Les inégalités se creusent et mettent en péril la cohésion sociale, avertit l’OCDE
Selon le Boston Consulting Group, le montant total de la richesse des plus riches dans le monde s’élevait à 120.000 milliards de dollars en 2010 ; mais le Crédit Suisse a estimé pour sa part qu’elle se montait à 230.000 milliards de dollars à la fin du premier semestre 2011. Dans son rapport concernant les 11 millions de plus riches individus du monde qui possèdent plus de 1 million de dollars en actifs, Merrill Lynch/Capgemini a calculé que cet agrégat valait 45.000 milliards de dollars. Il n’y a donc pas vraiment d’accord sur la population qui pourrait correspondre à ces critères.
Cependant un constat s’impose : Les inégalités se creusent et mettent en péril la cohésion sociale, avertit l’OCDE Les 10% les plus riches gagnent 9 fois plus que les 10% les plus pauvres dans les pays industrialisés Les programmes d’austérité pénalisent les classes les plus défavorisées

PLUS DECART EN SUIVANT :
Le fossé entre les riches et les pauvres dans les pays de 34 pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) n’a jamais été aussi grand depuis trente ans. Les Etats doivent agir au risque de mettre à mal la cohésion sociale, prévient un rapport publié lundi. En substance, le revenu moyen des 10% les plus riches représente aujourd’hui neuf fois plus que celui des 10% les plus pauvres. «Une telle inégalité freine la croissance, mais explique aussi la colère des mouvements comme les «99%», explique Maxime Ledaique, l’un des auteurs du rapport. Ce mouvement tient le pavé dans de nombreuses capitales depuis cet été et revendique une meilleure répartition des richesses.
En Suisse, l’écart entre les riches et les pauvres est au-dessous de la moyenne de l’OCDE, c’est-à-dire un à sept, en légère détérioration au fil des années. Mais dans d’autres pays de tradition plutôt égalitaire comme l’Allemagne, le Danemark et la Suède, l’écart s’est creusé et a passé de 5 à 1 dans les années 80 à 6 à 1 aujourd’hui. Il est de 10 à 1 en Corée du Sud, en Italie, au Japon, et au Royaume-Uni et de 14 à 1 aux Etats-Unis, en Israël et en Turquie. En queue de peloton, le Chili et le Mexique où les revenus des plus riches est 25 fois supérieur à ceux des pauvres. L’OCDE fait ressortir que l’écart est pire dans les pays émergents ou en développement; dans certains pays, l’écart est de 50 à 1.
C’est la deuxième fois que l’OCDE publie un rapport sur les disparités. «Nous avions tiré la sonnette d’alarme en 2008 et demandé aux Etats de prendre les mesures qui s’imposent, explique Maxime Ledaique. La crise financière et économique de 2008-2009 n’a rien arrangé et la situation s’est empirée depuis.» Pendant les années précédentes marquées par la croissance, les riches en avaient profité pour gagner plus d’argent. Et pendant cette période de vaches grasses, l’Etat, la France par exemple, avait même baissé les impôts pour les riches.
L’OCDE donne quelques explications. En premier, les inégalités croissantes de salaires, notamment entre travailleurs qualifiés et non qualifiés. Les premiers ont tiré profit du progrès technologique et gagné en compétitivité. Sur un autre registre, la progression du temps partiel a contribué à creuser l’écart.
Selon Maxime Ledaique, la redistribution de la richesse n’a pas réussi à atténuer les inégalités. «En Suisse plus particulièrement, il n’y a pas eu de transfert par le jeu du fisc et d’allocations sociales.» Il ajoute que depuis 2008, les Etats, programmes d’austérité obligent, ont réduit les allocations sociales à toute une catégorie de la population, creusant davantage l’écart entre les riches et les pauvres.
Dans son analyse, l’OCDE soulève une question qui fait débat ces jours: la mondialisation accentue-t-elle les inégalités? Le rapport note que la concurrence en provenance des pays du Sud, mais aussi les délocalisations et le transfert des capitaux ont pu avoir une incidence sur la distribution de revenus, notamment aux Etats-Unis.
Mais le phénomène n’est pas irréversible, estime l’OCDE. «Dans un premier temps, il faut mieux distribuer les allocations sociales disponibles, dit Maxime Ledaique. A moyen et long terme, la réponse vient de l’éducation et de la formation de la main-d’œuvre.» L’OCDE note par ailleurs que dans de nombreux pays, les hauts revenus ne paient pas assez d’impôts et que dans certains cas, ces derniers se disent prêts à assumer plus de charges fiscales. Dès lors, selon elle, l’Etat doit assurer une meilleure redistribution de la richesse.
Infographie. Inversement de tendance depuis les années 1980
Source le temps dec11
EN LIEN : LE RAPPORT DE WELL FARGO DU 15 NOVEMBRE SUR LES US
EN COMPLEMENT : Occupy Wall Street ou les inégalités économiques au cœur du débat
Par Stéphane Bussard New York/le temps dec11
C’est à Vancouver, au Canada, que l’idée d’occuper le quartier financier de New York a vu le jour. Aujourd’hui, évacué des centres-villes, le mouvement cible ses actions
En chassant les manifestants du Zuccotti Park le 15 novembre dernier, la police de New York pensait avoir fait l’essentiel. Le mouvement Occupy Wall Street (OWS) pouvait mourir de sa belle mort. Ce d’autant que les forces de l’ordre de Los Angeles et de Philadelphie ont évacué des manifestants rétifs à l’ultimatum des autorités et procédé à plus de 350 arrestations.
