la réputation notoire de l’organisation.
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