Le trader ayant « caché » 2,7 milliards à Credit Suisse menacé d’extradition
Le trader ayant « caché » 2,7 milliards à Credit Suisse menacé d’extradition Le financier londonien et son équipe ont maquillé les pertes de la crise. En février 2008, la banque devait renier ses résultats annuels

Incarcéré à Londres depuis la fin de l’été, le banquier qui dirigeait jusqu’en mars 2008 l’activité de «crédits structurés» au sein de Credit Suisse attend son extradition. Poursuivi aux Etats-Unis pour «escroquerie» et «manipulation comptable», il peut encore faire appel. Selon l’agence Reuters, la procédure ne nécessiterait cependant plus que la signature du Ministère de l’intérieur britannique et un «feu vert» serait «escompté». Aujourd’hui âgé de 39 ans, cet Anglo-Américain est poursuivi au pénal par la SEC, le gendarme financier aux Etats-Unis. Et se retrouve dans le collimateur de Preetinder Bharara, le procureur vedette de Manhattan qui a forcé la banque suisse Wegelin aux aveux.
Depuis longtemps engloutie dans le livre noir de la crise, l’affaire à laquelle il est mêlé avait pourtant fait grand bruit. Sa mise au jour le 19 février 2008 avait acculé Credit Suisse à un humiliant recalcul de ses résultats annuels. Tandis que 2,7 milliards de francs figurant à son bilan s’avéraient soudain virtuels, 800 millions de profits soi-disant enregistrés en 2007 devenaient fictifs. Ce jour-là, les actions de la deuxième banque suisse plongèrent de 7%. Peu après, son grand patron, Brady Dougan, devait accuser «un petit groupe de traders». Comme en écho au scandale Kerviel, qui avait ébranlé la Société Générale un mois plus tôt à Paris.
PLUS DE MANIP EN SUIVANT :
Pointés du doigt: le responsable aujourd’hui menacé d’extradition – il faisait la navette entre New York et Londres – mais aussi son bras droit en charge du «hedge trading» ainsi que deux responsables new-yorkais du négoce de «CDO».
Ces titres financiers ayant servi à financer la bulle immobilière américaine se sont transformés en actifs toxiques à partir de l’été 2007. Les quatre hommes se sont alors entendus pour cacher la dépréciation galopante d’un énorme portefeuille de 3,5 milliards de dollars de «CDO» appartenant à Credit Suisse. Leur mobile? Cela aurait «vaporisé [leurs] espoirs de toucher un bonus de plusieurs millions de dollars» et, pour leur chef, «mis en péril une promotion durement obtenue», décrit la plainte de la SEC. Ces attendus détaillent comment les quatre financiers ont tenté d’échapper aux contrôles internes, évoquaient un «re-pointage» des comptes ou s’embrouillaient dans le bidouillage des tableaux Excel. Le tout sous les ordres d’un responsable rappelant au téléphone que «tout le monde pense que [le portefeuille] va monter» et que «ce sera une bien mauvaise surprise» si tel n’était pas le cas.
Contrairement à ce dernier, les autres cadres new-yorkais – défendus par des stars du barreau comme Ira Sorkin, qui s’était illustré aux côtés de Bernard Madoff – ont préféré plaider coupables l’an dernier. Ils attendent l’issue des négociations qui décideront de leur peine. Et qui en feront les premiers banquiers de Wall Street condamnés pour leur rôle dans la crise des «subprime». Cinq ans plus tard. La banque a, elle, réglé dès l’été 2008 une amende de 5,6 millions de livres au Royaume-Uni. Pour n’avoir pas su mieux contrôler ses hommes.
Par Pierre-Alexandre Sallier/Le Temps Janv13
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Un peu d’histoire….
mercredi20 février 2008
Credit Suisse impute ses amortissements de 3 milliards à des «erreurs» de ses traders/ Par Pierre-Alexandre Sallier
A la surprise générale, l’établissement révise en baisse d’un milliard de dollars les profits attendus ce trimestre. Une déconvenue expliquée par l’aggravation de la crise ces dernières semaines. Et par des irrégularités internes.
Jusque-là épargné par la crise du «subprime», Credit Suisse a dû réviser mardi en baisse de 2,85 milliards de dollars (3,1 milliards de francs) la valeur de ses investissements dans les produits financiers s’appuyant sur le marché du crédit immobilier américain. Un soudain manque à gagner qui, s’il se confirme à la fin mars, creusera ses profits trimestriels de 1 milliard de dollars. Une annonce d’autant plus fracassante qu’elle intervient une semaine après la publication de résultats étonnement solides. La réaction des marchés ne s’est pas fait attendre, le cours des actions de la banque plongeant hier de 6,6%, alors que nombre d’analystes exprimaient leur déception. «Ceci ne fait que renforcer la réputation d’inaptitude financière que les grandes banques suisses ont établi l’an dernier», accusait ainsi Peter Thorne, analyste au sein de la maison de courtage Helvea.
Des traders «suspendus»
L’origine de ces amortissements demeure floue. Le problème serait, selon la banque, apparu «la semaine dernière» et s’expliquerait par la dégradation de la situation des marchés du crédit ces six dernières semaines. Egalement en cause, des irrégularités de la part de «traders» actifs sur les crédits structurés, un contrôle routinier ayant mis à jour une comptabilisation incorrecte de leurs portefeuilles à leur valeur de marché. Ces employés «ont été suspendus» a indiqué hier Brady Dougan, le patron de la banque. Refusant de donner d’autres détails, ce dernier a écarté un scénario similaire à celui de la fraude de la Société Générale, soulignant qu’il s’agissait «d’une mauvaise valorisation des positions». Et non de la tenue de positions fictives.
