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Les Clefs pour Comprendre : François Hollande : Qui veut faire l’ange fait la bête Par Bruno Bertez

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Les Clefs pour Comprendre : François Hollande : Qui veut faire l’ange fait la bête Par Bruno Bertez

L’une des thèses que nous défendons est que la politique financière suivie depuis la dérégulation et le début de la financiarisation, cette politique financière est déflationniste. Elle produit des inégalités, du chômage, et incite les marchés à réclamer des taux de profits historiquement records alors que l’on est en pleine crise.

La dérégulation financière n’a pas provoqué d’inflation du prix des biens et services, Elle a provoqué un gonflement sans précèdent de  la valeur des assets, des actifs. Cela est normal, et c’était voulu, puisque le canal par lequel la manne financière a été déversée a été, non pas les consommateurs, mais les marchés financiers, les marchés d’actifs. C’est une des conséquences de la théorie de l’offre qui dit que ce qu’il  faut stimuler, pour accélérer la croissance, c’est l’investissement. Mais la théorie de l’offre n’avait pas prévu que, dans une économie non compétitive, comme les USA et les vieux pays industrialisés, la délocalisation, les investissements à l’étranger et les importations se développeraient et qu’ainsi, les ressources financières artificielles créées, au lieu d’alimenter la croissance domestique et de produire de l’emploi, produiraient du profit et un gonflement de la valeur du capital, des assets.

La concomitance d’une crise de surendettement, d’une bulle des assets financières, de taux de profits absolument records et d’un système social dominé par l’aggravation des inégalités devraient faire réfléchir. Intuitivement, on sent bien que tout est lié.

C’est ce que nous avons essayé de montrer dans notre article sur la production des inégalités.

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En un mot comme en cent, le recours à la dette, au levier, a servi à produire, à fabriquer, du capital et des profits records et, ce capital, comme cela est normal et souhaitable en régime capitaliste, cherche à se défendre, à maintenir sa valeur et sa rentabilité en imposant, ou cherchant à imposer, un taux de profit supérieur aux normes historiques. A capital hors normes, doivent correspondre des profits hors normes. La loi de la concurrence ne s’impose pas seulement aux marchandises, elle s’impose aussi aux capitaux. Dans un monde de l’investissement compétitif, les capitaux cherchent la rentabilité maximum, par tous les moyens, et de ceci témoignent la création et le développement des hedge funds et du private equity.

 

A noter que les détenteurs de capitaux et les gérants ne font que leur travail, imposé par le système; placés dans un monde de compétition, ils essaient d’exceller. Mais on remarquera que si l’argent était moins facile, si les taux d’intérêt étaient à leur prix, c’est à dire réellement positifs, le recours au levier et à la dette serait beaucoup plus limité. Le gonflement de la valeur des assets, du capital, serait beaucoup moindre, la pression pour valoriser le capital, obtenir la masse de profits la plus élevée possible, cette pression serait elle aussi beaucoup plus limitée.

Présenté autrement pour les besoins de la démonstration, on a créé du capital à crédit, on a inflaté la masse de capital par le recours à l’endettement et on ne doit donc pas s’étonner si cette masse de capital essaie de faire en sorte de maintenir sa valeur, d’une part, et de s’octroyer le profit maximum, d’autre part. Les managers, on le sait,  cherchent à remplir leur contrat vis à vis des propriétaires et des marchés et à délivrer des performances qui sont conformes aux attentes et qui ratifient les cours.

Les managers sont donc conduits à chercher la productivité maximum, à investir là où c’est le plus rentable, donc à l’étranger, à chercher les fiscalités les plus avantageuses, à importer plutôt qu’à produire, à racheter les actions pour soutenir les cours plutôt que de subir une érosion de leur taux de rentabilité du capital investi.

Pratiquement, pour illustrer, prenons le cas Lejaby. Une ouvrière explique qu’à la suite de diverses transactions financières, Lejaby est passé dans les mains de capitalistes du Private Equity.

 

 Le Private Equity, pour acheter, a recouru au levier, cela permettait de bonifier le retour sur le capital propre investi. La production a été délocalisée, seule 30% de la fabrication est restée en France. Le taux de profit moyen normal de Lejaby est de 3 à 4 % ; c’est peu ; mais pour un capitaliste à l’ancienne, c’était et c’est encore souvent suffisant. Mais pour un capitaliste de Private Equity qui attire les fonds de ses souscripteurs par des promesses de rentabilité supérieures à 10%, et, en plus, a des dettes à rembourser et, en plus, veut faire de l’asset stripping (dégraisser les actifs immobiliers ou autres), c’est très insuffisant.

Si le capital en levier, le capital à crédit, n’était pas entré dans la danse, peut-être que les Lejaby seraient encore au travail.

Si les politiques monétaires d’argent facile, de stimulations idiotes, n’avaient pas été mises en place, d’une part, il y aurait moins de dettes dans le système et, d’autre part, il y aurait moins d’inégalités et plus d’emplois.

