Professeur Bernanke et Chairman Ben Par Andreas Höfert
Professeur Bernanke et Chairman Ben La raison d’Etat du président de la Fed a pris le pas sur l’honnêteté intellectuelle du professeur.

En 1996, j’ai eu la chance de pouvoir suivre un séminaire donné par Ben Bernanke dans le cadre des cours que la Banque nationale suisse organise chaque été pour les facultés d’économie des universités suisses en son magnifique château de Gerzensee dans le Mittelland bernois. A l’époque, celui qui, de 2002 à 2005, allait faire partie du directoire de la Réserve fédérale avant d’en devenir en 2007 le président, était professeur d’économie à la prestigieuse Université de Princeton.
Le thème du séminaire était «Les marchés de crédit dans la macroéconomie». Ben Bernanke y présentait ses travaux sur le rôle des paniques bancaires et du gel des crédits comme amplificateurs de la Grande Dépression. Je me souviens d’un professeur rigoureux et intellectuellement brillant. Et j’ai beaucoup de mal à réconcilier cette image avec la personne qui dirige aujourd’hui la Fed.
Il y a quelques semaines un de mes collègues, chef économiste auprès d’une grande banque américaine, a provoqué l’hilarité dans la profession, lorsqu’il a suggéré au journal britannique The Guardian que «les profits accumulés par la Banque d’Angleterre dans le cadre de ses opérations d’achat de dette publique pourraient servir à financer une baisse d’impôts au Royaume-Uni».
Cette idée farfelue s’est révélée nettement moins drôle lorsqu’elle a été implicitement reprise par Ben Bernanke dans son discours de Jackson Hole: «Dans une perspective purement fiscale, des analyses approfondies suggèrent que les programmes d’achats d’actifs [donc aussi les achats de bon du Trésor] vont vraisemblablement résulter dans un profit pour les contribuables et ainsi réduire les déficits et la dette du gouvernement.»
Arrêtons-nous un instant ici. Le gouvernement américain fait un déficit et émet une obligation de 100 dollars à dix ans avec un coupon de 5%. La Fed achète cette obligation dans le cadre de son programme d’assouplissement quantitatif. Pour les dix prochaines années, la Fed reçoit donc chaque année 5 dollars de revenu, qu’elle déclare comme profit et reverse au gouvernement. Au bout de dix ans, le gouvernement rembourse sa dette de 100 dollars à la Fed soit au moyen d’un surplus budgétaire, soit, plus vraisemblablement en émettant une nouvelle obligation, que la Fed pourrait à nouveau acheter.
On remarque assez vite que tout cela se simplifie. Pour une période définie, ou indéfinie, si après dix ans la Fed achète la nouvelle dette au gouvernement, ce dernier aura pu financer certaines de ses dépenses au moyen de la planche à billets.
Lors d’un témoignage devant le Congrès américain en juin 2009, Ben Bernanke a répondu à la question «Est-ce que la Fed va monétiser la dette?» par: «Non, la Fed ne monétisera pas la dette». Il semble à présent que ce soit le cas ou tout au moins l’intention de Ben Bernanke. La raison d’Etat du président de la Fed a pris le pas sur l’honnêteté intellectuelle du professeur.

Andreas Höfert Economiste en chef, UBS Wealth Management /Le Temps oct12
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