Brady Dougan ne s’est cependant pas prononcé sur l’impact respectif de l’amplification de la crise et de ces dissimulations comptables. Tout juste sait-on que les 3,1 milliards amortis concernent son exposition sur les RMBS et les CDO, produits au cœur de la crise du «subprime». Il y a une semaine, Credit Suisse indiquait être exposé à hauteur de 8,7 milliards de francs sur les RMBS et 2,7 milliards de CDO. Le patron du numéro deux bancaire a cependant refusé de rapprocher ces chiffres avec la dépréciation annoncée hier. «En dehors de ces «erreurs» de la part de traders, Credit Suisse est la première banque à avertir sur l’impact qu’aura la dégradation de la situation non plus sur ses résultats 2007 mais sur le premier trimestre 2008, ce qui est de mauvais augure pour ses concurrentes!» s’inquiétait hier un analyste londonien.
Première alerte pour 2008
Cet incident jette également le doute sur la validité des comptes annuels publiés il y a une semaine. «Aucune indication ne montre que nous devrions les amender, la plus grande partie du problème concerne le trimestre en cours», a tenté de rassurer Brady Dougan. Avant d’admettre que ceci ne serait certain que lorsque «le passage en revue de la situation» serait achevé.
Plus inquiétante reste l’ombre que ce premier avertissement sur profit en 2008 dessine sur tout le secteur. Si Credit Suisse – qui n’a passé que 2 milliards de provisions sur le «subprime» en 2007 – doit soudain mettre de côté 3 milliards pour les six premières semaines de l’année… qu’en sera-t-il par la suite? «Cette valorisation des positions de trading est un chiffre interne que nous ne sommes pas forcés de publier, elle évolue chaque jour et n’est pas forcément une indication [de la perte] pour l’ensemble du trimestre», a tempéré le patron de la banque. «Ces dernières années les investisseurs ont voulu toujours davantage de transparence, exigeant que les positions des banques soient dévoilées à leur valeur de marché, ceci les expose à une telle volatilité des résultats annoncés», ajoutait un analyste genevois. Il n’empêche. Les investisseurs ont aussi voulu davantage de contrôle des risques, que les banques n’ont en rien assuré.
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samedi22 mars 2008
Tromperie chez Credit Suisse/ Par Pierre-Alexandre Sallier
Les manipulations comptables de traders vont coûter 2,9 milliards de francs à la banque.
Une «situation des plus décevante que nous ne pouvons tolérer». C’est en ces termes que Brady Dougan, directeur général de Credit Suisse, a condamné les irrégularités comptables d’un «petit groupe de traders», révélées le mois dernier et dont l’ampleur a été précisée jeudi. Ces employés avaient «intentionnellement» gonflé, en fin d’année, la valeur des plus-values attendues sur le marché des CDO. Ces titres, qui ont servi à financer la bulle immobilière américaine, font l’objet d’un krach depuis neuf mois. Le 19 février, à peine une semaine après l’annonce d’un solide quatrième trimestre 2007 – la période avait pourtant été sanglante – la banque avait estimé que la valeur de ces portefeuilles devrait être revue de près de 3 milliards de francs.
Ce scandale a créé un second choc, jeudi. Brady Dougan a indiqué qu’il était «peu probable que [la banque] soit rentable au premier trimestre». Pis, Credit Suisse doit se livrer à un humiliant recalcul de ses comptes pour 2007. La réappréciation des portefeuilles maquillés diminue leur valeur de 1,2 milliard de francs sur le quatrième trimestre. Sur cette période, la banque se retrouve avec 789 millions de bénéfices, 40% de moins qu’annoncé jusque-là. La «dislocation du marché du crédit», selon Brady Dougan, le conduit à raboter de 1,7 milliard supplémentaires la valeur de ces investissements sur janvier et février. Le coût total des manipulations atteint donc 2,9 milliards. La banque n’a pas précisé l’impact estimé de ces réévaluations sur les résultats du 1er trimestre. Seule indication, ceux-ci seront négatifs, pour la première fois en cinq ans. Cet avertissement a été accueilli par un plongeon de 6,4% de ses actions, jeudi.
Les dommages provoqués par ces tromperies peuvent-ils s’amplifier? Non, à en croire le responsable du contrôle du risque, Wilson Ervin. Une partie des titres est comptabilisée comme si plus rien ne pouvait en être tiré, et les portefeuilles les contenant sont «stables depuis fin février». Sur le plan de la confiance, les séquelles seront plus durables. «Terriblement décevant, apparemment ils n’ont pas estimé correctement cette partie du bilan en fin de l’année, ce qui sème le doute sur tout le reste», lâche Peter Thorn, analyste chez Helvea.
Contrôle des risques
Comme à la Société Générale après l’affaire Kerviel, se pose la question du (non) contrôle des risques. «Trois ou quatre niveaux [de surveillance] auraient dû révéler ces agissements», a admis Brady Dougan. Certes, comme l’a expliqué le responsable de ces contrôles, la paralysie du marché sur lesquels opéraient les traders a tout brouillé: il n’y avait «plus assez de transactions pour infirmer les valeurs retenues». Ce n’était pas le cas à la SocGen. L’agence de notation Moody’s s’est émue que «des écarts aussi importants dans les estimations aient pu rester indétectables aussi longtemps».
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