Les politiques idiotes se poursuivent et s’aggravent.

Elles consistent toutes à prélever sur les ménages, leur épargne, leurs fonds de retraites, au profit du couple maudit constitué par l’Etat et les Banques.

En réalité, c’est plus qu’un couple, car les participants à l’entreprise sont plus nombreux, il y a l’Etat, les Banques Centrales, les Banques, le Shadow Banking System.

Les politiques de taux d’intérêt nul, ou quasi nul, consistent à transférer les revenus des épargnants, des ménages et de leur retraites, vers les endettés, surendettés, c’est à dire l’Etat et les Banques. Ce transfert de revenu est purement et simplement un impôt qui pénalise le pouvoir d’achat et le pouvoir d’épargne des ménages. C’est une taxation cachée, mais c’est aussi de l’austérité qui ne dit pas son nom. Car les taux bas ne sont pas transmis à l’économie par les banques, celles-ci maintiennent des taux élevés, des marges exceptionnelles, elles refusent les risques, elles découragent les emprunteurs. Ce que les épargnants et retraités perdent ne se retrouve pas dans la demande finale du pays, ne contribue pas à accélérer l’investissement, la croissance, à créer des emplois; non, cela sert à améliorer la situation financière des deux complices, Banques et Etat. Pour souligner cette complicité, nous faisons remarquer que la crise actuelle sert de révélateur et que l’on voit clairement que Banques et Etat sont liés, les Banques finançant les Etats, achetant leurs dettes, et les Etats, en échange, assurant les Banques de leur soutien. Bien entendu, les discours publics tendent à prouver le contraire.

Les Banques Centrales ne se contentent pas d’imposer des taux d’intérêt spoliateurs, elles font des Quantitative Easing. Un QE, cela consiste à acheter des actifs dont le taux de rendement est élevé, car risqué ou long, et à le remplacer par un actif, la monnaie, à une rentabilité nulle, à rendement zéro. Un QE, cela consiste à retirer du revenu dont disposait avant l’économie et à le remplacer par des assets monétaires court terme qui ne rapportent aucun revenu. Les QE ne sont évidemment pas inflationnistes, mais déflationnistes, ils retirent du revenu et le donnent à l’Etat et au système bancaire, lesquels font, because austérité et surendettement, lesquels font la grève de la dépense. Au passage, on fait un cadeau aux banques sur la valeur de leurs assets puisque l’on rachète de préférence ce qui est pourri ou douteux.

La BCE est une Bad Banque qui décolle (plus ou moins temporairement) le système bancaire de ses actifs pourris et transfère les revenus, qui normalement devraient revenir aux ménages, vers l’Etat et ses associés systémiques, les banques.

Contrairement à ce que proclame François Hollande, tout cela n’a rien à voir avec les riches, avec le système capitaliste etc. Les attaques contre les riches sont là pour détourner l’attention et masquer un colossal conservatisme connivent. Les riches ne sont qu’un sous-produit, un by-product, du système de la financiarisation, un sous-produit réel, visible, donc désigné pour être un bon bouc émissaire.

Revenez à une politique monétaire saine et en très peu de temps le problème des riches, des ultras riches, disparaitra. Le retour à une économie saine suffira à empêcher la prolifération de parasites, à faire rendre aux ultras riches ce qui leur a été octroyé indument. Le nombre de richesses fictives qui seront balayées par une politique monétaire, économique et fiscale saine est considérable.

Le programme cadre de François Hollande, même après analyse approfondie,  n’apporte rien pour sortir de la crise. Le véritable ennemi, ce n’est pas l’argent, contrairement à ce qu’il dit en reprenant l’antienne de Mitterrand, le véritable ennemi, ce sont les fondements, les ressorts cachés du système, sa logique perverse. Ce sont les complices, Etats, Banques Centrales, Banques, Shadow Banking.

Mitterrand a été élu en son temps sur la stigmatisation de l’argent et des riches, on a vu ce qu’il en est advenu.

 Faute d’une analyse correcte, il a été l’un des présidents les plus soumis aux puissances anonymes de l’argent. Toute sa politique a été mise à bas par les lois implacables de l’économie et de la finance, tout a été renversé par les dévaluations et politiques d’austérité du type Jacques Delors! Lui-même et son entourage ont été victimes de ce qu’il dénonçait, par les scandales, délits, etc. Jamais le vieil adage pascalien n’aura été plus justifié: qui veut faire l’ange fait la bête.

Nous reviendrons plus tard sur les risques qu’il y a prendre à prendre la foule dans le sens du poil et à utiliser les vieilles ficelles populistes d’avant-guerre du bouc émissaire… surtout en matière d’argent.

BRUNO BERTEZ  Le 25 Janvier 2012

EN LIEN : Les Clefs pour Comprendre : François Hollande, Finance, Financiarisation ,Inégalités par Bruno Bertez

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