Occupy Wall Street, dont le nom s’est adapté à chaque ville des Etats-Unis (exemple: Occupy DC) où le mouvement a sévi, trompe les apparences. Il est toujours bien vivant. Désormais, OWS multiplient les actions ciblées. A Manhattan, hier, des manifestants ont dénoncé la tenue d’une conférence de Aviation Week et de Credit Suisse sur le financement de la Défense, qualifiant les organisateurs de «profiteurs de guerre». En Californie, Occupy Oakland appelle la population à bloquer tous les ports de l’Etat le 12 décembre.
De sa ferme de deux hectares, à proximité de Vancouver au Canada, Kalle Lasn, diplômé en mathématiques, n’aurait jamais imaginé une telle mobilisation. Cofondateur et rédacteur en chef du magazine anti-consommation Adbusters, il a eu l’idée de créer un campement près de la bourse de New York. Comme il le raconte dans The New Yorker, «l’Amérique avait besoin de son propre Tahrir», allusion à la place du Caire où s’est concrétisée la révolution égyptienne. Aux yeux de cet Estonien d’origine, Wall Street entraîne l’Amérique dans son «déclin terminal». Le virage opéré par cet homme de 69 ans est radical. En Australie, où sa famille s’était installée peu après la Seconde Guerre mondiale, il concevait des jeux de guerre vidéo pour le Ministère de la défense. Puis, au Japon, il fit beaucoup d’argent dans l’informatique. Maintenant, son cheval de bataille est la lutte contre le grand capital.
En juin 2011, il en discute avec son collaborateur Micah White, 29 ans. Entre Acampada WallStreet.org, TakeWallStreet.org ou OccupyWallStreet.org., ils choisissent le dernier pour qualifier la future mobilisation. Kalle Lasn opte pour le 17 septembre, jour de l’anniversaire de sa mère, comme date de rassemblement. Il lance un ballon d’essai le 13 juillet sur Twitter et Reddit. Le message envoyé montre une ballerine dansant sur le dos du musculeux taureau de bronze de 3200 kilos, symbole de Wall Street et de l’agressivité des marchés, sculpté par Arturo di Modica. L’opération fait un tabac. Le lendemain, le nom de domaine OccupyWallStreet.org est officiellement enregistré. Pour bénéficier de conseils logistiques, le mouvement se lie avec un autre courant opposé aux baisses d’impôts, le New Yorkers Against Budget Cuts.
A Manhattan, d’autres citoyens se mobilisent, dont Diana Eguia. Sur son blog, la jeune Espagnole s’insurge contre l’attribution du Nobel de la paix à Barack Obama «qui n’a rien fait», précisant que Julian Assange, Monsieur WikiLeaks, a réalisé «des choses incroyables dans le combat pour la vérité», mais a été récompensé par une arrestation. En mai 2011, elle se souvient: «Une manifestation d’Espagnols s’organise à Washington Square à New York en solidarité avec les Indignés madrilènes. En août, un groupe se réunit en assemblée générale au Bowling Green Park près de Wall Street, copiant le modèle de fonctionnement des Indignés madrilènes.»
«L’esprit du mouvement à New York est très similaire à celui de Madrid», constate Diana Eguia. Les protestataires reprennent à leur compte une gestuelle héritée du mouvement des droits civiques: paumes ouvertes, doigts levés signifient approbation, paumes fermées, doigts pointant vers le bas désapprobation, les bras croisés, objection. Horizontalité est leur maître mot. Une manière de refuser le changement imposé par la hiérarchie. Le modèle, c’est la place Tahrir, les manifestations anti-OMC voire même le Tea Party. C’est aussi Linux, un logiciel ouvert, sans propriétaire.
Occupy Wall Street se targue d’être sans demande et sans leader. Ce n’était pourtant pas le souhait de Kalle Lasn qui jugeait nécessaire d’avoir un message clair du genre «renverser Moubarak». Il songeait ainsi à instaurer une taxe «Robin des Bois» sur les transactions financières. Maintenant, le mouvement est toutefois beaucoup plus organisé. Quant à la rhétorique d’OWS, les 99% de la population contre le 1% de super-riches, elle est floue mais interpelle.
Professeur de sciences politiques à la Columbia University, Robert Lieberman notait lors d’une récente conférence du Council on Foreign Relations: «La redistribution des revenus est plus inégale que jamais. Le 1% supérieur de la société a vu ses revenus augmenter de 275% au cours des trente dernières années. Parallèlement, les 25% les plus pauvres n’ont connu qu’une croissance de 18%. Mais les vraies inégalités ne découlent pas d’une redistribution insuffisante, mais de salaires toujours plus bas.»
Lors du même événement, le journaliste George Packer explique la durabilité d’OWS: «Occupy Wall Street a fait des inégalités sociales un thème qui résonne partout, même dans des zones rurales de l’Ohio. C’est une bombe à retardement. Les gens ont l’impression qu’il n’y a plus de classe moyenne. Ils attendaient du gouvernement et du Congrès qu’ils règlent le problème. En vain. Ils ont abandonné cet espoir et ne croient plus dans le processus électoral normal.» George Packer n’est pas surpris par le pessimisme ambiant. «Les gens ne voient plus à quoi servent leurs impôts. Prenez la loi Dodd-Frank (de régulation de Wall Street). Elle contient des bonnes choses. Mais elle a aussi beaucoup de défauts. En un an, 3000 lobbies ont versé plus de 3 milliards de dollars pour influencer les débats du Congrès.»
Dans le camp démocrate, le débat est vif sur la nécessité d’appuyer le mouvement ou d’en rester à l’écart. Le sénateur démocrate de New York, Charles Schumer, n’hésite pas. Pour lui, les inégalités seront au cœur de la présidentielle de 2012. Les démocrates doivent en faire leur thème campagne.
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